Basse-Indre. Série de 12 dessins sur le travail aux Forges de Basse - Indre au 19ème siècle. Original : Les nouvelles des forges. Coulée de Fonte au Creusot, vers 1864. François Bonhommé [1809-1881] Le Creus ot en 1851 . Lithographie par Chalas. Centre d'Histoire du Travail A t e l i e r s e t C h a n t i e r s d e N a n t e s
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Almanach impérial, an XIII, 1805, p. 711; 14 févr. 1806; Lycée Impérial. A. Nat. 1050. — 4. A. Nat. FIT 3114, n» 74, Université de France. Le Sénateur, grand Maître de l'Uni- versité, arrête ce qui suit Le Lyoée Impérial à Paris prendra désormais le nom de Lycée Louis le Grand. Fait à Paris, au chef-lieu de l'Univt-rsité, le 8 avr. 1814. Signé Fontakes. — 5. Palmarès 1815-1830, Archives de Louis-le-G'1 et aux Arch. Nat. FHh 78 485, n° 41. — 6. Arch. Corresp. administrât., n° 1903 et seq. — 7. A. Nat. F17h 78488, n° 18. — 8. lb. n° 19 ; pétition des Elèves, 29 févr. 1848. PRELIMINAIRES 3 maîtres déclarèrent leur vœu le plus cher que la République appelât leur lycée, Le lycée National l ». La République répondit en rem- plaçant le roi par un philosophe et c'est ainsi que naquit le lycée Dks- CAhTES lbis. Descartes, sous celte première réincarnation, ne vécut guère plus d'une année et Louis XIV, dès 1849 2, avait recouvré son ancien fief. II avait dû cependant, peu après le 2 décembre 1852, consentir au rapprochement de l'épilhèle obligatoire et laisser dire Lycée impérial Louis-le-GKAND. Le 6 septembre 1870, le lycée fut rebaptisé Descartes par surprise ; l'autorité municipale, au début de ce mois tragique, avait omis de consulter le pouvoir central. En février 1873, les protestations du Proviseur, du lycée tout entier, des anciens élèves et du Recteur furent portées au ministre. L'occasion semblait bonne le lycée Cor- neille, tout voisin, venait de recouvrer son ancien nom de Lycée Henri IV, et l'applaudissement avait été unanime 3. Le proviseur de Descartes, Girard pouvait dire, dans sa lettre au Ministre Permettez-moi de vous rappeler que vous nous avez promis de nous rendre notre nom traditionnel de Louis-le-Grand et c'est au nom de tous mes collaborateurs que je viens vous le redemander. Je ne crois pas que vous ayez assez mauvaise opinion de moi pour penser que le nom de Descartes m'effraie ou me paraisse indigne de décorer le fronton d'un lycée. Mais, vous le savez, il y a des traditions dont l'opinion publique elle-même ne se sépare point sans peine; et le vieux nom de Louis- le-Grand est une de ces traditions. Si j'osais rappeler, à ce propos, un mot fameux de Mirabeau, je dirais qu'avec le nom de Descartes on a désorienté, depuis deux ans, non pas l'Europe, sans doute, mais la France, qui, de tous les coins, était habituée à envoyer ses enfants au Lycée Louis-le-Grand et qui ne sait plus où le trouver 4 ». Le vice-recteur M. Mourier ne se contentait pas d'appuyer la requête du Proviseur il donnait avec précision des arguments nou- veaux. La dénomination de lycée Descartes était illégale et la mairie du Ve arrondissement était sortie de ses attributions, en l'imposant. L'arbitraire avait trop duré et le ministre n'avait, pour le faire cesser, qu'un signe à faire 8. Et puis, en visitant le lycée, avec le Préfet de la 1. Ibid — • lbis. a. Nat. F17h n 20, 21 et 22. — 2. Le 14 août 1849. Archives de Louis le Gr. Correspondance administrât. IX, n° 9250. Arrêté de ce jour pris par M. Falloux, ministre secrétaire d'Etat au Département de l'Ins- truction publique et des Cultes. Cet arrêté est pris i yu les réclamations des Proviseurs des Lycées de Paris. >» — 3. Arch. Nat. F1~h liasse B, n° 49, Lycée Louis le Grand aux applaudissements de tous. > — 4. Id. ib. La lettre du Proviseur est datée Paris, 5 février 1873. — 5. Id. ibid. Lettre du 8 févr. 1873 J'ai eu l'honneur de vous faire con- naître que le nom de Descartes avait été substitué à celui de Louis-le Crand, le 6 sept. 1870, par suite des ordre» qu'avait donnés à ce sujet l'administration 4 l'organisation moderne Seine, le ministre n'avait-il pas laissé entendre au baron Larrey que l'ancien nom de Louis -le- Grand serait bientôt restauré x. A son tour, M. Drouvn de Lhuys, président de l'Association des Anciens élèves, insista, de toute la force de son influence 2. Le Ministre hésitait ; en marge de la lettre rectorale, il écrivit, de sa main attendre 3. 11 soumit la question à la réunion des Proviseurs. En cette année 1873, où se négociait le retour du comte de Chambord, o;i pouvait craindre que le vieux nom de Louis-le-drand eût un méchant air de réaction. C'était confondre misérablement la politique avec l'histoire. Le bon sens, qui 6nit toujours par avoir ses revanches, l'emporta, en d pit de tout. Le lycée perdit son faux nez, il s'appela désormais, comme jadis, lycée Louis -le- Grand '* et nous ne sachions pas que la République ait couru, de ce chef, depuis 1873, quelque péril. Collège ou Lycée, de quel nom qu'on l'appelât, la vieille maison de rue Saint-Jacques était prédestinée au xixe siècle à une gloire nouvelle. Dans la période précédente, elle venait d'être, avant la Révolution, le chef-lieu de l'Université de Paris ; à l'heure où grondait l'orage révo- lutionnaire, elle avait été !e seul, parmi tous les collèges de la capitale, à ne pas fermer ses portes et à ne pas suspendre ses leçons. Le 22 mars 1800, 1er Germinal an VIII, un rapport ministériel adopté par un arrêté consulaire pouvait donc constater officiellement ceci Le Prytanee français a remplacé tous les établissements publics qui, sous le nom de collèges, étaient consacrés, dans Paris à l'Instruction géné- rais et composaient l'ancienne université B. » Nous allons maintenant rechercher comment il lui fut possible de sauvegarder son ancien prestige et de se ménager un avenir digne de son passé. municipale du Ve arrondissement..... L'administration municipale a excédé évi- demment ses droits en faisant inscrire les mots Lycée Descartes à la porte du lycée Louis le Grand... Les dénominations des lycées appartiennent à l'autorité centrale... » Le Vice-Recteur ajoutait Le lycée n'a cessé de demander que son ancien nom de Louis le Grand lui soit conservé ; et je n'ai cessé, de mon côté, d'appuyer son vœu. » — 1. Id. ibid. — 2. Id. n° 50. Lettre datée Pari», 22 févr. 1873. — 3. Id. pièce n» 49. — 4. Le Bulletin administratif de l'instr. pub. du 19 mars 1873 porte, dans sa pattie non officielle Le lycée Descartes ancien lycée Louis-le-Grandj et le lycée Corneille ancien lycée Henri IV ont repris leur première dénomination. » Jusqu'à la démolition de l'ancien lycée, on lisait encore, mal effacé, le nom de Descartes, sur la porte du lycée Louis le Grand. V. Planche XI, fig. 28. — Chose curieuse, les Palmarès n'ont jamais adopté le nom de Descartes', ils sont restés fidèles au vieux nom de Louis-le-Crand. — 5. A. Nat. F>v 9, Dossier 41, n° 5. Rapport de Lucien Bonaparte, ministre de l'Intérieur. PRELIMINAIRES 5 Comme elle avait été le plus vivace des collèges, elle fut aussi l'aîné de fous les lycées parisiens. Et c'est chez elle qu'on modela leur pre- mière ébauche l. Elle était promue au titre de Lvcér» de Paris, le 10 juin 1803 ; c'était trois mois, très exactement, avant que ne vinssent au jour, le 23 fructidor an XI, 10 sept. 1803, les trois lycées du Pan- théon, de la Hue Saint-Antoine et des Capucins, que nous nommons aujourd'hui Henri IV, Charlemagne et Condorcet 2. Et c'est chez elle que fut essayé d'abord le premier règlement général des Lycées s. Enfin c'eat cbez elle que l'on rassemblait, pour les distribuer peu à peu aux quatre coins de la France, dans les lycées provinciaux; qui, l'un après l'autre, semblaient jaillir du soi, les jeunes gens que le Gouver- nement avait le souci d'élever à ses frais. A cet égard, on pourrait dire qu'elle n'était plus seulement, comme aux derniers jours de l'ancien Régime, le chef lieu de l'Université; elle en était un peu la maison mère. Le jour même où il obtint pour eile la dignité de Lycép, Chaptal, ministre de l'Intérieur avait dit Elle peut devenir, à l'époque même de la création, !e premier lycée de France » *. Autour de celte idée centrale, vont se grouper naturellement tous les détails analytiques de notre é!ude, soit que nous observions le collège ou le lycée dans son personnel, soit que nous l'envisagions dans sa vie matérielle, dans sa vie intellectuelle, dans sa vie morale. Tout ce qui existe se transforme ce personnel, cette vie maté- rielle, cette vie intellectuelle, cette vie morale seront donc différents sous le Consulat et l'Empire, différents de 1815 a 1848 ; et on pense bien qu'ils n'ont cessé d'évoluer depuis lors. Notre devoir sera de mar- quer constamment, dans les cadres que nous avons choisis, les stades de cette évolution progressive. 1. Dès le 22 mars 1800 1 germinal an VIII Bonaparte avait d'abord écrit, dans la minute de l'arrêté divisant le Prytanée français en 4 collèges Vu l'état où se trouve aujourd'hui l'Instruction publique et roulant faire un pre- mier pas vers la réorganisation des collèges arrête... > A. N. F" 9, Dos- sier 41, n° 5. — 2. Arch. Nat. F17h 3104, n°» 9 et 36. — La loi créant les lycées est du 11 floréal an X 1er mai 1802. — 3. Ce règlement est da'é précisément du 21 prairial an XI, c'est-à-dire du 10 juin 1803. A. Nat. FHh 3104, n° 2, mais une première ébauche en avait été faite le 10 déc. 1802, ou 19 frimaire an XI,tft.,n°5. — 4 A. Nat. AF'v 544, Dossier 96, n» 3. Cette même idée reparait dans les pa- piers du Prytanée, A. N. H3 2554, Dossier 1 Le Gouvernement, y lit-on, a voulu donner au Prytanée un grand développement et en faire le tronc d'un arbre dont les racines et les branches s'étendroient sur la surface de la Répu- blique entière .. [vers le 13 nov. 1800]. PI. XIV Fig. 34. — M. Malleval, Proviseur de 1819 à 1823. Fig. 35. — M. Pierrot-Deseilligny, Proviseur de 1S30 à 1S45. Fig. 36. — M. Rinn, Proviseur de 1845 à 1853. [Voir p. 540. LIVRE PREMIER LE PERSONNEL Le lycée était une société organisée et très vivante, dans laquelle quatre groupes de personnes coordonnaient leur activité l'administra- liou, le corps des professeurs, le corps des maîtres et la petite armée des élèves. CHAPITRE PREMIER Les administrateurs L'administration collégiale a presque toujours été ramenée à la triar- chie bien connue le Proviseur, le Ceuseur, l'Econome; les surveillants généraux et des secrélaires particuliers servaient d'organes à cette triar- chie. Proviseur fut un mot repris par le Consulat à quelques anciens col- lèges universitaires1. Jus u'au 29 fructidor an XI 16 sept. 1803, Cham- pagne, le dernier principal de l'ancien Louis-le-Grand, était qualifié ou bien Directeur du Prytanée de Paris» 2 ou bien Directeur du collège de Paris », l'une des quatre sections du Prytanée. Depuis lors, jusqu'à nos jours, il veut quinze proviseurs à Louis-le-Grand ce furent, 1. Ainsi aux Coll. d'Harcourt, de Sorbonne et de Navarre, cf. H. L. Bouquet, L'ancien collège d'Harcourt .. Paris, 1891, itt-8», p. 60. Ce mot proviseur s'ap- pliquait, du reste, à des fonctions différantes. — 2. Arrêté de c^ jour. Titre I, Arch. L. le Gr., Reg. dos Délibérât. An XII ; Arch. Nat. F" 105, Dos?. 587. pièce 3. 8 L OKGAINISATJOIN MODERNE MM. Champagne ', de Sermand 2, Taillefer 3, Mallevai4, Laborie % Pierrot-Deseiliigny 6, Rinn7, Fcrneroa 8, Jullien0, Didier10, Girard llr Gidel 12, Blanchet 1S, Gazeau u el Ferlé15. La moyenne de leur Provi- sorat est de 7 ans et demi ; aucun de ces provisora's qui n'ait atteint 3 ans, au moins, ni 15 au plus. La stabilité de la fonction a donc été certaine. Et deux proviseurs sont morts à leur poste IG ; un seul, M. Mallevai, fut nettement disgracié. L'âge moyen où ces provisorats ont commencé avoisine la cinquan- taine. Le do}ren de ces proviseurs fut M. Laborie, à 57 ans; le benja- min, ce fut M. Malleval, à 34 ans 17 L'un d'entre eux, M. Taillefer était prêtre ou l'avait été 1S ; deux autres MM. de Sermand 19, Laborie 20 semblent avoir été engagés, à quelque degré, dans les ordres. Sauf MM. Taillefer et Mallevai, tous semblent avoir été mariés 21. Dès la Res- tauration, sinon dès l'Empire, on avait Qni par comprendre en dépit des préjugés de l'Ancien Régime, que, pour connaître les enfants, il n'était pas mauvais d'en avoir. De nos quinze proviseurs, trois avaient été élèves à Louis-le- Grand MM. Champagne, Malleval et Didier 22. Six avaient débuté comme maîtres d'étude, MM. Champagne, Malleval, Jullien, Didier, Gidel et Gazeau î3. Tous avaient été professeurs et quelques uns avec beaucoup d'éclat. Mais presque tous avaient été initiés, peu ou prou, aux pra- tiques administratives, comme censeurs, comme proviseurs, comme recteurs départementaux d'un avait fait partie de l'enseignement supérieur en province 2sou même à Paris 2\ Leur recrutement avait encore d'autres garanties solides les grades universitaires, les ouvrages, les titres 27. Champagne avait un grand renon d'helléniste 28 et il fut membre de l'Institut29. La nomination, consulaire d'abord 20bis, était devenu ministérielle; en réalité, si elle portait la signature du ministre de l'Intérieur 30, ou du Grand maître31, ou, depuis le 4 janvier 1828, du ministre de l'Instruc- 1-20. Appendice C, 1-17 ; Champagne fut Directeur 1800-1803 et Proviseur de 1803-1810; furent ensuite proviseurs MM. Sermand, 1810-1815 ; Taillefer, 1815- 1819 ; Malleval, 1819-1823 ; Berthot intérim., 1823-1824 ; Laborie, 1824-1830 ; Pierrot-Deeilligny, 1830-1845 ; Rinn, 1845-1853 ; Forneron, 1853-1856 ; Jullien, 1856 1864 ; Didier, 1854-1868 ; Filon intérim, 1868; Julien Girard, 1868-1878 ; Gidel, 1878-1892; Blanchet, .892-1895; Gazeau, 1895 1909; G. Ferté, depuis sept. 1909.— Sur eux, voir Planches XIV-XV, flg. 34 43.— 21-27. Appendice G, 1-10. — 28. Lettre du Ministère, à ce sujet, 11 octob. 1810, A. Nat. F? 6554 ; Emond, pp. 3S7-9. — 29. Emond. id. ; lettre de Champagne, 12 frimaire an X, signée Membre de l'Institut », etc. A. Nat. H» 2558, Doss. 3. — 29b's. Loi du 11 flo- réal an X [1er mai 1802j TU IV apt 4 Duvergier, t. XIII, p. 411, vol. 1. - 30. 22 fructidor an VIII; A. Nat. H3 2558, Doss. 7, n° 19 Nomination de Cham- pagne, membre de l'Institut, à la Direction du Collège de Paris ; le 29 1 an XI, la nomination de Champagne à la place de proviseur fut faite par arrêté consu- laire, A Nat. Fit 105, Dossier 587, pièce 3. - 31. Le Gr. Maître fut créé le 17 mars 1808 ; le 25 juin 1810, le Gr. Maître nomme de Sermand proviseur du Lycée Impér., A. Nat. F 3114", n° 18. Pi. xv Hs. Fig. — M. Jullien, Proviseur de 1856 à 1864 Fig. 38. - M. Didier. 1 ur de 1864 à 1868 19. — M. Julien Girard, Proviseur de L868 à L878 Fig. H M Gidel, ii' d 1878 ;» L892 l oir LE ADMINISTRATEURS 9 tion publique1, elle avait élé provoquée soit parle conseiller d'Etat chargé de l'Inslruction publique - soil par la commission s, puis le con- seil royal de l'Instruction publique *, soit par le Directeur de l'Ensei- gnement secondaire5; elle avait élé préparée par le Vice-Recteur et par les Inspecteurs généraux. Celle nomination élait parfois provisoire, avant d'être déGnitive 6 ; parfois aussi elle était dilTérée, comme en 1823-4 et 1868, où un ad- ministrateur intérimaire fut délégué à Louis-le-Grand 7. L'installation jadis ne se faisait pas sans quelque solennité le Rec- teur, assisté d'un inspecteur de l'Académie, y procédait en personne, à Louis-le-Grand, devant tous les fonctionnaires du Lycée, réunis 8. Le traitement du Proviseur élait encore, en 1839, ce qu'il était pu 1803 ; francs, soit un chilfre C\xp de francs et un supplé- ment de 3 000, très irrégulièrement versé9. Il n'avait pas profité de l'augmentation générale, accordée depuis 1809, aux traitements univer- sitaires il pouvait arriver au Provis>eur que tel de ses subordonnés fût plus payé que lui11. Les plaintes des trois proviseurs de? collèges parisiens d'internes 12 ne semblent pas avoir été entendues avant le 9 oc- tobre 1816 13 ; mais, dès le 15 novembre 1850, la diminution de l'effec- tif scolaire servit de prétexte à supprimer l'augmentation un moment consentie u. Aujourd'hui, le traitement des proviseurs est encore com- posé de deux parties le chiffre de la première est déterminé par !a classe dans laquelle les proviseurs sont placés, en leur qualité de pro- fesseurs du cadre parisien ou départemental ; le chiffre de la seconde correspond à ce l'indemnité de direction ». Mais, au total, si l'on tient compte des changements du prix de l'argent, il est sûr que le provi- seur de Louis-le-Grand, en 1D13, avait un traitement inférieur à celui dout se plaignait, en 1839, son prédécesseur. 1. Celte date est celle où fut créé le Ministère de l'Iostr. publique Duverg., t. 23. — 2 4 Germ. an X, Lettre du Ministre de l'Intérieur à l'Administration du Prytanée, pour lui annoncer que le cit. Roederer, conseiller d'Eta'.ales Pry- tanées dans ses attributions et que c'eît à lui qu'il faudra s'aJre?ser. A. Nat. H 2441, 1'° 17, r°; M. 158; 21 floréal an XI, Lettre de Fourcroy, qui a remplacé Roederer, A. Mat. H 2441, fa 30 v°. — 3-5. La commission fut établie par or- donnance du 15 août 1815 pour remplacer le Gr. Maître et le de l'Uni- versité ; le 1er no?. 1820, cette commis&ion fut par ordonnance de Louis XVIII éri-ée en Conseil royal. — 6. Ainsi, pour MM. Mallevai et Rinn. — 7. Ainsi, M. Berthot. Appendice G, n°5 . — 8. L-ttre du Ministre au Recteur de la Seine, 13 janv 1853, au sujet de l'installation de M. Forneron, A. Nat. FHh 78488, n° 196. — 9-12. Lettre des Proviseurs MM. Pierrot [L. le Gr.], A. de Waiily [Henri IV], P. Lorrain [S Louis], au Ministre, 13 juillet 1839 ; A. Nat. F" 3575.— Cf. feuille de traitement pour l'an XII, 4 trimastre, A. Nat. F1~h 3517', n° 27. — Arch. L. le Gr., Corr. odmin., III, n» 1159 ; 28 nov. 1823. En 1800, le Directeur avait 6000 irancs, y compris les Irais de nourriture. A. Nat. H 255S3, doss. VII, n° 22. — 13-14. Arrêté du 15 nov 1850, à ce sujet, A. Nat. F" 3602*'.— En 1779-1800, la Directeur du Prytanée français», Champagne, avait une indemnité de nourriture de francs par an, A. Nat. II 2409, f» 47 v°. 4 0 L ORGANISATION MODERNE On devine bien que les attributions du proviseur ne risquaient guère, elles non plus, d'augmenter à l'époque où il n'y avait pas à. Paris plus de 4 ou 5 collèges ou lycées royaux, le proviseur de Louis- le-Grand était un personnage d'importance, avec qui le minisire nes notes particulières, consaeiées à chacun de ses subordonnés, dans le rapport annuel du mois d'août \ voi à presque les seules armes laissées aux mains du proviseur, en face de son personnel. Ces notes étaient contrôlées parcelles des Inspecteurs et fjndues avec ces der- nières, ava t d'être mises sous les yeux du Ministre -. Ce régime permit à des fonctionnaires, jugés déplorables par le Proviseur, de garder pai- siblement leurs fonctions 3. C'étaient là, sans doute, des garanties pré- cieuses contre L'absolutisme, les caprices ou les erreurs *, toujours pos- sibles, d'un chef; d'autre part, c'étiit risquer de donner h ce chef, au milieu de ses subordonnés, un? impression d isolement et de vide. II avait des co'Uborateurs qui pouvaient oublier de collaborer. I! y a mieux le proviseur était rarement le maître d'expulser les élèves, les boursiers surtout ; la gravité de leurs torts était soumise à l'an >récialion du Recteur et du Ministre. Pour obliger les élèves insuffi- sants à redoubler une classe ou pour autoriser les élèves mieux entrai - nés à en sauter une, il fallait, jusqu'à la fin du Gouvernement de Juillet, une autorisation ministérielle ". L'autorité du Proviseur n'était pas s?u'emenl limitée vis-à-vis du personnel par l'autorité supérieure et par les droits reconnus à tous les fonctionnaires et à tous les élèves du lycée ; à diverses reprises, elle fut encore et surtout pour le bien-être matériel, intellectuel et moral de la maison, disciplinée et contrôlée par un Consul d'ad- ministration. Le 1er germinal an VIII, [22 mars 1800], un Directoire composé de cinq membres 6 fut chargé d'administrer la collège de 1. Nous avons tiré le plus grand profit de tous ceux de ces rapports que con- servent, les Arck. Nat et doul la s'rie est presque complète depuis 1828 A. Nat. FHh 78485, n" 31, 41, 86, 88; — n° 7, 20, etc — 2 Les Rapport* des Insp >cteurs sont conservés dans !a même série ex. en mars 1830, A. Nat. Fl~u . n° 40. — Et pareillement les Notes miies sous Us yeux du Ministre ; ex. pour 183D-40 ; A. Nat. Fi7„ 73486, n» 17, 42, etc. — 3. Ainsi, M GuilUrd, de mathématiq. M. Laborie s'en plaignait déjà, en 1889 [k. Nat FITb 7î n» 41 ; en 1831-2, M. Pierrot disait La position de l 'administration vis à-tis de M Gaillard e»t toujours la même, c'est-à-dire intolérable. > ///. n° - 4. Ainsi, M, Pierrot aurait voulu se défaire de M. Gaillardin, jug^ par lui trop indiffèrent au Concours général en 1842 3, il disait de lui De tels profes- seurs sont le fléau de nos études de Collège. » A. Nat. F"» 7^is fonctions le 1er germ. an XIII [22 mars 1805] Rapport de Reboul, 25 mai 1810, A. Nat. F" 4260. — 1. Le 24 ocl. 1809, le Proviseur du Lycée Impérial se plaignait d'être sous la dépendance du Conseil académique, simple commission rendant compte aux Inspecteurs généraux et sujette à la révision du Conseil de l'Université. Ce con- seil académique délibérait sur toutes les dépenses proposées par le proviseur, sans rien ordonner, parce que, s'il ordonnait, il serait responsable. Le provi- seur proposait et donnait les renseignements qu'on lui demandait; il avùt l'or- donnancement des fonds et surveillait l'exécution des traités. Mais il n'était admis au Conseil acacémique que si ce Conseil l'y appelait. Il se tenait à la porte de ce Conseil ; et c'est de cette situation humiliante que Champagne se plai- gnait. A. Nat. F" 3114, pièce 43 — 2. 24 mai 1815, arrêté du Gr. Maître réta- blissant la Commission d'administration des Lycées de Paris, supprimée par l'effet de l'ordonnance du 17 lévrier 1315; A. Nat. FHh 3104, n° 118. — Cette ordonnance est dans'Duvergier, Lois, Décrets, Ordonnances, t. XIX, pp. 407 et ss. — 3 Napoléon, d'-s le 26 frimaire an XIII [17 déc. 1804J, avait voulu que Cham- pagne, admis dans la Légion d'honneur, y lût reçu avec solennité. A. 147, Dossier 867, n» 3. LE PERSONNEL ADMINISTRATEURS 13 el Diilier, 1^ provisoral de Louis-le-Grand marqua 'e terme de bjur carrière ; fut trans'éré au provisorat de Vanves, ce qui étaii à [ eine changer de maison ; MM. Fomeron, Girard, Blanchet, Gazeau q ji Itèrent un lycée d'internes pour un lycée d'externes, d'administra- tion plus dou?e, et Louis-l^-Grand pour Condorcet , M. llinn, en laissant Louis-le-Grand, passa au Collège de France, d'abord, au rec- torat de Strasbourg, ensuite. Si tous, sauf M. Mallevai, peut-être, avaient ainsi, en abandonnant le provisorat de Louis-le-Grand, un impérieux besoin de repos, c'était dire combien les fonctions de la charge étaient absorbantes. Jusqu'à quel point, les collaborateurs de tous ces hommes de talent prenaient-ils leur part du fardeau commun ? Censeur pas plus que Proviseur n'était un nom nouveau ; c'est à l'ancienne Université que Bonaparte le prit, quitte à lui donner, comme au lerme de Proviseur, une signification nouvelle 1. Avant de s'app'ler Censeur, le second de M. Champagne s'appela Sous-Directeur du Prytanée 2 puis Chef de l'Enseignement au Collège de Paris 3. La loi du il Floréal an X, [1er mai 1802] établit, dans chaque Lycée, un Censeur d"s Eludes, et le plaça immédiatement au-desssous du Proviseur *. Depuis celte date jusqu'à nos jours, il y eut à Louis-le-Grand 17 censeurs iilu'.aires 5. La moy une du Censorat fut donc de 7 à S ans ; elle est sensiblement analogue à celle du Provisorat. Deux censeurs gardèrent leurs fonctions moins d'un an ; trois gardèrent les leurs plus de cinq ans ; six, plus de dix ans. M. Roy, l'avant-dernier censeur, est celui qui marqua aux siennes !a plus longue Gdéiité. Au.;un Censeur ne fut disgracié. La stabilité du Censorat fut par suite aussi réelle que celle du Pro- visorat. jue nous révèle son recrutement ? — L'âge moyen de début fut 41 ans ; c'est-à-dire inférieur de 9 ans à l'âge moyen où débutèrent les Proviseurs. On eut des censeurs de .'S et de 30 an-, MM. Emond etdeWailly; et on en eut qui entrèrent en charge un peu avant 50 iDs ou même après 50 ans, MM. R>g;!et et DMorme 8. 1. Max. Tur_p, Professeurs et Régents de Collège dans l'ancienne Université de Paris, svii-xviu8 s , Paris, in-S°, 1902 ; p. 26. — 2 5 Ce furent MM. J. L. Chambi -y [jusqu'au 21 octobre 1802 ; Et. Aug. de Waitly 1802 1804 ; Ch. Sim. Le Prévost d'Iray 1804-1809; ; J. N. M. de Guérie 1809-1824 ; E. !.. Gustave Emond 1825-1838; MM Ch. Aubert-Hix 1838 1S49; ; J. Fr. Edu. Didier '1840 1852 ; J. P 1852-1855 f M. E. Talbert 1855 .864; Ch. L. A A. Maréchal 1864-1871; Louis Roguet 1871-1878; L. M. Joubin 1878- B83 A. M. Laigle 1883- Î91 A, P. ^uvillier 1807-1 '.'02, ; M. M J. M. Maldidier ;1902; L. M. Ci». Roy v1902 1019, ; Bruet, d^uis 1919. Cf. sur eux, Planche XVI — 6. Appendics C, 18-33. A 28 ans, M. Emond; à 30 ans, M. de Wailly ; 14 I. ORGANISATION MODERNE Un seul était ecclésiastique, M. Chambry 1 ; trois étaient anciens élèves dp la maison, MM. Emond, Didier et Vaîdidier. MM. de Guérie, Emond, Didier, Roguet, Joubin, Maldidiér, Roy avaient été maîtres d'étude 2. Tous avaient été professeurs et quelques uns, à Louis- le-Grand 3 ; l'un d'eux, M. de Guérie, à la Faculté des Lettres de Paris*. Beaucoup avaient été censeurs, en province surtout 5 ; cerfains avaient été proviseurs 5bis ; l'un deux, M. Joubin, avait été inspecteur d'académie ; il avait même fait fonction de recteur8. La nomination, qui émanait d'abord des Consuls, fut laissée ensuite au Ministre 7. Le traitement atteignait près de G. 000 francs s. A MM. Chambry, de WaillyJ Didier, Talbert, Maréchal, Joubin 9, le Censorat de Louis-le-Grand permit de s'élever plus haut, dans la hié- rarchie universitaire, et d'atteindre des provisorats très en vue. Il fut donc un chemin plutôt qu'une impasse, M. le Prévost d'irai, lui, devint Inspecteur général et Membre de l'Institut 10. Les fonctions de censeur, au Lycée Impérial, paraissaient, le 7 mars 1809, mal définies encore. En 6 ans, il y avait eu 3 censeurs, qui res- taient trop peu de temps en charge. Entre eux et Champagne, c'étaient toujours des luîtes sourdes », dans lesquelles ils gagnaient à eux l'Econome, lis prétendaient à l'égalité administrative vis-à-vis du Proviseur il ordonnait et ils ordonnaient. Pour éviter un éclat, Chaul- ai 35 an?, M. Talbert ; à 36 ans, M. Le Prévost d'Iray ; à 37 ans, M Cuvillier ; à 39 ans, MM. Didier et Maréchal ; à 42 ans, M. Maldidiér ; à 43 ans, M. de Guérie; à 44 ans, M. Chambry ; à 47 ans, MM. Aubert-Hix, Joubin, Roy; à 49 ans, M. Laigle et M. Bruet ; à 51 ans, M. Roguet ; à 53 ans, M. De- lorrae. — 1. A. Nat. F 17= G 53; dossier Chambry. — 2. MM. de Guérie, au Coll. de Lisieux ; Emond, à L. le Gr. ; Didier, à l'Institution Verger et Babil et à Louis le Gr. ; Roguet, à Vesoul, Besançon, L. le Gr. ; Joubin, à Epinal; Malnidier, à Vanves ; Roy, à Charlemagne. — 3. A L. le Gr., MM. Eœoud, Aubert-Hix, Didier, Delorme.— 4. Professeur titulaire, depuis le 6 mai 1809. 3150; pièce 169.— 5. MM. Grenoble,16 déc. 1833 ; puis à Besançon, 30 ; Didier, à Louis le Gr., comme suppléant, 21 cet. 1834 au 30 sep*. 1835; à S Louis, 1845-1849; Talbert, à Rouen, 27 sept. 1854 ; Maréchal, à Rennes, 5 sept. 1855 et Lyon 17 juin 1860 ; Roguet, à Nancy, 8 sept. 1857 ; à Rouen, 14 août 1S61 ; Jou- bin, à Anger?, 19 avr. 1861 ; à Bordeaux, 24 sept. 1864; Laigle, à Douai, 15 sept. 1873 ; à Marseille, 2 août 1876; Cuvillier, à Rollin, 24 avr. 1896; Roy, à la Roche-s-Yon, 13 août 89 ; Marseille, 19 août 90 ; Bordeaux, 17 mars 1893 ; Bruet, à Lakanal et à Pasteur. — 5bis. MM. Maréchal, à Angers, 26 juil. 1^62 ; Joubin, à Laval et Angers, 16 août 1865 et mai 1871 ; Laigle, à Sens, -2 août 1876; Amiens, 30 avr. 1878 ; Dijon, 9 août 1879 ; Roy, à Bastia, 4 août 1894 ; Chartres, 1 sept. 1896 ; Eruet, à Vesoul et Limoges. — 6. A Poitiers, 1869-70. — 7. Comme pour les Proviseurs supra, p. 8 et 9. — 8. Grâce à l'Eventuel, v. infra, p. 3,-42. — 10 vend" an XII ; A. Nat. H3 2528, n° 22 ; 30 sept 1836, A. Nat. FHh 78486 ; n» 22. — 9. M. Chambry, devint proviseur à Bruxelles, à Lyon et à Bourbon; M. de Wailly, proviseur à Napoléon ; M. Didier, provis. à L. le Gr. ; Taibert, Di- recteur de Rollin ; M. Maréchal, proviseur de Versailles ; M. Joubin, proviseur à S. Louis. — 10. A. Nat. FHh 3104, n» 39 ; en 1818, à l'Acad, des Inscrip. et B. Lettres. PI. XVI. Fig. ;;. m. Maréchal, Censeur de 1864 à 1871. Fig. \\ bis. - M Laigle, Censeur de 1883 h Lé Fig. 15. M. l h Roy Censeur de 1902 à 1919 Voir p 540 LE 15 pagne négociait el capitulait. Et puis, sous le prétexte qu'ils élaient censeurs des Eludes, ils quittaient le Lycée pendant toutes les vacances, puisque, aussi bien, les études étaient alors interrompues. Il fallait, pour remplacer le Censeur, trois Sous-directeur3 1 et cela coûtait cher au Lycée. Champagne demanda donc au Grand Maître que le Censeur fût nettement subordonné au Proviseur, et que la loi du li floréal an X ne fût pluâ lettre morte; que le Censeur assislàt au Conseil, pour les comptes seulement, aux termes du règlement du 22 prairial ; que le Proviseur, seul responsable, eût, seul, la décision des affaires ; que le Censeur surveillât le travail dans les salles d'étude et que toute la discipline intérieure relevât de lui ; enfin qu'il fût tenu de rendra compte, tous les jours, au proviseur, de l'état du lycée 2. Il semble bien que la requête de Champagne fut entendue. Et avec le 4e censeur du Lycée l'ère des conflits fut close. Plus tard même, sous le proviseur Pierrot, par exemple, la dépendance du censeur fut jugée trop absolue. Les attributions duCensoral risquaient d'être à Louis-Ie-Grand, plus absorbantes qu'ailleurs ; ce qui n'empêchait pas que M. de Guérie les préférât à sa chaire en Sorbonne. Au Censeur étaient attribuées la sur- veillance immédiate de la discipline et de l'enseignement ; les dortoirs, les classes, les études, les bibliothèques, les récréations, les réfectoire?, les promenades, tous les mouvements ; la conduite, les mœurs le progrès des élèves. Chaque soir, il avait à réunir les maîtres d'étude. 2bi' En réalité et en bien des cas, la mauvaise santé ou l'in- différence de certains censeurs 3, l'inlassable activité de certains pro- viseurs, et leur ambition de tout faire 4, allégèrent sensiblement la tâche censorale. Avec d'excellents surveillants généraux, le Proviseur semblait parfois s'efforcer de faire face atout. Les Censeurs, acceptaient de bonne grâce la subordination à laquelle les réduisaient les règlements et le zèle du Proviseur. Quand il leur fut donné de se montrer et d'agir, des hommes tels que MM. Emond, Maréchal, Roguet et Joubin — et j'en passe — se révélèrent comme des hommes do caractère. On vit souvent, et par l'effet des qualités ou des défauts des censeurs, en dépit de la nature même du Censorat, l'affection des élèves s'attacher à leur Censeur3. 1 2. A. Nat. Fn 3114. pièce 3. — 2bis. Sur ce que davait être le Censeur à L. le Gr. ; Note du 11 mai 1837, Insp. gén. A. Nat. Flui 7S486, n» 32. — 3. MM. Emond, Aubert-Hix, Didier. Talb^rt. — 4. lnfra, l'Emulation, fin; A. Nat. Flm 3176, M. du Guérie; id. n° 36 — 5. A M. de Guérie, par et., lettre du 31 junv. 1824, A. Nat. FlTn 3150, n° 278, n. 1 ; à M. Aubert-Ilix ; Note ministér., 1844, A. Nat. THu 78487, n" 48 ; à MM. Talber», Maréchal, etc. 16 L ORGANISATION MODERNE Le fonclionnaire placé à la tôle oVs services de l'Économat ne s'ap- pela pa3 décidéinent Économe avant 1809. Auparavant, depuis le l"r mai 1802, son nom était Procureur gérant, dans tous les lycées x; maisau Prytanée, de sept. 1800 au 30 avril 1802, le nom d'Econome avait prévalu, pendant dix-huit mois2; il est dune vraiseuiblable que ce vocable, qui devait finir par l'emporter dans l'enseignement secondaire, eut notre maison pour marraine. La liste des Economes ou Procureurs-gérants est moins longue que que celle des Proviseurs ou des Censeurs. Elle compie seulement onze noms 3. La durée moyenne de leur charge fut donc de dix ans et demi. ne resta que 3 ans et M. Moreau, 5 ans ; mais M. Bruzard, 27 ans et demi. Il fut le seul qui mourut en fonctions, la retraite clôtura la carrière de son prédécesseur et de ses successeurs. Pour le recrutement de ces fonctionnaires, on choisissait générale- ment des hommes d'une cinquantaine d'années. L'âge des débuts n'eu varia pas moins de 33 à 57 ans. Au début du xix8 siècle, le nombre des années n'était pas considéré comme une garantie indispensable mais le préjugé de l'âge s'imposa dès 1838 et l'économat de Louis- Ie-Grand fut de plus en plus, à partir de 1867, considéré comme une fin de carrière *. Avant d'être appelés rue Saint-Jacques, M. Moreau avait géré déjà trois économats5; et quatre Loumont 7, Dufaure 8, Mairot9, Roy10 et Ivornprobst10bis ; six, AI. le Forestier11. Et ces économats n'avaient pas tous été en province. L'économat de Louis-!e-Grand devint le couronnement de bons el loyaux services d'ordre technique, qui se 1. Lois du 11 floréal an X il" mai 1802, tit. IV, art. 13 et 14 ; et du 21 prai- rial an XI 10 juin 1303, tit. II, § 3, Duvergier, t.. XIII, p. 411 et t. XIV, p. 318. — 2. Règlement du Prytanée, 22 fructidor an VIII [9 sept. 1800], tit. XI, art. 92 de l'Econome; A. Nat. M 158, n° 4 ; et 16 juill. 1801, tit. II, art 5 Econome; A. Nat. H3 2528. — 3. Appendice C, MM. Lesieur 1800-18 0, ; Bruzard 1810- 1838 ; Louslau 1838-1851 ; Alera 1851-1857; Sicre 1867-1874; Le Forestier 1874-1882; Loumont 1882-1894; Dufaure 1894-1897 ; Moreau 1897-1902; ; Mai- rot 1902-1913 ; Alfred Roy 1913-1919 ; Kornprobst depuis 1919 Cf. notre Planche XVIII, fi g .57, 1er rang.— 4. Répert. C, Administr.— 5. Lycée de Niort; Minist. de l'Instr. publ. ; lycées de Versailles. Orléans, Gharlemagne, Nancy. — 6. Lycées de Dijon, Nîmes, S. Quentin, Lille, Versailles. — 7. Bastia, Ghà- teauroux, Orléans, Charlemagne, Nancy.— 8. Lycées du Puy, Périgueux, Limoges, Lille, Vânves. — 9. Lycées de Carcassonne, Cherbourg, Brest, Bordeaux, Carnot. — 10. Lycées de Laon, Dijon, Lyon, Versailles. — 10bis. S. Orner, le Havre, Lyon, Vanves. — 11. Lycées de Laval, Angers, Chambéry, Orléans; Ecole Normale, Lycée de Vanves. LE PERSONNEL ADMINISTRATEURS 17 chiffraient par un total respectable 13 ans pour M. Louslau ' ; 17, pour M. Alem2; 19, pour M. Loumonl3; près de 22, pour M. Le- sieur*; 23 pour M. Sicre6; 27, pour M. Muirot8; 30, 33, 34 et 36 pour A1M. Le Forestier 7, Roy8, Moreau9 et Dufaure10. Le choix n'était pas exclu, sans doute, mais il ne pouvait guère s'affranchir trop de l'ancienneté. Une seule fois, en 1810, un économe fut pris en dehors de la carrière, peut être parce que la carrière n'avait pas encore eu le temps de se dé- velopper. Quand il fut donné pur successeur à M. Le-ieur, H. Bruzard était tout simplement bibliothécaire de la ville de Semur11. M. Louslau, lui, avait un passé sans banalité excessive12 c'était un ancien soldat, devenu officier payeur, puis trésorier; chef de division à la préfecture des Bouches du Weser, il avait quitté l'administration, en 1813, pour créer, trois ans plus tard, la première fabrique de chapeaux de soie que connût la France; il avait, eu 1817, inventé, pour l'armée, une nou- velle coiffure et l'avait fait adopter en 1821. Après quoi, quittant, ainsi qu'il disait, la Fabrication, il était revenu à l'une des premières passions de sa jeunesse les hautes et belles feuilles de papier blanc, où s'ali- gnaient les chiffres et les comptes. La nomination de l'Econome, réservée d'abord au premier Consul13, avait ensui'e été dévolue au Ministre. Son traitement fixe fut long- temps,de 3000 francs 14 auxquels s'ajoutaient le logement et l'éclairage, puis, jusqu'en 1832, la table gratuite1'; des gratifications, jusqu'en 1849 16 et môme une part de l'éventuel17, en dépit des règlements de 1809 18. En 1839, le total de ce traitement s'élevait, déduction faite de la retenue du 20e, à 7810 francs 19. C'était, vu les changements survenus depuis lors dans la valeur de l'argent, un chiffre supérieur au traitement actuel qui s'élève, outre le logement, à 8000 francs et à l'indemnité allouée aux économes 20. L'Econome, depuis 1803, donnait un cautionnement, fixé alors à 90 0 francs 21 ; la quotité en est aujourd'hui variable elle est réglée, à chaque mutation, par l'arrêté de nomination 22. 1-10. Appendice C, 37-49. — 11. Arch. L. le Gr., Reg. du Personnel, t. I, p. 5. - 12. Id. ibid., p. 121. - 13. Tit. 4, ait. 14, Loi du il floréal an X.— 14. 4* Trimestre an XII et irtrim. an XIII, commencés le 20 juin et 23 sept. 1804 ; A. Nat. 3517', n° 27 ; état des traitements. Ce chiffre de 3000 francs était encore celui de 1839 Lettre des Proviseurs de L. le Gr., Henri IV et S. Louis au ministre, 13 juill. 1839 ; A. Nat. F11 3575. — 15. Lettre du Recteur au Proviseur, 13 avr. 1832. Arch. L. le Gr. Corr. adm., IV, n° 2148. — 16. Arrêté du5janv. 1849; A. Nat. F1" 3602". — 17. Lett. cit. du 13 juill. 1839. — 18. Lettre de TEconome Lesieur, au Grand Maitre, 13 fév. 1810; A. Nat. F17 3114, n° 2 ii"> Liasse. — 19. Lett cit. du 13 juill. 1839. — 20. DOcr. du 24 juin 1910 ; Tableau annexe ; et art. 1 du second décret de ce jour. — 21. Loi du 21 prairial an XI ;10 juin 1803, Tit. II, § 3, art. 21 Duver-;er, t. XIV, p. 318. — 22. Décr. du 20 janvier 1909. 2 jg L ORGANISATION Les allributions de l'Econome étaient, jusqu'à l'organisation des lvcées, particulières au Prytanée les receltes et les dépenses, les mar- chés la nourriture, les vêtements, les domestique?, étaient spéciale- ment confiés à ses soins, sous le contrôle du Directeur de l'adminis- tration du Prytanée1. Il était le subordonné de l'Agent comptable, Hébert2. A partir de la loi du 2 prairial an XI, les fonctions de l'Eco- nome au Lycée de Paris, au Lycée impérial ou au Collège Louis-le- Grand furent, à peu d'exceptions près, celles de tous les économes de de tous les lycées8. Il est aujourd'hui chargé, sous la direction et l'au- torité du Proviseur, de tous les détails du service intérieur4. Pour la caisse, la comptabilité, les écritures et tout le reste, un per- sonnel de huit personnes, travaillait dans les bureaux ; en 1799, l'agent comptable était à leur tète ; l'économe était alors un moindre person- nage que le secrétaire et le caissier et ne venait, dans la hiérarchie, qu'au 49 rang 5. Depuis 1800, il passa au 1er, quand l'Agent comptable eut quitté le Collège de Paris pour s'occuper des quatre sections du Prytanée. Il est vrai que le personnel des Bureaux semble avoir été très fortement ré- duit nous ne constatons alors anprès de l'Econome qu'un caissier, M. Poupard 8, puis, dès 1811, M. Beauguille \ Il est possible, d'ailleurs, que, sous le Consulat et l'Empire, quelque maître d'étude, ait été, au moins de temps en temps, délégué aux écritures. Sous la Restauration, nous voyons dans les Bureaux jusqu'à 5 ou 6 personnes8 un caissier, un commis à la receite, un chef de l'habillement, un commis aux trousseaux, un employé 9. Sous Louis-Philippe, apparaît, à côté du teneur de livres, un pre- mier commis d'Economat ; puis un autre premier commis ; sous Na- poléon 111, 3, 4, 5 et jusqu'à 6 premiers commis ; 5 encore, en 1872 ; 6, en 1873 mais 4 seulement, d'ordinaire, depuis 1874 10. C'est encore le nombre actuel. Le titre seul a changé il y a 3 Sous-économes et un commis aux écritures ".C'est parmi ces Sous-économes que se recrutent 1. Règlem. cit. des 22 fructidor an VIII [9 sept. 1800], Tit. XI, art. 92 et 16 juill, 1801, art. 5 — 2. Cf. quittance de Lesieur à Hébert, 11 vendr an XII [4 oct. 1803], 2410, f°40 2o; cf. sur Hébert, A. Nat. AFm 2522. — 3. Cf. l'arrangement consenti par le Gr. Maître pour la partage des fonctions écono- miques entre le Proviseur, l'Econome malade et un économe adjoint, A. Nat. F11 3114, lre Liasse, n» 6 25 nov. 1809. — 4. Règlement du 30 mars 1862, art. 1. — 5. Etat des... Employés à la Comptabilité ; appointements de ventose-gorminal et floréal an VII [du 19 fév. au 18 juin 1799] ; A. Nat. H 2448, f9 83 v». — 6. Ibid.; 3 et 6 therm. an X [22 et 25 juill. 1801], A. Nat H 2533, Liasse D; an XI [1802-3], Almanach national, p. 680; cf. 1789 90, A Nat. M 155, Liasse 3; Poupard était ancien élève de L. la Gr. ; A. Nat. AFm 2522, n° 4. — 7. Arch. L. le Gr.. Reg. du Personnel, t. I, in fine; A Nat. F17u 78485, pièce 2 \ n°» 11 et 30. — S. De 1820 à 1828 par ex. — 9. Beauguille, caissier 1811-1828; Humblat commis à la recette ; Bezodis, chef de l'habillement ; Boivin, employé puis commis aux trous- seaux. Répart, admin. C. — 10. Cf. les Palmarès annuels. — 11. Décret du. 31 mai 1902, art. 6 et 7 ; 9 à 12 ; et Décr. du 24 juin 1910. le personnel administrateurs 19 les économes de province, comme ils se recrutaient, avant 1902, parmi les commis d'économat les bureaux de Louis-le-Grand en ont fourni un grand nombre l. Aidés par leurs bureaux, quelques-uns des économes de Louis le- Grand surent montrer beaucoup d'intelligence, d'activité et de dévoue- ment en 1837, l'administra'ion de M. Bruzard était donnée comme un modèle -. Mais, l'année suivante, des abus graves étaient signalas dans la crédence et la cuisine c[ trop de créances restaient en retard. II. Lous- laud dut déployer beaucoup d'adresse pour les recouvrer3. M. Alem, en 18G1, semblait avoir multiplié, sans assez de profit, les domestiques et les employés *. Enfin, et fort heureusement, la bonne entente entre le Proviseur et l'Econome semble avoir été, presque toujours s, la règle à Louis-le-Grand. La prospérité matérielle de la maison était à ce prix. Les Sous-directeurs ou Surveillants généreux avaient, pour la dis- cipline, du collège, autanld'impoitancequerEconome, pour le bien être général. Sans eux, ni le Censeur, ni le Proviseur n'auraient pu exercer utilement leur action. Les Sous-directeurs formaient donc une des assises les plus solides de l'administration. Leur nom de Sous-directeurs » k>ur fut surtout donné de 1801 à 1819 et, depuis lors, mais par exception, jusqu'en 1846 °. De 1820 à 1833, on les appelait de préférence Maîtres de surveillance» ou Mattres surveillants 7 ». On disait encore, dès 1809 et surtout en 1824 et 1825, Surveillants de la première, delà seconde division 8 ou de la troisième cour, ou du petit collège. » Depuis 1838, le nom de surveillant général tendit à prévaloir 9 ; il était consacré depuis 1846 10 et il est demeuré 1X. 11 n'y eut d'abord, en 1799-1800, qu'un seul Sous-directeur ; puis, provisoiren enl d'abord, de 18C0 à 1806, définitivement ensuite, de 180G à 1853 et depuis 1913, les Sous-directions ou Surveillances générales furent au nombre de trois ; moins de trois, non seulement dans la pé- riode d'organisation primitive mais, de 1890 à 1912, après la création 1. Palmarès annuels. — 2 A Nat FIT» 78486, n» 32 ; rapport du 11 mai 1*37 — 3. Ibid., n° 40 — 4. Le service en lui-même n'e-t pas parfait II y a cependant toute une cohorte de domestiquas 59, pour 600 élèves [internes] et 14 employés divers. Le nombre n'est donc pas en défaut ; c'est la surveillance et le contrôle du maître qui n'ont peut-être as l'activité et l'énergie nécessaire... » L'^P. générale 28 mars 1S61 ; A. Nat. i 86464, n* 14 et 14M». — 5. Entre M. Rhin et M Loustaud, ces rappoita ne furent pas toujours sans quelques nuages. — 6-7. Cf. notre Répertoire administrât., C, Arch. L. le Or., nous y avons annexé un tableau annuel des surveillant généraux, de L801 a 1920. — 8-11. Ibid. — Cl. A Nat. II 2409, 1° 47 \e U5 2558, does. VII, n' 15 et 58, F3114, piùce 3. 20 L ORGANISATION MODERNE du lycée Montaigne; quatre, de 1854 à 1890, époque où le nombre des élèves, et, pendant quelque temps, des internes, ne cessait de s'ac- croître ; quatre, depuis i 9 i 8 l. Le nombre dos surveillants généraux devait donc largement doubler le nombre des Censeurs il y avait eu 16 y eut 44 sur- veillants généraux 2-3. La stabilité de leurs fonctions est très certaine * 20 sont restés à leur po>te 5 ans ou plus, dont 7, de 5 à 10 ans ; 7, de 10 à 20 ; 6, de 20 à 30. Les quatre doyens furent JV1M. Roques et Aribaut, 24 ans; Lan- glois, 30 ans et Le Fèvre, 31 ans. Quand Al. Le Fèvre, en octobre 1841, quitta Louis-le-Jrand, il avait plus de 70 ans6. Le recrutement de ces fonctionnaires tenait compte de leur âge, de leurs services antérieurs, de leurs grades et de leurs aptitudes de tout ordre. — Quand ils débutaient à Louis-le-Grand c'étaient généralement des hommes de 25 à 35 ans 6 et qui étaient dans 1 université depuis une dizaine d'années 7. Cinq au moins étaient d'anciens élèves de la maison 3. Presque tous étaient choisis parmi les maîtres d'étude ; quelques-uns avaient été régents ou professeurs de collège 9; un d'eux avait été principal 10. Une douzaine avait conquis, outre le diplôme i_2 Ib'd. — Cf. A. Nat. H 2409, f° 47 v° ; H» 2558, doss. VII, n°* 15 et 53, F3t 14,. pièce 3. — 3. Ibii. — Il va de soi que certains de ces Surv. gén. purent à l'occasion, changer de cour ; nous les classons ici, d'après la cour qui leur fut le plus habituellement confiée. Ce turent après MM. Delarue iSOl-1803, Cail- lieux et Adam 1800-1801 pour la 1™ cour MM. Moulin, 1806-1810; Crochot, 1808-1817, avec des solutions de continuité de 1809-1810 Emond, 1819-1824 ; Patru, 1 mars au 1 octob. 1825; Langloia, 1 octob. 1825 15 octob. 1855; Mol- liard, 1 oct. 1856-1 juin 1857 ; Dreuilhe, 12 déc. 1864 1869 ; Roques, 22 mars 1870- 30 sept. 1894 ; Leloup, oct. 1873-30 fév. 1878 ; Humbert, 11 janv. 1879-9 oct. 1881 Serveau, 6 oct. 18816 fév. 1882; Aribaut, 1 oct. 1883-30 mai 1907;' Ripault, depuis janv 1907 ; Verdière, depuis nov. 1911 ; Margat, 1915-6; Chabé, 1916-7 Chaion, depuis 1917-8 ; — pour la 2 cour MM. Godard, 1806 1809 ; Le Chevalier, 1810-1811 Thouvenel, 1811-oet. 1815; Chadrin aîné, 1816 janv. 1819; Charpen- tier. 1819 nov. 1820; Lemoine, 1 oct. 1822 30 sept. 1824 Thomassin, 1 oct. 1824-20 nov. 1827; Duprateau, 10 fév. 1828-9 mai 1843; Desforges, avr. 1848- congé d'oct. 1866; retr. 28 oct. 1872; Sévrette, oct. 1860; v Appendice, Lang. Viv , anglais, n° 598 ; Nérot, 12 oct. 1866-sept. 1873 ; Guiot, 1 nov. 1894-sept. 1910; Gaillet, depuis sept. 1911 ; Dumoulin, depuis oct. 1914 ; — pour la 38 cour, MM. Du- bof, 1806-1809; Delavaux, lb09 ; Le Fèvre, 1 oct. 1809-1 oct. 1841; Genouille, 1 oct. 1841-1845 mars ; Hervau, 1 avr. 1845-5 avr. 1853 ; Toussaint, 1 oct. 1853- fin mai 1874 ; Blanc, oct. 1874 ; — pour la 4* cour, MM. Canet, 3 oct. 1854 j. en oct, 1856 ; Houchard, 25 oct. 1858 congés oct. 1871 ; déc. 1872 ; déc. 1873 ; Hivon- nait, oct. 1372-4 oct. 1875; Houdan, oct. 1875-1890. — 4. Cependant, en 1815 octob lors de l'épuration i des fonctionnaires, M. Thouvenel dut quitter L le Gr , A. Nat. F» 3114, n° 85. — 5 II était né le 15 mai 1770. A. Nat. FHh 78487, nos 24 et 25 ; il prit sa retraite en oct. 1841. — 6-7, Arch. L. le Gr. ; voir notre Répert. admin. C— 8. MM. Caillieux, Crochot, Delarue, Emond, Hervau.— 9. MAI. Dreuilhe, Duprateau, Hervau. — 10. M. Delarue; il avait été, en 1788, principal du Collège de Reims, A. Nat. H3 2558, Doss. 7, n° 65. LE PERSONNEL ADMINISTRATEURS 21 de bachelier, ceux de licencié es lettres \ es s iences 2, ou en droit * et môme celui d'agrégé 4 et celui de docteur en droit 5. Plusieurs étaient capables d** remplacer à l'improvise les professeurs absents .Presque tous, au xix8 siècle, étaient célibataires. Leur nomination, avant de devenir définitive, restait provisoire, et, au besoin, pendant plusieurs années. Elle était provoquée par le Provi- seur, proposée par le Recteur et signée par le Ministre 7. Le traitement était, en principe, celui des maîtres d'étude 8 il comportait le logement, la nourriture et des émoluments en espèces. Ces émoluments, fixés d'abord à francs, en 1800, et menacés d'une réduction, dès 1801 », furent pendant longtemps de francs; en 1859, ils purent atteindre francs, puis et francs. Depuis lors, ils furent en dix ans, de 1891 à 1901, portés à francs, francs, francs. Depuis 1910, leur maximum est de francs ".Bien peu d'universitaires, sans doute, ont bénéficié d'un relèvement financier aussi notable. Il est vrai qu'à Louis-le Grand certaines traditions l'avaient devancé. Pendant toute la première moitié du xixe siècle, on permettait aux Surveillants généraux d'avoir cbez eux quel ques élèves et de prélever sur chacun une pension particulière de 400, 500 ou 600 francs. Tels Surveillants généraux auront ainsi jusqu'à 8 ou 10 élèves ce qui augmentait leur traitement de à francs ou francs u. Au nom de légalité, qui devait régner entre les élèves, les Inspec- teurs généraux s'élevaient contre celle coutume 12; mais le Proviseur et le Censeur la défendaient obstinément. Ils y voyaient un triple avan- tage pour les élèves, pour le collège, pour les Surveillants généraux. Dreuilhe, 1866.— 3 M. Charpentier, 1820.— 4. MM. Charpentier, 1820 ; Crochot 1817; Emond, 1819; Genouille, 1839; Molliard, 1856. — 5. M. Lanplois, 1825. — M. Crochot était chevalier de la Lég. d'honn'. — 6. MM. Can^t, 1854 ; Charpen- tier, 1820; Crochot, 1816-1820; Ripault, 1907. — 7. Le 1"' mars 1825, M. Patru avait été nommé par le Proviseur ; A. Nat. FHh 78485, pièce n» 2. — 8. Le 27 sept. 1841, le Proviseur M. Pierrot Deseilligny parle, dans une lettre à M. Cayx, du traitement le maître d'étude » accordé aux Surveill. gén. Areh. L. le Gr., Corr. coll. IV, n 5i66l>i3. — Cependant, MM. Delarue et Caillieui, en l'an VIII, avaient 1500 francs, A. Nat. H' 2558, Dosa. VII, n° 15. — En 1866. le traitement de M. Toussaint avait été porté, de 2000, à 2200 francs ; A. Nat. F 86471, L. le Gr., A, n» 3. — 9. A Nat. H3 2558, do*s. VII, n» 15 Extrait des reg. de l'administration du Prytanée ; ib. 53, Lettre de deux Sous-Directeur^ à ladite administration. - 10. Décrets des 16 janv. 1847, art. 30; 17 sept. 1853, art. 12; 27 juill. 1859, art. 10 ; 27 janv. 1877, art. 8 ; 29 sept. 1891, art. 2 ; 20 mai 1897, art. 1 ; 13 juin 1899, art. 1 et 2 ; 18 nov. 1901, art. 1 ; 24 juin 1910 et Tabl annexes ; Loi budget, 1910.— 11. Lettre de M. Pierrot-Deseilligny, 27 sept. 1841 Arch. L le Gr., Corr. coll., IV, n° 5166M». Rapport des Insp, gén , 26 mars 1846, A. Nat. FH» 78 487, n» 54 ; id. n° 1. 20 mars 1847 id. n0 128, 24 mars 1849.— 12. Rapports des Insp. génér., cités note précéd. ; et fév. 1820, A Nat. Fn 3149, n» 128. 22 L MODERNE C'était en faveur des élèves, comme un système de répétitions pro- longées et perfectionnées, à l'usage d'écoliers arriérés, d'humeur trop inégale, ou de caractère trop faible ou de santé trop incertaine » ; ces jeunes gens réclamaient, pour un de ces divers motifs, une vigi- lance et des soins particuliers. l » Ils travaillaient donc dans une salle d'études trois fois moindre qu'une étude ordinaire et ils couchaient dans un dortoir de 6 ou 8 lits, au lieu de coucher dans un dortdir de 25 à 30 lits. Aucun d'eux n'avait pour lui seul de chambre séparée 2. — Sans cet artifice de discipline, ces élèves n'auraient pu être gardés au collège, parce qu'Us y auraient été importuns et malheureux ; » ils n'auraient pu s'y former à l'obéissance et au respect de la règle, sans dégoût, sans punitions multipliées.., sans danger pour leurs cama- rades » 3. — EnQn, par ce moyen, la situation des Surveillants géné- raux devenait enviable à Louis-le-Grand ; le collège était en mesure de la réserver à l'élite de ses maîtres d'étude » et de faire, pour eux, ce que l'Université n'avait pas eu encore le courage de faire. Le dé- voilement, l'attachement à leurs fonctions, l'expérience, l'autorité, voilà ce que les Surveillants généraux apportaient au collège, pour prix de ce que le collège leur rapportait 4. De 1820 à 1854 6, les Proviseurs réussirent à sauvegarder des privi- lèges, qui ajoutaient un adoucissement légitime à des fonctions infi- niment pénibles 6. Elles consistaient à contrôler tout à la fois les élèves et les maîtres ; à veiller à l'ordre intérieur, au travail et aux mœurs. Ni les études, ni les récréations, ni les réfectoires, ni les dortoirs, ni aucun des mouvements, qui se faisaient, dans l'immense maison, ne devaient échappera leurs yeux. Us multipliaient, par trois ou par quatre, la présence du Censeur, ils le suppléaient constamment et par- tout. Le jour où Louis-le-Grand serait privé de leur pxpérience, écri- vait, en 1841, M. Pierrot-Deseilligny,... je craindrais un ébranlement fâcheux dans l'organisation de celte maison, dont ils sont aujourd'hui une partie essentielle 7. » Il y eut, sans aucun doute, des Surveillants généraux peu aimés des maîtres et des élèves 8. Mais le plus grand nombre sut conquéiir l'es- time elle respect 9. Nul ne connaissait les traditions de la maison mieux que M. Langlois 10 et nul ne s'identifia avec le collège plus com- 1. Lettre de M. Pierrot-D., du 27 sept. 1841. — 2-4. Ibid., id. — 5. En 1854, le 1 avr. les Insp. géuér. écrivent, au sujet de L. le Gr. Aujourd'hui, il n'y a plus que 2 Sous-directeurs qui aient chacun deux élèves particuliers. On ne permet plus cet arrangement exceptionnel. » A. Nat. FiVo 78488, n° 225. — 6-7. Lettre cit. de M. Pierrot-Deseilligny du 27 sept. 1841. — 8. Ainsi, la haine des élèves contre le Surveill. général Chadrin fut une des causes de la ré- volte de 1819. Ce que le Proviseur avoue, 29 janv. 1819, A. Nat. F17h 3149, n° 108. — 9. Ainsi, MM. Langlois, Duprateau, Desforges, Hervau, Toussaint, etc. — 10. Rapports du Proviseur, du Censeur et des Insp. génér. de 1845 à 1850, A. nat. Fi"» 78487, n°* 49, 52, 54 ; et 78483, n** 2, 4, 131. LE PERSONNEL ADMINISTRATEURS 23 plètement que M. Le Fèvre l. Celui de tous les fonctionnaires de Louis-le-Grand qui remplit le mieux ses fonctions, proclamait M. Rinn, en 18i7, c'est M. Hervau » 2. Et, d'un autre Surveillant général, M. Du- praleau, le Censeur pouvait rendre un témoignage presque aussi flat- teur 3. Dans toutes les crises et mutineries que connût Louis-le- Grand, le courage, la fermeté et l'adresse de ses Surveillants généraux assurèrent, pour une large part, le salut de la maison 4. Quant à l'avenir ménagé à leurs services, ce fut souvent une re- traite5 que les limites de leurs forces pouvaient relarder fort longtemps8 un seul, parmi eux, mourut en fonctions7 ; un autre devint principal de collège 8 ; 8 devinrent censeurs en province ou à Paris 9 ; 2 'furent nommés proviseurs10 et un autre, Inspecteur de l'Académie de Paris u; un seul devint docteur en médecine12 ; un devint professeur de collège 12bis; 2, devinrent professeurs de lycée 18 et l'un de ces deux maîtres fut nommé professeur à la Sorbonne14. Faut-il ajouter qu'auprès de l'Administration les fonctions de secré- taires du cabinet pouvaient prendre, à l'occasion, une importance assez notable? C'était un peu la fonction qui faisait l'bomme ; c'était, avant tout, l'homme qui faisait la fonction. M. Gabé avait été secrétaire du Lycée en 1808-9; M. Malleval avait été secrétaire de M. Champagne, avant de devenir, au provisorat de Louis-le-Grand, son troisième suc- cesseur. Et, de nos jours, est un de ceux qui connaissent le mieux le lycée d'aujourd'hui, comme le lycée d'autrefois. 1. ,21 mars 1840, A. Nat. F^ 78487, n° 25.— 2. A. Nat. ibid., n° 57. — 3. En 1845 6, ièid, n° 54. — 4. MM. Kmond, Thomassin, Lemoine, Charpentier, Langlois, Le Fèvre, etc. — 5. MM. Le Fèvre, Langlois, Desforges, Guiot, etc. — 6. M. Le Fèvre, jusqu'à 70 ans passés. Supra, p. 20, n. 5. — 7. M. Aribaut, en 1907. — 8. M. Thomassin, à Cosne puis à Nevers.— 9. MM. Emond, Thomassin, Genouille, Hervau, Molliard, Nérot, Dreuilhe, Humbert. — 10. MM. Delarue et Lemoine. — 11. M. Charpentier. — 12. M Hivonnait. — 12bi\ M. Servau. — 13. MM. Canet et Charpentier. — 14. M. Charpentier. —15. Secrétaire auxi- liaire 26 nov. 1882 ; titulaire, depuis le 1 mai 1884 ; cf. infra, Appendice C, 145. CHAPITRE II Les Professeurs Autour des Administrateurs, était groupé le corps professoral du Lycée. Le moment est venu de préciser le nombre des Professeurs, leurs catégories, leur recrutement, leur nomination, leur traitement, leur service, et toute leur carrière. Leur nombre varia beaucoup * du simple au double et au qua- druple 17, en 1800 ; 19, en 1806 ; 23, en 1817 ; — de 33 à 37, entre 1820 et 1827 ; de 45 à 50 entre 1*31 et 1847 ; il se cantonna aux envi- rons de 80, en 1850 d'abord, entre 1881 et 1891 ensuite. Le minimum, ce fut 12, en sept. 1803 2 ; le maximum, ce fut 84, en 1881 ; la moyenne, ce fut 50 ; et on l'atteignit ou à peu près en 1829 et 1830, de 1840 à 1843, en 1865 et de 1895 à 1902. Depuis 1903, le nombre des profes- seurs tend à se fixer autour de 60. La courbe générale de ces oscillations numériques eut, à trois re- prises, une allure ascensionnelle très nette de 1800 à 1850 ; de 1857 à 1881 ; et, quoiqu'à un moindre degré, depuis 1900, Ces bonds en hau- teur furent suivis de deux chutes notables, que la naissance des deux filiales de Louis-le-Grand, Vanves et Montaigne, explique de reste. La création de Vanves fit tomber le nombre des professeurs de 76 à 33 ; et la création de Montaigne l'abaissa de 80 à 44. Ces professeurs, qui variaient quant à leur nombre, variaient aussi quant à leurs catégories du débutant au professeur titulaire, il y avait une hiérarcbie de degrés, différente suivant les époques, mais dont les agrégés formaient les principaux échelons. A vrai dire, jusqu'en 1809-1810, il n'y eut guère, dans notre maison, que des professeurs titulaires, sauf deux maîtres3 chargés, entre l'an IX 1. V. le graphique, planche XXVIII, fig. 75. — 2. Arrêté consulaire du 29 f»r an XI [16 sept. 1803], Organisation du Lycée de Paris ; Tit. 2. Le nombre des professeurs est fixé provisoirement et pour cette année à 12. » Arch. L. le Gr., Reg. des Délibérât, an XII. — 3. MM. Girardot et Romagny ; Palmarès des 26 therm. an X et 30 therm. an XI. LE PERSONNEL 25 I cl l'an XI, de renseignement élémentaire des mathématiques. Aucun de ces professeurs adjoints, qui furent créés, le 7 brumaire an X1I1 30 oct. 1803 ', ne semble avoir alors enseigné rue Saint-Jacques. Etait-ce parce que le proviseur, Champagne, avait signalé au ministre le danger de cett^ institution nouvelle? Champagne craignait que le professeur titulaire ne résistât pas toujours à la tentation de se faire remplacer par son adjoint et qu'il désertât sa chaire impunément2? Le proviseur demandait donc, avec le Bureau d'administration des lycées, que la suppléance des professeurs titulaires fût assurée d'autre façon8. Aussi bien, en 1800, cette suppléance était un peu arbitraire- ment confiée à un citoyen instruit4 ». Et, des février 1804, Cham- pagne réclamait un corps d'agrégés, parmi lesquels seraient choisis les agrégés adjoints aux professeurs titulaires 3. Ce corps d'agrégés, projeté le 10 mai 1806, fut créé le 17 mars 1808 ; en janvier 1810, le titre de professeur supplémen'aire fut changé contre celui d'agrégé-professeur 7 ; et, dès 1810-"l81i, les agrégés-professeurs parurent au Lycée Impé- rial8. Il y en eut 3 d'abord, et pas davantage9, ce qui était conforme au statut du 24 août 1810, un pour les classes de lettres, "un pour les classes de grammaire, un pour les sciences10. Mais le lycée impérial ne pouvait guère rester longtemps assimilé, sur ce point notamment, aux autres lycées et, dès 1811-2, le nombre des agrégés augmenta i' y en avait 8, celte année-là ; 9, l'année suivante; 7 ou 8, depuis 1819-20; il, en 1825; 15, en 1832-33; 16, en 1834-5, etc. ". L'agrégalion, renouvelée de l'ancienne Université, aurait dû en prin- cipe et comme jadis, n'èlre donnée qu'au concours. En réalité, de 1810 à 1821, un matlre attaché au Lycée Impérial ou à Louis-le-Grand pouvait recevoir son agrégation de l'autorité centrale, sur une simple demande du proviseur, qui faisait valoir des conditions d'âge, de ser- vices, de caractère12. Il y avait des agrégés de Rhétorique, de seconde, de 3e, de 4e, de 5e, de 6e, de mathématiques13. Les promotions, sur lesquelles la Commission de l'Instruction publique avait à se prononcer, élevaient à la Rhétorique un agrégé de seconde ; à la seconde, un agrégé de 3e, olc. li. Le concours fut rétabli le 6 lévrier 1821 15 ; et il n'y eut d'abovd que 3 agrégations, lettres, grammaire, sciences ; puis, le 22 juillet 1825, 1-3. Observations présentées au Ministre de l'Intérieur, Le 13 pluviôse an XIII [3 féy. 1804]; A. Nat. FHb 3104, n° 1S. — 4. Règlement du Prytanée, 9 sept. 1800, art. 37. — 5. Observât, cit. du 13 pluv. an XIII. — 6. Décret de ce jour, Tit. XIV, § II, art. 119-122. — 7. A. Nat. F1" 3114, n° 12. - 8. Palmarès du 14 août 1811. — 9. 12. ibid. — 10. Iulian, Tableau hùtor. p. 133. — 11. Pal- marès et Arch. L. le Gr. - 12. 29 août et 1" sept. 1817, A. Nat. F» 3149, n°' 30 et 33. En 1819, il>. n°* 52 et 80 ; en 1820, A. Nat. F" 3150, D 7, 8, 9. — 13. A. Nat. F1' 3149, n° 29; 30 oct. 1817. — 14. Ib. — 15. Statut de ce jour. 26 L OBGAMSATION MODERNE un concours fut établi pour l'agrégation de philosophie; en 1831, pour l'agrégation d'histoire ; le 11 octohre 1848, pourles langues vivantes. Ces spécialisations paraissant dangereuses, le décret du 10 avril 1852, sup- prima toutes les agrégations, sauf deux celle des lettres et celle des sciences. Mais, cinq ans plus tard, la résurrection des agrégations abolies commença par l'agrégation de grammaire, en 1857 ; elle se continua, en 1858, par la double agrégation des sciences; en 1860, par l'agréga- tion d'histoir? ; en 1863, par l'agrégation de philosophie el, en 1864, par l'agrégation des langues vivantes. D'autres agrégations furent ins- tiluées; celle de l'enseignement spécial, en 1866, el celle des sciences naturelles, en 1881. Les agrégés attachés à Louis le-Gran 1 avaient généralement une trentaine d'années1; beaucoup étaient docteurs2. 11 leur arrivait de rester simples agrégés plus de dix ans3 ; parfois même plus de vingt ans4. llsétaienl agrégés supjdéantsouagrégésdivisionnairesiconimeagrégés suppléants, ils pouvaient, pendant quelques jours, quelques semaines ou quelques mois, être appelés à remplacer un professeur titulaire, malade, absent ou en congé; comme agrégés divisionnaires, ils étaient chargés, pendant une ou plusieurs années, d'une section de classe, quand la classe, trop nombreuse, avait été partagée en deux ou en trois sec- tions^. Mais, que le nombre des élèves vint à décroître, une section ou deux pouvait être supprimée; l'agrégé divisionnaire redevenait alors simple agrégé suppléant. El il lui arrivait de passer une année entière ou da- vantage, sans avoir à suppléer personne 6. On voil, soit pour l'administration universiîaire, soit pour l'agrégé, les avantages et les inconvénients de cet to institution. Le stage imposé à l'agrégé- permettait de l'éprouver plus ou moins longtemps et de ne le titulariser professeur que si ses aptitudes pédagogiques étaient cer- taines el bien constatées. L'agrégé, quant à lui, trouvait habituelle- ment profit à ne pas quitter Louis- le-Grand et à franchir, sans sortir de la capitale, tous ou presque tous les stades de sa carrière. Mais, d'autre part, son ancienneté à Louis-le-Grand finissait par donner des droits 1. En juin 1825, A. Nat. F17h 78465, pièce n» 2 ; en 1826, ib. n°23; en 1828, ib. n° 31 ; etc. — 2. Ib. n° 41 juill. 1829; FHh 78486, n* 6, 7 et 20, 22 1830-6; 78485, nos 86, 88 1831-1833; FHe 78487, n° 24; 30 mars 1840. — 3. Appen- dices, Professeurs, passim. — 4. M. Roberge, le 22 sept. 1835, est agrégé depuis plus de 24 ans et n'est pas encore professeur titulaire, A. Nat. F17h n° 19. — 5. 29 août 1817, rapport du proviseur Taillefer, A. Nat. F» 3149, n 17, 33; 18 dec. 1818, id. ib. n° 42; 14 mai 1830, note de l'administration, FHh 78486. Lettre de Guizot, au sujet de M. Guillard, agrégé à L. le Gr., Arch. L. le Gr. Gorr. admin. V, n° 2741. — Cf. pour 1835. Jules Simon, Première! années, p. 254. — 6. Rapports annuels du Proviseur. Ainsi, en 1830-1, M. Pierrot dit de M. Dhéqne, agrégé suppléant » ne remplace jamais. » A. Nat. F17h 78486, n°7; et, en 1832-3, ne supplée jamais i ; ib. 78485, n° 88. LE PERSONNEL PBOFESSEOBS 2 7 à toat agrégé, fût-il médiocre, et le proviseur ne réussissait pas toujours à l'éloigner l. iïufin comment nier que L'instabilité précaire des fonctions d'agrégé ne fussent, pour elles, une marque' notable d'infériorité ? L'agrégé avait un labeur égal à celui du pro ts sur, pour un profit très inégal '2 et, quand cette situation se prolongeait, il en éprouvait plus d'un dommage ; d'autant mieux que tel agrégé pouvait réu-sir h mer- veille, auprès d'un professeur qui n'avait plus aucun succès3. Louis-le- Grand eut, plus d'une fois, à pitir, quand certains agrégés étaient trop provisoires et certains professeur» trop durables *. Au total, le stage en province, devenu pratiquement la règle, dès les dernières années du Gouvernement de Juillet, nous semble avoir été plus profitable à que le système des agrégés-professeurs. L'agrégation donnée au concours n'en demeura pas moins, depuis le lerjanvier 1822, le titre indispensable de oui professeur titulaire5. 11 ne suffisait pas d'être agrégé pour devenir professeur, mais il était im- possible, désormais, de devenir pro'osseur sans avoir été reçu agrégé. Et cet espoir d'une titularisation, plus ou moins proebe, c'était ce qui soutenait le courage de fout agrégé. Au-dessous du professeur titulaire et, plus ou moins voisin de î'agrégé, il y avait I e professeur suppléant, le professeur provisoire, îe professeur adjoint", le professeur divisionnaire ; il y avait le chargé de cour-ï ; il y avait encore le professeur délégué. Le professeur suppléant était quelque peu le doublet de l'agrégé suppléant, ou plutôt l'agrégé suppléant fut comme le double! du pro- fesseur suppliant. Car, dans notre maison, les professeurs suppléants ont précédé les agrégés suppléants et leur ont survécu il y en eut avant 1810 B et il y en avait encore cent ans plus tard. Quelques- uns d'entre eux ont laissé, à Louis-le Grand ou au dehors, un grand renom Ainsi MM. Malleval, Tisserand, Darboux, Baillaud, Waddington, Janet, Levy-Bruhl, Gaillardin, Rosseeuw-Saint-IIilaire, Georges Perrot, Deltour 7. 1. Ainsi, pour M. Guillard, agrégé de mathénia'.iques, Appendice C, 59. — 2. Observât, du proviseur Taillefer [début de juin 1815], A. Nat. F3176; et, en 1833, M. Roger, agrégé de 3»; A. Nat. PHa 78486, n° 17. — 5. Il e?t inutile de rappeler qu'il en est loueurs ainsi. Aucune exception, pas même en 1825, pour un ancien chef d'Institution, oratorien et professeur depuis 26 années, A. Nat. Fia. 3104, n» 254 — 6. Amar. 1809, Appendice C, 334 — 7. V. Appendice C, 50 et suiv. — Math. MM. Desuilleux, IR102; Nicollet, 1810-5; Bordière, 1812-5; Guillard, fila, 1817-9; Tisserand, 1832-3 Lecaplain, 1848-50; Frontera, 1854-55; Salrignac, 1855-9; André, 186d; F. F. Tisserand, 1866; Delamain, 1862 3; Darboux, 1867-8; Baillaud, 1874; Roche, 1887-8?; Hors- 2 8 l'organisation moderne Le professeur provisoire pouvait bien, en dépit de son titre, faire à Louis-Ie-Grand un séjour qui dépassât quelques mois et atteignît plu- sieursannées l'un d'eux y demeura provisoirement », dix ans 1. C'est surtout de 1835 à 1850, qu'il y eut des professeurs provisoires2. Le stage qui leur était imposé avant la titularisation ne tenait pas d'ordiAair u à l'insuffisance de leurs litres mais à la nécessité d'attendre la vacance d'une chaire. On devine bien que la liste des professeurs provisoires s'étendrait beaucoup, si on la complétait en lui ajoutant celle de tous les professeurs momentanément ôtés à leur chaire et transférés à une chaire voisine ou supérieure, pour répondre à leurs vœux personnels ou aux besoins du service. Le titre de professeur adjoint fut surtout, en faveur vers le milieu du dernier siècle s, avant de refleurir depuis 1905, en faveur de certains maîtres repétsVurs 4. Plus encore que le litre de professeur provisoire, il était un acheminement vers la titularisation définitive. Uue variété du professorat adjoint parut, de 1841 à 1860, pour l'histoire d'abord, pour la physique ensuite. Un distinguait alors, officiellement, le 2e, le 3° professeur, par opposition au premier ; c'était dire qu'il ne devait y avoir, en principe, qu'une seule chaire et que les autres étaient comme ses filia'es M. Uosseeuw-Saint-Hilaire fut second et M. Geiïroy fut troisième professeur d'histoire ; M. Prival-Deschanel fut second pro- fesseur de Physique 5. Le titre de professeur divisionnaire, il n'y a plus de professeurs di- visionnaires depuis le décret du 6 juillet 1887, avait le mérite de sou- ligner moins rudement certaines préséances ; mais il laissait voir les démembrements successifs de la chaire principale. Les sciences mathé- matiques 6, physiques7 et naturelles8 eurent leurs professeurs division- naires, tout comme la philosophie °, l'histoire l°, les lettres ",1a gram- maire12 et les langues vivantes 13le premier caractère de cette catégorie de professeurs ce fut d'avoir été généralisée; le secondée fut d'avoir duré trois quarts de siècle. Nous la voyons apparaître en 1820, se systé- matiser en 1845, et disparaître en 1892 ; naturellement elle avait ses non, 1909-10; etc. En outre, 11 en Philo.; 12 en Hist.; 7 en Se. Ph. ou nat. ; 14 en Rhéto. ; 9 en 2 ; 5 en 3' ; 2 en 4e ; 4 en Lang. Viv. — 1. M. Marquis, prof. d'Angl. 1840-1850; Append. C, 594. — 2. Outre M. Marquis, en Phys. M Mas- son; en Math. M. Guibert ; en Rhéto. P. A. Lemaire. — 3. En Math. 4, de 1853 à 1867 ; 1, en Se. Ph. et nat. 1853-67 ; 5, en Hist., de 1845 à 1867 3, en Rhéto., de 1854 à 1869; 3, en 2, 1824-62; 2, en 3, 1855-60; 1, en 4e, 1853-58. — 4. MM. Guiot, 1905-7; Claustre, depuis 1905 Poullain, 1906-7; math., etc. — 5. Hist., 2es Prof. MM. Rosseeuw S. Hilaire,1845; Barberet, 1845-8; Lacroix 1841-50; 3s Prof. MM Peyrot, 1845-47; Gaffroy, 1847 52. — Phys., 2° Prof. M. Privat-Deschanel, 1853-60. — 6. 12, de 1844 à 1885. — 7. 6, de 1868 à 1892.— 8. 1, de 18S1 à 9. 3, de 1847 à 1888.— 10. 6,de 1862 à 1888 — 11. Rhêto. 11, de 1847 à 1879; — Seconde 9, de 1S20 à 1868; Troisième 10, de 1845 à 1886. - 12. Quatrième 9, de 1827 à 1886; Cinquième 8, de 1845 à 1360; — Sixième, 5, de 1845 à 1860. — 13. 11 de 18G7 à 1890. LE PERSONNEL PROFESSEURS 29 degrés hiérarchiques ou ses classes 1 ». Loiàs-le-Grand eut, ai; total, un peu moins de cent professrurs divisionnaires, entre lesquels les plus connus furent, MM. Vieille, Darboux, Niewenglovvski, pour les mathé- matiques ; Mangin, pour l'histoire naturelle ; Jacques et Burdéau, pour la pliilosophie ; Pigeonneau pour l'Histoire ; Despois, J. Girard, Paul-Albert, Georges Perrot, Alfred Croiset pour la Rhétorique, et Bréal, pour 1 pour la o t 9 Les professeurs divisionnaires s'élevaient presque tous au titulariat ; il n'en était pas nécessairement de même, sauf exception, pour les chargés de cours et surtout pour les délégués. Les chargés de cours, aujourd'hui, sont, pour les Lycées de Paris et de Versailles, des profes- seurs pourvus de la Licence ou d'un certificat il sont donc devenus très rares à Louis-le-Grand 3. Mais depuis 1820, où ils y apparaissent, ils ont été très nombreux. Aussi bien on les appelait, presqu'indiiïérem- ment, chargés de division, de classe ou de cours ; on donnait l'un de ces trois titres a des agrégés, voire à des docteurs ; et ces titres, avant comme après la création du professorat divisionnaire ou du professorat adjoint, pouvaient conduire à la titularisation ; enfin ces titres étaient parfois donnés à un professeur, quand on l'appelait de la chaire dont il était titulaire à un enseignement plus élevé, ainsi de la seconde à la Rhétorique ou des mathématiques élémentaires aux mathématiques spéciales. Du reste, il pouvait arriver, sous le ministère de M. de Sal- vandy par exemple, 1er fév. 18io-23 fév. 1848 que les professeurs divisionnaires fussent prématurément appelés à jouir de toutes les pré- rogatives des professeurs titulaires 3bit. » L'égalité officielle, en!re divi- sionnaires et titulaires, n'eu devait pas moins être relardée jusqu'en 1887. 11 y eut une centaine de chargés de cours à Louis-le-Grand, dont plus du tiers dans les seules sciences mathématiques '*. C'est ailleurs, cependant, qu'il faut chercher les plus notables ainsi MM. Manchard, dans l'histoire naturelle ; Garnier et Barni, dans la Philosophie ; Gaillardin et Lemonnier, dans l'histoire ; Pierrot, Despois, Emile Deschan^l, Aubert-Hix, en Rhétorique ; Louis Quicherat, dans les classes de Grammaire ; Beljame pour l'anglais et Benj. Lévy, pour l'allemand 5. 1. 2 classes décrets du 26 d^c. 1867; 4 août 1869; 25 sept. 1872; 8 janv. 1877. — 2. Appendice C, 7 2, 100, etc. — 3. Depuis 1900, trois seulement MM. Vos- gienraath; Brocard Se. natur. ; Bouilhac Se. pliysiq.. — 3b'% Ce dont se plaignait, le 14 oct. 1850, dans une lettre au Proviseur de L. le-Gr , M. Jules Vieille, professeur titulaire de Phil. audit Lycée. A. Nat. PlTa 78 48*, n° 105. — 4 Math. 31, depuis 1820. — Se. Phys , 7, depuis 1837; Se. natur., 4, depuis 1827. — Philo, 7, depuis 1821. — h'ist., 7, depuis 1828. — lihêto, 7, depuis 1825. — Seconde, 8, depuis 1*20. — Troisième, 4, depuis 1820 — Qua- trième, 5, depuis 1821. — Cinquième, 6, depuis 1828. — Sixième, 3, depuis 1840. — 5. Appendice C, 234, 235, etc. 30 t ORGANISATION MODERNE Los professeurs délégués se montrèrent à Louis-le-Grand dès 1851 ; mais il ne se multiplièrent vraiment que depuis 1872 et nulle part plus que dans les langues vivantes et les sciences physiques1. On en pourrait compter plus de soixante dix. C'étaient presque toujours, en temps nor- mal, des professeurs n'ayant pas encore tous leurs grades ou les ayant depuis peu de temps. Au cours de la guerre de 1914-1918, quelques professeurs délégués furent prêtés à Louis-le-Grand par les lycées pari- siens2 ou môme par renseignement supérieur 3. Jadis MM. Ferd. Brune- lière et Alfr. Croiset, en Rhétorique et M. Dastre, pour l'histoire natu- relle, furent, à leurs débuts, de simples professeurs délégués '\ En somme et en dépit de leurs différences, agrégés-professeurs, pro- fesseurs suppléants, professeurs provisoires, adjoints et divisionnaires, chargés de cours et délégués, tous avaient cette ressemblante commune tendre, par des chemins plus ou moins directs, à un même idéal deve- nir professeurs titulaires. Entre professeurs, la répartition des élèves, au moins sous le provi- sorat de M. Pierrot, se faisait automatiquement à Louis-le-Grand, les élèves du titulaire passaient, au renouvellement de l'année scolaire, sous le titulaire de !a classe supérieure; les élèves de l'agrégé, sous Paulre agrégé + bis. » Plus tard, cette règle avait dû fléchir les profes- seurs titulaires accaparaient volontiers les meilleurs élèves. Et cela explique une boutade de M. Merlet, en oct. 1837. 11 n'était encore que divisionnaire en Rhétorique, tandis que M. Aubert-Hix, aussi connu pour la corpulence de sa taille que par la finesse de son esprit, était titu- laire. A la première classe après la rentrée, M. Merlet fit l'.ippel des noms, compulsa des dossiers et, constatant que les vétérans et quelques nouveaux fort distingués lui avaient été refusés, il parcourut la classe d'un regard circulaire. Finalement sa mauvaise humeur éclata et, faisant allusion à son imposant titulaire, il. ne put s'empêcher dédire Allons! cette grosse machine pneumatique a fait le vide dans ma classe 4 ' r. » Le recrutement des professeurs titulaires à Louis-le-Grand ne risquait donc guère de connaître cette disette de candidats, dont l'Université avait souffert, aux premières années du xix8 siècle B. La qualité d'ancien élève de la maison, qui avait semblé jadis une recommandation sérieuse6, était 1. Math., 10, depuis 1875.— Se. Physiq , 14, depuis 1874. — Sciences natur., 1, 1874-9. — Philo, 5, depuis 1875. — Hist., 6, depuis 1880. — depuis 185i. — Seconde, 1, 1862-68. — Troisième, 3, depuis 1867, — Quatrième, 1, 1883-84.— Langues vivantes, 2, de Michelet; 1, de Cbarlemagne ; 2, prof. Lonor. de L. le Gr. — 3. M. Jouguet, de la Fac. des Lettres de Lille, par ex.— 4. Appkndics C, 231. — 4bis. Arch. L. le Gr , Corr. Coll., III, n° 3230; lettre du Proviseur au Ministre, 13 janv. 1835. — 4ter Communication de M. Théoph. Homolle, aujourd'hui membre de l'Institut et alors élève de M. Merlet V, notre Planche XX, fig. disait Luce de L., ib. LE PERSONNEL '. PROFESSEURS 31 devenue, presque toujours, une circonstance négligeable 1 l'âge auquel on choisissait les professeurs avait permis d'oublier ces souvenirs un peu lointains. 7b' 0/0 furent nommés titulaires entre 31 et 47 ans ; 12 >/ 0, de 26 à 33 ans ; 12 0 0 de 48 à 57 ans. El ne croyons pas que ces nominations faisaient jadis, plus hâtivement qu'aujourd'hui, appel à la jeunesse sur 17 professeurs titularisés entre 26 et 33 ans, l'un le fut en 1824 - ; un second en 1826 3 ; un troisième en t8o8 '* ; un quatrième eu 1874 *•; les 13 autres le furent de 1881 à 1904 6. Est-on curieux de savoir la proportion, pour les lettres et les sciences, des professeurs titularisés au-de-sous de 40 ans ? Moins d'un tiers appar- tenait aux sciences, mathématiques, physiques ou naturelles; plus des deux tiers appartenaient aux lettres, à la grammaire, à la philosophie, à l'histoire, aux langues vivantes7. Entre l'agrégation et la titularisation, combien d'années s'écoulaient ? Cela était, on le pense bien, a-sez variable. L'exception, c'étaient les professeurs titularisés à Louis-le-Grand, soit avant 9 ans8, soit après 19 ans d'agrégation9; 66 0/0 étaient titularisés de 9 à 18 ans après l'agrégation. Durant les dix premières années du Gouvernement de Juillet, la moitié des professeurs titulaires étaient docteurs1" ; mais cette propor- tion diminua, dans la mesure où furent accrues les difficultés du docto- ral ; car une thèse tendait peu à peu à être autre chose qu'une ingénieuse 1. MM. Vian! Physiq., et Radier Rhétor, etc., ont été &lève9 de L. le Gc — 2. M. J. P. Charpentier, prof, de Lettres, à 27 ans; Append C, 437. — 3. M. A?0!i, prof, de 6e, à 31 ans, le 13 août 1826. — 4 M. Chambon, prof, de 4e, à 33 ans, Append. C, 537. — 5. M. Th. V. Charpentier, prof, de philo, à 33 ans; App. C, 246. — 6. En 1881, M. Mangin, prof, d'hist nat., à 29 ans; en 1888, M. Humbert, pr. de raath., à 30 ans; en 1889, M. Bergson, pr. philo., à 30 ans ; en 1891, M. Charvet, pr. math., à 32 ans; en 1833, M Ch. H. Boudhors, pr. Lettres, à 31 ans; en 1893, M. Mile, pr. Lettres, à 31 ans en 1894, M. Abra- ham, pr. Physiq., à 26 ans ; en 1895, MM. Berr, pr. lett., 32 ans; Delbos, pr. philo, à 33 ans; Riemann, pr. math., 32 ans; en 1897, M. Ferval, pr math., à 33 ans; en 1904. MM. Dufour, prof, physiq., à 29 ans tt Godart, pr. Allemand, 33 ans. — 7 Sur 67 profess., 19 pour les sciences math. 11; pbys. 7; hist. nal. 1; 48, pour les lettres 27, 3», 2», Rhéto. ; 5, pour les classes de grammaire ; 6, pour la philos , 6 pour les Lang. viv., 4 pour l'hist. — 8. Après 2 ans seulement, M. Lorain, rhélo , 1830 après -1 ans, MM. Ouyot. -, 1824; et Charpentier J. P., 1824}, gram.; Didier, plus., 1881 ; après 5 an*, MM Monod, gram 6, 1887; Abraham, pbys , 1894; Dufour, pbys., 1904 après 0 ans, MM. Agon, 6", 1826 et Tandon Desforges, Lett. 1828; après 7 ans, MM. Davadant, Gramm , 1881; M. Lnd. Durand, , 1881 ; Dater, 1881; Bergson, philo., 1888; Mar. Pierre Félix Janet, philo., f889; aprèt - MM. ! G 'tilin, math , 1892. — 9. Après 19 ans, 5; 2» ans, 2 22 an*, 2 23 ans, 5; 27 ans, 2 28 ans, 2; 31 ans, 1 M. Hargnet, math., - 1 . En 1829, 8 docteurs Btir 15 prof. ; en 1 ^2, 9 sur 14 en 14; en 1834, 7 sur 17; en 1835, 8 sur i, 8 sur 13; etc. A. Nat. Fl~'- 78485, no» 41, 86, 8S Fi'v 78486, nos 7, 8, 9, 2 32 L ORGANISATION MODERNE dissertation ; elle devenait une œuvre originale, fruit de longues années de recherches et de réflexions. Aujourd'hui les docteurs sont presque des exceptions à Louis le-Grand l. Leurs thèses n'en ont pas moins permis à quelques-uns d'être titularisés plus tôt. Le vrai chemin vers la titularisation ce fut presque toujours deux stages professoraux, l'un en province, l'autre à Paris. Le stage provin- cial était, dès 1819, en passe de devenir obligatoire, au moins en prin- cipe2. La durée de ces stages variait, on le comprend de reste, suivant les époques, la qualité de la chaire et celle des sujets. La durée moyenne des deux stages additionnés était de 12 à lo ans ; exceptionnellement elle était intérieure à 7 ans ou supérieure à 20 ans. Avant 1870, c'est le stage en province qui était parfois supprimé ou très abrégé3 ; mais le stage à Paris était alors assez long*. Depuis 1870, le stage dans renseignement secondaire de province était devenu, en fait et à très peu d'exceptions près5, obligatoire ; mais il semblait beaucoup plus lent que jadis ; du moins, le stage à Paris était-il très abrégé, voire supprimé au besoin, d'un grand lycée de province, on passait d'emblée à Louis-le Grand 6. Le nombre des chaires a beaucoup varié, depuis 1 800 7 ; les plus nom- breuses et celles qui ont eu le plus de titulaires, ce sont les plus anciennes lettres, grammaire, mathématiques; les professeurs spécialistes phy- siciens, philosophes, historiens, linguistes risquaient donc d'attendre davantage la titularisation. Il faudrait pouvoir tenir compte de ces iné- galités, si l'on voulait comparer les chaires entre elles et savoir celles qui permettaient l'avancement le plus rapide. Bornons-nous à dire que, sur 37 proresseurs titularisés avant 11 ans d'enseignement, 10 étaient humanistes8 ; 8, mathématiciens9; 5, linguistes10; 4, grammairiens ; 5, physiciens11 ; 3, philosophes 12 ; 2, historiens13. Sur iOl professeurs titularisés, avant leur 19" année d'enseignement 36 étaient huma- nistes; 15, mathématiciens; 12, historiens; 11, linguistes; 10, gram- mairiens ; 10, philosophes; 10, physiciens. 1. En août 1914, sur 65 prot. 13 docteurs seulement; 12 en 1919 20 MM. André, Berret, Bouilhac, Bourgin, Brocard, Canat, Dautremer, Dufour AL, Lauvrière, Malapert, Pt'choulre, Riemann. — 2 Le 3 oct. 1819, M Guil- lard, père, prof, de Math, à L. le Gr., constate, au sujet de son fils, agrégé à L. le Gr., que pour obtenir de l'avancement à Pari?, il fallait, au préa- lable, travailler en province. A. Nat. F" 3149, n° 75. — Cf. 8 nov. 1819, ib. n° 87. — 3. 5 prof, ont été titularisés à L. le Gr., sans aucun stage en pro- vince 1, en 1810; 1, en 1824; 1, en 1826; \, en 1847; 1, en 1854. — 4. Une dizaine d'années, assez souvent; 18 ans 1830-1848, pour M, Gaillardin.— 5. Ont été titularisés sans stage en province ; MM. Lemonnier hist. 1880 ; Abraham phys. 1894 ; Henri Durand lre, 1906. — 6. 21 cas. — 7. V. supra, p. 24. — 8. Notamment, MM. J. L. Burnouf, J. P. Charpentier, Uestainville, Hatzfeld, Mâle, Pttul Gautier. — 9. Entre autres, MM. Riemann, Ce!?, Leconte, Serrier. — 10. Ainsi, MM. Paoli, Godart. — 11. Par ex. MM. Luc. Poincaré, Abraham> Colin, Dufour.— 12. MM. Lévy-Bnihl, Bergson, entre autre?. — 13. MM. Darsy et A. Malet. LE PERS0>NEL PROFESSEURS 33 Mais ce qui échappe à tout pourcentage c'est la valeur comparative des maîtres; leur âge, leur mérite, leurs services de tous ordres, leur sa- voir ou même leur savoir faire ont pu hâter leur avancement. Conten- ions nous de souligner, parmi les professeurs titularisés le plus vite, certains noms comme ceux de MM. Burnouf, Hatzfeld, Mâle, en rhéto- rique ; Levy-Brùhl et Bergson, en philosophie ; Lucien Poincaré et Abraham, en physique. La titularisation pouvait d'ailleurs, récompenser soit les services rendus dans l'administration universitaire par d'anciens chefs d'insti- tution1, d'anciens censeurs2, d'anciens proviseurs3, d'anciens inspec- teurs d'académie4 ; soit les services rendus dans l'enseignement supé- rieur6. Une vingtaine de professeurs passèrent, comme titulaires ou non, dans une chaire de Louis-le-Grand, après avoir enseigné dans une Faculté de Province 8, ou, à Paris, à l'Ecole des Hautes Etudes7, à l'Ecole Normale 8, à la Sorbonne9, au Collège de France10. Le Proviseur faisait des propositions à l'administration supérieure, qui avait toute liberté pour en tenir compte ou non 10 arrivait aussi — tout arrive — que les recommandations politiques jouassent là un bout de rôle 10 ur. Ainsi recrutés, les professeurs étaient nommés, comme les proviseurs ou les censeurs, exceptionnellement par arrêté consulaire, habituelle- ment par arrêté ministériel ".Nous savons que la Commission royale de l'Instruction publique, sous la Restauration et le Gouvernement de Juillet, et la Direction de l'Enseignement secondaire, depuis le second Empire, décidait, en réalité, des nominations. Du moins, M. Victor Duruy eut il le souci de les garantir contre l'arbitraire. 1. M. iïuinet, en 1817; en 5e.— 2 censeur de juin à à Ver- sailles.— 3. M. Dejean delà Bâtie,1897.— 4. M. de Salve,1851.— 5. MM Valette philo., 1837; Rinn, 1837 ; Cheruel, 1853 Bouquet, 1858; Hatzfeld, 1861; Charles,1853 Bergson, 1888; Abraham, 1894 ; Dautreraer,1901 ; —6. Fac. de Lyon, MM Bourguet math., de 1845-52; Alb. Mar. Leconte lett., 1882-85; — Fac. de Lille Lett.. M. Dautremer, j. en 1901; — Fac Toulouse lett., M Bompard, 1884; — Fac. lett. Aix, M. Bompard, 1835. — Fac. Rennes, M. Hervé de la Provostaye, 1840 sciences phys.. — Fac. Poitiers, MM L. E. Gonstans, j. en 1881 lett. ; Hatzfeld. 1853 lett. ; — Fac. Grenoble, M Hatzfeld, 1856; — Fac Strasbourg, M. Janet, 1852 philo. — Fac. Clermont, MM. Paul Albert, 1858 lett.; Bergson, 1884 philo. — 7 M. Abraham, phys., j en 1894. — 8. MM. Pierrot, 1812; Rinn, 1832; Cheruel, j. en 1853 — 9. MM Pierrot, 1819; Valette, philo., 1829-37; Rinn, 1836 7; Masson,i*40 2, phys.; Jules Simon, 1839.— 10. J B. P. Humbert, 1805 6, litt. grecq.— 10bi*. Supra, p. 10. Ex. pour 1820 et as. A. Nat. F" 3149, n»* 153J»1', 152 ; 3150, n°* 190, 60; en 1851, F17 78488, nos 150 et 160.— 10ter. Ainsi, M. Guyot, professeur de 6e et suppléant de 3e à L. le Gr., e faisait recommander par M. Binoît, membre de la Chambre des Dé- putés, 29 août 1821. A. Nat. F"» 3150. n» 110; et lettre du même Guyot au baron de Montbel, Ministre Secret. d'Etat à l'Instr. publ , le 17 août 1829, A. Nat. F^a 78485, n° 72. — 11. Supra, p. 8. — Le 29 fructidor .an XI, Dubos prof, d'hu- manités fut nommé par le Ier Consul. 3 34 L OKGANISATION MODERNE Une fois nommés, quelle situation matérielle les professeurs avaient- ils à Louis-le-Grand ? Depuis le décret du 17 févr. 1809, ils devaient en principe payer à l'Etat un diplôme d'emploi, de 80 à 120 francs, mais, sous la Restaura- tion, les professeurs de notre maison s'acquittaient mal de cette obli- gation. L'idée de loger les professeurs sous le même toit que leurs élèves peut bien, aujourd'hui, nous surprendre ; elle était toute naturelle, au len- demain du xviue siècle. Sous le Consulat et l'Empire, grouper les pro- fesseurs et les maîtres en une sorte de congrégation nouvelle, pouvait sembler à sa place et dans son cadre, entre les vieux murs de Louis-le- Grand et du Plessis. La congrégation serait laïque et le célibat y resterait en honneur. Sans doute, les ecclésiastiques, qui n'étaient pas les aumôniers, avaient presque totalement disparu1 ; les professeurs mariés devenaient peu à peu la majorité2. Au reste, le proviseur Laborie déplorait, en 1826, ces mœurs nouvelles 3. En principe, sous Charles X, tout projet de mariage, formé par un agrégé ou un professeur, devait être soumis à un juge- ment du Grand-Maître, qui accordait ou refusait son autorisation 4. En fait, que se passait-il ? C'est encore le proviseur qui nous l'avoue la plupart des jeunes gens arrivent à peine au litre d'agrégé-divisionnaire qu'ils se marient sans permission et, quelquefois, au mépris de toutes les convenances. De là viennent, — ajoutait-il en gémissant, — des dis- tractions, des besoins, des chagrins domestiques, qui nuisent à la con- sidération et aux éludes8. » Les premiers règlements du Prytanée défendaient qu'aucune femme habitât le collège6. Napoléon avait édicté le 17 mars 1808 Les pro- fesseurs des lycées pourront être mariés et, dans ce cas, ils logeront hors du lycée. Les professeurs célibataires pourront y loger et profiler de la vie commune 7. » Le statut du 4 sept. 1821 précisait encore Les 1. Luce de Lancival, mort en 1810, prof, de rhéto., avait reçu les ordres. Emond, Hist. Coll. L. le Gr., p. 402 — Lemarchand, mort. en 1820, prof, de se- conde, était ecclésiastique. — prof, de philosophie de 1809 à 1826, également. — V. Appendice G, 429, 240. — 2. En juin 1825, 20 fonct. mariés, 3 veufs, 3 prêtres ce sont les aumôniers et 44 célibataires, à L. le Gr., A. Nat. FHu 78485, pièce n° 2 ; en 1826, 14 prof, mariés et 17 célibataires ; ib. n 23. Le 19 juillet 1828, 10 professeurs mariés et 5 célibataires ; 7 agrégés mariés, et 10 céli- bataires ; ib. n° 31 , en 18301, 9 prof, mariés et 3 célibataires; en 1837-8, 12 prof, mariés et 9 célib. ; A. Nat. F 17" 78486, nos 7 et 41. — 3. Rapport du 1er juillet 1826; A. Nat. Fl7n 78485, n° 23. — 4. Id. Demande d'autorisation adressée par M. Camus et transmise par le Proviseur; 22 déc. 1827, Arch. L. le Gr., Corr. Coll. II, n 1308; 23 déc. 1827, A. Nat. F1?h 78485, n* 26 28; Réponse favo- rable, 2 janv. 1828; Arch. L. le Gr., Corr. Admin, II, n° 880. — 5. Rapport cité du 1er juin. 1826. — 6. Règlement du Prytanée, 16 juill. 1801, Tit. III, art. 7; — id. Décret du 17 mars 1808, Tit. XIII, art. 102 ûuvergier, Lois et Décrets, t. XVI, p. 271. - 7. Décret du 17 mars, Tit. XIII, art. 101; ibid. LE PROFESSEURS 35 professeurs et les agrégés célibataires ou veufs sans enfants sont, autant qu'il est possible, logés dans le collège1. » En 1838, il avait cependant fallu répéter que, parmi les professeurs, les célibataires seuls pouvaient être ainsi hospitalisés 2. En réalité et dès avant 1800, on avait adouci par des tempéraments la sévérité des principes les professeurs mariés pouvaient avoir leur domicile à Louis-le-Grand ou dans ses dépendances, et notamment au Plessis, pour peu qu'un appartement s'y trouvât libre3. Il y avait, en 1801, huit appartements de cet ordre4 et le 4 bâtiment des Profes- seurs» ne risquait guère de rester vacant. La place y était d'autant plus mesurée que la Facuilé des Lettres, une section de la Faculté de Droit, l'Ecole Normale y furent quelque temps installées5. Et puis on décida, en 1830, que les professeurs ayant enseigné plus de 20 ans au collège y conserveraient, leur retraite venue, le logement occupé par eux6. Ces appartements, qui n'étaient pas tous dépourvus de bains 6bis, semblaient réduits d'ordinaire à deux ou trois pièces, plus ou moins étroites, auxquelles l'ingéniosité la plus subtile ne parvenait pas toujours à joindre des locaux annexes 7. Quels que fussent ces logi*, on se les disputait il n'était pas jusqu'au professeur d'escrime qui, en 1801, ne se découvrit sur eux des droits". En 1825, presque tous les professeurs étaient logés au collège9; en 1834-5, un grand nombre l'avait quitté 9bis, mais cependant, en 1846, plus d'un y habitait encore 10. Sous la Troisième République, Al. Gaillardin déplorait de n'y être plus11. Les administrateurs du Prytanée, puis le Proviseur, sauf, depuis 1838, 1. § 4, art. 32. — 2. Arrêté du 17 avr. 1838, art. 2. Arch. L. le Gr. Corr. Admin., VI, n° 3720. — 3. Le 3 frim. an IX [24 nov. 1800], A. Nat. H! 2558, doss. 3; 24 nivôse an IX [14 janv. 1801]. ibid. ; 11 messidor an IX [30 juin 1801], ib. ; 3 ventôse an X [22 iév. 1802], ib. Le 6 vendém. an XII [29 sept. 1803J la fosse d'aisance déborde dans le bâtiment des professeurs, en raison des bains qu'y font vider les femmes des professeurs et de l'engorgement des tuyaux par les légumes et les trognons de choux.» A. Nat. H3 2558, doss. 7, n° 66.— En 1830-5 quelques professeurs même mariés sont logés au Coll. A. Nat. FIT* 7$486,n°7. — 4. Lettre [des administrateurs du Prytanée] au Minisire de l'Intérieur. A. Nat. H; 2558, Doss. 3.— 5. Lettre [du V. Recteur] à M. Rio, prof. 27 janv. 1823 ; A. Nat. FHh 3150,n 246. Cf. supra, Livre I,p. 21-22. —6. Arrêté du Conseil l'Inst. publ. 14 déc. 1830; Arch. L. le Gr., Corr. adm., V, 3001. Lettre du Ministère au Proviseur de L. le Gr., 28 déc. 1830, Arch. L. le Gr., Corr. adm., IV, iv» 1767. — 6his. Rapport de l'agent comptable à l'admin. du Prytanée, 6 vend, an XII [29 sept. 1803. A. Nat. II! 256U. — 7. 8 germin. an VIII [29 mars 1SOO, A. Nat. II 2558, Doss. vendém. an IX, logement compote de 3 pièces extrême- ment étroites. » A. Nat. H! 8553, doss. 3 ; ib. 3 frim. an IX. — 8. [Sept. 1801], A. Nat. H8 2553, doss. 7, n» 57. — 9. 25 août 1825, le fait est constaté par le Proviseur, A Nat FlTa 73485, n» 6>l ; id 1 juillet 1826 ; ib. n° 23. — 9>>i». Dix sur 14; A. Nat. Fl~» 78486, n»s 8 et 9.— 10. Ce qu* constate le Proviseur Rinn, dans un rapport; A. Nat. F'"" 78437, n» 68. — 11. Communication de M. Eug. Ledos, ancien élève de L, le Gr. 3 6 L ORGANISATION MODERNE approbation du Grand Maître, sur la proposition du R"cteur. décidaient de l'attribution de ces logements1. Les Inspecteurs Généraux avaient à vérifier, chaque année, l'état de ces logements, leur nombre, leur étendue et le titre auquel ils étaient occupés2. » C'était l'époque où les professeurs craignaient, par dessus tout, d'être trop éloignés de leurs élèves 3. Ni le confort ni l'indépendance n'étaient pour eux le principal souci; il leur suffisait que la gratuité du logement allégeât les charges de leur budget ; du reste, l'éclairage et le chauîTage restaient à leur charge4. Dans quelle mesure les frais d'alimentation pouvaient-ils leur être épargnés? Dans celle où ils étaient admis à la table commune. Après le départ des Pères Jésuites, les professeurs de Louis-le-Grand étaient nourris parle collège. Cette tradition, en 1831, était considérée comme abolie B et c'est à peine si l'on tenta, sous Louis-Phi!ippe, de l'exhumer 6. Mais, au début du xixe siècle, elle avait paru très vivace 7. Au reste, la table n'était pas accordée gratuitement aux professeurs; le paiement d'une somme annuelle leur était imposé, quand ils voulaient prendre leur repas en commua 400 francs par an, avant le 25 mars 1816 ; 550 francs eusuite 8. Parfois même ils obtenaient d'amener un invité ou de se faire servir chez eux. Une seule poriion leur était allouée ; la table commune ne convenait donc qu'aux seuls célibataires. Elle n'était pas moins l'occasion de quelques abus et, le 1er novembre 1831, elle fut supprimée9 ; elle fui rétablie facultativement pour les professeurs, en mai 1838 10. Chacun de ceux qui étaient admis à s'y asseoir payait 650 francs de pension annuelle; une salle particulière réunissait les professeurs et le plus élevé en grade présidait. Aucun étranger n'était admis et quiconque s'absentait n'avait droit à aucune indemnité u. Cette résurrection tardive d'une vieille coutume ne paraît pas cependant 1. Lettre au proviseur, 28 dVc. 1830; Arch. L. le Gr., Corr. adm., IV, n° 1767. Arrêté du 17 avr. 1838, ib. IV, n° 3720. — 2. Arrêté du 17 avr. 1838; Arch. L. le Gr., Corr. adm., VI. n° 3720. - 3. Lettre de Jumelin, prof, de phys. qui, dit-il, a besoin d'être logé dans le Prytanée, pour se trouver exactement aux heures où commence sa classe. * A Nat. H3 2558, doss. 3. — 4. Ni chauffage, ni éclairage » ; lettre de M. Rousselle au Proviseur. Arch. L. le Gr., Corr adm , IV, n° 2291; 1 oct. 1832. — 5. Au Coll. L. le Gr., écrit-on le 15 nov. 1831, il n'y a plus, depuis longtemps, de table commune. » Arch. L. le Gr., Corr. coll., II, n° 2313. — 6. En 1838; Arch. L. le Gr., Corr. adm., IV, n° 3716. — 7. Lettre des administrateurs au Ministre de l'Intérieur, laissant entendre que la nourriture et le logement accordés aux professeurs fout partie de leur traitement. A. Nat. H 25583, Do*s. Vil, n» 22. — 8. A, Nat. FI^h 3104, n° 130 ; circulaire de la Comm. de l*ln6tr. publ. — Le 1 sept. 1817, deux professeurs sont nourris à L. le Gr. moyennant un service supplémentaire. A. Nat. F11 3149 n° 30 — Le 4 oct 1817, les règlements inter- disent de donner aux professeurs la nourriture gratuite, ib. n° 21. Cf. 11 août 1829, Arch. L. le Gr., Corr. admin., III, n» 1377. — 9. Arrêté dn Conseil rojal de l'tnstr. publ. 11 oct. 1831 ; Arch. L le Gr , Corr. admin., IV, n* 2014. — 10-11. Arrêté du 17 avr. 1838; Arch. L le Gr , Corr. admin., VI, n» 3720. LE PERSONNEL PBOFESSBGRS 37 lui avoir rendu une vie bien durable. Mais, quand elle eut achevé de mourir, à Louis -le-Grand, un des traits les plus curieux de l'ancien collège se perdit avec elle. Une force nouvelle entraînait donc, et d'un élan de plus en plus fort, les professeurs de Louis -Ie-Graud à se loger et à se nourrrir en dehors de Louis-le-Grand. L'individualisme moderne fleurissait sur les ruines séculaires de la vie commune. Il fallait, tout au moins, que le traitement des professeurs s'élevât en proportion et pût s'adapter aux conditions de l'existence nouvelle, qui leur étaient faite. Or, si nous comparons les traitements Gxes en 1801 et en 1920, nous constatons que ces traitements sont aujouid'hui, en appa- rence, quadruples, au moins de ce qu ils étaient sous le Consulat ou au début de l'Empire ' le professeur titulaire le plus payé avait alors francs ; il a aujourd'hui ; les professeurs les moins rétri- bués avaient alors frs et frs et ils louchent aujourd'hui 1 0 francs. En réalité, francs valaient alors très probablement beaucoup plus que G. 000 aujourd'hui. Un traitement 6xe de et môme de da 'S notre monnaie actuelle serait donc inférieur à un traitement tixe de francs, en 1801 ou en 1804. Et cette infériorité s'accroîtra encore si l'on pense que le traitement fixe, sous Napoléon, sous la Restauration ou le Gouvernement de Juillet, était augmenté, sinon par la table commune, du moins par la gratuité du logement ; et surtout si l'on ajoute à ces avantages ceux que la pios- périté de la maison y pouvait joindre, selon des proportions variables chaque année mais calculées suivant des règles fixes. Une partie des bé- néfices annuels de Louis-le-Graud était attribuée aux professeurs, c'était ce qu'on nommait le boni2. Le proviseur, auquel en revenait su'', loul la gloire, en recevait le principal profit 3. Mais les professeurs qui, 1. Tableau des Traitements pour les profess. du Coll. de Paris 6 ont 3000 fr. ; 5 ont 2500 fr. ; t a 2000; 2 ont 1500; A Nat. H' 2558, Doss. 7, n° 36 ; 9 fructidor an IX [27 août 1801] ; en 1804, un prof, a 3600 fr. ; 3 prof, ont 3000 ; 5 ont 2500 ; 4 ont 2000 ; 1 a 1500 ; 3 ont 1200. A. Nat. Fia. 3517'.— Sur les trai- tements depuis 1853, cf. Décrets du 16 avr 1^53; 26 déc. 1867; 4 août 1869; 25 sept. 1872 ; S janv. 1877 ; 16 juill. 1887 ; 28 déc. 1903 ; 24 juin 1910 en avr. 1853, les divisionnaires furent répartis en 4 classes avec 3000; 3500; 4000 ; 4500 de traitement fixe ; depuis sept. 1872, l'éventuel étant supprimé, ces 4 classes eurent 6000, 6500, 7000, 7500 ; après le 24 juin 1910, les 6 classes furent portées à 5500, 6000, 6500, 7000, 7500, 8000 ; et pour les profess, hors classe, 9000. En plus, 500 fr., pour l'agrégation. La loi du 6 oct. 1919 a relevé ainsi les traite- ments de ces 6 classes agrégés 12 100 ; 14 100; 16 100. La classe exceptionnelle a En outre 500 fr. de plus pour les docteurs ; non pour les agrégée. — 2. Les agrégés avaient droit de participation au front ordonnance do 2> mars 1^29 et arrêté du 9 net. 1830 ; Aich. L. le Gr., Corr. admit., IV, n°° 1757 24 nov. 1830 et 1828 13 janv. 1831. Le 25 juill M. iîinn parle de i3 ports de boni de 600 fr , l'une. » A. Nat 1 1% 488, n° 76. — 3. Le Conseil royal de l'Inst. publ., par arrêté du 28 nov. 1828, fixe à 3000 fr. pour son traitement supplémentaire la part allouée au Proviseur, sur les 3 8 L ORGANISATION MODERNE sous sa direction, en étaient, eux aussi, les artisans, en touchaient éga- lement leur part G00 francs sous Louis-Philippe l. En ces dernières années, etavanlla guerre de 1914-18, sous le provisorat de M. Ferté, quelque chose de cette ancienne tradition ressuscita quelques mil- liers de francs, furent ainsi distribués, non pas aux seuls professeurs, mais à tous les fonctionnaire* du lycée. Le boni malgré tout n'éleva jamais beaucoup le traitement fixe des professeurs il en allait autrement du traitement éventuel qui, institué le 5 brumaire an XI, subsista jusqu'au décret du 25 septembre 1872. Il consistait, à l'origine, dans le prélèvement du dixième pris sur la pension des élèves payants 8. En l'an XI, ces élèves au lycée de Paris n'étaient guère que d 271, 275, 216 ; 4 déc. 1823 et 20 nov. 1824; ib. 304. Rio, en 1825, n'a que 1800 fr. ; ià. n» 313. — 8. Par arrêté du 19 nov. 1839, le traitement d'un profess. divisionnaire put être analogue, après 5 ans d'exercice non interrompu, au traitement du prol. titulaire. Arch. L. le Gr.. Corr. admin., VII, n» 4171. 42 l'organisation moderne dans les dernières années do Napoléon III, égal au traitement des pro- fesseurs titulaires de la 4e classe. Au total, c'était l'éventuel qui per- mettait à maints professeurs de faire face aux nécessités matérielles de la vie. C'était lui qui liait leur fortune à la fortune de la maison. QuelqueR-uns, pour accroître leur revenu, recouraient à d'autres- ressources il avaient, chez eux, des élèves pensionnaires, qui suivaient les classes de Louis-le-Grand. Et ils ne se bornaient pas toujours à n'en avoir qu'un ou deux 1. Ils en avaient un bien plus grand nombre, ainsi M. Guyet, en 1823 2 ; et il fallait les rappeler au respect des règlements de 1808 et de 1821. Les répétitions, les interrogations, sinon les conférences ou la cor- rection des copies, au concours général 3, n'étaient pas toujours un appoint négligeable 4. Le traitement total de M. Bouquet professeur de mathématiques spéciales était, quand il quitta Louis-le-Grand pour la Faculté des Sciences, en 1867, de 9000 francs 4bis. Enfin, dès la Restauration, certains professeurs s'estimaient en droit de cumuler, avec leurs fonctions à Louis-le-Grand, des occupa- tions extérieures, plus ou moins lucratives soit dans les institutions et pensions parisiennes, soit dans renseignement supérieur, soit dans la presse littéraire ou scientifique, sinon politique. Quelques-uns de ces cumuls n'en étaient pas moins suspects 5. Il fallut les journées de février 1848 puis la révolution du 4 septembre 1870 pour qu'on s'avisât de reconnaître au professeur, en dehors de sa classe, tous les droits du citoyen. Ce qui n'alla pas toujours sans péril. Malgré foui, à condition d'être celle d'un professeur titulaire ou d'un prolesseur divisionnaire, la situation matérielle des professeurs à 1. Décret du 17 mars 1808, Tit. XIII, art 101 ; et Statut du 4 sept. 1821, § IV, art. 33. — Circul. du 2 nov. 1815, n» 17, A. Nat. F"h 3104, n° 119.— 2. M. Guyet, le 19 déc. 1823, avait chez lui dix pensionnaires. A. Nat. FnH3l50, rï°240 ; autres ex., le 1 juillet 1826, A. Nat. F17h n° 23. — 3. 22 profess. en 1841 ; A. Nat. Fn 3575. — 4. Le 1er juillet 1826, le proviseur Laborie écrit Plusieurs professeurs, non satisfaits de leurs traitements, prennent plus de 2 pensionnaires, donnent des répétitions, soit chez eux ou même dans les pensions... » A Nat. F1"h 78485, n° 23. — Le 9 sept. 1815, un candidat à une chaire de L. le Gr. parle des accessoires qu'il y pourrait trouver, i A, Nat. F17 3114, n°83. — 4his. Pour 5 classes Je 2 hpures], 3 conlérences [d'une heure], deux interrogations [d'une heure] soit 15 heures. A Nat. F" 86471, Liasse L. le Gr., ri° 18. — M. Char- pentier, en oct. 1872, avait 7000 fr. A. Nat. ib. E, n» 15. — 5. L'art. 45, Tit. VI du décret du 17 mars 1808 défendait tout cumul sans la permission authentique du Gr. Maître ; Le Recteur le 8 déc. 1820 charge le proviseur Malieval d'en avertir M. Trognon ; A. Nat. FT7h 3150, n° 77. MM. Duroznir et Artaud eurent des difficultés pour des sujets analogues. — Plusieurs professseurs cumulaient, avec leurs fonctions à L. le Gr. des emplois dans l'enseignement super. MM. Mau- gras, Lecaplain, Jules Simon, Lorain, à la Scrbonne ; .Tavary et Viard à l'Ecole Polytechn. ; Burnouf au Coll. de France ; Damiron et Jacques à l'Ec. Normale ; Nicollet à l'Observatoire. LE I' PROFESSEURS 43 Louis-le- Grand pouvait passer, avec ses profils accessoires, pour fort désirable l. Il est vrai q ie leur tache quotidienne était lourde et qu'elle exigeait presque toujours le sacrilice entier de leur activité. En principe, comme dans l'ancienne université, tout professeur, durant la première moitié du dernier siècle, devait faire deux classes par jour le règlement du Prytanée, en 1802, le prescrivait formelle- ment libU. L'une de ces classes était de 2 heures, lautre de 1 heure et demie. Cela faisait 17 heures 1/2 par semaine 2. En réalité, le Provi- seur n'imposait pas toujours ce total ou ne l'obtenait pas, et, en 1820, par exemple, il demandait à la Commission royale de l'Instruction publique d'y contraindre les récalcitrants3. L'arrêté de 1852 4 infligeait, chaque semaine, 10 heures de classes et 4 heures de conférences au professeur de mathématiques spéciales B ; 12 heures de classes et 4 heures de conférences, aux autres processeur. s de mathématiques ; 12 heures de classes et 2, de conférences, aux profes- seurs de physique ; 14 heures de classes et 4 de conférences, aux profes- seurs de Logique, de Rhétorique et d'Histoire ; 16 heures de classes et 4 heures de conférences, aux professeurs de 2e et 3e ; 10 heures d classes, aux professeurs de 4e, 5e. 6e et de Langues vivantes 6. Mais le Proviseur réussissait parfois à diminuer, pour quelques privilégiés, le fardeau 7 de ces heures accumulées. Aujourd'hui, à Louis-le-Grand comme ailleurs, les proresseurs les plus lourdement chargés, gram- maire et 'langues vivantes, doivent un service hebdomadaire de li heures ; les professeurs d'histoire naturelle, de physique, de chimie, de mathématiques ; les professeurs de Philosophie, Première, Histoire, doivent 12 heures ; les professeurs de lettres, en Première supérieure et Première vétérans, et de Philosophie, en Première super., ne sont, traditionnellement, astreints qu'à 6 heures 8. L'assiduité étant l'une des premières vertus professorales, les titu- laires, adjoints ou divisionnaires absents payaient, de leurs deniers, droit de diplôme d'emploi, exigé depuis 1809, et payé une fois pour toutes on par acomptes espacés, était à Louis le Grand acquitté avec de grands retards. Arch. L. le Gr , Corr. admin., 1, n» 210 ce droit y variait suivant le traite- ment 80, 100. 120 fr , etc. — iM». 20 nov. 1802 ; A. Nat. H3 255S, Doss 7, u»62. — 2. IL, ibid. — 3. Lettre du Proviseur Malleval è la Commission, 31 oct. 1^20, A. Nat. FHh 3150, n° 69. — 4. Arrêté du 10 sept. 1852 ; Bullet. admin. Instr. pull., 1852, p. 299. — Voir un Tableau de service pour L. le Gr., du [14 nov. 1852, A. Nat. FHh 78488, n° 205. — 5. Ces 14 heures de service hebdomadaire, c'était dtjh ce que en math, spéc. MM. Richard et Guibert donnaient à L. le Gr. en 1839-40 A. Nat. FH» 78487, n" 29. — 6. M. prof, de Langues viv. à Descartes, avait, en mai 1849, un maximum de service fixé à 18 heures. A. Nat FITh 78488, n 86-88. — 7. Ce que consiste flasp. génér. en lô'.> ; A. nat Fn8G471, Liasse L. le Gr. C, n° 42. — 8. A-r. du 25 août 1892 et cire, du 24 oct. 1892; décr. du 11 nov. 1902; arr. du 2'i oct. 1903; cire, du 18 jnill. 1905. Documents communiqués par l'administration actuelle de L. le Gr. — Les prof, de dessin d'imitation doivent 16 heures. L ORGANISATION MODERNE leurs suppléants. Les absences autorisées ou justifiées sont aujourd'hui payées par le lycée l. Les agrégés jadis, les professeurs adjoints au- jourd'hui étaient ou sont chargés de ces remplacements éventuels. Les congés, à Louis-le-Grand, purent paraître, en plus d'un cas, trop multipliés ou trop prolongés 2. Certains professeurs les renouve- laient plusieurs années de suite, et parfois avec un semblant de désin- volture ; on les accusait dôtre moins jaloux d'accomplir leurs fonc- tions que de conserver leur litre. Et les collègues, dont l'avancement était ainsi retardé, avaient la franchise de se plaindre. Il y eut certai- nement là plus d'un abus. Cependant, il s'en faut que tous ces congés aient été stériles ils ont permis à quelques suppléants de révéler leur vraie mesure; et surtout, en libérant, de façon plus ou moins durable, certains esprits distingués des accaparements de la besogne quoti- dienne, ils leur ont donné le moyen d'élaborer des oeuvres brillantes ou solides, dont l'Université et les Lettres françaises ont retiré quelque gloire 3. Soucieuses de laisser les professeurs à leurs élèves, les lois militaires, entre 1818 et i 889. admirent que la promesse écrite de s'enrôler, pour dix années, au service de l'instruction publique, dispensait de tout en- rôlement dans l'armée 4. C'était l'engagement décennal >. Et les pro- fesseurs anciens officiers ou ancien» soldats furent, à Louis-le-Grand, des exceptions 5. Sous le Consulat et l'Empire 6 et sous la Restaura- tion G bis, la garde nationale laissait les professeurs à leurs chaires; sous Louis-Philippe, elle les en éloignait de temps en temps. Il y avait, alors au collège, un fonds spécial 6 ter, pour payer les frais de ces ab- 1. Arr. du 2 mars 1810; arr. du 31 mars 1812, art,8 ; arr. du 4 oct. 1883, art. 4 et 5 ; cire, du 15 oct. 1883 ; décr. du 30 sept. 1906, art. 2 ; cire, du 20 oct. 1906. — Le taux de remplacement était 6 fr. par classe, en 1811 3, A. Nat. F1" 3114, n° 71 ; et, en 1821, Flm 3150, n° 83 ; — puis 8 fr. par jour de classe, en 1824, ib. 292 ; en 1825, Arch. L. le Gr., Corr. adm., I, 317 et 335. — 2. Le Conseil royal de l'Inst. publ., le 14 mai 1830, avise le Proviseur de L. le Gr. que désormais t nul congé ne sera accordé que pour raisons de santé, bien constatées, et pour une durée maxima de 3 mois » A. Nat. Fl" 78486, n° 1*. — 3. V. Appendices, Professeurs notamment, en philo. MM. Damiron, Jules Simon, Charles, Burdeau, Lévy-Bruhl ; en histoire, MM. Rio, Rosseeuw S. Hilair^, Wallon, Geffroy, Pigeonneau, Lemonnier, Malet ; en rhéto. MM. Bur- nout J. L., S. Marc-Girardin, Hatzfeld, Georges Perrot, Brunetière, G. Laa- sou, etc. — 4. Loi du 10 mars 1818, 'fit. II, art, 15 ; 5». —Loi du 27 juill. 1872, art, 20. Exemplaire d'engagement décennal, l5 déc. 1818, A. Nat F1" 3149,n° 100b. — 5. J. B. P. Ilumbert, par ex., avait été olficier de 1793 à 1797; Appendice, Profess. Rhéto suppre. De 1916 à 1918, M. Grillet, prof, d'histoire, lieutenant de chasseurs à pied ; blessé. — 6. Rapport au ministre de l'Intér. au sujet du Pry- tanée, vers le 12 brumaire an IX [3 nov. 1800] ; A. Nat. II3 2558, Doss. 8, nrs 7 t 8. — S1»*. Ord. du 17 juillet 1816, art. 27 ; cf. A. Nat. F» 3149, n° 95. Et en- core en 1850, A. Nat. F17 3602". — 6t8'. Arch. L. le Gr., Corr. admin , IV, n°» 1871, 1868, 1873, 1S82, 2272; A. Nat. F" F'" 3575; ce crédit, en 1844, était de 260 fr., ib. n° 3576. LE PERSONNEL PHOFESSEITIS 45 sences. Mais les absences dues aux exigences du jury demeuraienl aux frais des professeurs * du moins, étaient-ils libres de se dire que l'honneur déjuger des concitoyens vaut bien quelques sacrifices. Il est vrai qu'ils eussent préféré à la qualité de juré la qualité d'électeur, qji n'eût pas troublé la belle harmonie de leurs classes. On racontait, non sans malice, un peu ilus tard, que la capacité électorale n'était reconnue, sous le Gouver emont de Juillet, qu'à un seul censitaire, à Louis-le-Grand au concierge 2. Avec l'assiduité, la dignité semblait, chez le professeur, une vertu cardinale. On comptait sur la toque, la robe et l'épitoge, pour donner à l'enseignement plus de majesté 8. C'est à peine si les professeurs de sciences, obtenaient, en 1838, de se dispenser de cette obligation com- mune, assurant que b-urs démonstrations au tableau noir et les expé- riences de physique ou chimie s'accordaient mal av^c l'ampleur de la toge moderne s bis. Le proviseur et les Inspecteurs signalaient donc comme autant de suspects ceux qui osaient laisser leur rob-> suspendue dans les placards, proches du vestibule d'entrée 4. Des placards, ana- logues, aujourd'hui, existent encore, mais les robes en ont émigré. Elles ne reparaissent à la distribution des prix que parce que cette céré- monie est obligatoirem nt qualifiée solennelle», puisque les adjectifs font partie de notre patrimoine national. Par dérogation à notre conception vulgaire de la dignité, qui exige l'installation de l'auditoire avant l'apparition de l'orateur, les règle- ments, rédigés par des hommes avertis, imposaient au professeur d'en- trer en classe immédiatement avant ses élèves5. Et, pour les profes- seurs retardataires, les trésors d'indulgence de l'Administration s'épui- saient, en somme, assez vite * bis. Les choses extérieures pouvaient bien contribuer à établir la dignité de l'enseignement; la valeur morale et la valeur intellectuelle du maître se chargeaient surtout de la fonder. Eiles donnaient naissance à l'autorité. — La vie privée des professeurs de Louis-le-Grand souleva fort rarement quelques critiques 6. Mais leurs idées religieuses et poli- 1. Arch. L. le G'., Corr. admin., IV, n» 2163. — 2. Communicat. de M. Luc Andrieux, né en 1851, mort avocat à la Cour d'appel de Lyon, en 1909. — 3. Décret 17 mars 1803, Tit. XVI, art. 129; Statut du 4 sept. 1821, art. 30. — Insp. gén. 19 mars 1842; A. Nat. FH» 784S7, n° 39. — 3bi3 Arch. L. le Gr., Corr. coll., IV, n° 4410 — 4. Lettre du Recteur au Proviseur Rinn, 12 nov. 1847; Arch L. le Gr , Corr. adro., IX, n» 8641 ; oct. 1820, le Provi- seur signale des négligences dans le port de la rob->, A. Nat. FHu 3!50, n0 65.— 5. Statut du 4 sept. 1821, art. 30. — Bw». Au sujet de M. Artaud, agrégé di- visre de 2e, le Proviseur se plaint que ce professeur entre le dernier dans sa clause et en sorte le l", même avant ses élèves. Des désordres en résultent, oct- 1820, A. Nat. FI'h 3150, n° 65. — 6. Ainsi, pour M. II. de G. poursuivi pour le non-paiement d'un billet, Arch. L. le Gr., Corr. admin., V, n° 2860. — On trouve ces critiques dans le rapport annuel du Proviseur ; par ex. en 1844, au sujet de M. D., A. Nat. Fil» 78487, n° 43. 46 L ORGANISATION MODERNE tiques, surtout sous la Restauration ' et le Principat, qui préparait le second Empire 2, étaient officiellement signalées. 11 est vrai que le li- béralisme était alors en faveur, auprès des élèves et de leurs familles. Ils applaudissaient volontiers à ce que le gouvernement persécutait. Leur attachement, passager ou non, à cerlains professeurs vint souvent ds là. Apiès les journées de juillet, les idées libérales de M. Pierrot Deseilligny 3, professeur de rhétorique, le désignèrent, autant que son caractère et son talent, au provisorat de la maison. Et personne n'eut à regretter un pareil choix. Sous le second Empire, les élèves devinaient, paraît-il 4, que la plupart de leurs professeurs étaient républicains et. ils leurs en savaient gré, Ils avaient admiré le geste de ceux qui avaient préféré leur conviction à leur carrière et avaient refusé le serment 5. Du reste, la tradition de la maison était de ne blesser aucune conscience et les élèves étaient d'autant plus respectueux de leurs maîtres qu'ils leurs reconnaissaient plus de tolérance et plus de tact6. Les professeurs qui manquaient de prestige étaient presque toujours ceux qui manquaient de fermeté et d'adresse ; presque jamais, ceux qui manquaient de savoir et de compétence 7. La faiblesse du caractère était plus commune que la faiblesse de l'intelligence. Et aussi, pour que d'éminentes qualités n'achevassent pas de se flétrir à Louis-le- Grand, les Proviseurs dépensaient-ils des trésors d'ingéniorilé ; tout leur effort tendait à donner de l'avancement — hors du collège — à ces victimes du collège 3, dont l'exportation rehausserait le prix. Pour permettre à un professeur de suivre ses élèves deux années de suite, on avait eu l'idée, sous le Consulat et l'Empire, de le conjuguer avec un collègue en mathématiques, en littérature, en grammaire, deux professeurs alternaient ainsi leur enseignement 8 bis. Au lieu de se 1. Le 26 déc. 1820, le Proviseur écrit de M. Maugras A toujours fait preuve de sentimens monarchiques et religieux. » A. Nat. FI~h 3150, n° 80. De même, pour MM. Trognon hist., Artaud 2e, Pierrot rhéto.. Liez 2e Courtaud-Duverneresse 2e, qui cependant eurent à souflfrir des enquêtes administratives — 2. En 1850-51, notamment.— 3. En [1826-7], l'Inspection gén. écrivait sur M. Pierrot Beaucoup de zèle, beaucoup de talent, pour l'ensei- gnement ; ses opinions ont été mauvaises ; je ne crois pas qu'elles soient devenues meilleures; on assure qu'il les manifeste quelquefois ; le proviseur le nie for- mellement Je n'ai pas encore pu me procurer des renseignements crois cependant qu'il devrait être appelé par Mgr le Grand Maître, pour recevoir un avertissement sévère. » A. Nat. F17 — 4-6. Communications écrites d'an- ciens élèves. — Cf. Henry Dabot, Lettres d'un lycéen, p. 40; lettre du 10 oct. 1849. — A Nat. F17h 78488, n° 164 ; lettre du Recteur au sujet de M. Despois. — 7. Ainsi, JeanBapt. Pol. Humbert, prof, de 2e trop fable pour sa classe » dit le Proviseur, Laborie, en 1826, A. Nat. F17h 78485, n° 23. Le proviseur Pier- rot, en 1835, donne des preuves de l'incapacité de M. Humbert. A. Nat. FI^h 78486^ n° 19. — 8. Ainsi, en 1830 et 1840, pour MM. Humbert, Agon, Durozoir, pro- posés à l'Inspect. académique, à Paris ou en province. A. Nat. Fl"" 78486 n° 1a, 78487, nos 27 et 32. — 8Ws. Par ex. pour les Mathématiq., les Humanités, la Grammaire. Cf. les Appendices, Professeurs. — Lettre dAdam, prof, de 4e, peu avant le 13 mai, 1816, A. Nat. F» 3149, n° 37. LE rERSOXNEL PROFESSEURS 47 confiner à une seule classe, cet enseignement portait sur deux classes ; il montait, une année ; il redescendait, une autre année. En 1818, un arrêté prescrivit Dans les collèges royaux de Louis-le-Grand, de Henri IV et de Charlemagne, l'enseignement sera partagé entre deux professeurs ou agrégés, qui alterneront d'année en année '. » C'était ce qu'on nommait l'alternat. Or, peu à peu, les défauts de l'alternat, à Louis-le-Grand, parurent assez sensibles, au moins pour certaines classes. Ainsi, aux dernières annéesde Louis-Philippe, la moitié des élèves redoublait la classe de mathématiques élémentaires et les deux tiers, celle des spéciales. Ces élèves recevaient, par suite, non plus pour deux cours distincts mais pour le même "wirs, les leçons su^.cssives et souvent très différentes de deux professeurs 2. L'alternat existait alors à Saint-Louis mais pour une division et non pour les autres; il était près de disparaître à Henri IV. A Louis-le-Grand, le proviseur avait réussi à s'y dérober, jusque-là. Une cachait pas ses répugnances à s'y soumettre 3. Quanta la rhétoiique, l'usage était que deux professeurs fissent, à tour de rôle, la rhétorique française et la rhétorique latine. L'inspec- tion académique, en 1851, trouvait àLcuis-le- Grand cet alternat pré- udiciable aux élèves et même aux professeurs, qui, en réussissant moins bien dans telle ou telle faculté, peuvent, par cela même, y prendre et y répandre moins d'intérêt i. » Aujourd'hui, le vœu de 1851 est réalisé et dépassé. L'alternat n'est plus un droit ; il n'est mène plus un fait il demeure à peine un sou- venir. Les classes préparatoires à l'Ecole Normale Supérieure n'ont plus rien qui rappelle les Rhétoriques française ou latine d'autrefois ; leurs professeurs enseignaient, chaque année et avec une maîtrise pa- reille, les mêmes matières M. Henri Durand, jusqu'à son décès en 1918, la composition française et la version latine; M. Lafont, jusqu'à sa retraite, en 1919, le thème latin et la version grecque. Pour les ma- thématiques, dans le grand collège, il en allait de même MM. Hum- bert, Leconte, Riemann, Keraval, Combet et Bioche n'alternaient pas entre eux chacun d'entre eux gardait fidèlement sa chaire. Sans doute, de la Philosophie à la 4e, les Sections se sont mulipliées mais en Philosophie, chaque professeur a, chaque année, la même sec- tion; en Première, pas d'alternance régulière entre les 4 professeurs de lettres les uns font la même section deux ou trois ans de suite et laissent passer 2, 3 ou 5 ans, sans la reprendre. Mais on a fini par re- 1. Arrêté du 9 nov., art. 3. A. Nat. FH» 3150, n° 277. — 2-3. Rapport au Ministre de V\. publ., 29 sept. 1837, A. Nat. FIT» n° 38. — Note du Pro- viseur Pierrot, 31 août 1838, ib. 45 ; et sui tout rapport du proviseur Riun, 30 juill. 1845 ; A. Nat. K17n 78487, n° 52 ; note au ministre, oct. 1845, ib. n°* 61 et 62. — Rapport du provia. Rinn, A. Nat. F*»n 7S4Sd, u° 130. — 4. 25janv. 1851 ; A. Nat. Fi"» n» 158. 48 L ORGANISATION MODERNE uoncer, vu les difficultés du service, à donner toujours une même sec- tion à un seul professeur. — En seconde, le système du professeur unique de lettres est habituellement suivi, surtout dans les sections A et B ; depuis 1908, la dualité des professeurs de lettres a été parfois adoptée, pour les sections C. En Troisième, dans !es sections de latin avec grec, alternent généralement deux professeurs. Presque toujours, de même qu'en Quatrième, il y a un seul professeur par section. — Pour les mathématiques, de la 3e à la lre, les clisses de latin -sciences gardent, depuis de longues années, le même professeur. En somme, s'il n'y a plus d'alternat de classe inférieure à classe supérieure ou inverse- ment, il y a encore alternance entre Ls diverses sections d'une même classe. Mais voici la question capitale a-t-il été possible de permettre à un même professeur de suivre ses élèvss, d'une classe à l'autre? Pour les lettres, assez rarement et seulement pour la 3e A, Latin sans Grec, à laquelle les professeurs de 4e sont périodiquement appelés. Mais un professeur de 3e n'enseignant pas en 2e, ni un professeur de 2e, en 1", aucun d'eux ne pourra suivre ses élèves à moins d'être, de 3° promu en 2° ou de 2e en lr\ Et ce cas exceptionnel se présente, en effet *. Les mathématiques, dans les classes de lettres, de la 3e à la lr9, sont con- fiées aux mêmes professeurs, qui peuvent ainsi, trois années de suite, se consacrer aux mêmes élèves. On voit comment a été sauvegardé tout ce qui, dans l'ancien al- ternat, pouvait être utile; et comment le reste est tombé. Il n'en est pas moins vrai que certaines classes ont parfois un trop grand nombre de professeurs 2. Les élèves n'en souffrent pas seuls ; les professeurs, eux aussi, ont raison de se plaindre condamnés a enseigner, trop d'élèves différents, et parfois seulement une heure ou deux par se- maine, ils les connaissent trop peu devant cette foule bariolée, ils ne peuvent, sans d'excessives fatigues, réussir à donner leur mesure. Consacrer, par des distinctions honorifiques, la valeur morale ou in- tellectuelle des professeurs de Louis-le-Grand, cela fut longtemps une tradition que l'Université se gardait de laisser perdre. Dès 1800, le Consulat affichait publiquement le dessein de récompenser les maîtres les plus distingués 3. Sous le Premier Empire et la Restauration, une des plus hautes ambitions, pour un professeur, c'était d'être fait offi- cier de l'Université 4. La légion d'honneur était donnée d'une main moins avare que ce titre là. 1. En 1909-1910 pour M. Plésent et, en 1913-4, pour M G. de Bévotte, nommés de 2" en lre. — 2. Il arrive même, pour des nécessités de service, qu'une seule classe ait un professeur d'bistoire et un profess. de géographie ce dernier, une heure par semaine. — 3. Règlement du Prjtanée, 22 fructidor an VIII [9 sept. 1800], A. Nat. Hs 2528, n° 10 Tit. III, art. 18. — 4. Ainsi, pour 1810 et 1814,. Dubourguet et Landry, prof, de math., A. Nat. F17 3114, n°» 54 et 72. LE PERSONNEL PROFESSEURS 4'J C'est surtout depuis 1836 que chevaliers ou officiers de la légion d'honneur se multiplièrent à Louis-le-Grand ; certaines années, trois professeurs furent décorés à la fois 1. Les années les plus riches en no- minations ou en promotions s'espacent de 183G à 1847; de 18G0 à 1870 ; de 1877 à 1885 2; enfin, 1920. De la 6e aux mathématiques spéciales, chaque classe î avait ainsi ses élus et surtout la Rhétorique4, la philosophie 5, l'histoire ; ; à un moindre degré, la seconde 7, sinon les mathématiques 8, les sciences physiques 9 et naturelles10. Les langues vivantes, purent sembler, jusqu'en 1867, tenues à l'écart ". La croix ne s'épinglait pas presqu'uniquement sur des poitrines de quinquagénaires très mûrs ,2 ; elle était mieux que la discrète annonce de la retraite. Dès l'âge de 34 ans, on décorait MM. Merlet, Perrot, Pellat; à 35 ans, MM. Gaspard et Gernez ; à 36, M. Gaillardin ; a 37, MM. Masson et Pigeonneau 13. Jusqu'à la fin du siècle dernier, les professeurs titulaires décorés étaient la règle commune; ils sont aujourd'hui l'exception ; et à Louis- le-Grand comme dans les autres lycées parisiens. La politique a gagné ce que l'Université a perdu. Que devenaient les professeurs, en quittant Louis-le-Grand? D'au- cuns — sous Louis XVIII ou Charles X — étaient placés à la tête d'une Institution1*. L'administration faisait appel à quelques autres, comme censeurs1', comme proviseurs '• ou comme inspecteurs d'Académie, en 1. En 1867; remerciements du proviseur, 20 août, A. Nat. F 86471, Liasse L. le Gr., A, n° 18 ; id. en 18S5. — 2. De 1836 à 1847, 7 nominatious de 1860 à 1870, 11 ; de 1877 à 1885, 11. — 3. En 6», Beaujean, 1878 ; en 5, Pourmarin, 1845; en 4e, Barrot, 1850; Chambon. 1869 ; puis Rocherolles, Clairin, Peine, Sudre, Richardot, Lanusse. — 4. MM. Rinn, 1839; Lemaire, 1S45 ; Merlet, 1862 ; Perrot, 1866 ; Hatzfeld, 1867 Gaspard, 1870 ; Jacob, 1885 ; Hémon, 1890 ; et plus récemment, MM. Lafont, Durand, Morand, Berret, Mayer. — 5. MM, Maugras, 1821 ; Valette ; Janet, 1860 ; Charles, 1867 ; Charpentier, 1881; Burdeau, Belot, Colona d'istria, Malapert. — 6. MM. Gaillardin, 1847, offic, 1867; Pigeonneau, 1871 ; Hubault, 1877 ; Letnoine, 1888 ; Lemonnier, 1889 ; Darsy, Amman, Milhaud Kergomard, Fallex — 7. MM. Gros, 1836; Chardin, 1847 ; Delacroix, 1870; Marcou, 1878; Dejean de la Bâtie; Chastaing de la Filiolie. — 8. MM. Richard. 1837 ; Leca- plain, 1866 ; Bouquet ; Ribout et Burat, 1885 ; Niewenglowski ; Javary 1895- offlc. ; Humbert. —9-10. MM. Masson, 1843; Gernez, 1869; Lechat 1880 ; Pel- lat, 1884 ; Dybowski ; Mangin ; Péchoutre, Viard. — 11. M. Méliot en 1867 ; puis M. Beaujeu. — 12. Ainsi, 51 ans Jacob ; 52, Hubault et Marcou ; 53, Ribont ; 54, Leuoine ; 55, Burat et Halomon ; 56, Barrot et Lecaplain ; 57, Beaujean ; Meliot ; Maugras; 61, Lechat, etc. — 13. 38 ans, Gros, 1846; 40, Charpentier, 1881 ; Janet, 1860; Girard, 1860; 41, Charles, 1867; 42, Richard, 1837; Rinn, 1839; Hatileld, 1*67 ; Ilomon, 1890; 43, Lemaire, 1845; Delacroix, 1870 ; 45, Chardin, 1847 ; 46. Chambon, 1869; 49, Pourmarin, 1845. — 14. MM. Adam. 1816 ; Guyet, 1824 ; Duhamel, 1829. — 15. MM. Roger, 1834-8. à L. le Gr. ; puis. Louis ; Genouille, à Rouen, 1845; Pichot, à Versailles, 1875. — 16. MM. Pierrot à L. le Gr., 1830 ; Liez, à S. Louis. 1830 ; Lorain. à S. Louis, 1S37 ; Rinn, à L. le Gr., 1845; Lacroix, à Nantes, 1853 ; Wintzweiller, à Vesoul, 1911. 50 L ORGANISATION MODERNE province1, ou à Paris * bis. Un plus grand nombre, de leur chaire de Louis le-Grandou de l'inspection académique de Paris, étaient élevés à l'Inspection générale2. Le Rectorat lui-même3 attirait à lui plus d'un esprit distingué. La magistrature*, les bibliothèques5, la politique6 n'accaparaient qu'assez peu de transfuges. Mais, pour l'enseignement supérieur, Louis- le-Grand sembla parfois être un véritable séminaire Universités étran- gères7, Facultés de Province3, Ecole normale supérieure8, Sorbonne 10, Collège de France11, Ecole des Chartes 12, Ecole Polytechnique 13;Faculté de Médecine131'3, Muséum d'Histoire naturelle1*. L'Institut ouvrit quarante-trois fois ses portes aux anciens profes- seurs de notre maison15 l'Académie des Beaux-Arts en accueillit deux, MAL Cogniet et Lemonnier ; l'Académie des Sciences en reçut dix MM. Liouville, Duhamel, Bouquet, Tisserand, Darboux, Violle, Daslre, Gernez, Baillaud, Mangin ; onze également, l'Académie des Sciences AIo- rales MM. Mentelle, Laromiguière, Damiron, Jules Simon, Paul Janet, Rocseeuw-Saint-Hilaire, Cheruel, Waddington, Bergson, Delbos, Lévy- Bruhl ; quatorze, l'Académie des Inscriptions et Belles Lettres MAL Champagne, Mentelle, Gail, Rochelle, burnouf, Wallon, Alexandre, Dehéque, Quicheral, Georges Perrot, Bréal, Alfred Croiset, Mâle, Glotz, et, parmi eux, elle choisit à deux reprises son secrétaire perpétuel 16. L'Académie française, elle, admit dans sa compagnie MAL Saint-Marc Girardin, Jules Simon, Brunetière et Bergson. Tous les noms de cette pléiade ont su dire magnifiquement, dans les Lettres et la Science française, la valeur intellectuelle du corps professoral de Louis-le-Grand. Quand la carrière des professeurs s'achevait dans notre maison, elle s'y poursuivait presque toujours de paisible façon. Une fois titularisé, 1. MM. Roberge, 1836; de Salve, 1853; Frin, 1876; Beaujean, 1879. — l*1». MM. Privat-Deschanel, 1868; Aubert-Hix, 1373 ; Combarieu, D. Roustan, G. de Bévotte, etc. — 2. MM. Noël, avant 1803; Castel, 1809; Burnouf J. L., 1830; Artaud N. L. M. ; Ozaneaux, 1835; Benj. Lévy, 1873 ; Niewenglowski, 1895 ; Cahen ; Hémon ; Gallouédec ; Belot. — 3. MM. Ozaneaux, 1830 ; Thuillier, 1835 ; Barberet, 1850 ; Rinn, 1854 ; Charles, 1875. — 4. M. Lou- vrier, devenu procur. du roi, nov. 1816. — 5. M. Baudon-Desforgec, devenu bibliolhéc. de l'Univ. de Paris, 1846. — 6. MM. Chevallier, en 1850 ; Bur- deau, en 1881 ; Wallon, en 1849 ; Lintilhac, en 1898. — 7. M. Rudler, à l'Univ. de Londres, 1912. — 8. MM. Ch. Benoit, à Nancy ; Geffroy, à Bordeaux, 1S52 ; G. Weill, à Caen, 9. MM. Damiron ; Bersot; Gernez; Crouslé ; Goumy ; Lanson ; Lévy-Brubl ; Bouquet ; Abraham. — 10. MM. Maugras ; Delbos ; Janet ; Wallon ; Geffroy ; Pigeonneau ; Glotz ; S. Marc-Girardin ; A. Croiset ; Crouslé. Marcou ; Ch. Benoît; Lanson ; Lintilhac; Rudler; Mâle ; Beljame ; Morel ; G. Reynier ; Bouquet; Darboux; Luc. Poincaré. — 11, MM. J. L. Burnouf; Rinn; Bréal. — 12. Dupont-Ferrier. — 13. MM. Duhamel ; Jamin. — 13bu. M. Raph. Blanchard. — 14. M. Mangin. — 15. A 37 professeurs, car 4 furent de 2 classes de l'Institut MM. Champagne ; Mentelle ; Jules Simon ; Bergson. — 16, MM. Wal- lon, de 1873 à 1904 ; Perrot, 1904-1914. LE PERSONNEL »R0FE8SE1 51 un professeur était, de fait, inamovible1. En plus d'un siècle, on ne citerait pas une seule révocation 2. Lps déplacements, contre le gré du titulaire, étaient eux-mêmes fort rares*. Les démissions ne se produi- saient guère que dans les moments de crise politique et encore étaient- elles exceptionnelles '\ Dès que les professeurs sont entrés dans notre établissement, disait, en 1838, le Proviseur, ils n'en veulent plus sortir8 ». L'avancement était assuré par des règles fixes, dont l'applica- cation ne faisait guère, chez nous, de victimes. De promotions en pro- motions, les professeurs s'acheminaient peu .à peu, d'un pas égal ou alourdi, jusqu'à la retraite. Un petit nombre mourait avant de l'avoir obtenue *. Comme pour les anciens soldats, Napoléon avait rêvé de construire, pour les anciens Universitaires, la maison des Emériles », où les pro- fesseurs retraités auraient pu trouver un foyer. Celte maison, qui aurait dû s'achever dès 1809 7, ne s'ouvrit point. A défaut de cette maison de retraite, une pension de retraite fut accordée aux anciens professeurs8; leur ambition était, sous la Res- tauration, de l'obtenir seulement après 30 ans de services 9 ; sans quoi, elle paraissait insignifiante, car elle était basée sur le traitement fixe et non pas sur l'éventuel 10. Ils ne faisaient guère, avant 60 ans d'âge, valoir leurs droits à cette pension ". En certains cas, dès 1. En 1825, Je Proviseur Laborie se plaignait de cette t prétendue inamovibi- lité. » A. Nat. F1"h 78485, n° 6d. Cf. Jules Simon, Premières années, pp. 272- 274 ; Fr. Sarcey, Souvenirs de Jeunesse 1885, p. 125; Ern. Bersot, Questions actuelles 1862, p. 24. — 2, Lettre de M. de Corbière au Gr. Maître, 8 juill. 1822, pour révoquer M. Trognon, qui fut maintenu ; A Nat. Fl~» 3150, n° 173. — En 1^21, M. Roussel, profess'. de 5e, fut suspendu 2 mois. A. Nat, F^» 3150, nos 82-88. — 3. M. Courtaud-Divernéresse, agrégé de 2e, fut en 1835 transféré malgré lui de Louis le Grand à Bourbon et il protesta. A. Nat. Fl'"78486, n° 19. — 4. En 1851, par ex. MM. .Jacques, Deschanel, D^-pois ; cf. à ce sujet, le 7 déc. 1851, lettre du Recteur Cayx, au Ministre, A. Nat. FI"» 78488, n 164. Quelques professeurs souffrirent de la Restauration Liez 2e, Artaud 2e, Pierrot Rhét. , Trognon Hist.. — 5. M. Pierrot-D., le 18 août 1838 A. Nat. Fl"» 78436, n° 46. — 6. Ainsi, MM. Luce de Lancival, en 1310; Lemarchand, 1820; Marcou, 1832; Ribout, 1854; Maillet, 1897; Lelorieux, 1901; Mathis, 1906; Morand, 1910; Mul- ler, 1914. - 7. Art 123 et 127 du décret du 17 mars 1808, Tit. XV; et Tit IX ; et A. Nat. F'7 1345, n° 55 Décret 22 mars 1812. Tit. Il, art. 5. — 8. Décret» du 17 mars 1808, art. 123 et ss. ; du 22 oct. 1810, art. 1-3; du 17 fév. art. 82 loi du 9 juin 1^53, art. 5, §§ 1 et 5 ; art. 11. $§4,5; décr. du 9 1853, art 29, 30 ; décr. des 22 juill. 1895 ; 27 mai 1897 ; loi de finances des 30 déc. 1903, art. 18, et 26 déc. 1908, art. 37, etc. — 9-10. Observation du prof. Laran, 30 sept. 1825; A Nat. Fn 3150, n° 312.— 11. Ex. à 59 ans, M. Légit, pr. ail.; 1905; Roche, 1895 ; a 61 ans, MM Ans, lett., 1909; Gaspard, 1896; Merlin, lett., 1903 ; Riquiez. ail., 1907 ; 62 ans, MM. Barrot, 1856 ; Gartault, 1^7."> ; Hnyot, 63 ans, MM. C nouille, 1910; Grumbacli, 1902; Jacob, 1^97 ; Jully, 1894 ; Lange, 1905; LUjoières, 1895; Pressoir, 1913; 64 ans, E. Darsy, 1913 ; 65 ani MM bos, 1828 ; Peine, 1914 ; 66 ans, MM Sévrette, 1897 ; Rocherolles, 1907 67 ans. 52 L ORGANISATION MODERNE 50 ans' ; en d'autres, à 75 ans seulement2. C'était, d'ordinaire, une question d'espèces, que la santé et le succès du professeur, autant que les circonstances, se chargeaient de résoudre. En somme, de tout ce qui précède, il résulte qu'un professeur titu- laire à Louis-le-Grand fut, pendant près d'un siècle, et surtout quand il enseignait dans les classes supérieures, un homme dont la situation sociale, matérielle ou morale, pouvait paraître enviable*. Il faisait partie d'une élite universitaire. Il était quelque chose et il dépendait de lui d'être quelqu'un. M. Boudhors, 1894 ; 68 ans, MM. Gay, 1896 ; Marcou, 1894 ; 70 ans, MM. Hatzfeld, 1894; Bernard, 1893. — 1. M. Agon, en 1845; — à 55 ans, MM. Baudon-Des- forges, 1846 ; Koell, 1894. — 2. M. Javary, en 1909. — 3. Cf. Luce de Lancival, Discours à la Distrib. des Prix du Lycée impèr., 1808 ; début et pp. 16-18. 90 ..... . ! i i 80 i 76 Prof 70 A V 60 1 II 50 . y- AT 1 r W 1 40 1 j 55 50 33 20 .26 Prof." / \2l/ V23 24~~ / 27,-, » N / f/'T9 \7 l / / / / / M V'16 10 r i t i M 8 '-— '9 0 n oo n 10 li '20 IS 50 IS Fig 40 IS 75. — Nombre 50 des pH ] PI. XXVIII. 1870 1880 1890 1900 1910 1920 des maîtres, de 1800 à 1920 CHAPITRE III Les Maîtres Gomme les administrateurs, comme les professeurs, les maîtres étaient une des pierres angulaires de Louis-le-Grand. Longtemps et surtout dans la première partie du dernier siècle, ils parurent déshérités, sans fortune et sans espoirs ; puis, peu à peu, on vit se relever leur situation, leur statut s'améliorer, leurs horizons s'éclaircir leur car- rière se dessina. Il s'agit seulement de savoir comment. Dans quelle mesure varièrent leur nombre et leur hiérarchie, leur recrutement, leur nomination, leurs garanties et les étapes diverses de leurs cursus honorum ? En quoi consistaient leurs fonctions, dans quel esprit les remplissaient-ils et à quoi les acheminaient-elles? Voilà, sans doute, bien des questions et dont plus d'une est délicate les documents, du moins, se chargeront de nous donner des réponses précises. Le nombre des maîtres ne fut jamais très considérable à Louis-le- Grand et sa courbe * ne connut guère les oscillations que nous avons notées dans le graphique des professeurs. C'est généralement entre la vingtaine et la trentaine que le nombre des maîtres se maintint. Il est curieux de constater que ce nombre, en dépit des modifications de l'effectif scolaire et de l'inlernat, est sensiblement le même en 1807, sous la Restauration, sous le Gouvernement de Juillet ou de nos jours. H fut dépassé de 1846 à 1870 et, en 1869, porté à 40. L'Inspection gé- nérale veillait à la suppression des emplois inutiles. La règle était, depuis l'origine, qu'il y eût, au moins, un maître pour 25 élèves 2 ; en septembre 1828, elle avait accordé un maître à 20 élèves !bis ; elle admet aujourd'hui un maître pour 35 élèves. 1. Planche XXVIII, fig. 75. — 2. Règl. du 19 sept. 1809, § IV, art. 31. Lettre de Champagne, proviseur de L. lo Gr., au Gr. Maître, 22 fév. 1S10 Les règle- mens de l'ancienne Université, ceux des Lycées, ont fixé constamment un maUre d'étude pour 25 élèves... » A. Nat. F'"» 3104, n» 53. — 2liis. Arrêté du 5 août 1828, art. 1. Arch. L. le Gr., Corr. admin., III, n° 1004 et circulaire du 30 août t'6.. 54 L OltGANISATIOJS MODEREE Le progrès des maîtres ne doit donc pas être cherché dans le progrès de leur nombre. Mais la transformation de leur hiérarchie a pu favori- ser quelque peu leur relèvement universitaire. Le nom officiel qu'on ne cessa de leur donner, depuis 1800, c'était celui de maîtres » ; l'argot des Ecoliers, depuis Louis-Philippe et probablement avant lui, employait à Louis-le-Grand, ce terme de pion1 », par lequel la langue populaire désignait, vers 1830, un homme pauvre et sansappui 2. Ces appellations uniformes dissimulaient plus ou moins aux yeux du public des catégories très différentes de matires. La plus élevée ce fut, jusqu'en 1853, celle des maîtres d'étude titulaires ; depuis 1853, celle des maîtres répétiteurs de lro classe ; depuis 1909, celle des professeurs adjoints. Aux degrés inférieurs de l'échelle des maîtres, se trouvaient, sous le Consulat et l'Empire les sous-maîtres, les maîtres surnumé- raires du Prytanée ; les maîtres suppléants du Collège de Paris puis du Lycée-Impérial; sous la Restauration et le Gouvernement de Juillet, les maîtres supplémentaires et surnuméraires et, au-dessus d'eux, les maîtres d'étude à nomination provisoire ; sous Napoléon III et les pre- mières années de la 3e République, les aspirants répétiteurs; depuis 1875, les auxiliaires; enfin, les répétiteurs stagiaires, et, depuis 1902, les surveillants d'internat. De 1891 à 1902, la hiérarchie élève, aux degrés supérieurs, les répétiteurs titulaires, les répétiteurs division- naires, les répétiteurs principaux, les répétiteurs généraux*. Depuis 1902, les surveillants d'internat ont remplacé, dans leur service, les ci-devant répétiteurs divisionnaires. Si la petite armée des maîtres comptait peu d'unités, on ne saurait donc dire qu'elle comptât peu de grades. Son recrutement, à l'origine, avait été fort malaisé en 1808, devant tout le Lycée Impérial, Luce de Laucival affichait l'espoir que l'orga- nisation de l'Université allait mettre fin à la disette, chaque jour crois- sante, des maîtres d'étude* ». Les anciens élèves de la maison étaient choisis de préférence, sous le Premier Empire, comme sous la Restaura- tion, sons Louis-Philippe et les premières années de la Troisième Ré- pubique*. H avait fallu renoncer et très vile à l'utopie de 1810, qui 1. H. Dabot, Lettres d'un Lycéen [de L. le Gr., 1846-49], passim. sur les pions à L. le Gr., juill. 1864, A. Nat. FHh 82784, Liasse B, n° 5. — 2. Dict. de la Conversation, 2 édit. 1878, t XIV, p. 581 ; v Pion. Cf. A. Nat. F 93185 ; coupure du Voltaire, 28 mars 1883 et réponse de L. Pouard, licencié en droit, répétiteur au lycée L. le Gr. et M. Ameline, docteur en médecine, répétiteur au lycée S. Louis ; ils écrivent à Em. Bercerai, qui s'était mépris sur les pions. — 3. Décret du 28 aoiH 1891, art. 3 Dans les lycées, les répétiteurs titulaires se répartissent en répétiteurs divisionnaire* et répétiteurs généraux. Les répéti- teurs titulaires, appartenant à la première classe, peuvent recevoir le titre de répétiteur principal. » Cf. Décret du 29 août 1891, art. 1. — 4. Palmarès de 1808 Discours à la distrib. des Prix, 6 août 1808, p. 18. — 5. Au début de 1810. Lettre du Proviseur Cbampagne, au Grand-MaiLre ; A. Nat. F'7h LE PERSONNEL 55 avait dicté ce petit article des statuts du 24 août Nul ne pourra être maître d'étude dans un lycée, qu'il n'ait été élève de l'Eco'e Normale1». Le Lycée Impérial avait dû ouvrir ses portes à d'anciens sous-officiers et, semble-t-il, les entrebâiller, tout au moins, pour le* prêtres mariés2. En 1828, Is ministre, M. de Valimesnil, écrivait en vain Il est essen- tiel de ne choisir, pour les fonctions de maîtres d'étude, que des sujets qui se destinent à la carrière de l'Instruction p ib'.ique * ». En I8i5, s' piranl des vœux d'un ancien proviseur de Louis-Ie-Grand, M. Laborie, le ministre, M. de Salvandy, annonça la création d'Ecoles normales secon- daires* destinées à pourvoir 1p^ collèges royaux dj maîtres d'Etudes et de régents ». Ce projet resta lettre morte 3bis. Il avait bien fallu 'fermer les yeux et accepter quelques épaves des administrations, des Grandes Ecoles, de l'industrie, du commerce; quelques jeunes gens poursui- vant leurs éludes de droit ou de médecine*. On faisait accueil à d'an- ciens précepteurs particuliers5 et, de 1820 à 1860 surtout, à d'anciens maîtres ou professeurs d'Institutions ou Pensions provinciales et pari- siennes*. Et aussi, à d'anciens cbefs d'Institutions " et à d'anciens principaux de collèges8. Les anciens récents abondaient 9, beaucoup plus que les anciens chargés de cours10. Avant lo décret du 17 août 1853, parmi les maîtres appelés à Louis-le-Grand, 18 °/0 seulement avaient fait un stage en province ; de 185i jusqu'au décret du 29 mars 1891, 70 % firent ce stage " ; pour la plupart des maîtres, les collèges ou les lycées de province étaient ainsi devenus la voie la plus sûre conduisant à Louis-le-Grand. Et au stage provincial. s'ajoutait bien souvent un stage parisien. La durée de ces deux stages était très inégale. Le stase en province était presque toujours plus long que le stage à Paris et quelquefois beaucoup plus. Dans 79 cas sur 100, le stage à Paris s'étendait de 1 à 3 ans, et le stage eu province, de 2 à 8 ans. Nous pourrions citer un 3104, n° 53 ; en 1826, Nicole! V. J. A ; en 1835, Sahuqué ; en 1851, Petit Ch. M. A. ; eD 1850, Gay Ch. V en 1853, Brousseaud ; en 1861, Gour- doux ; en 1S68, Hérelle, et 27 autres, de 1875 à 1884, nommés directement maîtres à L. le Gr., étaient anciens élèves de la maison. Areh. L, le Gr. ; Reg. du Per- sonnel. — 1. Rabany, maître au Lycée Impérial, en 1815, sortait cependant de l'Kc. normale. — 2. A. Nat. F" 3149, n° 5. — 3 Arch. L. le Gr., Corr. adm. III, n° 1094. — 3his. Ordonn. du 6 décembre 1845, art. 1. Il sera établi dans les ville* possédant des Facultés, qui seront ultérieurement désignées, des écoles normales secondaires, etc. — M. Laborie, dès le 2'. 2; du 8 janv. 1887, art. 11, § 2 ; du 28 août 1891, art. 10, $ 1 du 30 juillet 1902, 60 l'orgamsation moderne qu'il outrepassait ses droits ; M. Pierrot-Deseilligny, à son tour, dut se justifier à ce sujet1. Le proviseur était simplememenl autorisé à prononcer, non la révocation de ces maîtres, mais leur suspension et à proposer leur changement et leur destitution. Le ministre, seul, statuait. Et, pour assurer au ministre l'exercice efficace de ses droits, le proviseur devait, chaque année, transmettre au recteur le tableau complet des maîtres 2. A l'époque où les pouvoirs du proviseur étaient moins limités qu'ils le furent plus tard, M. Champagne avait eu l'occasion d'en souffrir ses maîtres d'études, en 1809 et 1810, l'abandonnaient un à un. Douze le quittèrent en cinq mois, sous des prétextes plus ou moins mensongers, pour passer au lycée Napoléon. M. de Wailly les attirait par l'appât d'un travail moitié moindre et d'une liberté double 3. Pour arrêter cet exode, l'autorité du Grand-Maître et la menace de ses foudres apparurent à notre proviseur comme le salut suprême et il y recourut 4. Malgré tout et si diminués qu'ils fussent, les droits du proviseur suffisaient parfois pour accélérer ou retarder, compromettre et décourager l'avancement de certains maîtres. Depuis 1853,1a durée minima des divers stages fut précisée 5 ; mais la durée maxima ne pouvait l'être, l'ancienneté étant trop souvent une prime aux abus. L'inégalité, dans la durée des stages du même ordre, était donc inévi- table. Le proviseur, du reste, avait à tenir compte, dans ses propo- sitions au ministre, non pas seulement des aptitudes, du caractère et de l'esprit des maîtres, mais aussi de leur âge, de leurs services anté- rieurs, de leurs grades. A Louis-le-Grand, certains maîtres, avant d'être nommés provisoires, attendirent 18, 17, 14 mois et d'autres 7, 5, 4, 3, mois ou 1 mois 1/2 ; avant d'être nommés aspirants, certains postulaient 7ou 10 mois et d'autres, 2 ou 3; une fois nommés aspirants, ceux-ci n'obtenaient leur promotion qu'après plus de 3 ans, de 2 ans, d'un an, et ceux-là, après 8, 3 ou 2 mois. Tels maîtres provi- soires avaient à patienter 5 ans 1/2, 5 ans, 4 ans 1/2. 3 ans, 2 ans 1/2, 2 ans et tels, un an tout juste ; enfin si tels répétiteurs de 2e classe piétinaient 8 ans 1/2, ou 6 ou 4 ans, tels autres étaient, après 15 jours, nommés à la 1er* classe 6. En faisant leur part aux noies du Proviseur, du Recteur, des Ins- pecteurs, le Ministre réglait de plus en plus la carrière des maîtres ; 1. Cf. note 1-2, p. 59, blâme cite du 16 nov. 1821 et lettre cit. du 9 janv. 1832. — Cf. Lettre de Guizot au Proviseur, 6 cet. 1834 et lettre du Recteur audit Proviseur, 10 ocf. 1S34 ; Arch. L. le Gr., Corr. admin., V, 2778 et 2790 — 2. Lettre du Recteur au Proviseur, 5 févr. 1828, Arch. L. le Gr., Corr. admin., II, n° 909. — 3-4. Arch. Nat. FHh 3104, n» 53 ; lettre de Champagne au Gr. Maître, 22 févr. 1810. — 5. Décret du 17 août 1853, art. 4 — 6. Toutes ces affir- mations sont prouvées par l'analyse comparative de tous les dossiers des maîtres, contenus notamment dans les registres du Personnel, aux archives de L. le Gr. LE PERSONNEL I MAITRES 61 il les choisissait, il les nommait, il les déplaçait, il les révoquait, il décidait de leurs promotions. Ils lui appartenaient parce qu'il les payait. A vrai dire, pour avoir des maîtres à lui, le Proviseur de Louis-le- Grand avait imaginé, quelque temps, de les mettre en marge du budget universitaire. Nos maîtres surnuméraires, expliquait-il, en mars 1833 *, ne reçoivent aucun traitement de la maison, mais ils sont rétribués par les répétitions particulières, demandées par les familles et payées par elles. Le prix de ces répétitions est fixé à 18 francs par mois et il est permis à chaque maître supplémentaire d'en avoir jusqu'à six... Cette ressource des répétitions étant éventuelle, il n'y a pas un de ces maîtres qui n'aspire à devenir maître de quartier ». Aussi bien, une fuis maître de quartier, il avait un traitement fixe. Ce traitement fixe, pour les maîtres titulaires, était, en 1800, de 400 à 700 francs 2 ; entre 1804 et 1853, de 1200 francs, qui pouvaient être élevés jusqu'à 1500 francs, après 10 ans de séjour à Louis-le-Grand et à 1700 francs, pour les maîtres admissibles à l'agrégation 3 ; de 1859 à 1891, les maîtres répétiteurs à Louis-le-Grand eurent, suivant leur classe, 1200, 1500 ou 1800 francs * ; ils obtiennent aujourd'hui de 2300 à 4900 ; et même, quand ils sont assimilés aux 'professeurs de collège, ils peuvent atteindre francs *. Ces augmentations sont, depuis 1891, beaucoup plus sensibles que celles dont les administrateurs et les professeurs ont bénéficié ; comment s'expliquent-elles ? Tout d'abord, elles comprennent le» indemnités du logement et de la nourriture. Jusqu'au 1er janvier 1892, l'internat des maîtres était obligatoire s. Mais chaque maître, fùt-il marié, veuf avec enfants ou soutien de famille, avait l'obligation d'habiter seul au lycée 7. On avait pu jadis, dans la première partie du xixe siècle, admettre, en fait, les professeurs mariés dans les appartements disponibles à Louis-le-Grand 8. Pour les maîtres, rien de pareil. Ils étaient réputés célibataires. En réalité, presque tous se condamnaient, de bonne grâce ou non, à buuder le mariage. La congré- gation laïque, rêvée par Napoléon, pour l'Université, avait en eux ses représentants suprêmes. 11 était besoin, pour ces maîtres, d'un courage peu commun pour céder aux tentations conjugales et se risquer 1. Rapport du proviseur Pierrot à l'Inspecteur général, le 11 mars 1833 F17 3183.— 2. Etats des appointerons au Coll. de Paris; pluviôse an VIII. P17h 3517', n° 22 ; vend. an 23'' ; 9 fructid. an IX. A. Nat. II 2558, doss. 7, n° 36. — 3. 4e trimestre an XII [commencé le 1er messidor an XII, ou 20 juin 1804], A. Nat. FHb 3517», n 27 ; id. 1" trimestre an XIII, ibid. arrêté du 5 août 1828, art. 3 et 8 ; décrets du 16 janv. 1817. art. 30 et du 17 août 1S53, art. 12—4 Déoreta du 27 jnill. 1857. art. 10 ; 27 janv. 1877, art. 8. — 5- Dé- crets du 29 août 1891, art. 2 20 mai 1897, art. 1 ; 18 dot. 1901, art. 1 ; loi bud- gétaire de 1910. — 6. Décret du 29 août 1891. — 7. Règlent, du Prytanée, juill. 1801, Tit. III, art. 6; A. Nat. H 2528. — 8. Supra, p. 35. 62 L ORGANISATION MODERNE à fonder un foyer précaire nous connaissons 2 de ces audacieux, en 1829 1 ; 2, en 1833-1 2 ; 2 encore, en 1851 3 ; 2, en 1885, et 4 en 1891*. Il leur fallait prélever sur leur traitememenl îa somme nécessaire pour loger hors du lycée leur femme et leurs enfants. L'externement accordé aux maîtres répétiteurs *bis eut pour effet certain, le mariage de 300 d'entre eux, en 5 ans. A Louis-le-Grand, dès 1896, un tiers avait déserté les bannières du célibat 6. En 1891, l'indemnité de logement avait été eslimée au même prix qu'en 1853 500 francs, elle ne fut même que de 300 francs, pendant l'année 1891. Ce qui nous semblerait aujourd'hui quelque peu idyllique. D'autant mieux que l'indemnité de nourriture fut, elle aussi, évaluée à 500 francs 6. L'obligation de s'asseoir à Louis-le-Grand, autour de la table com- mune Gbis, élait beaucoup moins pénible aux maîtres que leur inter- nement. Des couverts d'argent ne leur furent donnés qu'à partir de 1845-6 7. Jusqu'à 1918-19 quelques uns de ceux qui se réjouissaient déloger au dehors avaient conservé l'ancienne tradition de prendre ensemble leur repas 8 ; et, pendant la guerre de 1914-1918, ils rendaient volontiers hommage à la qualité et à la préparation des mets. La conversion, en espèces monnayées, du droit des matlres au logement et à la nourriture ne suffit pas, bien entendu, à expliquer les i. A. Nat. FHh 78485, n° 41 1 juill. 1829 ; et 21 2. Et 24 cé- libataires ; A. Nat. FHh 78486, n° 20 à la même date, 11 prof, mariés et. 4 cé- libataires.— 3. MM. Beauvais et Bastide. —4. Au terjanv. 1891, dans l'Université de France, il y avait 132 maîtres répétiteurs mariés sur 1685. Communicat. de M. Guillo. — 4bis. Depuis 1903, logent au lycée les seuls surveillants d'internat. — De 1892 à 1902 y logèrent ies répétiteurs dits divisionnaires ».Les répétiteurs dits " généraux internes i pouvaient loger au dehors, mais, sans indemnité de logement. Seuls les répétiteurs dits généraux externes » recevaient, pour leur logement au dehors, une indemnité de 500 fr. ; cf. décret du 20 août 1891. art 20. — 5. Au 31 déc. 1896, dans l'Université, 422 maities étaient mariés sur 1772, dont 9 à L. leGr. Communicat. de M. Guillo. — En 1917, à L. le Gr , il y avait, parmi les maîtres, y compris les mobilisés, 2 veufs. 7 mariés et 6 célibataires. — 6. Aujourd'hui à L. le Gr. cf. note 8, le chifire forfaitaire de la nourriture est évalué 600 fr. par an. Contrat entre le Proviseur et les surveillants d'iuter- nat. — 6bi3. Règlem. de police pour les Lycées, 19* sept. 1909; § IV des maîtres d'étude, art. 24. Ils [les maîtres d'étude] mangeront avec les élèves. Par exception, en 1830-1, 3 maîtres et en 1832-3, un maître à L. le Gr. n'étaient pas nourris ; A. Nat. Fi'n 78485, n° 88 et 784*6, n° 7 — Cf. arrêté du 17 mai 1833, art. 4, Arch. L. le Gr., V, n° 2508. — 7. Arch. L. le Gr., Gorr. admin., VIII, n°7075; lettre du Recteur au Proviseur, qui avait demandé un crédit de 1500 fr. pour l'achat de 3 douzaines de couvert d'argent, à l'usage des maîtres — 8. Les maîtres qui prenaient leurs repas à L. le Gr. versaient mensuellement 60 fr. à l'Economat, en 1919 ; en 1916-7, trois répétiteurs étaient dans ce cas. — Ces maîtres peuvent prendre au lycée leurs repas, même pendant les vacances, et ne versent rien à l'Economat, s'ils mangent au dehors. Ils ont une salle à manger spéciale. Le menu est celui des élèves, un peu plus copieux. LE PERSONNEL MAITRES 63 récentes majorations de leur traitement. Aussi bien, d'autres causes ont agi. Laisser subsister plus longtemps un fossé, entre les maîtres et les professeurs, a paru, non sans raison, dommageable aux intérêts universitaires. Les collaborateurs d'une même œuvre ne peuvent guère s'ignorer mutuellement sans péril ; à Louis-le-Giand, maîtres et professeurs gagnent souvent à se rapprocher et les élèves n'y perdent jamais nous l'avons vérifié bien dts fois. Il n'était donc pas mauvais de diminuer l'écart entre le traitement accordé à un professeur débu- tant et à un. maître proche delà retraite. Et puis, à ceux des maîtres qui ne s'évadaient pas du répétitorat, il était bon que le répétitorat permit de vivre ; il fallait qu'il pût, au besoin, se suffire à lui-même. 'Enfin si les traitements des répétiteurs furent relevés plus que beaucoup d'autres, depuis un quart de siècle, c'est peut-être que, pendant trois quarts de siècle et davantage, on les avait négligés, sinon oubliés ; on fit beaucoup pour eux, depuis 1891, parcequ'avant 1891 on avait lait trop peu. Toules ces raisons de se mettre hors de page, les répétiteurs ne les découvrirent pas en un seul moment ; elles étaient anciennes. Mais un jour est venu où ils ont su les grouper, les ordonner, les faire valoir et, grâce à certains appuis, assurer leur triomphe. Les maîtres étaient une des victimes de l'internat ; c'est à la défaite de l'internat que l'opinion jugeait équitable d'associer leur victoire. Et, dès 1902, à Louis-le-Grand, où l'internat jadis ne se concevait guère sans les maîtres titulaires, les maîtres provisoires par excellence ont un nom significatif ce sont les surveillants d'internat '. Maîtres stagiaires et maîtres titulaires, tous avaient fini par être en- globés dans le corps enseignant ; dès 1839 2, l'Université avait adopté jusqu'aux surnuméraires. Leurs émoluments furent assujettis, comme ceux des maîtres provisoires et des maîtres définitifs, aux retenues pour la retraite. Tous étaient invités à contracter un engagement décennal. Ils devaient se vouer à l'Instruction publique, puisque l'Université leur faisait une carrière, de mieux en mieux définie, soit dans le présent soit dans l'avenir. 1. Ils sont choisis par le Proviseur décret du 31 mai 1902, art. 2, § 4 et décret du 1 sept. 1904, art. 1 ; ils ont 400 Ir d'émoluments annuels ; quelques-uns ce- pendant sont au pair; ils sont, de plus, lo^és, nourris, éclairés, chauffés. Tons ou presque tous font de la médecine, de la pharmacie, du droit ou préparent soit une licence, soit l'examen d'entrée d'une grande Ecole. Leurs fonctions consistent à assurer, tous les jours, les services dans toutes les études, dans tous les dor- toirs, depuis le soir à 19 heures jusqu'au lendemain, à S heures ; le service des dimanches, congés et vacances, ainsi que les services hors du lycée promenades, théâtres, etc.. Ils assurent le remplacement des répétiteurs absents, moyennant une rétribution supplémentaire.— Un contrat particulier est passé entre le Pro- viseur de L. lo Gr. et cliaqu- surveillant d'internat. — 2. Ord. roy. du 17janv. 1839 et circul. ministér. du 1" mars 1839; Arch L. le Gr., €>»>•. admin., VI. n> 3935. 64 L ORGAMSATIOE MODERNE Le présent, c'était la besogne quotidienne et les fondions assignées à chacun par le Vice-Recteur et le Proviseur. Il fallait à Louis-le-Grand prélever annuellement *, sur le nombre des maîtres, les surveillants gé- néraux, dont le nombre varia de 2 à 4 ; les maîtres — 3 à 5 — chargés des classes élémentaires ; le secrétaire de l'administration, aidé ou non d'un adoint ; le bibliothécaire ; les préposés à l'infirmerie, au parloir, aux arrèls ; les maîtres de quartiers, chargés chacun d'une étude le nombre des études a varié semble-t-il de 9 à 23 2. Enfin, pour remplacer les maîtres absents ou malades, il fallait encore des maîtres suppléants, surnuméraires, supplémentaires ou auxiliaires. Le Vice-Recteur, les Inspecteurs généraux, leMinistre ratifiaient, chaque année, ou modifiaient les désignalions proposées par le Proviseur ; ils lui demandaient, sur chaque maître, des appréciations écrites et motivées. Il va de soi qu'un maître, qui avait convenablement rempli ses fonctions, était maintenu, d'année en année, tant que s'y prêtaient ses désirs, ses intérêts person- nels ou les nécessités de la maison. Dans ses lignes essentielles, le tableau de service des maîtres subsistait donc plusieurs années de suite 3. Surveillance assidue, direction intellectuelle, direction morale des élèves * tout cela était exigé, en principe, des maîtres de Louis-le-Grand or, ce que réclamaient d'eux les règlements du Prytanée en sept. 1800* et en juillet 1801 8, les statuts des collèges, en 1 814 7 et 4821 8, le deman- 1. Sur ce point, la principale source est l'Etat du Personnel, dressé chaque année par le Proviseur et transmis aux Insp. génér. et au ministère. Un des plus anciens est celui de [1820J, A. Nat. Fl~* 32. Nous avons consulté tous ceux qui sont conservés aux Arch. Nat. depuis la Restauration jusqu'en 1873. A. Nat. FITh 86471, liasse L. le Gr. F, n°3. — 2 Voici quelques chiffres d'après les Palmarès surtout 13 études en 1812-3 ; 11, en 1813-14 ; 17, en 1829-30; de 15 à 18 jusqu'en 1847-8; de 14 à 23, de 1848-9 à 1869-70 le 3 nov. 1866, le ministre autorisa une 23° étude, A. Nat. F17h 82784, liasse B, n 23 ; cf. le tableau des 22 études, le 20 oct. 1864, ib. n 7 ; sous la 3e République, le maximum a été 21 en 1883 4 et 1884-5, et le minimum 9 en 1908-9 et 1914-5. — Cependant pour 31 années, ni les Palmarès, ni les registres des notes hebdomadaires, ni les documents ne nous ont donné le nombre précis des études ; de 1800 à 1812 ; de 1815 à 1817 ; de 1819 à 1829 ; en 1838 ; de 1853 à 1855. — 3. Ce que prouvent les Etats annuels du Personnel et les Registres dud. Personnel. — 4. Le premier proviseur de L. le Gr., Champagne, en l'an IX, Vues sur l'organisât, de l'Instr. publ. B. nat Rp. 14178, p .1, recommandait aux maîtres la moralité, la conduite, l'éducation, les soins physiques ; ils appren- draient à leurs élèves leurs devoirs à l'égard de l'Etre suprême, d'eux-mêmes, de leurs parents, de leurs semblables, de leur patrie. » Tit. III, art. 1 p. 3, ils se concerteront avec les professeurs, afin de bien connaître la nature des devoirs et des travaux, exigés des élèves. Ils s'appliqueront surtout à suivre exactement la méthode de l'enseignement adoptée par le Professeur ; art. 2-4, inspection des devoirs, etc. Tit. IV, art. 8 ; ils feront réciter les leçons, etc. — 5. Règlem. du Prytanée, 22 fructid. an VIII [9 sept. 1800], lit. VI, art. 39-54. — 6. Règlem. du Prytanée, thermid. an IX, tit. II, art. 7. — 7. § V, art. 20-29. — 8. § VI, art. 39-50. LE PERSONNEL I MAITRES ho dèrent, et presque dans lès mêmes termes, à tous les maîtres de l'L'ni- Versité de France. Sur ce point particulier, ainsi que sur tant d'autres, l'Université fut donc comme la filiale de notre maison. De son réveil jusqu'à son coucher, p»ndant la journée et pendant la nuit, chaque élève était, sauf pendant les classes, — et encore ! * — confié à la sollicitude d'un maître. Ce maître devait en principe remp'acer la famille et remplacer le professeur, auprès de l'enfant ; former ses ma- nières, tremper son caractère, nnidnler son esprit ; diriger ses devoir*, faire réciter ses leçons ; donner sur lui des notes quotidiennes et libeller des rapports hebdomaires2. Il se devait à tons et à chacun. Une pareille lâche tendait presque à élever chaque maître à la dignité d'un Grand maître, mais d'un Grand maître à traitement minuscule. Aussi, même à Louis-l^-Grand, devait-elle échouer. Et nous aurons, avec quelque détail, à dire comment*. Pour l'accomplir, il eût fallut l'âme d'un Rollin et le zèle d'un apôtre. Ce que trouvait trop souvent le proviseur, c'était bien autre chose l'égoïsmeel le dégoût, la défiance vis-à-vis de l'élevé, du surveillant général, du censeur, du proviseur ; la crainte de se compromettre et le ferme dessein de s'affranchir *bi\ Au fond de la plupart des révoltas qui agitèrent Louis-le-Grand4, on trouvera la haine des élèves pour certains maîtres et le désir de prendre sur eux une belle revanche. Dans les rancunes tenaces de tant d'intern"s5, contre l'ancien internat, le souvenir de tel maître d'étude se mêle encore. Ces élèves et les mânes de leurs anciens se consoleront-ils, à la pensée que quelques maîtres ont pu crucifier l'administration plus cruellement encore que les écoliers ? Ce fut surtout sous le consulat de M. Rinn que le conflit des maîtres d'étude et du proviseur provoqua des cri-es aiguës 6. 1. En eftet, nous verrons que, pendant leurs c'as^es. quelques profes- seurs de Louis le Gr., M. Arvers par ex , se voyaient, parfois obligés de recourir à un maître, chargé de surveiller les élèves, lnfra, pp. 348. — 2. Kn mars 1833, les lnsp. génér. disaient, au sujet des maîtres à L le Gr Chaque maître d'étude est tenu de corriger les devoirs de S élèves par jour, d'examiner l'écriture des copies de tous et de l'aire réciter les leçons d'un assez grand nombre... Les maîtres d'étude envoient tous les jours au Bureau leur rap- port sur le travail, la conduite, les faits accidentels ils envoyent le samedi une note hebdomndaire générale... etc. A Nat. Fl~n 78486, n° 44. — On trouvera, infra, pp. 95-99, à propos des élèves illustres de L. le Or., de nombreuses appré- ciations émanant de leurs maîtres d'étude. — 3 lnfra, pp. 429 431 et suiv. — 3bi». Rapports du Proviseur, 31 juill. 1846 A. Nat Fl"" 7^i-' dans les malles, les valises, les sacs de voyage, et, à leur défaut, sous le rempart improvisé de toiles cirées, plus ou moins précaires. Et les caravane- parlaient à l'assaut des dili- gences aux lianes luisants et rebondis5. L'administration dé- signait à chacun de ces gioupes nomades l'homme de confiance res- ponsable de toute cette jeunesse. Les fiais de route étaient à la charge du Pryiaoée, qui essayait vainement de h-s écarter. Quand ils éiaient avisés à temps, les parents accouraient ou écrivaient, pour applaudir ou pour protester, lis obtenaient parfois des échanges, entre leurs enlarrts et d'autres écoliers ; les destinations, mais non sans peine, pouvaient être modifiées ou le dépait reiaidé. La hâle napohonienne de peupler les lycées, tout récemment du sol français, était telle que les élèves risquaient d'arriver avant l'heure en 1803 39 élèves du Pry- tanée p truient à Marseille, avant l'ouverture du lycée, et il fallut écrire au ministre, pour savoir où loger tons .es jeunes gens, comment les nourrir et les équiper. Et les convenances, tirées du domiciledes familles, n'embarrassaient pas toujours le ministre ' à défaut du lycée de Nîmes, ou désignait un jeune Corse pour le lycée de Metz ; les lycées de Montpellier et de Poitiers recueillaient de petits seplenfri lyc e de Bourges, de 1. A. Nat. F17 4262 -2. A Nat. H* 25^8, . u° 7 24 plov. an VIII [13 févr. 1800], etc — 3. A. Nat. Il 2441. — 4. A. Nat. ; 2441, I" 29 r et v°. - 5. A. Nat. F1" 4260; places .lans les diligences, etc. ; II 2532, liasse A id. — 6. 10 floroal an XI \ 30 avr 1S03], lettre du fténeial I. f bvre, ^ plaignant de la destination de son neveu pour le lycée. île Boni. 'aux, A. Nat. II 2441, ° 30. 72 l'organisation moderne petits parisiens; le lycée Je Limoge», des Dauphinois et des Lyonnais1. Hospitaliser des étudiants pari-ieus et des écoliers promis aux lycées bretons, aquitains, provençaux ou alsaciens, là n'était pas, bien entendu, la principale destination du Collège de Paris. Sous le Consulat et au début de l'Empire, le Prytanée devait, avant tout, élever, aux frais de la patrie, les {ils de ceux qui étaient morts pour elle2. Il était .spécinle- ment chargé d'acquitter, au nom de la France, la dette d'honneur de la France. Tons ses élèves, devenus les pupilles de la Nation, devaient être, par suite, des boursiers nationaux. Il en résultait que, pour entrer au Collège de Paris, en qualité d'élève, il fallait une nomination en règle, comme pour y entrer en qualité d'administrateur ou de professeur. C'est du Premier Consul lui même qu'elle émanait3. Aucun enfant estropié ou contrefait n'y pouvait pré- tendre 4, et aucun qui ne sût lire et écrire '. Les admissions .ivaient lieu deux fois par an, le 1er Germinal et le 1er Vendémiaire*. Chaque élève nommé devait être présenté à l'agent comptable par un citoyen domi- cilié à Paris, et qui devenait son correspondant7 ; sur le vu de l'acte de nomination et de l'acte de naissance, l'élève était admis à un double examen le premier, d'ordre médical, était confié aux officiers de Santé du Prytanée et devait constater que l'élève n'avait aucune ma- ladie contagieuse, ni quelque infirmité, le meltant hors d'état de suivre les exercices du Prytanée8; à délaut d'un certificat de vaccine, l'enfant était, le plus tôt possible, inoculé9. Le second examen, d'ordre intel- lectuel, était confié au ciloven instituteur du Collège de Paris et devait constater les capacités et dispositions de l'enfant 10. Dès le Ie' Pluviôse an IX, [21 janvier 1801], il fallut bien, entre ces pupilles de la nation, qui risquaient, hélas, de se multiplier, tenir compte des différences de fortune n'auraient une bourse entière que ceux dont le revenu paternel serait inférieur à 3 000 francs u. Il y eut donc désormais des fractions de bourse 12. Malgré tout, les divers collèges du Prytanée, collèges de Paris, de Saint-Cyr, de Saint-Germain, de Compiègne, ne pouvaient suffire à héberger tous les orphelins de la guerre, nommés par Bonaparte. La création des Lycées vint donc, fort à propos, au secours de l'ancien 1. A. Nat. H3 2528, n° 20. — 2. Règlement général du Prytanée, thermidor an IX, A. Nat. H8 2528, petit liv. in-16, titre I, art. 1 ; Bibl. Nat. R 22319. — 3. Ce que dit Bonap. aux élèves du Coll de Paris, le 6 prairial an IX [22 mai 1801], A. Nat. H 2558, dosa. XXVI. — Règl. therm. an IX, tit. I, art. 10 — Cf. Délibérât, de l'admin. du Prytanée, 2 vend, an IX. A. Nat. H. 2528, n° 14. — 4. Règl. du Prytanée du 22 fruct. an VIII [9 sept. 1800], tit. II, art. 2 ; Règl. de therm. an IX, tit. III, art. 9.— Cela s'explique par ce fait que le Coll. de Paris, dans le principe, était avant tout militaire. — 5. Règl. du 22 fruct. an VIII, tit. II, art 9. — 6. Id. art. 11. — 7. A. Nat. H3 2528, n° 14, Délibérât, de l'adm. du Prytan. cil art 3. — 8-9 Id. art. 4, ibid. — 10. Id. art. 5, ibid. — 11. A. Nat. M 158, art. 1. — 13. Ib. art. 3 ; A. Nat. H* 2542, liasse B. LE \ ELEVBS 73 Prylanée. Et ces jeunes gens, qu'un ordre ministériel distribuai!, pres- que tous les mois, entre les points les plusopposés du territoire, c'étaient justement ceux des boursiers de la Nation que les locaux du Prvtanée étaient impuissants à abriter plus longtemps1. Dès le milieu de 1803, l'afllux des candidats vers les bourses natio- nales avait rendu nécessaire, entre eux, un concours * ; la distinction des esprits s'ajoutait ainsi à la distinction des fortunes pour instituer, entre les pupilles de la nation, des inégalilésque la ferveur républicaine avait jadis voulu proscrire. Après l'Empire, le système d 2530, liasse 3, n» 23 9 juill. 1872, A. Nat. 82784. liasse B, n» 48. — Aujourd'hui encore, existe à L. le Gr. la bourse Chevallier ville de Beauvais, au taux de la division de grammaire. 74 L ORGANISATION MODEKNE tinaient à des Ecoles supérieures de l'Etat, pour la préparation des- quelles Louis-lé'-Grand semblait tout spécialement désigné *. L'usage de ces bourses communales avait précédé le Prytanée et l'usage des bourses nationales ; l'Ancien régime l'avait pratiqué 2. Il se confondait alors, en plus d'un cas, avec l'usage des bourses collégiales ou familiales. Louis-le-Grand possède encore aujourd'hui dps bourses collé- giales. Cbaque année, le Proviseur les attribue aux eandidatsauxgrandes Ecoles Normale, Polytechnique et que leurs succès antérieurs ont spé- cialement désignés 2bis. On se demanda, en 1845, si ces bourses-là avaient été juridiquement abolies par la Révolution8. Et autres, les bourses de la fondation Forlet, qui remontait à 1394, ne parurent pas au Proviseur avoir été frappées de déchéance légale, puisque les biens de cette fondation avaient été vendus, en partie, comme biens na- tionaux, et, en partie, attribués, comme destination, au Prytanée français 4. De nos jours les représentants de quelques unes des plus vieilles familles élevées n Louis-le-Grand *bu ou dans les Collèges réunis à notre Collège, de 1762 à 1764, ont donc le droit de revenir encore dans l'illustre maison, que leurs deniers ont contribué jadis à entretenir ils ne sont point, pour elle, des étrangers. Et plusieurs ont raison de s'en souvenir. Ils sont la p-euve, entre mille autres preuves, que tous les liens qui attachent le présent au passé ne meurent point. A ces boursiers nationaux, communaux ou familiaux s'en ajoutaient d'autres, d'une catégorie très originale ceux qui étaient destinés à servir plus lard les intérêts français dans le Levant. C'étaient ces Jeunes de Langue, hérités , de l'Ancien régime, dont nous avons parlé déjà * et dont nous aurons à reparler encore 6. Us étaient internes. L'internat pour quelques privilégiés revêtit, enfin, pendant près d'un siècle, une forme particulière à Louis-le-Grand. Chacun des Sous- directeurs logeait, dans son appartement, 8 ou. 10 élèves » ces élèves travaillaient ensemble, à proximité de son cabinet, dans une salle d'études, et ils dormaient, en dehors du dortoir commun. Chaque éco- lier ne pouvait avoir une chambre séparée, puisque l'exiguité des locaux s'y refusait ; tous se contentaient de ce qu'on nommait une chambrée 7 ». Pour les classes, les ré'ectoires, les récréations, les i. Ex. pour le 8 oct. 1869, A. Nat. FH" 82784. liasse B, n° 42. — 2. V. notre précédent volume. — 2bU. Les crédils s'élèvent annuellement à 3000 ou 4000 francs ; ils sont, votés par le Conseil d'administration du Lycée. — 3. Arch. L. le Gi\, Corr. coll., V, n° 5S97 ; Lettre du Proviseur au Ministre. — 4. Id. ibid. — 4bis. Aujourd'hui encore, existent. bourses Maillard, pour deux enfants de Vimoti tiers, deux bourses de 783 fr. chacune existaient déjà en 1845j; bnurse Vinas d. En 1919-20, il y a encore un jeune de langues à L. le Gr., l'élève Saugon. — G. Infra, p. 80-S2. — 7. Observât, des Insp. généraux, sur ces cham- LE rEKSO.\>EL ELEVES i > promenades, ces élèves se retrouvaient m A lés à \a masse de leurs camarades. Ce contact avec des tcohers de leur h^e valait mieux p^ut être que l'isolement de la chambrée, où entants et jeunes gens vivaient à proximité. Les parents des élèves spécialement confies aux Sous- directeurs n'en gardaient pas moins l'illusion que leurs rejetons, grâce à ces petits pensionnats, à l'intérieur du grand pensionna, étaient l'objet d'une sollicitude attentive, capable de réformer les caractères et de stimuler le travail, ht ils estimaient heureusement placés les 600 ou 800 francs, dont i! rétribuaient annuellement ce supplément de sur- veillance l. Comme l'internat, l'externat avait, lui aus>i, ses privilégies celaient les jeunes gens que leurs familles confiaient aux institutions ou aux pensions, sous le prétexte, assurait le proviseur Laborie, vers 18-!ti, qu'ils ne pourraient supporter le régime trop sévère des coll royaux 2 ». Internes dans ces pensions, ces élèves étaient conduits, comme ies externes, à Louis-le-Grand. Depuis l'an Vlil, jusqu'à nos jours, près de 150 institutions ou je li- sions ont l'ait profiter leurs élèves de l'enseignement donné à L mis le- Grand 3. Pendant trois années seulement, de l'an IX à l'an XI, c'est à. dire de 1801 .i 1803, notre maison ne reçut, ce seoible, aucun ex- terne de ce genre. Le nombre des pensions attachées à Louis-le-Grand varia de 1 a 2, entre l'an XII 1803-4 et 18U8 ; il fut de 6, en 1803-9, puis fut presque toujours supérieur à 10, de 1809-10 à 1852-3 ; il atteignit 15, en 1839-4, 16, en 1818-19, 1828-9, 1843-5 ; 19, en 1845-6 *; et il se hau-sa jusqu'à 21, en 1813. Depuis 1853 4, ce nombre descendit au dessous de 10 unités et, à partir de 1860-1, presque toujours au dessous de 5. Depuis 1894, une seule iusiitu ion, mais elle est llorissanle, continue à conduire ses élevés aux classes de Louis-Ie-Grand c'est l'Ecole Bossue t. Additionner annuelleme il ces Institutions ne suffit pas ; il faudrait savoir, année par année, le toial des élevés de chacune, [tour mesurer son importance relative. Impossible de mettre sur une même ligne telles pensions qui envoyaient un seul élève, comme le faisaient, en 1820-21, les pensions Andiieux, Maissas, Massin, Poitevin, Chymay •, ou, en 1825 6, la pension Constant — et telles autres qui, a la même époque, en avaient quarante à cinquante pensions Savouré Gandon, br.''ev le 2*5 mars 1846, A. Nat. F"h 78487, n» 54; id. en 184" , n 2; id. 14 mars 1849, ib. n° 128; i'"' J50, ib. n° 131 ; id. 8 avr 1852. té. n 202; 1 avr. 1854, ib n225. -Cf. supra, — 1. / Weiss, de 1839 à 1^47 et l'institution Démare eut, en 1841-2. Henri Meilhnc dont les parents habitaient cependant tout près de Louis le Gr., 3 rue Racine. — 2. Ainsi, Sainte Barbe, en 1847 et 1849, A. Nat. FlTn 78488, n»» 2 et 140 ; rapports de l'Insp. génér.— 3. A. Nat. F'"» 78488, n. — 5. Voici les derniers chiffres 5 nov. 1920 Pensionnaire?-, 296; demi-pensionnaires, 232; externes surveillés, 32; externes simples, 971. 82 L ORGANISATION MODERNE sième Irait la majorité de ces externes fut, jusqu'en 1870-1880, fournie par les Pensions et Institutions ; depuis cette date, cette majorité est fournie par les externes logés chez leurs parents. En additionnant la somme de ces différents groupes, — boursiers et jeunes de langues, internes payants, demi-pensionnaires et externes — i nous obtenons des totaux d'ensemble, dont le graphique est instructif 1 . Son tracé serpenteautour de 1,000. Avant 1832-3, un effectif supérieur à élèves semble avoir été exceptionnel, avec 1164, en 1812-3, et 1053, en 1817-8 ; mais c'est l'époque ou les lacunes documentaires sont le plus nombreuses. De 1833-34 à 1888-7, l'effectif est sauf pour 5 ou 6 années après 1850, constamment au-dessus de élèves et fréquem- ment au-dessus de Il atteint en 1868-9; 1432, en 1881-2; et le maximum avant 1920, 1509, en 1886-7. A ce moment, ouvert depuis le 1er octobre 1885, le petit lycée de Louis-le-Grand, Montaigne, achève de s'organiser et désormais, jusqu'en 1909-10, il y a moins de élèves, rue Saint-Jacques; la courbe des effectifs plonge même jusqu'à 756, en 1890-1, chiffre que notre lycée n'avait plus connu, ce semble, depuis 1808-1810. Aujourd'hui la courbe ascenlionnelle est reprise, et, depuis la dernière guerre, plus que jamais 2. En somme, depuis 1812-3, cette courbe a fléchi cinq fois trois fois, à la suite des événements politiques la chute de Napoléon I, de Louis- Philippe, de Napoléon III ; deux fois, à la suite de la création des deux filiales de Louis-le-Grand, Vanves, d'abord, Montaigne ensuite. Et si, de ces cinq crises, la plus malaisée à dominer fut la dernière, ;cela tient sans doute à ce que, de 1885 à 1914, toute une éclosion de lycées nou- veaux surgissait dans Paris et sa banlieue, qui attirèrent à eux une clientèle nombreuse. De 1803 à 1819, il n'y avait eu que quatre lycées parisiens3 et cinq, de 1820 à 1864 4. Il y en a aujourd'hui quatorze 5. Et d'ailleurs, n'était-ce pas l'époque où la campagne contre l'internat battait son plein et Louis-le-Grand ne passait-il pas pour avoir toujours été l'immuable bastille de l'internat6? Jusqu'à quel point ce vieux renom était-il justifié ? Pour le savoir, nous avons calculé, aux intervalles que les documents nous permettaient de choisir, le pourcentage des internes boursiers ou non, des demi- pensionnaires et des externes externes libres ou externes de pension ; et nous avons dressé le tableau que voici 1. V. Appbndice F*. — 2 Appendice F* 1913-4, 839; 1914-15, 1105; 1915-6, 1248; 1916-17, 1190 ; 1917-18, 1367 ; 1918-19,1250; 1919-20, 14S1 ; 1920-21, 1531. — 3. Louis îe Gr., Henri IV, Charlemagne, Bourbon Condorcet, S. Louis. — 4. Lycée du Prince Impérial Vanves ou Michelet. — 5. Outre les 6 lycées cités ci-dessus, Lakanal, Montaigne, Janson, Buffon, Voltaire, Carnot, Pasteur, et le coll. Rollin. Cf. notre livre Les Ecoles, lycées, collèges de Paris ; Paris Laurens ; 1913, in-4». — 6. Cf. A Nat. Fa 93185 ; 22 et 23 avr. 1883, sur la ré- percussion, à la Chambre des Députés, de la révolte de L. le Gr. de 1883. LE PERSONNEL ELEVES 1 Années , i Boariiera ,ntfll'nP' D?mi- -'eosiounairet Externe, J ESn-éh» 1809-10 i B. 23 o/0 00 /o J P. 27 o/0 40 Vo 1817-8 °' ° ? P. 33 o/0 i L- 15,5 o/o ^ ' * t P. 19,5 o/0 1824 5 54 o/0 4b /o i P. 34,6 »,/o 1888-9 450' $B- 8-8°/o 40 ' j P. -6,2 o/0 55 '„ 1837-8 4Q5 0- J B 8-6°''o 4y'5 '• } P. 40,4 o/o IL. 10,5 Vo 00,5 " » } P. 40 o/0 1847-8 4S o/ J B- 7 ° » 48 °/ J P. 41 °~ /o i P. 37 o/o 1858-9 » •/. ! ? Jfîfc 2°/o 38 o/0 1861-2 •/. s £ 4 7! 00 0 S L- !44 •/• ^ u ? P. 23,9 o/0 1868-9 53 o/0 •/o 0 1 L. 16,1 o/o 41 '" 1 P. 24,9 °/o 1878-9 43 Vo 9°/o 48 °/o L. 23 0/0 P. 25 Vo 1888-9 24 Vo 22 Vo -M £5% 1898-9 23 0/o 17 0 » •/. î k s % 19089 18 °/o 13 Vo 69 v0 1918-9 & i3o/0 " ° ? P- 4 o/„ 18 Vo 65 /o L'enseignement qui s'en dégage nous parait clair la prépondérance des internes s'affirme à deux moments, depuis les origines jusqu'à 18213, d'abord ; sous le Second Empila et les premières années de la Troisième République ensuite ; soil, pendant une cinquantaine d'années. Entre ces deux périodes il y a cependant celte ditîérence notable si les interne* ont été, à deux reprises, la majorité à Louis-le-Grand, c'est grâce aux boursiers, du Consulat à Charles X, et grAce aux pension- naires payants, sous Napoléon III. II en résulte que, jusqu'en 1825, la majorité ai quise à l'internat était plus factice que réelle. La décrois- sance numérique des internes s'annonçait donc, en réalite, depuis 1828 quand elle s'est aci entiiée de nos jours, elle ne résultait pas d'une fan- taisie passagère de ia mode ; elle était préparée dans le passé et le 84 L ORGANISATION MODERNE Second Empire ne réussit pas à s'opposer, d'une façon durable, aux conquêtes de l'externat. Ces conquêtes, à Louis-le-Grand, comme ailleurs, eurent longtemps besoin, pour s'accomplir, du secours des pensions Pensions ou institu- tions ménagèrent la transition entre la sévérité de l'internat de collège et l'aimable discipline familiale. Quand les dernières pensions laïques disparurent de Louis-le-Grand, en 1894 *, le* écoliers étaient, par leurs parents, jugés dignes de la liberté. Et ce fait pourrait bien marquer, dans l'histoire de nos mœurs, une date décisive. Comme le nombre des élèves, leur âge vaut qu'on s'y arrête ; les va- riations de l'opinion publique, au sujet de cet âge, n'eurent-elles pas, aussi, leur importance, dans l'histoire de nos habitudes scolaires ? Notre maison, aux derniers temps do l'Ancien Régime, nourrissait, tout au plus, cent écoliers, que l'on pouvait regarder comme enfants ; les autres étaient des hommes faits et dans la vigueur de l'âge2 ». Au xixe siècle, tout fut changé2bi5 ; il n'y eut bientôt plus d'étudiants, il n'y eut que des élèves. Pour les boursiers, un âge mini- mum, 9 ans, et un âge maximum, 18 ans, avait été Gxé, dès 1800 3. Et cela voulait dire que notre collège n'était pas fait pour les tout jeunes enfants ni pour les jeunes hommes, Point d'enseignement maternel ; point d'enseignement supérieur. On refusait même, à l'origine, de rece- voir aucun élève, payant ou non, après 13 ans révolus* ; mais un élève payant pouvait être admis dès 7 ans • et rester après 18 ans6. En peu d'années, ces beaux principes furent pratiquement oubliés. Le Lycée Impérial eut son instituteur élémentaire, dès 1805-6 7, sinon plus tôt ; en 1818, les maîtres élémentaires sont chargés d'initier les enfants, non pas seulement aux premiers mystères du latin, mais à ceux de l'écriture et de la lecture 8 ; jusqu'à l'organisation des classes enfan- tines à Vanves, en 1861, il y eut à Louis-le-Grand des minimes », de 5, 6, 7 et 8 ans ; même après cette date, et jusqu'à l'ouverture de Montaigne, en oct. 1885, d'autres minimes reparurent, rue Saint- Jacques, ceux dont la famille trouvait trop lointains les ombrages de Vanves ; en 1891-92, il fallut, pour débuter au vieux Louis-le- 1. A partir de 1894, Sainte-Barbe a cessé de conduire ses élèves à L. le Gr. ; c'est à peine si elle a fait depuis quelques exceptions pour certains élèves de Première Vétérans et de Première Supérieure. — 2. Arch. L. le Gr., Sommier, Année classiq. 1784 et 1785, f° 15 r°. — 2bis. En 1910-1, les boursiers ottomans avaient de 20 à 26 ans mais ils furent une exception. — 3. Ce que rappelle une lettre de la Commiss. de l'Instr. ministre de l'Intérieur, le 29 mars 1819, A. Nat. FI?" 3104, n° 110 et le statut de 1814, § 8, art. 37. — An IX. A. Nat. H 2441, p. 7, f 22 v et 23 r°, an XI; M. 158 ; etc. — 4-5. 8 floréal an V11I 128 avr. 1800], A. Nat. H 2532, liasse D. - 6. A. Nat. F17h 3104, pièce n° 158. — 7. Alman. impér. 1806, p. 736; 1807, p. 755 ; 1808, p. 771; 1813, p. 858, etc. — 8. Observations du proviseur de L. le Gr., à la Commission de l'Instr. publ., le 18 déc. 1818 ; A. Nat. F'" 3149, n 42. LE PERSONNEL ] ELEVES 85 Grand, avoir la gravité d'un élève de 3e ; mais jusqu'en 1800 et depuis 1892, celle d'un élève de 4e parut suffisante et la règle est demeurée depuis1. Un âge maximum ne fut pas davantage imposé aux élèves. Pour les candidats aux grandes Ecoles, la limite d'âge imposée par ces Ecoles marquait la limite du séjour à Louis-le-Grand. A vingt ans, les futurs universitaires contractaient leur engagement décennal et cessaient d'être élèves2. Quant à l'âge commun aux diverses classes, il était, avant 1860, plus vénérable que depuis*. Et l'ambition de cueillir des couronnes au Grand Concours avaient pu contribuer à retenir le plus longtemps possible les meilleurs élèves dans les classes. Dès 1869*, le proviseur et, dès 1872, l'Assemblée des professeurs6 constataient un changement dans les tra- ditions jadis, observait-on alors, les élèves n'arrivaient pa* si jeunes, dans les classes supérieures ». Depuis 1872, et surlout depuis la suppres- sion du Concours général, de 4904 à 1920, l'âge moyen pour chaque classe semble encore avoir baissé. Les rhétoriciensda 14 ans, les philosophes de 15 ans et les bacheliers de 16, ne sont pas plus rares à Louis-le-Grand qu'ailleurs et celle précocité est moins souvent une preuve de maturité chez l'enfant qu'un signe des ambitions paternelles. On veut se persuader que travailler plus vite c'est travailler mieux et l'on charge la mémoire de traverser à la course toutes ces contrées du monde intellectuel, que la réflexion n'a plus le loi-ir d'explorer. L'origiîie sccmle des élèves pourrait expliquer, en plus d'un cas, ce souci des familles. Beaucoup de ces jeunes gens avaient hâte de faire leur trouée, parce qu'ils comptaient surtout sur leur elTorl personnel et leur mérite propre, pour se faire une place, dans le monde. Sous le Consulat et au début de l'Empire, c'étaient surtout des fils d'officiers et de soldats, morts à l'ennemi 6. Et aussi, des enfants de familles ruinées7 par les dernières convulsions politiques, II ne me reste pas une obole de ma petite fortune en rentes, sur le ci-devant hôtel de ville, écrivait le père d'un de ces écoliers ; ni de mes couverts d'argent, ni de mes meubles ». Et le plus clair de son avoir, expliquait-il, c'était le nom 1. Quand, en 1891-92, les élèves de 4e ne furent plus reçus à L. le Gr., on les dirigea sur Montaigne ; dès oct. 1892, la 4e fut de nouveau admise à L. le Gr. — 2. Voilà pourquoi les Registres du Personnel contiennent un grand nombre d'élèves de L. le Gr., devenant, à 20 ans, maîtres auxiliaires de 1S75 à lv>5 surtout, les cas se multiplient. — Aujourd'hui l'Age maximum de 18 ans pour les boursiers peut être prorogé à 19 et 20 ans, par un 1er ou un second renouvelle- ment de la bourse. Quant aux boursiers ottomans de 1910, nous avons vu que leur âge était de 20 à 26 ans. — 3-4. Constatation faite le 28 juill. 1859 par M. Girard, i roviseur, Fl~» 82784, liasse B, n° 41.— 5. Arch. de L. leGr. — 6. Supra, p 72. — 7. Ainsi, les jeunes de Borthou, Annequin, Walfe-Fone, Roucher, Godin. 3 6 L-0RGAN1SAT10N MODERNE d'ami des hommes » que lui avait donné, dans une de ses lettres, le ministre de l'Intérieur1. Un autre enfant était rentré au Collège de Pari» presque nu2 ». Les boursiers, dont les parents avaient conservé leur fortune, devaient être exclus8. Et ainsi le fils du citoyen Josseî S. Ange, adjudant-général. La police ou l'administration du prytanée avertissait le ministre que cet homme n'avait jamais servi aux armées ; qu'il demeurait rue Poissonnière, avait un loyer de frs., deux ou trois chevaux, dans son écurie, uns place de frs. d'appointements et plus; une terre en ci-devant Picardie; une femme intrigante, intéresséedans lesjeux et couverte de diamants * ». i'À le ministre de l'Intérieur, Chaptal, rédamait aux admiuistrateurs des renseignements exacts sur la fortune des parents 6. » A mesure que se fit plus grand le nombre des élèves payants, le milieu social des écoliers put changer. Ne croyons pas cependantque les institu- iionsou pensions, clientes du Lycée, recru lassent toujours leurs élèves dans les familles riches. Nous avons des précisions sur les parents dont les fils étaient à l'Institution Liaufard, quand elle suivait les cours du Ly- cée Impérial sur une trentaine d'enfants nous trouvons des fils de cuisi- nier, de rôtisseur, de maréchal-ferrant, de boulanger, de perruquier, de portier, de porteur d'eau, de femme de chambre, d'ouvrier6. Ne soyons pas, non plus la dupe des grands noms, que nous conservent les pal- marès. Ils masquèrent parfois de cruelles détresses. Le 14 juin 1821, la mère d'un externe, Mme de L., dont la famille, depuis quatre siècles, fut toujours attachée à son roi », écrivait au Proviseur une lettre suppliante, au sujet d'une dette de 26 frs., et la faisait apostiller par la marquise de S. sous-gouvernante des enfants de France 7. Quand nous avons, sur le milieu social des élèves, quelques rensei- gnements précis, ils sont en trop petit nombre, pour autoriser des gé- néralisations exactes. Le 4 mai 1823, sur 36 élèves cités 8, 4 étaient fils de grands industriels ; 2, fils de basochiens ; 3, fils do' liciers su- périeurs ; 1, fils d'avocat général ; 4 appartenaient à l'aristocratie. En 1824 et 182o, des fils d'hommes politiques, de fonctionnaires, de ma- gistrats, d'officiers 9. Paul-il attendre beaucoup plus des 40 registres, dans lesquels, de 1854 à 1894, la condition sociale des patents devait être mentionnée et que les Archives du Lycée ont conservés10? Non certes. Car ces registres 1. L'avocat Angelet; 15 brumaire an IX [6 nov. 1S00], A. Nat. H3 2530, liasse 3, pièce 9. — 2. Le jeune Abresche ; 13 brumaire an X [4 nov. 1S01[, A. Nat. H? 2530. — 3. Lettres de Chaptal, ministre de l'Intérieur, aux administrateurs du Prytanée, M 158, 2t ventôse an IX [15 mars 1801 ]. — 4. Copie d'une note adressée au ministre par le Prytanée [1801J, A. Nat. H 2532, liasse D. — 5. M. 158, A Nat. ; 24 ventôse an IX, citée av. dern. note. — 6 A. Nat. F» • 1345. doss. 166 ; mars 1809. — 7. A. Nat. FH 3150, n" 29. — 8. Ibid. n» 218W». — 9. A- Nat. F»7 3176», liasse 17; 3150, n° 29i ; n° 310». — 10. Arch. L. le Gr., Registres de Classification, de 1854-55 à 1893-4. PERSONNEL ! ÉLÈVES 87 sont très incomplets. Us ne s'inléress-ent qu'aux internes el aux demi- pensionna;res el encore pas à ton?. El piis el surtout, un très grand nombre de parents n'on! pas daigné répondre aux questions relatives à leur profession un tiers, la moitié, les deux tiers, les quatre cin- quièmes se sont abstenus. En 1851-55, I58sur4i7, sont resiés muets; 1859-60, 422 sur 887; en 1865-6, 613 sur 770 ; en 1885-6, 685 sur 803 ; en 1893-4, 3HS sur 425. Après celle expérience vaine, nous comprenons qu'on ait fermé le registre. Parmi ceux qui ont répondu, les plus nombreux étaient, de 1851-5 à 1869-70, les commerçants et lis. — 9. En juillet 1^21 ; la demi-pension à L. le Gr. étant de 500 fr. et la pension de 1000. A. Nat. F»"» 3150. n>. Avec ses collègues de la Seine, le proviseur de Louis-le-Grand demanda donc et obtint que les externes payassent désormais à Paris autant qu'à Bordeaux et à Lyon 100 francs par année. En 183i, son piédecesseur aurait voulu leur imposer 120 francs; il n'avait pas eu gain de cause 4. Ce fut donc, en 18i5, une politique chère à cette époque, celle du juste milieu, qui l'emporta. Depuis 1845, le prix de l'externat a été porté à 300 et 375 fr. en 1860 ; à 450 et 700 fr. en 1901 ; à 801 fr., en 1920. Ei réalité, payer 1000 francs pour un interne, sinon 100 francs pour un extprne, sous le Gouvernement de Juillet, c'était payer plus qu'au- jourd'hui même, avant 1914, tant la valeur de l'argent a changé. Et, sans sortir de Louis-le-Grand, nous pouvons en avoir la preuve un interne, en dée. 1800, coûtait 640 fr. 77 par an 5. Il coûte, en 1919, 1988 fr. et, en 1920, 1896 fr. Il est vrai que, jusqu'au Pr janvier 1815, chaque élève, sauf dispense spéciale, était tenu de verser la rétribution universitaire dite du 20° ce qui équivalait à une cinquantaine de francs par an 6. 1-3. Lettre ds Proviseurs de Paris au Ministre, 20 juin 1845, et lettn\du Pro-1 viseur da L. le Gi\ au Recteur de Paris, 2 juill. 1*45; Corr. coll , V, n°s 6005 et 6058. — 3-4. M ibid. — 5. Rapport de l'Econome du Prytanée, 6 nivAse an IX [27 dc. 1800] Les élèves... an Coll. de Paris, ... y compris la nourriture des pro- fesseurs, des maîtres, domestiques, etc., coûtent, par an, chacun 449 fr. 95 et, pat- jour, 1,23 chacun ; plus, y compris les traitements pour l'instruction, les acqui- sitions annuelles de mobilier et son entretien... 640 fr 97.» 2532, liasse B. — 6. Arch. L. le Gr., Corr. admin., 1" janv. 1845, n° 8; Corr. coll., V, n 6005 LE PBR80N3EL ÉLÈTBS 91 Jaloux d'obtenir cotte dispense, les parents et les directeurs d'Insti- tutions ou Pensions prodiguaient parfois des trésors d'ingéniosité, Il est vrai qu'ils en tenaient d'autres e\ réserve, quand ils cherchaient à relarder le paiement des frais d'internat, de demi-pension ou d'externat. Ces traditions, cependant très anciennes, ont, de nos jours, complètement disparu. 'Juand les parents ne payaient point, leurs enfants ne pouvaient être longtemps gardés à Louis-le-Grand * car une clause essentielle du contrat scolaire, passé entre eux et l'administration collégiale, était rompue. A leur tour, les parents étaient fondés à se plaindre, quand cette administration, pour des raisons d'économie, négligeait les pro- messes faites aux familles elle surpeupîait les classes ou les études, elle avait trop d'élèves et trop peu de salles. Ainsi, sous la Restauration, quand les règlements toléraient, au maximum, 50 élèves par classe, que voyait-on, à Louis-le-Grand, en 1817? 119 élèves, en Rhétorique ; 75, dans une section de seconde; 92 et 68, dans les deux sectious de troisième ; 87 et 82, dans les deux sec- tions de 4e ; 85 et 78, dans les deux sections de 5e 2. Mêmes abus, et à Louis-le-Grand comme à Charlemagne, en 1819 3. Les choses sem- blaient rentrées dans l'ordre en 1821-22 ;. Mais, en 1829, une division de 4e avait 07 élèves K. Et, dans la suite, la Rhétorique ou les Mathé- matiques spéciales dépassèrent, à maintes reprises, nous verrons comment et pourquoi, 80. 90, 100. 410, 120 élèves6. Tout récem- ment, en 1913-4, il nous souvient, et pour cause, d'une classe de Pre- mière supérieure, où s'entassaient près de 80 élèves. Quant à séparer absolument les internes et les externes. M. Laborie put bien l'essayer et nous aurons loin à peser ses raisons 7. Elles ne convainquirent ni ses successeurs, ni l'administration supérieure. Les études, auxquelles les règlements, jadis, imposaient un maximun de 25 internes et aujourd'hui de 35, en eurent parfois de 45 à 50, et, par exemple, de 1864 à 1866 8. Enfin, l'Inspection générale, en 1817, déplorait que chaque profes- seur n'eût pas toujours un local particulier pour sa classe; il man- et6058,juin et juill. 1845; III, n» 35t33, mars 1836; A. nat. F17h 3150, n» 30-34 ; n° 210 7 mars 1823}, etc. — 1. Note ministér. 9 juill. 1821 ; A. nat. FIT» 3150, no» 30 31 ; 8 nov. 18Î5, arcli L. le Gr., Corr. coll., V, n° 6103 lettre lu liecteur au Frovig. de L. le Gr., 30 sept. 1847, arch, L. le Gr., 8614,ete. - 2. Lettre de lïnsp. pén. Rendu, 3 dov 1817. A. nat. F'" 3149, 22».— 3. Note du 24 août 1819; A. nat. FIT.. 78447.— 4. Lettre do M. Malleval au B 6 oot. 1821, et Etat des Internet- et ext. de L. le Gr. en 1821 ; A. nal il b 52 et 53. — 6. Attestation de M. Laborie, 20 mai 1829, A. nal . n» 39W cette division ^tut celle de M. Marcou. — 6. En 1869, A. nat. Fl* 82784, liasse H, n» 41. Cf. infrm, p. 375; en 1872 la Rhètor. de M. Merlet avaii 103 !.'•• it communioat. de M. Ad Adorer, oct. 1920. — 7. En 1825 et 26. A. nal. FI"» 78485, n° 4b et 6» ; et infra, p. 415. — 8. A. nal liasse B, n» 7 et 23 répartition des élèves dans les 22 éludes de L. le Gr. D2 L ORGANISATION MODERNE quait, au moins, six salles de classe a Louis-le-Grand et l'on s'y trou- vait exposé au péril de faire, dans un même local, à quelques minutes d'intervalle, une étude et une classe '. L'administration supérieure parlait d'interdire désormais aux externes l'entrée de Louis-le- Grand lbu. La folie du nombre aurait pu devenir funeste à l'avenir des élèves. Cet avenir, on était cependant très loin de le négliger à Louis-le-Grand. Le 22 mai 1801, dans la visite qu'il vint faire au Collège de Paris, Bonaparte dit en substance aux élèves Je vous ai nommés tous ; le Gouvernement et moi continuerons à penser à vous. Notre premier bienfait aura son complément vous serez placés tous, si votre conduite vous rend dignes de l'être 2. » Quatre jours plus tard, Champagne écrivait au ministre que cette promesse ne devait pas être une occasion de relâchement et d'indisci- pline pour les élèves, mais bien un stimulant *. Tous ne devaient pas être rassurés sur leur avancement ; mais tous devaient se dire on ne placera, parmi nous, que les très bons sujets ; soyons cette élite. Cham- pagne ajoutait le Gouvernement doit son aide aux orphelins de la Patrie ; mais il s'acquitte à leur égard en leur donnant généreusement l'éducation première. S'ils n'en ont pas profilé, le Gouvernement est quitte envers eux et ne leur doit plus rien ». Et le minisire, Chaptal, applaudissait aux ohservalions de Champagne *. En fait, à leur sortie du Collège de Paris ou du Lycée Impérial, les élèves pouvaient être nommés, après examen militaire spécial, sous- lieutenants dans les troupes de terre, ou, après le stage de navigation indispensable, aspirants de marine ; la diplomatie, les finances publiques, l'administration en recueillaient quelques-uns 6. Pendant la Restauration, le Proviseur continuait à ménager à quelques élèves l'entrée des fonctions de l'Etat 6. Sous le Gouverne- ment de Juillet et depuis lors, les efforts du Proviseur furent conjugués avec ceux de l'Association des Anciens Elèves. Mais depuis longtemps les élèves savaient à merveille que les meilleurs artisans de leur propre avenir c'étaient leur talent et leur énergie. La liste est infiniment longue des élèves de Louis-le-Grand qui réussirent à rendre leur nom connu ou même célèhre 7. 1. Lettre de l'insp. gén. Rendu, 3 nov. 1817 ; A. nat. F1' 3149, 22b et c. — Ibu. m. — 2. A. nat. H 2558, doss. XXVI. — 3. Ibid., doss. X. n° 2t. — 4. Id. — 5. Id. et A. nat. H 2441 f° 9 r°, lettre du ministre de l'Intér., 5 mess, an IX ; ib. f° 29 v°; 2 germin. an XI [23 mars 1803] ; id. lettre du2ger- min. an XI [23 mars 1803], A. nat. H* 2558, dose. 10, n» 42, n° 43, réponse. — Lettre du Proviseur au Gr. Maître. 13 janv. 1812, A. nat. F1 '.4258. — 6. En 1825 ; A. nat., F17h 3150 n° 311. — 7. Nous marquons d'un astérisque ceux qui désignent un membre de l'Institut. — Voir Appendice L, la liste des Membres de l'Institut, anciens élèves de Louis-le Grand, classés par ordre de leur entrée à l'Institut. LE PERSONNEL ELEVES 93 Plus du quart de l'Académie française, voire près du tiers, en 1911, était composé d'anciens élèves de Louis-le-Grand avec MM. Paul Bour- Voici quelques-uns de ces noms * Adam Ch. ; Aderer Ad. ; AdererAd. ; * Alexandre Ch. ; Albert *Panl ; Albert Petit A; Alglave Emile; Amaury-Duval ; Anlral Gab. ; *AucocLéon ; Audi^ier comto d' ; * Audouin J. V.; Aulard; Balfourier G»i; * Barbet de Jouy H ; Barbier Ch. ; * Barbier de Meynard ; Barbie du Bocage ; ♦Barthélémy Saint-Hilaire ; Bartholdi Aug; Baudelaire Ch. ; * Baudnllart Mgr Alfr. ; * Baudry Fréd. ; Bavoux ,'Ev. ; Beaumont tClie de ; * Beaussire E. J. A.; * Becquerel Henri; Belot Gustave; * Bédier Ch. Mar. Jos. ; * Belgrand Eug. ; Béquet Et. ; Bérard Victor ; * Bérenger René ; * Berger Ph.; Bertrand Léon ; * Bertrand Marcel ; Bétolaud V. A. R.; ; * Beugnot Arth. ; * Bienaymé Iren. J ; * Biot Ed. ; Bocage Paul ; * Boissier Gas- ton ; Boitard ; Bonloux Ad.; Boselli ; Bouillet ; Boulay de la Mearthe ; * Bourdeau Jean ; Boyer P. M Ph. ; Bozerian Jules-Fr., Jeannotte — ; * Bourget Paul ; * Boutmy Emile ; * Bréal Michel ; * Bresse J. A. Ch. ; * Brochard V. ; Brouardel ; * Brunetière Ferd. ; B. et J. Brunhes ; Brunot Ferd. ; * Buffet Louis ; Burdeau Au?. ; Burnouf Eug. Cain Georges ; Cahen Alb. ; * Cambon Jules ; * Cambon Paul ; Campenon M. E. ; * Carné Louis de ; * Carpentier Jules ; * Caussin de Perceval; GaI CavaignacLouis-Eug. ; *Champagny de; Chardin; *Chasles Michel ; ChaslesiPhilarète ; Cliasseloup-Laubat J. N. S. P.; * Châtelain Emile ; *Chatin Jonnnès; * Chavannes Ed. ; * Chevrillon André ; *Clermont-Ganneau Ch. ; * CochinDeny8; * Collignon Maxime ; *CompayréGabr. ; P. et H. Courteault; Crapelet ; Crémieux Is. Ad. ; * Croiset Alfr. ; * Croiset Maurice ; * Cuvillier- Fleury ; Dameth C. M. H. ; * Daru Nap. ; Daveluy ; Defodon J. Ch.; ; * De fre- in ery Ch. ; * Delacroix [Eug. ; De La Forge Anat. ; * Delavigne Casimir ; ♦Delbos Victor; *DelesseA. E. 0. J.; Deltour Nie. F. ; Emile Denis ; Denfert- Rochereau P. M. Ph. A.; Déroulède Paul; * Desains ; Deschanel Emile-Aug. Martin — ; * Deschanel Paul ; * Desjardins Alb. ; * Desjardins Arth. ; * Deslandres Henri ; Didier ; * Diehl Ch. ; * Donnay Maurice ; Dorez Léon; ; G. Dumas ; * Drouyn de Lhuys Ed ; Dubief L. A. ; * Dubois Paul ; * Du Camp Maxime ; Ducauroy ; * Duchàtel Tanneguy ; Ducrocq Th. G. A. ; * Dufrénoy Arm. ; * Duméril Aug. H. A. ;* Dumont Augustin ; * Dupin Ch. ; Durckheim Em. ; Du Sommerard Henri et Paul;. * Empis Ad. Simonis ; * Espinas Alf; *Fagniez Gust.; * Faidherbe géné- ral ; Falateut Octave ; Farcy G. ; Farges Louis ; * Faye Hervé Feray ; * Feuillet Octave; Feugère L.; Filon Ch. A. D; * Flameng François; Flou- rens Léop. Emile et Paul Gustave ; Focillon Ad. Jean ; Foncin ; Frary R. F.; Froment ; Gail ; * Galteaux Ed. ; Gautier Théophile; Gayot Ara. Nie; Geof- roy ; Gericault * Gervais Paul * Gilbert Emile ; * Girard Aimé ; * Girard Jules ;j* Girard Paul i ; Glachant Victor ; Goyau Georg. ; Gouiti'Eug. ; Gratiot Am. L. M.,; Grellet-Dumazeau Et. A. Th. ; * Guigniaut J. D. ; * Guiliot A . Hachette Jean Georges ; Hachette L. ; * Hadamard Jacq. ; »Halévy Lud.; Hallays André ; llarel ; • Hauréau J. Barthélémy ; * Ilaussouliier Bern. ; * Haui>. L'élèx e Baudrillarl h I I ph. Homi en cinquième. Voir p. 542 LE PERSONNEL ELEVES 97 sipé, bruyant, méihant, presque toujours en faute... Xe travaille que par boutades. Il n'y a rien à attendre de lui. » M. Alfred Mézières, presqu'à la même époque, ne devait pas quilter Louis- le-Grand sous le poids d'un semblable analhème. J'ai refait là, nous disait-il, deux années de Rhétorique, dont j'avais le plus grand besoin, pour ne pas m'en faire accroire sur mes succès de province ». Aussi bien, en 1843-44, M. Rinn observait-il Mauvaises habitudes de style, qui s'effacent ». Et M. Benoît Facilité, verve ; slyle inégal, parfois diffus » ; puis, trois mois plus tard le style empalé se dégage; le goût s'épure et s'assure ». Dès mars 1844, le succès-parait certain Commence à sortir de la phrase académique ». Trente ans plus lard, en effet, M. Mézières avait trouvé, à défaut de la phrase, un fauleuil très académique. En passant de Louis-le-Grand à l'Académie française, trois autres camarades de M. Mézières, Victor Hugo, le marquis de Vogue, rice Donnay, n'ont-ils pas, eux aussi, dû renoncer aux premiers flirts de leur esprit Hugo à la philosophie, à la géométrie et à la phys;que qui, en 1817 et 1818, avaient ilhistré son nom au collège ; le marquis de Vogué, aux mathématiques spéciales, qui faillirent le conduire à Polytechnique; M. Donnay, à tout ce qui fait la gloire d'un parfait ingénieur des Arts et Manufactures. Pour ne s'être pas assis à l'Académie française, Baudelaire, Weiss, Deroulède ne survivent pas moins dans la mémoire des hommes. Charles Baudelaire ne passa que trois années à Louis-le-Grand, du lrr mars 1836 au 18 avril 1839, de la 3e à la Philosophie. Sa nature intellectuelle et morale annonce déjà tout ce qui devait faire le tour- ment et le renom du poète. Son professeur de seconde, M. Chardin, disait de lui ; beaucoup de légèreté ; manque d'énergie pour corriger ses défauts ». Son maître d'étude, M. Riton se désolait Pas de ten.;e dans le caractère. Sa conduite est plus que légère. Son travail, par conséquent, n'est pas ce qu'il devrait être. C'est dommage, car il a tout ce qu'il faut pour réussir ». Baudelaire était interne ; ses maîtres d'étude, qui le voyaient tous les jours, disaient de lui en 1837-8, de la fausseté, des mensonges ; des manières quelquefois cavalières et quelquefois choquantes, à force d'affectation ». En 1838-9 caractère un peu original et parfois bizarre ». — El voici ce que pensait de son esprit, en seconde, M. Chardin a Peu d'habitude des langues anciennes ; beaucoup de caprice et d'inégalité ; esprit sautillant ; manque de vigueur, dans la composit'on ; progrès sensibles, malgré tout». En Rhétorique, M. Rinn déclarait Esprit fin ; pas assez sérieux ; ne réussit qu'en vers lalins ». Et M. Desforges A de l'inven- tion, quand il veut, et de la finesse. N'a pas assez de gravité, pour faire des études fortes et sérieuses ». Le professeur d'histoire, M. Durozoir remarquait d'abord Avec beaucoup d'aptitude, il est le second de 7 98 L ORGANISATION MODERNE la classe, ^il travaille^ mollement ». Puis, quelques mois plus tard, M. Durozoir s'ÏDdignait Cet élève paraît persuadé que l'histoire est parfaitement inutile. » Tout devait finir par un drame scolaire. Ce drame, nous le revivons dans cette lettre du proviseur au beau père de l'écolier, le colonel Aupick; elle est du 18 avril 1839. Ce matin, M. votre fils, sommé par Le sous-directeur de remettre un billet, qu'un de ses camarades venait de lui glisser, refusa de le donner, le mit en morceaux et l'avala. Mandé chez moi, il me déclare qu'il aime mieux toute punition que de livrer le secret de son camarade et, pressé de s'expliquer, dans l'intérêt môme de cet ami/qu'il laisse exposé aux soupçons les plus fâcheux, il me répond par des ricanements, dont je ne dois pas souffrir l'impertinence. Je vous renvoie tdonc ce jeune homme, qui était doué de moyens assez remarquables ; mais il a tout gâté par un très mauvais esprit, dont le bon ordre du collège a eu, plus d'une fois, à souffrir ». Dix-huit mois plus tard, Jean Jacques Weiss entrait en 6e à Louis- le-Grand, d'où il devait sorlir, en philosophie, en 1847. Dès le débul, il donna l'impression que la place de 1er était faite pour lui. On louait surtout, en lui, la justesse, la sagesse et l'équilibre d'esprit ; de la 6e à la 4e, il dut acquérir la précision, qui lui manquait, et classer quelque peu ses idées. Mais son professeur de seconde, M. Lemaire, annonçait Finira par atteindre la supériorité en tout ». Son professeur de Rhé- torique, M. Despois, écrivait, en janvier 1846 Souvent dissipé. Esprit distingué et brillant ; pas assez d'application ; ne travaille ses devoirs que quand le sujet lui convient ». En philosophie, M. Jacques constatait Beaucoup d'intelligence ». Quand il entra, en 7e, au collège, en oct. 1854, Paul Déroulède annonçait des qualités intellectuelles capables de le mettre en tète de l'élite. Mais elles n'allaient pas sans quelques défauts il avait un incoercible penchant à boire de l'encre ; et puis il avait un inégalité à peine croyable, dans le caractère, la conduite et le travail. Je n'ai pas dans ma classe, disait son proiesseur de 6e, à Vanves, d'élève plus intelligent, plus fatigant, plus insouciant, plus inappliqué». Sa turbu- lence et son indocilité ne se corrigèrent pas en 5e. Il manquait en- tièrement d'ordre et de soin » ; et les punitions s' sur lui. Le groupe des artistes est représenté notamment par Eugène Dela- croix, Auguste Bartholdi et Paul -Dubois. En 1812, Delacroix, dont la conduite était bonne, le travail suivi, les progrès assez sensibles et la santé parfaite », suivait le cours de lre année d'Humanités, c'est-à- dire la 3e, et celui] de mathématiques élémentaires, deux fois par semaine. Puis, nous trouvons cette petite ligne Il va au dessin, où il travaille bien». Bartholdi, entré en 7e et sorti en philosophie, fut externe, de 1844 à 1852. Sa santé l'empêchait de suivre assidûment LK PERSONNEL ELEVES 99 les classes, notamment en 6e, 5e, 3e, Rhétorique et Philosophie. Ses débuis révélaient un enfant très doux, sans volonté, indifférent au succès et d'une apathie excessive, à tel point, disait qu'il me fatigue, même pendant que je l'interroge». Des lueurs d'intelli- gence, cependant. En seconde, il prit goût aux travail. 11 ne néglige, assurait M. Gaillardin, rien de ce qui peut contribuer à son instruc- tion ».. Mais ses effurts étaient souvent gênés par le défaut de ses pre- mières études ». Il se laissa prendre, un moment, aux séductions des vers latins et de la version latine. En Rhétorique, il travaillait de temps en temps un devoir et négligeait les autres ». Il avait, pour les leçons, un mépris superbe. En cosmographie, il montrait de la dis- tinction ; il daignait aller en histoire naturelle, mais non pas en philo- sophie. M. Jamin, professeur de mathématiques et de phvsique, nous fait celte confidence Dessine, pendant la classe ». Entré à Louis-ie-Grand, un peu après Bartholdi, M. Paul-Dubois en sortit, un peu avant il y fut interne, depuis la 6e, en 1840-1, jusqu'aux mathématiques spéciales, en 1847-8. Légèreté, insouciance, crise de paresse et places indignes de sa valeur, voilà d'abord ce que signa- laient, chez lui, ses maîtres. Et l'un d'eux jetait ce cri de détresse S'il de s'amende pas, il tombera dans une mauvaise situation ! » Ou encore Son étourderie est devenue une seconde nature, qu'il ne peut vaincre ». En 1843, M. Gaillardin se désespérait Elève insup- portable par sa dissipation ; presque toujours en faute ». Le professeur de dessin, lui même. avait été obligé de constater une insuffisante appli- cation, s'opposant à la rapidité des progrès. — Puis peu à peu, en 3e, un changement s'opère au dessin, il sort de pair. Les mathématiques le captivent; près de trois mois de maladie, au début de 1846, achèvent la transformation. Quand il quitte l'infirmerie, on déclare son enten- dement très facile » ; certes, il néglige la Rhétorique, la philosophie et les menues besognes du baccalauréat, mais non pas l'histoire naturelle, ni la géométrie, ni l'algèbre. C'est tout au plus si, chez M. Masson. pendant les expériences de physique, il s'absorbe à lire des journaux et des livres d'histoire, relatifs à la Révolution o de 1789. M. Vieille, un bon juge, proclame ses chances d'admission à l'Ecole Poly- technique ». Au reste, nature captivante ses rapports avec ses mailres et condisciples sont très agréables ». On pourrait croire que la célébrité, promise aux années de maturité, s'enfante communément, au collège, dans la persécution et la douleur. A cette loi, ni les élèves P>réal ou Maspèro ne firent, parmi les savants, d'éclatantes exceptions ; mais bien plutôt les élèves Jules Quicherat, Fréd. Passy, Arthur Desjardins, Paye, le Verrier ; et surtout les futurs universitaires \ qui, dès leurs jeunes années, savaient èlie de parfaits modèles, pour le travail, le succès et la conduite ; ainsi, les élèves 1. 547 élèves de Louis-le-Grand entrèrent à l'Ecole normale sup> 1Sô9 j 1916 100 L ORGANISATION MODERNE Paul-Albert, Nie. Fél. Dellour, Emile Deschanel, Jules Girard, Cons- tant Marlha, Gabr. Compayré, Jules Lacbelier, Alfr. Rambaud. Quant aux étrangers, qui venaient à Louis-le-Grand demander une formation intellectuelle et morale, nous savons, pour quelques-uns, ce qu'ils s'applaudissaient d'y trouver. Le grand avantage que m'a con- féré l'enseignement donné par mes professeurs de Louis-le-Grand », nous écrivait, en 1913, M. Artbur Raffalovicb *, a été de m'apprendre à composer, à écrire avec précision, ordre et méthode, à chercher des formules nettes et concises, pour condenser la pensée. A la sortie du lycée, je me suis trouvé apte à recevoir tout autre enseignement plus spécial, moins général. Et il m'a paru que mes condisciples allemands, à l'Université de Bonn, où j'ai suivi les cours de Sybel, pour l'histoire, et de Nasse, pour l'économie politique, avaient reçu une autre prépara- tion ». Et, en août 1916, quand il se trouva, au cours de sa visite à Louis-lo-Grand, en face du portrait de l'ancien proviseur Jullien, le roi de Monténégro, Nicolas I, rendit ce témoignage 2 Le peu de bon que j'ai en moi c'est à M. Jullien que je le dois. C'était un homme de devoir. II m'a appris que, dans la vie, on n'est digne d'être un homme que si l'on est un honnête homme ». Une partie du patrimoine moral de notre pays, quelques-uns de ces hommes d'élite, aidés de tous leurs camarades, ont contribué à la faire. On entrevoit, par suite, combien la tâche de Louis-le-Grand a été féconde. Il a contribué à modeler l'esprit et à tremper l'âme de milliers d'écoliers, qui n'ont pas été seulement une force sociale, par le nombre et par les origines, mais par la culture, le talent et l'influence. Illustres ou non, tous, dans leur sphère, ils ont été mis par leurs maîtres en état de jouer leur rôle d'honnête homme et de Français. Leur collège leur doit bfaucoup, mais ils doivent beaucoup à leur collège. Du reste, à mesure que les générations d'écoliers se succédaient à Louis-le-Grand, leur condition allait s'améliorant toujours. Ce que les anciens avaient appris ou souffert servait aux jeunes. Internes ou externes d'aujourd'hui ne troqueraient pas volontiers leur existence scolaire contre celle de leurs prédécesseurs. La geôle de jadis est devenu un jardin fleuri, dont la verdure s'aperçoit, par delà les jolies baies vitrées de la façade. Depuis le Consulat, ni les Administrateurs ni les Professeurs n'ont sans doute amélioré leur situation à Louis-Ie Grand autant que les maîtres ont amélioré la leur. Or, les élèves nous semblent avoir gagné, en bien être, plus encore que les maîtres. Il nous reste à examiner si les progrès de la vie matérielle et ceux de la vie intellectuelle et de la vie morale, à Louis-le-Grand, ont su vrai- ment aller de pair. 1. Né à Odessa, en juin 1853 ; élève à Sainte Earbe et à Louis-le Grand, dans les dernières années du second Emp-re. Aujourd'hui correspondant de l'Institut de France et rédacteur au Journal des Débats. — 2. Communie, de M. Guillo. 1800 1810 18Z0 1830 ISHO fS50 600 1500 Î40C 130Q 1200 1100 f\ € i / 1 1000 N imi À vM fl 9oo $00 i i r ^ / V \ê06 700 713 600 J 500 Vm hOQ 300 Ukz ZOO 100 ! 18 00 1$ w n 1 \ %0 18 1 30 W \o 18, b Fig. 74. - Norab P 1870 1880 /sw ypoo /w P\q, j iche XXV». 920 ! 1 /&£ Jf /50 woo N» ./ 800 700 600 \ M ^ Uljr 1 839 73» i / ^ êvo 400 3oo 2O0 100 èves, de 70 J8c 1800 à 1920. L J fo 9 49 M. Rallier, Insp. gén. — 12blB. Appbnd. F et supra, Personnel, p. 81 et ss. LA VIE FINANCES 105 augmenter leur nombre, sans augmenter d'autant sa contribution. Il exhortait le lycée à la patience et faisait valoir que l'organisation des lycées de province le décbargerait peu à peu de ce surcroît de dépenses1. La Ville de Paris avait, el!e aussi, ses boursiers mais elle payait fort inexactement leurs pensions 2. Les autres élèves s'acquittaient-ils, avec une régularité plus parfaite ? Il ne pnratt pas. Les cbefs d'Institution avaient déjà l'habitude, à Louis le-Grand, comme dans les autres lycées parisiens 3, de laisser s'accumuler des arriérés considérables i. Quant aux familles, elles voyaient sans trop de déplaisir s'amonceler leurs délies, vis à vis du Collège ou du Lycée 3. Les créances arriérées con- tribuaient donc, pour leur large part, au malaise financier de la Maison. Est-il étonnant qu'e'le ait voulu, elle aus^i, conjurer ce malade par des expédients? Elle faisait appel au patriotisme de ses professeur* et de ses maîtres pour reculer, de mois en mois, l'échéance de leurs appointements 6. Elle endormait, par de bonnes paroles et d'aimables promesses, les réclamations des fournisseurs T. Elle manœuvrait pour éviter, en 18j0, de payer à l'Ecole Centrale du Panthéon les frais de scolarité de ses propres élèves 8. Elle protestait vivement auprès des pouvoirs publics, quand le Fisc, dans sa discourtoisie, la menaçait de loger chez elle ses garnisaires 9. Eile s'avisait, pour acquitter que!qus-unes des impositions, qui pesaient sur ehe d'un poids très lourd, de payer le Trésor, en lui donnant quittance d'une dette, dont le Trésor ne parvenait pas à se libérer 10. Vinrent l'effondrement de l'Empire, la Première Restauration et l'héroïque mais folle équipée des Cent Jour». Le contrecoup de tous ces drames historiques faillit êtie fatal à Louis-le-Grand. Le Proviseur d' Taillefer, nous a laissé le témoignage de son angoisse, au len- demain de Waterloo. Des bou'eveisements successifs, dans le court espace d'une année, disait-il, avaient atteint l'établissement dans le a cœur, détruit ses finances et anéanti presque tout ce que mon esti- mable prédéce-seur, [de Sermand. avait pi faire de bien ". » Le 22 août 1815, devant la Commission de l'Instruction publique, Taillefer 1. Lettre de Fourcroy au Pryt., 19 vend, an XIII [11 oct. lc04], A. nat. H3 2528, doss. 20. — 2-5. 22 juin 1810, A. nat. F17» 3104, n° 57; 13 juin 1815. ib. n 154 ; 1815, ib. F17h 3150, n° 3i7 la ville de Paria devait alors 30 MH1 fr. au Lycée. Cf. supra, p. 88 et ss. — 6. Le 24 vend, an VIII [16 oct. 99]. le retard dans le paiement appointements, était de 8 mois, A. nat. F, 4260, arriéré de plus de a mois, le 24 vent, an VIII [15 fév. 1800], H* 2558, doss. 9, n° 1>»» et 3. — 7. Ib., 16 prair. an X [5 juin 1802], A. nat. H3 2531, lias. C ; 3 vend an XIII [22 fév. 1805 HS2551, doas. 2, n 13. - 8. 20 friin. an VIII ]ll déc. 1*00. IP 2558, do?s. 9, n» 7. — 9. 27 bruni, an VIII [18 dot. 1799J, Fl" 4259, n° 357. - 10. 12 vend, an VIII [4 oct. 179»], ib. 355. - 11. Lettre de Taillefer. proviseur, au comte de Vaublanc, ministre d'Etat de Tinter, [du 24 sept. 18 5 au 8 mai 1816] A. nat. F. 17a 3150, n° 317. i 06 L ORGANISATION MODERNE avait précisé pourquoi Louis-le-Grand était menacé d'une catas- trophe ' ». Et les causes de ruine qu'il ennuierait, nous les connaissons déjà presque toutes dix à quinze années plus tôt, n'élaient-elles pas, pour le Prylanée ou le Lycée de Paris, un péril quotidien? On avait bien pu endormir le mal, non le guérir. De quoi Louis-le-Grand souffrait-il donc, en 1815? Taillefer le pré- cise des retards de ses créanciers et de l'exode de ses élèves. Ecoulons- le. 11 accuse d'abord un manque absolu de payement de la part de la Commune de Paris » ; sa dette est de francs environ et s'accroît chaque jour, sans qu'on entrevoye les moyens qu'elle aura de l'acquitter 2 ». Taillefer signale ensuite un arriéré très considérable, dans les pavements des maîtres de pension et des parents, sans qu'il ait été possible', vu les circonstances, d'en poursuivre les rentrées3 ». Et puis c'est la disparition journalière d'un grand nombre d'élèves pen- a sionnaires plus de 80, que des parents, alarmés par les événements, ont retirés, avant îe trimestre de juillet, pour ne plus les remettre au collège; quelques-uns qu'il a fallu renvoyer; d'autres, envers qui cette mesure sera nécessaire encore 4 ». Les tristes effets produits par ces causes n'étaient que trop visibles. 11 est nécessaire, ajoutait Taillefer, que nos recettes, par mois, soient, au moins, de francs. Or, depuis janvier 1815, celles de chaque mois n'ont été, les unes dans les autres, qu'à peu près de francs. C'était un déOcit mensuel de 5000 francs; soit, pour les trois trimestres, un déficit de francs5.» Le mal empirait chaque semaine le déficit de juillet 1815 venait de s'élever à francs. 11 allait être doublé, à l'exercice prochain 6 ». N'avait-on pas la perspective assurée d'une rentrée de pensionnaires très peu nombre^e » ? Et l'événement se chargea de justifier ces craintes 7. Les progrès du déficit tarissaient, depuis plusieurs mois, les appointe- ments des administrateurs et des maîtres et empochaient, depuis une année et davantage, de payer aux fournisseurs leurs notes arriérées 8. Les magasins achevaient de s'épuiser tous les jours 9 et les réparations locales les plus urgentes restaient en suspens10. Les remèdes ? — Ceux qui relevaient de son administration, Taille- fer n'avait pas attendu pour les prescrire ' 41 ; F1 12. A. nat. Fl"» n° 21. — 13-14. Arch. L. le Gr., Corr. adm. Y, 2876; A. nat. F1" 3574. 108 L ORGANISATION MODERNE La subvention de la Yille pouvait être double, elle aussi. Une part, versée tous les ans, était accordée sous forme de bourses communales, bourses entières ou bourses partielles ; ainsi francs, en 1834 x. La seconde part n'était pas nécessairement annuelle, car elle dépendait des grosses réparations, jugées indispensables pour le collège. En sa qualité de nu-propriétaire de Louis le-Grand, la Ville contribuait aux frais, dans la proportion de deux tiers 2. Aux deniers versés par 1 Etat et versés par la Ville, s'ajoutaient ceux que versaient les familles, pour les pensionnaires, boursiers-partiels ou non boursiers ; c'était la plus grosse part des recettes francs, p;i 1834, c'est à dire plus des 5 huitièmes, puisque les recettes totales étaient, cette année là, de francs 3. Ce chapitre suivit le sort de l'internat, que nous avons étudié plus haut il augmenta donc ou se maintint très élevé,jusqu'en 1869, et ne cessa de diminuer ensuite*. Inversement, le chapitre des demi-pensionnaires et des externes ne cessa de croître. Et nous avons eu l'occasion de dire ailleurs, avec les précisions indispensables, que ce progrès, de l'externat n'a rien de par- ticulier à Louis-le-Grand. En 1834-, les externes, qui payaient francs au collège, ne lui rapportaient pas la vingtième partie des recettes dues à l'internat 5. Un dernier chapitre n'était pas négligeable, quoiqu'il fût très vague ; francs, en 1834 c, c'est à dire plus de six fois l'apport de l'externat. Dans cette somme, le collège faisait entrer, sans doute, la rétribution universitaire, que tout écolier devait en principe, et qui rapportait 45 francs par tète, soit francs, pour un collège de 1000 élèves. Sous la Restauration, un trop grand nombre d'élevés s'en faisaient dispenser, sous prétexte qu'ils avaient la vocation ecclé-ias- tique 7. Le Gouvernement de juillet ne fut pas la dupe de cette super- cherie et il railla la perspicacité de ceux qui prétendaient, chez des enfants de huit ou dix ans, découvrir des théologiens prédestinés s. Il exigea un minimum de 15 ans d'âge, la preuve que la conduite de l'enfant et son travail étaient que ses parants étaient pauvres. Il assujettit aussi les chefs d'Institution à des droits qu'il jugèrent exorbitants ; d'aucuns même disaient arbitraires 9 ». Mais il supprima le vingtième, à partir du 1er janvier 1845 l0. Parfois le Ministre crut bon de ralentir le zèle de Louis-le-Grand. Convaincu, semble-t-il, que les petits profits font les bonnes maisons, le collège jugeait à propos, jusqu'en novembre 1828, de rançonner les arts d'agrément et de percevoir, sur les leçons de musique, de danse etc., un léger bénéfice ; et ce bénéfice,en 1827, n'avait pas dépassé fr. 74. î. A. nat FHh n» 21. — 2. Arch. L. le Gr., Corr adm., 1,109; 24avr. 1824; cf. ib. VII, 4117, 6 nov. 1839. — 3. Source cit., av. dern. Dote. — 4 Su- pra, p. 81. — 5-6. A. nat. F^h n» 21. — 7-9. Arch. L. le Gr, Corr adm . IV, 1747, 2279; IX, 8980, 9295. — 10, Ib., arrêté 16 sept. 1845. LA VIE MATERIELLE FINAMCES 109 Le Ministre chargea le Recteur d'expliquer au Proviseur qu'une tell - recette s'harmonisait peut être assez mal avec la dignité d'un grand établissement 1 ». La poursuite des créances arriérées, que l'en signalait encore en 18~2, paraissait, au contraire, tout à fait indispensable, et aussi la fin d'un abus, qui faisait perdre, en 1860, jusqu'à francs au collège ; quand un élève était absent plusieurs semaines, fût-ce moins de deux moi?, ses parents rélamaient ce qu'on appelait une remise pour absence momentanée ». L'Inspection générale était d'avis que l'absence, pour justitier un remboursement, fût au moins de trois mois 2. Il était loisible à Louis-le-Grand de comprendre, dans ses recettes, ses rente?, que beaucoup de labeur et de patience avaient enfin recons- tituées. Ces rentes avouées montaient à francs en 1828, pour un capital de francs et à francs, en 1838, comme en 1846. Mais on estimait que ces rente?, correspondant à francs décapitai, en 1838, représentaient, en 18i6,un capital de francs. En outre, le collège avait une réserve, pour les travaux extraordinaires, qui s'élevait, en 1838, à " francs 3. En face de ces rec ttes, et de ces revenus, les dépenses pouvaient se grouper sous plusieurs rubriques, qui étaient, en 1834 4 la Nourriture, — l'Entretien, — l'Habillement, — les Traitements fixes, l'Eventuel, les appointements et gages, les gratifications, les indemnités et les secours ; — les menues dépenses ; — les Dépenses diverses et extraor- dinaires. Les traitements et gages absorbaient plus du premier quart francs du total francs, La nourriture atteignait un peu moins du second quart francs et l'habillement, plus du huitième francs. Nous verrons plus loin, en détail, ce que fut, à Louis-le-Grand l'his- toire de la table et l'histoire du vestiaire s et nous n'avons pas à revenir sur la monographie des traitements accordes au personne! ". Bornons nous à constater que la diminution de l'internat a réduit les 1. Arch. L. le Gr., Corr. adm. III, 1159. — 2. A. nat. F1"h n8* 14 et 14M" ; lias. L. le Gr. E, n° 3. — 3. A. nat. F1" u° 41 ; arch. L. le Gr., Corr. adm. VIII, 8U3>>i* — 4. A nat. F1".78486, n 21. — Voici d'après les arch. de L. le Gr., Reg., les Etats annuels des traitements ; En 1858 . . . fr. 86 En 1892- . . . tr. 64 18f,0 . . . fr. 12 1900 . . . fr. 24 1865* . . . fr. 80 1902*". . . fr. SS 1870 . . . 355 883 fr 52 1910 . . . fr. 92 1880 . . . fr. 64 1916"" . . fr. 24 1810 . . . fr. 72 1920 1 fr. 75. Lycée du Prince Impér. ; " Montaigne I ••• Séparation des deux budg ret impérial prononça, le 21 mars Les bâtiments du Lycée Impérial et du collège Du Plessis seront disposés de manière à recevoir 200 élèves de plus c». Mais, un an plus tard, le Plessis semblait décidément intan- 1. Pour tout ce qui suit, v. notre planche XXIII, fig. 70, plan 1762 ; planche XXIV, fig. 71, plan 1806 ; t. III, planches XXV-XXVI, fig. 72-73, plans 1872 et 1920 ; Appendice G. — 2. A. nat. m 2528 n° 22 ; Fiv 135, doss. 783, pièce 30, n° i. — 3. Cf. A. n. F13 218i ancien F2- 16. — 4. Source cit. av. dern. note. — 5. Plan aux A. nat. H» 255S, doss. V. — 6. Décret 21 mars 1812, A. nat. F 644, doss. 5119, n» 5, § Lycée Iiripér., art. 11. PI. XXIII. ÏÏHr \Laro/r ftr/r .y,///// -./,?> suppression de la rue des Cholets et d'une partie de la rue de Reims,qui les séparaient ; le sol de ces rues leur avait été gratuitement cédé 5. Les difficultés que l'agrandissement du Collège rencontrait, vers son aile méridionale, du côté des Cho!ets,pouvaient sembler légères, au prix de celles qu'il lui fallait affronter, du côté du Plessis, pour s'emparer enGn de l'aile septentrionale indispensable. De ce côté, le Proviseur l'expliquait au ministre, en 183T, étaient tournés les suprêmes espoirs du Collège qui, limité de trois côtés par des rues, n'avait plus que de ce quatrième côlé la possibilité de se donner un peu d'air 6. C'est là surtout que, pendant un demi-siècle, les proviseurs durent braver de terribles menaces et soutenir les pires assauts. Sous le pré- texte de leur ôter le Plessis, on parlait, en 1801, de leur enlever une partie du vieux collège du Mans le Bâtiment des Entérites, trans- formé bàtivement,sousla maison d'arrêt et, plus hâtivement encore, appelé la Prison Du Plessis. Cette prison était voisine du Plessis mais ne lui avait jamais appartenu. Pourtant, la dénomination fautive, sous laquelle on avait fini par la désigner, risquait de lui être fatale. Si Champagne n'eût clairement démontré l'erreur, cet abus de mots aurait conduit à un abus de pouvoir . 1. Rapport du 31 mars 1813, A. nat. F" 1291., n* 248-251. - 2. A. nat. Fit 76Ô. doss. 6159, n" 33. - 3. Arch. L. le Gr., Corr. adtnin. VIII. a" o67b-s incurables Victor Chauvin, Hist. des Lycées et Coll. de Pa- ris, 1866. p. 291 898 parle de mètres [ib. p. 294. - 1. V .— 2-3. Arch. 1.. te Gr., Corr. adm., VIII, s 113b,, ; v. nat. F17h ; ,v „ , 57 ; ib. n» 1, 4. - 4. Ib. n- 32. - 5-6. V. Chauvin, foc. laud 124 L ORGANISATION MODERNE avait donc pas là de lycée proprement dit. Et, puisque on tendait alors, comme nous l'avons dit ailleurs, à décentraliser les lycées, à travers la grande Ville, à les placer dans tous les quartiers, nouveaux ou anciens, où l'activité de Paris s'épanouissait chaque jour davantage, il paraissait indispensable de donner son lycée au seul quartier de la rive gauche qui l'attendît encore *. Pourtant l'un et l'autre argument ne pouvaient gagner à être exa- minés d'un peu près. On avouait que la population de la rue de Sèvres et de ses environs réclamait surtout un lycée d'externes et d'enseigne- ment secondaire spécial or, Louis-Ie-Grand était alors un lycée d'in- ternes et d'enseignement secondaire classique. On concédait ensuite que l'emplacement des Incurables, avec ses mètres carrés, devait loger 1000 internes et l'on reconnaissait que le nombre de 600 internes ne pouvait être dépassé sans de sérieux inconvénients ».Aux Incurables il faudrait donc loger, côte à côte, deux lycées, au lieu d'un. Et, si l'on créait ces deux lycées, c'était surtout parce que les Incurables avaient un terrain trop vaste ; ce n'était point parce que les besoins du quartier l'exigeaient. Jusqu'ici, n'ayant aucun lycée, le quartier n'en avait pas assez ; désormais, ayant deux lycées, il risquait d'en avoir trop. En les établissant côte à côte, on répondait bien plus à des convenances parti- culières qu'à des intérêts généraux. Et, pour satisfaire à ces conve- nances, on choisissait, entre tous les lycées de la capitale, celui qui, par ses traditions, répondait le moins à ce qu'on attendait de lui2. Car, dans la vie de Paris et du pays latin, Louis-le-Grand tenait une place éminente, qu'on ne pouvait méconnaître sans impiété ni vanda- lisme. L'histoire est une chose sainte, à laquelle nul n'a le droit de toucher. Nos pères, qui l'ont faite de toutes leurs souffrances et de toutes leurs joies, nous l'ont transmise ; nous dépendons de notre passé ancestral, il ne dépend pas de nous. L'histoire de Paris, c'est toute son âme. Arracher Louis-le-Grand au sol de la colline maternelle où, depuis troia cents ans, il plongeait ses racines, c'était défigurer Paris et insulter à ses vieux souvenirs. Voilà bien ce que valait l'argument parisien ». C'était un argument de. barbares 8. Et ces barbares n'avaient même pas l'excuse de savoir compter ; l'arithmétique était contre eux, tout comme l'histoire, et la raison froide comme le sentiment. Le prix du terrain, qu'il faudrait, rue de Sèvres, acheter à l'Assistance publique, était évalué francs. C'était à 25 ou francs près ce que coûterait, rue Saint-Jacques, la reconstruction de Louis-le-Grand. Bien mieux, sur le terrain déblayé des Incurables, on estimait que les bâtiments à élever revien- draient à francs. Total 8 millions. De ce total, on pouvait bien déduire francs, valeur des terrains de la rue 2-3. Ib. LA VIE MATÉRIELLE LOCAUX 125 Saint-Jacques ; il n'en restait pas moins que la translation de Louis- le-Grand coûterait francs et que sa reconstruction sur place reviendrait à \ Ainsi, en rebâtissant Louis-le-Grand dans ce coin de Paris où était son berceau, on ne s'épargnait pas seulement un sacrilège; on épar- gnait encore un million francs. On faisait l'économie d'un attentat contre l'bisloire de Paris et d'un a'tentat contre la bourse des Parisiens. Les partisans de la translation rue de Sèvres ne manquèrent pas d'observer que le projet de réédifier Louis-le-Grand, rue Saint-Jacques, triomphât-il, la Ville n'échapperait pas à la création d'un lycée d'externes, dans le voisinage de la rue de Sèvres ; et que cette création coûterait au moins trois millions. 11 était bien facile de leur répondre que Louis-le-Grand, même rebâti rue Saint-Jacques, ne privait point Paris d'un autre lycée 2, qui valait bien, lui aussi trois millions, et ce lycée, venait justement d'être fait, aux dépens de Louis-le-Grand et de ses deniers on l'appelait le Lycée du Prince Impérial, avant de l'appeler le lycée de Vantes ou le lycée Michelet 3. Fallait-iî donc indéfiniment dépouiller Louis-le-Grand et de ses capitaux et de son passé et sacrifier son existence, sous le prétexte de mettre au monde un troisième lycée ? Les anciens élèves de Louis-le-Grand avaient compris tout leur devoir; ils devaient beaucoup au lycée et le lycée leur dut beaucoup, puisqu'ils le sauvèrent. Leurs jeunes camarade» ressentaient une émo- tion pareille et l'un d'aux, un enfant. Etienne Siry, disait à l'Evêque de Sura venu à Louis-le-Grand, le 19 avril 1866, pour la Première communion Est-il vrai que bientôt d'ici l'on nous exile, Qu'il nous faudra, proscrits, chercher un autre asile Dans des murs inconnus ? Avec vous, Monseigneur, uni pour nous défendre, Notre ministre aimé saura se taire entendre Et vous serez vainqueurs, Et, dans ces munies lieux, ou vous poi'tez la joie. Vous reviendrez encore, au Dieu qui vous envoie, Consacrer tous nos cœurs i. Ce ministre aimé, c'était Victor Duruy. C'était aussi un ministre écouté. Son influence, unie à celle des anciens de Louis-le-Grand et des anciens de Sainle-IJarbe, gagna l'opinion. C'était presque gagner la 1. Ib. — 2. Infra, p. 184. — 3. G. Duponk-Fwrier, Les Ecoles, lycées..., ci' p. 173 et sa. — 4. A. nat. FHa lias. B, n" 19. 126 L ORGANISATION MODERNE cause, à un moment où la force de l'opinion reprenait enfin toute sa maîtrise. Les bureaux de l'Instruction publique, qui n'avaient jamais été très accueillants au projet de translation et s'y étaient seulement ralliés, un moment, par surprise, retrouvèrent, même après la chute de M. Duruy, leurs premières hésitations et leurs anciens doutes. Il fut sursis au projet. Un Inspecteur général, M. Rallier, écrivait, dans un rapport olficiel, le 22 mars 1868, après une visite à Louis-Ie-Grand Le projet de déplacement du Lycée paraît toujours arrêté. On nous pardonnera si nous répétons ici que ce projet, peu sympathique à l'opinion, portera un préjudice moral sérieux à V Université de Paris 1. Pour achever le salut du Lycée et calmer les appétits de la Ville, l'Inspection générale suggérait, en 1868 et 1869, la transaction que voici accorder à la Ville ce qu'elle convoitait, une bande de douze à quinze mètres de terrain, tout le long de la rue Saifit-Jacques, où la Ville pourrait, à son aise, construire et louer de belles boutiques ; reporter l'entrée de Louis-le-Grand sur la rue Cujas et réduire le lycée à cinq cents internes. Mais ces élèves seraient disait-on, des internes d'élite et paieraient un prix exceptionnel ». L'Inspection ajoutait sur l'emplacement des Incurables, on élèverait un établissement plus vaste, propre à réunir tous les ordres d'étude, [comprenons l'enseignement spécial et l'enseignement classique], et qui serait le lycée de la petite bourgeoisie » 2. Après la guerre de 1870-1, le lycée se retrouvait à sa Ville de Paris, occupée à panser les plaies, encore vives, de l'invasion et de la Commune, ne pouvait plus momentanément soutenir, de ses deniers, l'exode du lycée. D'ailleurs, le succès du Lycée de Vanves avait con- tribué à répandre la mode des lycées à la campagne. Et puis on avait consacré à un hôpital, Laënnec, l'emplacement des Incurables 8 ; con- currencer Stanilas, par un lycée trop voisin, paraissait inconvenant à la majorité politique du moment. Et le Paris de l'ouest, se développant désormais sur la rive gauche, jusqu'aux Invalides et au-delà, le lycée qu'on voulait, en 1865, placer rue de Sèvres, à proximité de la Rue Du Bac, fut construit Boulevard Pasteur c'est le lycée Buffon. Un lycée nouveau fut bien élevé à la campagne, mais ce fut Lakanal ; un autre se dressa à l'orée du bois de Boulogne, et ce fut Janson de Sailly 4. En face de la Sorbonne, à laquelle M. Nénol donnait une magnifique parure neuve, Louis-le-Grand, resté fidèle à son berceau, à son horizon, à ses souvenirs, à tout lui-même, avait enfin le droit de revêtir une belle robe de pierres blanches. Son architecte fut M. Lecœur. Ces 1. Ib. 86471, lias. L. le Gr., B n° 49. — 2. Ib. et C, n° 42. — 3. L'Hospice des Incurables femmes avait été installé, de 1801 à 1869, au n° 42 actuel de la Rue de Sèvres; depuis 1S7S, ce fut l'hôpital Laënnec. — 4. Cf. notre volume cit., Les Ecoles, lycées, coll., p. 184, 198, 206 et sa. et source citée note suiv. PI. XXV. /'/ 15 v° ; 2442 p. 17 ; F'3 218'. — 10. A. n. H3 2558 dossier XXV. — 11. Ib. — 12 et 13. A. n, H3 2558, dossier XXV. — 14. Arch. de L. le Gr. Corresp, adm. III, n» 1380. — 15. Arch. de Loub le Gr. Corresp. administr. IV, u° — 18. Id. V, n» 2453 et 2454. LA VIE MATERIELLE LOCAUX 129 Assez fréquemment des fragments de pierre et de plâtre se détachent des loits » ou des lucarnes ; on n'a même pas des chenaux partout pour les retenir l. On veut bien éviter avec grand soin de laisser se porter, sur ces points délicats, l'attention des parents ; mais le Proviseur, en 18i2, signala vainement le danger à l'administration supérieure 2. L'Inspection générale, dix ans plus tard, crie casse-cou! elle aussi 3. Le 28 mars ! 88 1 , elle écrit textuellement Dernièrement, un couron- nement s'est détaché, de la partie supérieure d'une longue façade, sur une étendue de !5 mètres. Si l'événement fût arrivé quelques instants auparavant, il eût produit d'affreux malheurs ». Et cette petite' ligne, en conclusion Le même danger est en permanence, sur d'autres points * ». Creusées autour de ces murs branlants, les cours pouvaient donc être toute autre chose que des lieux de repos, ménagés à plusieurs cen- taines d'enfants. Ces cO'irs étaient limitées par les bâtiments qui, en 1800 et 1801, se nommaient encore non pas seulement le Bâtiment Neuf mais Tt/m'on, la Fraternité et YEyalitè '. Il y avait, au début du siècle, plus de cons- tructions que de cours 6, puisque que le Prytanée n'avait pas moins de 10. 0t 0 mètres carrés de toiture, en 1802 7, et que le Collège, agrandi de 1800 à 1865 9, occupait, en 1865, mètres carrés de surface 9. Mais ellns ne cessèrent de s'agrandir aux dépens des eonstructions, à partir d^ 1857 surtout et du Provisorat de M. Jullien 10. suivant le vœu de ses prédécesseurs n, et on tendit à ne plus les séparer que par des murs ou même par des grilles 12. Jusqu'à la reconstruction du lycée, les cours n en demeurèrent pas moins trop étroites l2bia. En 1884, il y avait quatre grandes cours réservées aux élèves. Au xviue s. 1. Arch. nat. F» 3576. — 2 Id. — 3. A. nat. P17a 78483 n° 202 et 225 1852 et 1 avril 1854. — 4. A. nat. FH» 86464. n" 14 et 14^ ; cf n» 17. — 5. 4 pluv. an VII [24 janv. 1800], réparations de serrurerie, A. nat. H3 2559, 3e liasse ; ventôse an IX [commencé le 20 févr. 1801], Inventaire général du collège, A. nat. H» 2558 dosa. XX, u° 35. — 6 A. nat. H3 2558 doss. V. Plan du coll en 1804. — 7. A. nat. H3 2558 doss. XIV Rapport à l'admimstr. du Prytanée français, présenté par Lefebvre, architecte Au coll. de Paris, les toitures ont une superficie de 9S01 moires carrés, 91 ; et, en plus, au dessus de la lingerie, 273 m. c. 33. — 8. Voir ci-dessus p. 1 17 à 122. — 9. Id. p. 122. — 10. Communicat. de M. Staub, provi9. honor. de et de Buffon, élève à L. le 1856 à 1864.— 11. Arch. nat. F1" n° 52, le proviseur Rinn écrit, le 30 juil. 1845, dans son rapport annuel Il Serait à désirer qu'il y eût moins de constructions intérieures, empêchant la circulation de l'air, et je crois qu'il sera important, dans toutes les constructions projetées, In se rattacher à ce principe... N'ajouter aucune construction autre que des murs et supprimer, dès que laire se pourra, celles qui existent... » — Rinn y revient le 24 août 1847 t Si nous avions un peu plus d'air... il nous manquerait bien peu de choses, s A. nat. F'"" 7S488 n° 4. — 12. Communie, de M. Staub.— 12'1'*. En 1872, l'Inspection générale éerit les élèves sont à l'étroit dans les cars de récréation. * A. nat. F'"» 130 L ORGANISATION MODERNE il n'y en avait eu que deux ; la troisième datait du Consulat et la qua- trième, du départ de l'Ecole normale,en plus vaste était aussi la plus noble et on l'appelait la Première cour ou la Cour d'honneur ou la Cour d'entrée c'était, en effet, la plus ancienne ; autour d'elle, était né le collège de Clermont. Aussi, a-t-on voulu conserver, dans le lycée reconstruit, les deux tours qui la dominaient, la tour de l'horloge au Sud, la tour des Cadrans solaires, au Nord. Une lettre du proviseur, Pierrot, nous la décrit, en 1842, sous de peu riantes couleurs 2 Son aspect, nous dit-il, est triste et même repoussant. Les murs, sur les quatre façades, sont noirs et sales. La plupart des fenêtres sont vieilles et hors de service. Les bandeaux du bâtiment, situés entre cette pre- mière cour et la seconde, sont tellement dégradés qu'il s'en détache assez souvent des fragments... J'ai eu à craindre, plus d'une fois, les accidents qui pouvaient résulter de cet état de choses... Les toits sont chargés de lucarnes inutiles et difformes. Enfin la façade de l'est, celle qui se présente d'abord aux yeux des personnes entrant au collège, vieillie, comme tout le reste, est encore enlaidie par des fenêtres de largeur très inégale. Et les bandeaux en ruine ne se rattachent pas même aux bandeaux des façades du sud et du nord a ». Elle n'avait de chenaux que sur un seul côté *. L'année suivante, un fronton fut construit sur la façade ouest, au dessus des trois fenêtres centrales, qui fut chargé de masquer un peu la difformité du bâtiment 5. Et, en même temps, les dix cadrans astro- nomiques dont les traits, rouges et noirs, s'effaçaient, furent restaurés 6. L'un d'eux portait cette légende Plures labori, dulcibus quaedam oliis. Et désormais, comme au temps des Jésuites, le Collège n'eut plus d'excuses, pour ne pas faire la leçon au soleil en personne. A la moindre distraction de l'Astre, on était armé pour lui rappeler, à la mode babylonienne ou italique », son métier de régulateur mondial. Dans le lycée d'aujourd'hui, cette cour est devenue une délicieuse oasis de gazons, d'arbustes et de fleurs le feuillage vert bleu, vert jaune et rougeâtre, d'essences très heureusement harmonisées, y pare, de poésie et de couleurs avenantes, le seuil de la vieille maison. La Seconde cour ou Cour du Bassin n a disparu le bassin avait été comblé, pour éviter aux écoliers les tentations dangereuses, et un vieux bâtiment, surnommé le Corps de garde, avait fini par être démoli, en 1854 8. Cette seconde cour était, comme la première, dont le bâtiment 1. V. pièce justifie, n° 65 [janvier 1804] et ci-dessus p. 120, et Arch. nat. F^h 78486 n°s 35 et 36 22 mai 1837 le proviseur Pierrot déclare au ministre que Louis le Gr. a besoin d'une cour nouvelle [la 4e cour], la cour du Plessis, encore occupée par l'Ecole normale. — 2,3 et 4. — Arch. nat. F*1 3576, lettre du 31 juillet à l' — 5. 1b. Le proviseur fit ces réparations sans autorisation préalable et l'admin. super. lui rappela la règle, qu'il avait violée. — 6. A. nat. Fn 3576. — 7. V. nos planches V, fig. 16, tome I ; XXIII, fig. 70; XXIV, fig. 71 du présent tome. — 8. Arch. nat. F1?h 78488 n°225 L'Inspection générale, écrit le LA VIE MATB1UELLE '. LOCAUX 131 du Proviseur la séparait au Nord-est, un reste de l'ancien collège de Clermont l. La Troisième cour, placée en arrière de la seconde, était une survi- vance du collège du Mans lbis. Elle était, au début du siècle, appelée Cour des Emérites 2 et av lit été mise en état, sous le Consulat ***•. Et c'était au dessus de son sol que la sinistre prison, dite du Plessis, avait verrouillé ses portes et aveuglé ses fenêtres ". Au nord et le long de la rue du Cimetière Saint-Benoit, plus vaste que l'^s autres cours, s'ouvrait la Cour du Plessis, la Quatrième cour1 c'était là qu'avait joué La Fayetle enfant, les cheveux poudrés et noués en perruque à marteau ; là, que les Elèves de l'Ecole Normale, Victor Cousin, Théod. Jouffroy, Ern. Havet, Jules Simon, Francisque Bouillier. Ern. Bersot, Constant Martha, Paul Janet, Ch. Thurot 5, et tant d'autres, avaient, avant ceux de l'Ecole d'Administration 6. pro- mené la gravité pTéooce de leurs pensées ou médité, qui sait? leurs escapades de jeunesse. Dans la partie de cette cour qui, depuis la fin du Gouvernement de juillet surtout, avait vu tomber, à l'angle des rues Sainl-Jacques et du Cimetière Saint-Benoît, un groupe mal assuré de constructions du xviii8 siècle, la place avait été nivelée une douzaine d'arbres avaient été plantés '. On avait abattu là l'ancienne façade du collège de Mar- moutier 8 et la petite cour, dite des Professeurs, en arrière du n° 121 de la rue Saint-Jacques, avait été enfin réunie à la Grand Cour du Plessis 9. Des arbres ! On avait fini par en découvrir d'assez dévoués et d'asser vivaces pour consentir a pousser leurs branches et à ouvrir leurs feuilles, dans le voisinage des murailles noires. Il n'avait pas fallu 1 avril 1354 les vieux bâtiments dits du Corps de garde, qui forment un des côtés de la seconde cour vont être probablement démolis... La suppression de ces masures agrandira la cour du moyen collège et y fera pénétrer plus large- ment la lumière et le soleil. » — 1 et lbi». Bibl. S. Fargeau, voir le plan de Berty, v. 1601, se superposant sur celui de Verniquet Ktin xvme s. — 2. 3 bru- maire an X ; areb. nat. H3 2558, doss XXV. Sur la proposition de Champagne, on fera déblayer la cour des Emérites, remplie de moellons... ; à rapprocher du plan conservé aux Arch. nat. ! 13 2181 datant de 1801 où le bâtiment des Emé- rites est marqué par un X. — 2bis. [Janvier 1804]. § 5, A. nat. HJ 2553, doss V. — 3. V. ci-dessus, p. 119, 128. —22 brumaire an XI [13 nov. 1802] Travaux pour replacer six croisées mur^s depuis le temps des prisons. » A. nat. M3 2553. doss. XXV. — 4 à 7. V. le plan le Paria 6535 cite'. — Notre 1. 1, planche V, fig. 16. — En 1837 le proviseur avait grand peur que cette cour lui échappât A. nat. F'"" 78486, n° 36. — Dupuy, L'Ecole normale super, p. 17-58; liste des élèves de l'Ecolfl normale, ib. p. 83 et as. ; hsU- de leurs. . travaux p. 161-180. — V. ci-dessus p. 120 et 121. — 8. Plan de erly v 1601, et plan de Tiuvot 1734-39. - 9. V. notre t. I, planche V, fig. 16 Outre les cours réservées aux élèves et que nous venons d'étudier, on verra sur ce plan notamment d'autre* petites cours celle des professeurs, celle des cui-uies ancien coll. de Marmoutier et celle de la cordonnerie anc. coll. de 132 L ORGANISATION MODEllN'E apporter là les arbres seuls nais aussi la terre végétale, pour les nourrir, car, à un pied du sol, on rencontrait des escaliers en pierre et autres constructions * ». Aucun arbre, dans la Première cour. Mais cinq ou six douzaines de bons platanes, du côté de la rue Cujas, sur ce qu'on appelait le TerrainlhU. Ils étaient là, sagement alignés, un peu maigres et très indulgents ; et leur feuillage mettait, avec une bienveillance discrète, une ombre menue sur les ébats des écoliers. Longtemps l'idéal, pour une cour bien tenue, avait été d'être pavée 2. C'est au début de son provisorat, commencé en 1830, que M. Pierrot avait eu la hardiesse de cette plantation 3 ; elle survécut presque intact?, jusqu'en 4885 *. On sait de reste la fortune de cette idée, puisque toutes les cours de Louis-le-Grand — sans parler des autres lycées parisiens — sont aujourd'hui égayées par le feuillage des bons arbres. Et M. Pierrot, j'imagine, ne contemplait pas son œuvre, sans un brin de mélancolie. C'était là que le jardin du Proviseur * n'avait pu vivre que des heures trop brèves. Plus brèves à Louis-le-Grand, nous l'avons dit jadis 6, qu'à Charlemagne, à Condorcet et surtout à Henri IV ; à Henri IV, les derniers gazons et les derniers arbres des vastes jardins des Genovéfains proclament encore, autour d'un tennis, la vanité des gloires d'antan. Du moins, à deux pas du Terrain, un des successeurs de M. Pierrot et non des moindres, M. Jullien, substitua-t-il, pour l'Infirmerie, un jardinet au pavé de la cour 7. Cette cour cessa d'être, le mot est de l'Inspection Générale, une entrée de cave froide et humide. Quelques plates bandes, des fleurs, un bassin, donnèrent un peu de joie aux con- valescents 8. Le. Terrain, le jardinet, la seconde cour et la troisième communi- quaient dès lors 9 et, pour la première fois, de grandes traînées lumi- neuses pénétraient le lycée. 1 Févr. avr. 1836, A. nat. F17 3574 ; arbres plantés dans la seconde cour. — lbU. V. le plan 6585, cilé ; — notre t. I, pi. V, fig 16.— 2. Champagne écrit, le 1er jour cotnplém. an X [18 sept. 1802] Le pavé des cours du collège de Pa- ris exige des réparations... pour remplir des creux dangereux et empêcher la stagnation des eaux, pendant l'hiver. s Arch. nat. H3 2558, dossier XXV. — En 1834, le proviseur observe qu'à l'Ecole normale alors au Plessis les cours sont pavées, comme à Louis le Grand, A. N. Fn 3574. — Sept. 1836, pavage des cours, A. nat. F" 3574 et 3575. — 3. A. nat. F*7 3574; en 1836, semble-t-il, ou plus tôt. — 4. V. le plan de notre planche V, fig. 16. — 5. A. nat. F" 3574 ; Depuis que les arbres ont été plantés dans la cour du petit collège et que l'an- cien jardin du proviseur est devenu le seul emplacement qui convienne à la dis- tribution des prix... » 5 févr. 1839. — 6. Cf. notre ouvrage, cité, Les Ecoles, lycées, etc. p. 108, pi. 24, 25, p. 119 et ss. 133. — 7. Communication de M. Staub, proviseur honoraire, élève à L. le Gr. de 1856 à 1S64. — Mais, dès 1854, le pro- jet de remplacer par une terrasse la muraille séparant cette cour de l'infir- merie du Terrain avait été conçu,nous dit l'Inspect. générale ; A. nat. FHr n 225. — 8. Id. Voir le plan, n»6585. — 9. Comm. de M. Staub. LA VIE MATÉRIELLE LOCAUX 133 Seule, la Cour d'honneur, encerclée de bâtiments revèches, n'avait pu prendre sa part du dégagement'général. Un double passage conduisait, de cette cour, vers l'infirmerie et le Terrain, à droite ; vers la seconde cour, au centre. Un autie passage menait de la seconde cour à la troi- sième. Sur ces points stratégiques, il y avait deux portiers intérieurs, autorisés à vendre aux élôres des friandises l. M. Rinn commença - et M. Jullien acbeva de doter de préaux cou- verts toutes les cours 3 jusqu'à eux, les élèves, en cas de pluie, deman- daient aux salles d'étude un refuge 4. Dès le 8 brumaire an IX, [30 octobre 1800], Champagne avait en vain signalé l'inconvénient de cet usage, qui gênait, dans ces salles, le renouvellement de l'air ; mais il n'avait proposé que de leur substituer la chapelle désaffectée du Plessis 6. C'avait été un premier progrès d'éviter aux élèves, dès le début du siècle, de patauger, en récréation, dans les trous de leurs cours • un second, d'épargner à leurs dos l'eau ruisselant du haut des toits sans gouttières 7. Il avait même fallu ménager à leurs ngrines cette autre douceur n'être pas obstinément offusquées par l'inondation des fosses d'aisance 8. L'augmentation des cours de récréation avait tenu à la même cause qui multiplia les classas et les études, les réfectoires et les dortoirs au développement organique du collège. La première obligation qu'imposaient, au nom de l'intérêt supérieur, l'aflluence des élèves et l'inégalité de leur âge, c'était la division du collège en trois grandes sections, celles qu'ordonnait le Règlement lui-même Champagne leur donnait, non sans quelque solennité, les 1. Comin. de élève à L. le Gr. de 1836 à 1846. Voir plus bas p. 151. —2. A. nat. Fl~ n° 76 25 juillet 1848 une partie des fonds pour cons- truire, dans les cours de récréation, des portiques couverts, contre la pluie, est accordée par la Ville, à M. Rinn, proviseur de Descartes. — 3. Comui. de M. Staub. — 4. M. ; A. nat. H3 2558, doss. XXIV, 8 brumaire an X jusqu'ici, en cas de pluie, les élèves se réunissent, pour les récréation*, dans les salles d'étude. — En nov. 1821, un élève, Guy, pendant une de ces récréations dans les salles d'étude, se brûle la joue à la chandelle, A. nat. FH» 3150, n° 113. — Nous manquons de salles de récréation •, écrit au ministre le proviseur, 14 déc. 1839, A. nat. F'1 n" 66. Le 25 juill. 1848, le proviseur Rinn écrit Nous manquons de portiques couverts, pour les récréations en tenps de pluie.» A. nat. F1" 784^8 n° 76. — 5. L'immense salle de l'ancienne chapelle du lMes- sis ». A. nat. H3 2558, doss. XXIV — 6, 1er jour compléra. an X [18 sept. 1802], lettre de Champagne, citée plus haut, p. 132, n.'2. — 7. Arch. L. le Gr., 5; planche XIX, fig. 62. — 5. Prof de 6fra,p. 384 5. — 3-5. Insp. gén., A. tint. F1T n'39. — 6. A. n. F» 3574 et n 36; supra, p. 135, En 1872, l'Insp. gén. écrit les élèveB sont en'asaés dans les salles de classes, t A. nat. F'"" lias. L. le Gr., E, no 3. — 7. A. nat. F»"b n» 32 ; 82784, lias. B. 138 L ORGANISATION MODERNE muret au second élage, souvent fort éloignées du petit local qu'on nom- mai! alors les commodités » . En mars 18io, les nouvelles sallesd'étude étaient fort belles » mais les autres, appelées à subsister, assurait-on, deux années encore, étaient dans le plus lamentable état. L'excuse invoquée était que les bâtiments, où ces vieilles salles d'étude étaient logées, devaient être prochainement démolis. Mais l'inspecteur général Alexandre, ancien professeur de Louis-Ie-Grand, n'acceptait pas cette -excuse. tin ne peut admettre, protestait-il, que, pour épargner quelques billets de mille francs, un tiers environ des élèves soit laissé, pendant encore deux ans, dans un état que n'accepterait pas le plus mince chef d'institution ». Il s'indignait que les choses fussent déjà au même point, trois ans plus tôt, et se demandait si, dans dix ans, quelque chose y serait vraiment changé. Et il concluait En atten- dant, les générations d'enfants croupissent dans la misère et dans la saleté l ». D'autres témoignages, en 1838 2 et 1865 3, confirment, hélas, cette impression de malpropreté, que rieD ne donnait, en 1852 et 1854 tout au moins 4. Champagne n'avait-il pas, le 11 Germinal an X, proclamé comme un principe l'obligation de blanchir, tous les quatre ans, les salles d'études âbis ? Mais ce qu'on s'accordait plus généralement à reconnaître, c'était l'entassement incohérent des élèves ainsi, en octobre 1864, il y avait jusqu'à 50 élèves dans certaines études et, dans onze études sur vingt-deux, les plus grands et les plus jeunes élèves étaient rassemblés, pêle-mêle 5. Les tables en étude étaient, en 1837, placées presque toujours eu fer à cheval ; le maître, d'un côté, et les élèves, des trois autres6; plus tard, de i8a6 à 1864, par exemple, le défaut de place contraignait à mettre des élevt s sur le côté même où jadis le maître était i-olé. Devant les tables, des bancs en bois, étroits et continus, de même dimension que les tables. Aucun dossier ; à l'extérieur des fenêtres, en 1836, des jalousies 7. Derrière chaque place, accrochée par un fort noeud de corde à un. gros clou de la muraille, était une armoire de bois blanc ; elle contenait les livres et les cahiers de chaque éiève. II appelait cette armoire mobile sa baraque ». Il était interdit de fouiller dans sa baraque, sans per- mission expresse, au cours de l'étude; il fallait, avant le travail, prévoir les livres et cahiers nécessaires et, l'étude finie, les remettre en ordre. A plus forte raison trouer ou taillader sa baraque et y allumer du feu était-ils autant de délits 8. En 1836 ou plus tard, on commença, 1. 24 mars 1345 ; A. nat. F17" n° 49. — 2-3. Mars 1838, Insp. gén., A. nat. Fii n° 44. — 4. F1"" '. Lettre du proviseur au ministre, 23 mai 1837 ; A. nat. F12h 78486, n° 36. — 6-7. Infra, p. 389. Communie, de MM. Marcou et Guillo. — 8. Planche XXII, LA VIE MATERIELLE LOCAUX 145 Grand, comme dans les anciens Collèges, les Elèves n'étaient pas eniretenus par rétablissement ; il n'y avait donc point de local peur la confection des vêtements, point de magasins, pour les habit?, ni pour les souliers ; point de buanderie, point de lingerie ». Depuis 1800, il avait fallu et notamment aux dépens de la Bibliothèque, cr> er toutes ces pièces nouvelles ce fut, du reste, pour l'administration, un souci presque perpétuel. Les boutiques, qui empiétaient sur le périmètre du lycée, lui paraissaient l'emplacement tout désigné de ses magasins futurs ; mais il fallait les disputer et avec quelle opiniâtreté ! au domaine '. Il n'est pas jusqu'aux Water-closets dont l'insuffisance ne 'parût presque toujours choquante. On sentait trop leur présence, un peu partout il ne fallait pas moins, pour les trouver au rez-de-chaussée, descendre ou trois étages. Et, quand on les atteignait enfin, on les jugeait déshonorants pour les cours qu'il desservaient 2. Ces cours devaient suppléer à l'imperfection des corridors et des escaliers. Dans les interminables couloirs, les élèves risquaient de se perdre et d'échapper à tout contrôle; dans les escaliers tournants, ils risquaient, par surcoît, des entorses 3. Un seul et môme escalier s'oflrait à la circulation de plusieurs quartiers. Pour aller chez le Pro- viseur, le Censeur ou l'Econome, les parents, les mères et les sœurs des élèves devaient, non sans inconvénients de tous ordres, traverser la grande cour *. Enfin, on le reconnaissait officiellement, en 1845, il n'y avait pas moyen, pour le Proviseur ou le Censeur, de passer d'un collège à l'autre, sans traverser les cours 6 ». Les éludes avaient long- temps, quand il pleuvait, remplacé les cours; les cours, même l'hiver, remplaçaient les couloirs. Services mutuels. C'est par les cours que l'on devait commencer la visite du collège et par les cours qu'on était amené, à la finir. Nous voyons très clairement à quoi aboutissait cette visite insuffi- sance générale des locaux. Les cours, les classes, les éludes, les réfec- toires, les dortoirs, et le reste auraient pu convenir peut être à trois ou quatre cents élèves; mais non pas à mille, ni à douze, ni à quinze cents. Honos, onus on dirait que partout le collège succombait tout le poids de sa prospérité. Incapables d'assurer à tous les leurs un logis convenable, il n'en falla-t pas moins, de temps en temps que le Collège ou le Lycée con- sentissent à hospitaliser les réunions électorales c. 1. Arch. L. le Gr., 24 oct. 1840, Corr. adm., VII, 4412. — 2 Rapport .tu Directeur, 8 frini. an IX, A. nat. H* 2558 doss. XXIV ; rapport juil. 1824 al u., Fi"3574 Insp. génér., mars 1838, F11» D 44; 8 avr. 1S52 et 1 avr. 1854, té. 78 488, n°* 202 et 225. — 3-5. Insp. gén., 1838 et 1852. A. nat. F»'» IC n°» 44 et 46; n8 202 ; rapport uebdomad. 9 fT. 1846, A. nat F" 3577; 30 juil. 1845, rapport du proviaeur, F» n° 52. — 6. 6 déo. 1848, A. nat. F»a n» 80, 81, 81>>". 10 1 46 L OBGAMSATION MODERNE Le défaut d'espace, n'avait pas empêché de prendre cette précaution, avouée sans ambages, en 1837 isoler matériellement les divisions, pour mieux briser leur élan, en cas d'émeutes 1. L'éclairaoe. — La clarté artificielle aurait pu, même en dehors des heures tragiques, être d'un grand secours ; il eût été piquant que la nuit fût devenue au collège plus lumineuse que le jour. Il n'en était rien, en dépit du triple combat très loyalement engagé pendant plus d'un demi-siècle, contre les ténèbres. Ce fut d'abord à coup de chandelles que l'on soutint la lutte. Un chandelier de fer forgé 2,armé de bobèches de fer battu3, était, en étude et en classe, placé entre deux élèves. La chandelle était en suif et une rnouchelte se chargeait de rendre à la mèche les menus offices indis- pensables. Le maître avait droit à une chandelle, pour lui seul. Les jours d'effervescence scolaire, l'ennemi c'était la chandelle. Les élèves, à un signal convenu, éteignaient la leur et un dictionnaire, adroitement lancé en projectile, était chargé de cueillir le dernier souffle de la lumière du maître *. Peu à peu les chandelles connurent la concurrence des quinquets 6 et celle des lampes ce fut l'époque où l'éclairage à l'huile sembla res- plendissant. D'abord très timide, en 1821, il connut l'apogée de la gloire, de 1836 à 183J 6; après quoi, il se survécut, de plus en plus étiolé et pâlissant, jusque vers 1886. Tout n'était pas nouveau sans doute, dans l'éclairage à l'huile et l'ancien Louis-le-Graud avait eu, au xviue siècle, des lampes et des officiers lampistes. Mais les lampes étaient alors réservées, comme un objet de luxe, aux endroits où il était besoin d'une aveuglante lumière aux carrefours des corridors, par exemple 7. L'innovation consista seulement dans l'application aux études et aux classes des quinquets et des lampes. Cinq à huit par salle, en 1835 8. Quinquets et lampes quittèrent la table de l'élève, pour s'accrocher orgueilleusement au plafond. L'huile était contenue dans une couronne circulaire, qui faisait corps avec un énorme réflec- teur, peint extérieurement en vert ; elle était conduite à la mèche par des tubes métalliques. Un godet inférieur recueillait l'huile non utilisée. Ce godet était la perpétuelle menace suspendue au dessus des tètes éco- lières. Quelques élèves, sournoisement initiés au mystère de cet inslru- 1. il mai 1837. Inspection gén., A. nat. F'7h n° 32. — 2. An XI, A. nat. H» 2561a ; cf. supra, t. I, p. 416, vie mater. 1763-99. — 3. An X, A. nat. H» 2551, doss. 3. — 4-5. 20 sept. 1821 et 31 janv. 1824, A, nat. F"n 3150, pièce 47 ; 3176', 1 et 2. — 6. Lettre du proviseur 13 nov. 1835, A. nat. F" 3574.— 7. Supra, t. I, p. 416. — 8. Lettre cit. provis., 13 nov, 1835 ; cf. 11 déc. 1843, A. nat. F" 3576. LA VIE MATERIELLE LOCAUX 147 ment, savaient pousser un organe caché, qui hâtait le remplissage du godet. Et soudain, flac, flac, une cascade d'huile se déversait sur les cahiers et les livres, la tète et le dos d'une victime. Autre jeu d'espiègles au moyen d'une seringue, aisément confectionnée avec un porle-plurne en fer hlanc, on savait mouiller le verre échauffé du quin- quet, qui se brisait presque aussitôt, après un ou deux claquements secs '. Au dessus de la table des maîtres, des lampes de sûreté » étaient chargées de déjouer l'ancien complot des chandelles pour que les élèves ne fussent plus tentés de les éteindre, à coups de livres, le verre et la flamme étaient emprisonnés dans une armure grillagée . Malheureusement et c'était la rançon du progrès, l'éclairage à l'huile était plus cher que l'éclairage à la chandelle. Chaque lampe, en 1836, coûtait 22 fraocs 3 ; et nous ne disons rien des verres ; un grand chan- delier de fer forgé ne coulait jadis que 2 francs et on avait 50 bobèches pour lo francs *. Et puis le prix des huiles pouvait monter d'une façon imprévue 6. Pourtant, en 1839, l'éclairage à l'huile triomphait partout dans les cours, les lieux d'aisance, les corridors, les dortoirs, aussi bien que dans les études et les classes. Or on crul s'apercevoir insensiblement que sa réputation était sur- faite et le gaz commença au Collège des conquêtes nouvelles. Non sans peine, à dire vrai. Ju;ind le Proviseur osa. en septembre 1839, demander cinq becs de gaz pour lout le collège, il fut, par l'Adminis- tration supérieure, repoussé avec perle. Et le Conseil royal refusa attendu qu'il y aurait danger d'explosion 6 ». L'année suivante, malgré tout, le Conseil, ayant fait provision d'héroïsme, on se risquait à essayer, avec la plus rare prudence, un bec de gaz. Pour plus de pré- caution, on le plaça hors du collège, au dessus de la porte d'entrée, auprès du vestiaire des professeurs '•. Cette inauguration fut chantée au banquet de la Saint-Charlemagne ; non point, comme le veut la légende, par Octave Feuillet alors rhétoricien, mais bien par le jeune Biacabe, dont l'esprit avait alors une verve plus universellement goûtée que celle de l'élève Feuillet. Malgré quelques revanches partielles, l'huile finit par succomber, en 1890. Mais le gaz, qui avait conquis en dernier lieu les éludes, ne savoura pas désormais sa victoire en repos. A Louis-le-Grand comme ailleurs, les hygiénistes l'accusèrent d'engendrer les maux de tête, la myopie et d'encourager les calvities futures l. On sait quelle est aujour- d'hui son heureuse rivale l'électricité. Pourtant l'Economat essaya d'abord de lui barrer presque partout la route elle ne put franchir ces premiers obstacles que dans les classes — histoire naturelle, physique 1. Corn. M. le Denlu, pour 1851-59. — 2. 7 ,uin 1*45. Ccrr. adm . VIII. 60P1. — 3-5. A. nat. H» 2551, doss. 3 an X; ; F'" 3574 1336 ; F'" 3602" 1848-1850. — 6. A. nat. F17 3575. — 7. /*. — 8. A, nat. F" en 1882. 148 L ORGANISATION MODERNE histoire, géographie 1910 — ,où les projections avaient revendiqué leur droit à la lumière. Depuis 1914-5, elle a étendu son domaine au lycée lout entier. Pour être moins indispensable que l'éclairage, le chauffage n'en méritait pas moins quelques égards. Point partout, cependant. Aux dortoirs, par exemple, qui, l'hiver, étaient glaces. Aux réfectoires non plus, semble-L-il. Et il est très cer- tain que la délicatesse de ce que l'on nomme le confort moderne ne songeait guère à ménager aux corridors une atmosphère tiède. Outre les classes, les études et la salle de l'administration, cinq ou six pièces seulement avaient droit, en à la chaleur officielle le Cabinet et l'antichambre du Proviseur ; le cabinet du Censeur ; le cabinet de l'Aumônier ; le cabinet de l'Econome et le bureau de l'Employé attaché à l'Econome 1. Le chauffage, dans les études, paraissait excellent, de 1856 à 1864 il était assuré par des poêles en tôle ou en faïence, dans lesquels on brûlait du bois 2. Mais le chauffage, dans les classes, était beaucoup plus défectueux, avec des cloches en fonte, à combustion de houille 5. La température, qui s'élevait très vite, tombait de même au travers du métal, porté au rouge, le dégagement des gaz donnait une atmos- phère malsaine ; les tètes étaient congestionnées et les pieds restaient gelés. Le service des poêles était fort compliqué et n'avait guère qu'un avantage celui de ne pas charger trop le budget *. Le Proviseur commença, en 1840, à parler de calorifères. Il savait qu'au collège de Versailles des calorifères fonctionnaient, à la satisfac- tion de tous 5. La ventilation serait mieux assurée qu'avec les poëies ; la houille, substituée partout au bois, permettrait même d'obtenir une économie honorable. Il proposa de commencer par le petit Collège, où deux calorifères auraient remplacé 25 poêles 6. Le nouveau chauffage fut aussitôt adopté, en principe ; seules, des expériences, inégalement heureuses, en retardèrent l'application "'. En 1862, il ne commençait pas moins à se généraliser au Lycée ; mais les derniers poêles ne furent délogés que par la reconstruction totale de la maison 8. ' Aujourd'hui, dans les nouvelles salles d'histoire, le chauffage central vient d'être installé, en 1912. Mais il lui arrive de se signaler encore par quelques sautes d'humeur. Faut-il ajouter que, en 1916-20, la crise du charbon n'épargna pas toujours ses menaces à notre lycée. 1. Lettre du recteur au proviseur, 20 déc. 1833 ; arch. L. le Gr., Corr. adm., V, 2628. — 2-3. Communie, anc. élèves. — 4. An XI, A. nat. H 2446, f° 129 r°. — 5-7. A. nat. F'' 3575; 3576. Arch. L. le Gr., Corr. adm„ VII, 4298; 4787- — S. A. nat. F^n lias. À* n° 1. la vie matérielle locaux 149 Pour conquérir à Louis-Ie-Grand l'air et l'espace, qui lui manquaient si étrangement, au début du xix' siècle, nous voyons maintenant quelles périodes, avant la reconstruction de 1885, furent surtout actives et heureuses ce sont celles que remplirent le provisorat de M. Pierrot- Deseilligny 1830-1815. de M. Rinn 1845-1852 et de M. Jullien 1856-1861. En d'autres termes, ce furent le Gouvernement de juillet et une partie du second Empire. A Napoléon I*r le lycée devait l'esquisse de ses frontières ; à la Restauration, le collège dut l'annexion des Cholets et les lils de fer, dans les dortoirs. Mais la réunion du Plessis, mais l'achat des bouliques, riveraines des rues Saint-Jacques, Saint- Etienne des Grès et Chartière ; mais le dégagement des cours et la construction des préaux ; mais la plantation des arbres, et l'introduc- tion de l'éclairage à l'huile puis au gaz, et enfin l'établissement des calorifères, c'est bien sous Louis Philippe et sous Napoléon III que le vieux Louis-Ie-Grand réalisa toutes ces améliorations successives. C'est M Pierrot qui, le premier, démontra la nécessité d'une reconstruc- tion totale. Plus encore peut être que M. Jullien, et c'est tout dire, il sut comprendre quel problème la complexité des locaux posait au Collège. Et il transmit, comme un legs, à ses successeurs la solution vraie. CHAPITRE III L'Hygiène L'air et l'espace, laissés à chaque élève, à l'intérieur de Louis-Ie- Grand, étaient, nous venons de le voir, réduits à la portion congrue. Il était d'autant plus nécessaire de surveiller l'hygiène de l'alimentation et du vêlement; des exercices physiques et des promenades la santé générale était à ce prix. Nous allons tenter de savoir par quel tour de force cette santé fut toujours bonne. § 1. — L alimentation. Quatre repas dans la journée deux, le déjeuner et le goûter, très rapidement pris ; les deux autres, à la fourchette. On les appelait le dîner et le souper. Les heures changèrent quelque peu, sauf pour le repas du soir, fixé, dès 1800, à 7 heures 1/2 et qui est resté fidèle à cette vieille habitude. Le moment du petit déjeuner matinal n'a pas beaucoup varié, lui non plus à 8 heures, en 1800 et 1801, il fut avancé à 7 h. 1/2, en 1803, le moment du lever ayant été avancé, lui aussi et, dès 1801, placé à 5 h. 1 /2. — Le repas de midi lut, surtout dans le début du siècle, a6sez notablement déplacé fixé d'abord à 1 h. 3/4, en 1800, il fut insensi- blement avancé à 1 h. 1/2 en 1801 ; à midi 1/2 dès 1803 et à midi en 1821, sinon dès 1814 \ 11 n'y avait pas de goûter, avant la visite de Bonaparte, le 22 mai 1801. Le premier Consul, ce jour là, interrogeait le Directeur, Champagne, sur l'ordre des exercices ». II écoula. Tout à coup, cette observation Je ne vois pas de goûter ». — Ce repas là n'est pas indispensable, expliqua Champagne, tant bien que mal ; et il n'est pas démontré qu'il soit utile à la santé. Au reste, les élèves peuvent prendre à dfner » le pain qu'il leur faut, s'il leur en faut. Leur appétit les avertit assez sur 1, Règl. 22 fruct. an VIII [9 sept. 1800f, A. nat. H* 2528, n° 12 ; tit. XV, art. 107, 108; règl. juil. 1801, ib. arl. 19; id. tit. 3, art. 4; règl. 10 juin 1803, § 10, art. 68-91. A. nat. Fnu 3104, n» 2. LA VIE MATÉRIELLE HYGIENE 1 5 ce point. — Sans doute, trancha Bonaparte. Mais donnez leur à goûter je crois que cela est bon, à leur âge ». Et, dans le moi* de juillet qui suivit, Bonaparte fil dire au règlement du Prylanée 'art. 41 Personne ne pourra mettre du pain dans sa poche et le manger ailleurs qu'au réfectoire. Le goûter, placé à 5 heures, en 1801, fut avancé à 4 h. 3/4 en 1803 puis, eu 1821, au plus tard, à 4 h. 1/2 '. Depuis lors, cette heure n'a pas été changée à Louis-le-Grand. Le» repas de midi et du soir duraient 3/4 d'heures. En somme et dès 1803, les quatre repas étaient placé» entre 7 h. 1/2 du matin et 7 h. 1/2 du soir. Deux heures après le lever, 1 h. 1/2 avant le coucher. L'e6tomac, du soir au matin, avait 11 heures environ pour se reposer '-. Et l'on se couchait trois quarts d'heures après le souper ». Une récréation d'une demi heure suivit ce souper jusqu'à M. Jullien, qui, non sans peine, la supprima . Quantaux menus, nous serions bien surpris, j'imagine, qu'ils fussent somptueux. Au goûter, l'Economat donnait du pain tout sec, arrosé, sans doute, d'eau fraîche et claire. Mais les deux portiers de l'intérieur vendaient aux jeunes gourmands quelques friandises c'étaient des sucreries, du chocolat, de» gâteaux, des tartelettes de la galette, du beurre et le fromage nommé bondon ; l'été, c'étaient des fruits et du sirop de groseille. Le petit déjeuner, de 1803 à 1854, se prenait en élude ; à partir de 1854, on le prit au réfectoire, l'Administration ayant consenti à joindre au pain de la soupe chaude soupe au lait, ou à l'oignon, ou à l'oseille. Les familles, au début, applaudirent à ce geste. On crut généralement qu'il produisait quelques bons effets sur la santé des élevés i ». Mais la plupart des écoliers dédaignèrent bientôt la soupe et se contentèrent de dévorer à belles dents leur pain blanc. On se demanda si, les jours de sortie, on ne remplacerait pas la soupe par le chocolat. Puis, réflexion faite, on réserva le chocolat pour les jeunes enfants, dans la succursale de Vanves 5. Mais on pouvait, une fois par semaine, remplacer la soupe par le café au lait. Au dîner», qui coupait en deux la journée, un polage gras, un plat de viande garni de légumes, un plat de légumes, que pouvait remplacer un entremets sucré, un gâteau de riz. par exemple. Le soir, au souper, point de potage ; un plat de viande avec légumes et une salade et un dessert. Le poison pouvait remplacer la viande et, dans ce cas. i! semble que les œufs remplaçaient le légume 6. En 1800, et probable- ment jusqu'au Concordat, on ne faisait jamais maigre '' ; sous la Ins- tauration, le maigre était observé trois fois par semaine mer redi, vendredi, s. En 1872, une fois, le vendredi seulement. Les 1-8. Ibid. — 3. Infra. Vie mor. — 4-5. Insp. g6D„ A. nai. F" K ne225. - 6-7. A. nat H> 2548 ; prairial an VIII 21 mai 1800 et M.]. — S. en- quête, sur plaintes des milles, A. nat. FlT" 3104, n° 149 ; 14 mars 1818. 152 L ORGANISATION MODERNE menus devaient être approuvés par les signatures du Proviseur, du Médecin, de l'Econome *. En 1851, les cuisines connurent des minutes de grosse émotion. Il leur fallut se séparer de leur plus vieux serviteur, devenu pour elles l'ami de tous les jours leur fourneau. Il recevait ses invalides, après vingt ans de surmenage mais vingt années sur la vie d'un fourneau pèsent beaucoup plus que sur la vie d'un marmiton. Aussi bien ce fourneau-!à tombait il de vélusté». Son âge ne l'empêchait pas de garder une incandescence admirable. Mais il exagérait un peu et il lui fallait brûler 12 fr. 28 de charbon par y ur. Moins vorace et cependant mieux en forme, son successeur, dont les archives nous ont gardé le joli portrait en couleur, se contentait quotidiennement, pour une chaleur égale, de li'O kil. de charl ©n soit 4 fr. 80 seulement, au lieu de 12 fr. 28 * ; devant un pareil record, l'ancêtre n'avait plus qu'à dis- paraître. Autour des fourneaux, le lycée actuel ent;elienl un chef et six auxi- liaires. En 1801, la cuisine comprenait six personnes un chef, trois aides, un laveur, un écureur 3. » Le service de la halle, des batteries de cuisine, des réfectoires s'ajoutait, pour ces auxiliaires, au service des fourneaux. Pour obtenir qu'on leur rendit la chopine quotidienne de vin dont ils avaient été officiellement privés, il avait fallu livrer de grands combats 4. 11 fallait en livrer encore, pour réussir à les habiller, car la modicité de leurs gages, disait l'économe Lesieur, les empêchait, depuis deux ans, de s'acheter une seule veste » ; et puis leurs vêtements, tant bas que souliers, étaient brûlés ou pourris par l'eau 6 ». Et cependant, chaque jour, eux et leurs successeurs, devant ces fourneaux ou ces alambics, accomplissaient le grand œuvre. Nous voulons dire, qu'en 1800, le bœuf se transformait au besoin, cinq fois sur six, en bouilli ; qu'on le faisait aussi passer à ia vinaigrette, comme le veau passait à la gelée, ou en ragoût, ou en rôti, et comme les pigeons passaient à la compote. Le mouton braisé ou la tête de veau pouvaient faire les cavaliers seuls. Après quoi, l'épargne intelligente et attentive >avait la bonne formule des hachis, des mortadelles et des paies froids. Les maquereaux, plutôt que les soles, étaient chargés de représenter les poissons. Les œufs étaient multiformes en omelette ou au beurre blanc ou battus au fouet d'osier ,;. Au registre des légumes, les pommes de terre étaient, en 1800 et 1801, réservées surtout pour l'infirmerie 7. Les élèves bien portants 1. Arch L. le Gr., Corr, adm. III, 1148.— 2. A. nat. F1' 3602G8 ; sept. 1851. Avec un plan en couleur. — 3-4. Rapport de l'Econome, 24 vent.' an IX f !5 mers 1801 1. A. nat. H3 2558, dois. 8, n» 9. — 5. 1b — 6. A. nat. H3 2548 ; montis pour prairial an VI11 [21 niai 1800 et ss.]; H3 2544, aliments pour vend. an X [commencé le 23 sept. 1801]. — 7. A. nat. H3 2570, n» 794 ; H3 2544 aliments. vie HYGIÈNE l'- étaient invités à se consoler avec les pois verts au lard, les choux fleurs au beurre ou les choux-pommes, les épinards au lait et les carottes, les lentilles et les artichaut, les haricots frica>-sés, le riz, les oignons et les navets l. Le mois de mai autorisait les tartelettes aux cerises et prolongeait le règne des pommes crues; septembre et octobre enseignaient avec succès la douceur des poires et des raisins. Au temps de l'épopée impériale, en 1807, !e bœuf bouilli régnait en maître le bœuf à la mode, la langue de bœuf, le ragoût de mouton, le veau rôti ne songeaient guère à luMer conire un rival de cette force ; et, moins encore, les pieds de mouton, les petits pâtés, ou la morta- delle. Les haricots, qu'on fricassait, comme les lentilles, les pommes de terre et les sah->ifis, l'emportaient presque quotidiennement sur les autres légumes. On faisait maigre le vendredi et le samedi et, pendant le carême, un jour de plus, le mercredi les poissons morue, raie, limande et saumon étaient généralement préférés aux œufs. On avait l'âme a>sez généreuse, mêcne au lendemain de Tilsilt, pour manger, et plus d'une fois par semaine, des poires d'Angleterre * -. Plus près de nous, les menus de mai 1872 s nous laissent ente dre que les écoliers de ce temps connaissaient maintes délicatesses, dont étaient sevrés leurs aînés, A la soupe grasse, si en faveur en 1800 et 1807, on veut bien mêler la julienne et la soupe à l'oignon, la soupe à l'oseille, la soupe purée et la soupe au lait. L'imagination de l'Eco- nomat sVt enrichie, à l'endroit des viandes tout d'abord le bœuf bouilli à perdu de son absolutisme il s'auréole de radis, il passe à la sauce piquante, il devient rôti-jardinière et rôti-sauce, aux champi- gnons. Le veau est rôti, avec purée. Le mouton se réhabilite un peu il n'est pas seulement en ragoût mais il est présenté comme rôti en purée, ou rôti jardinière. Le lapin — authentique — est agréablement sauté. Il y a bien quelques saucisses aux choux et quelques pâtés chauds, mais il y a surtout un plat fameux, dont le fumet chatouillait en vain l'odorat des internes, placés dans les autres lycées parisiens ce plat c'était la volaille du jeudi. M. Le vice-recteur Mourier, dans une lettre au ministre, le 25 mai 1872, n'a pas jugé trop indigne de la gravité universitaire cette petite glose, à l'honneur de la volaille Vous remarquerez, Monsieur I"1 Ministre, ce service traditionnel la volaille du jeudi. On ne la trouve qu'à Louis-le-Grand. Elle fait tant de jalousies, dans les autres établis- 1. Vend, an X, A. nat. !•' 2544. — 2. Menus conservés dans les archives de l'Eeonomat à Louis le Grand. Ainsi. du lundi 9 mars au dimanche 15 mars 1807; du 18 au 24 mai ; du 5 au 11 oct. 1807. Cette même année, pour la S Jean, un dîner succulent fut servi à Vauves, où figurèrent des poulets, pâtés, oies, bro- chets, gâteaux, du vin de du eafe, de l'eau-de-vie. — 3 25 mai 1872. rapport au ministre, A nat F1 "» liasse li, n° 47. 154 L ORGANISATION MODERNE sements, que le Conseil Académique eût élé enclin à la supprimer. J'ai persisté à la maintenir, pour éviter les graves difficultés qu'une pareille suppression eût causées à l'Administration du Lycée et pour écarter les plaintes, dont on n'uurait pas manqué d'assaillir Monsieur le Ministre * ». Le tact de l'Administration supérieure avait peut-être, ce jour-là, empêché la volaille de Louis-Ie-Grand do monter à l'assaut du Minis- tère. A ce moment-là, les pommes déterre fricassées connaissaient l'apogée de leur règne, quoiqu'il leur convint, à l'occasion, de s'accommoder en purée. Mais l'oseille et les lentilles au lard, le riz, les haricots et les asperges avaient aussi leurs dévots. Le fromage et la confiture se fai- saient moins rares que jadis. Le Prytanée avait essayé de faire et de cuire son pain lui-même. Il avait fallu, dans ta suite, y renoncer; mais, pour l'avoir mieux cuit, le Collège, en 1861, n'avait pas hésité à le payer pius cher, sans grand succès, semble-t-il, quoi qu'il en coûtât francs au lycée*. En 1818, les Inspecteurs l'avaient trouvé beau et bon 3 » ; et, en 1872, ils disaient le pain est toujours bon 4 ». Celait aussi l'avis du Recteur, qui voulut le goûter n. Chaque élève en avait une demi livre à déjeuner, cinq à six onces au goûter, et, à discrétion, au dîner et au souper. En 1801, chaque élève en mangeait deux livres environ par jour 6 et, en 1845, 54 décagrammes » ; or. dans les autres collèges parisiens d'internes, les mangeurs de pain exigeaient davantage 60 décagrammes à Saint-Louis, et 67, à Henri IV6bu. Dès 1801, on Prytanée, la précaution de donner le pain rassis ; carie pain frais dis- paraissait trop vite. En 1828, le pain fut si cher que le Collège perdit, de ce chef, francs 7. Le souci d'avoir de la viande fratche était constant, ainsi qu'on le pense bien. Le 2 thermidor an XI [21 juillet 1803], on avouait que, la viande livrée étant faisandée, et jusqu'à trois fois en une semaine, il avait fallu changer de boucher 8. Du reste, les bouchers du Prytanée ayant leur tuerie à domicile », le contrôle des viandes était plus malaisé. En sept. 1805, Champagne e s'applaudissait, au contraire, de la bonne qualité des viandes fournies et, le 1" février 1822, le Proviseur Malleval mettait en garde le Recteur contre des prix trop bas, fixés pour les viandes du Collège le bon marché risquait de coûter trop 1. Ib.— 2. mars 1861, 86464,n 14 et 14^".— 3. 14 mars 1818, A. nat. F» 3104, n° 149. — 4-5. Le 25 mai 1872, lettre de l'inspecteur [d'académie] Sonnet, au v. recteur, A. nat. Fn liasse B, n° Rap- port, A. nat. H» 2553, dos. XXI. — 61"». Exercice 1845, tableau comparatif; A. nat. F" 3577. — 7. Arch. L. le Gr., Corr.' adm 24 déc. 1828. — 8. A. nat. H3 2558, doss. XXI. — 9. Lettre de Champagne au président de l'administra- tion du Prjtanée, 26 fruct. an XII, A. nat. H3 2558, dossier V. LA VIE MATÉRIELLE HYGIENE 155 cher *. Rn 1845, chaque élève à Louis-le-Grand, comme à Henrf IV, consommait quotidiennement 21 décagrammes de viande; un peu plus qu'à Henri IV '. En 1841, l'Inspection générale avisait le Proviseur que les œufs n'avaient point toujours paru irréprochables '. Cet avis, que nous sachions, ne fut pas renouvelé. Autres observations, en 1841 le repas du soir plus substantiel que le repas de midi 4 ; enfin parfois cette cri- tique, que n'eussent pas signée tous les élevés trop de pâtisseries. Le devoir de l'Economat était d'éviter toute dépense alimentaire, dont la santé ne tirait aucun profit et son ingéniosité, pour l'accommode- ment des mets, fui, en mainte circonstance, aux abois. Le 24 ventôse an IX, [15 mars 1801", il écrivait a Je fais faire un emploi journalier de la graisse, pour les légumes et les ragoûts. J* rédais ainsi presque à moitié la consommation du beurre et les aliments sont très bons. Il est nécessaire aus*i d'observer que, le suif éiant fort cher, le boucher a bien soin de ne laisser de suif ou de graisse sur la viande que ce qu'il ne peut ôter sans l'altérer 5 ». La boisson ne semble pas avoir été trop indigne de la nourriture l'eau des fontaines d'Arcueil,dont le collège avait déjà l'usage, au temps des Jésuites, continuait à l'alimenter*. Nous avons vu que le Plessis avait un réservoir et que Louis-le-Grand dut le disputer à la Faculté de Droit 7. Le Collège, en l'an^X, utilisait également de l'eau de puit- On ne songeait pas encore à stériliser, comme on le fail aujourd'hui, Gette eau, d'origines diverses. Mais on songea, des le 3 vendre an XI, [25 sept. 1800], un peu avant la rentrée, à la mélanger adroite- ment avec le vin. Le nom était déjà consacré c'était l'abondance '. L'économe expliquait que la mesure était salutaire. Il ajoutait qu'on en usait de même à Saint-Cyr. Tout de même, il n'était pas sans inquié- tude, sur l'accueil que lui réserveraient les élèves de Paris. Et il s'était fait autoriser à familiariser avec elle les élèves restés au collège pendant les vacances ceux-ci préviendraient les élèves arrivants ; alors, il n'y aurait point de difficulté 3bis ». L'abondance survécut. En 1818 on mélangeait 7 10 d'eau et 3 10 de vin 10. Le vin du Collège coûtait aiors 1 franc à 1 fr. 10 le litre. Il était, en 1872 encore, comme aujourd'hui, choisi par adjudication ». Sans doute, en 1872, le V. Recteur Mourier écrivait au Ministre u L'abon- dance pourrait être discuté*1 le tiers de vin, qui en est l'un des élé- 1. Lettre de Mallwral au recteur, 1 tir. 1822, A. nat. F"' S 2. — Le Vêlement. 11 semble paradoxal qu'au début du xix° siècle la pénurie de vêle- ments ait menacé la santé des élèves et la fortune du collège. Voici cependant ce que nous révèlent plusieurs documents d'arcliives. Lorsque, en brumaire an IX, uue partie des élèves du Prytanée français fut transporlée à Lîancouxt, ils étaient sans bas, la plupart sans souliers, avec une mauvaise paire de draps, chacun ; deux che- mises, encore plus mauvaises, un pantalon et une carmagnole, dans le même état. » Le citoyen Crouzet^ Directeur du Collège national de Compiègne, était chargé d'accompagner cette lamentable caravane ; dans une lettre au citoyen Reboul, secrétaire de l'administration du Prytanée, Crouzet ajoute Les enfants étaient, en général, si délabrés que je fus obligé d'en cacher une partie dans des chariots couverts, pour ne pas les exposer, sur les chemins, aux cris de la pitié publique ». Le jeune Simon, fils d'un officier de vétérans réformé, était là à peu près nu, comme tous les aulres 1 ». Quelques jours plus tard, le Directeur du Collège de Paris ajoute, dans un rapport officiel à l'Administration 2, quelques traits nouveaux an tableau de celte misère Beaucoup d'enfants manquent d'effets, depuis 15 ou 20 jours ; l'inspection des élèves de chaque salle d'études, lors du dernier congé, l'a prouvé. Presque aucun n'a eu de bas, de bonnets, de cravates, le 5 frimaire. Le 30 brumaire, presque tous furent mouillés, par une forte averse, à la promenade. Ils n'eurent ni bas, ni effets à changer. Et presque tous ont aujourd'hui ces mêmes bas... Si cet ordre de choses n'est réformé, on perdra entièrement le pensionnat ». Comment ces écoliers acceptaient-ils leur détresse ? L'un deux nous le dit, dans ces quelques lignes 3, auxquelles nous nous reprocherions de rien changer, pas même l'orthographe Aux citoyens administrateurs du Prytanée français. Concitoyens, Vous m'avez comblés de bienfaits, depuis mon admission dans cetle maison ; vous avez jette vos regards paternels sur mes pressants besoins et enfin vous avez secouru celui qui ne connut le bonheur que depuis qu'il se trouve auprès de vous; c'est encore tout confus de ces 1. Arch. nat. H" 2530 ; 28 brumaire an IX i9 nov. 1800] — 2. A. n. II' 2558' do8. XXIV 8 frimaire an IX [29 no?. 1800]. — 3. Du 3 lloréal an IX [26 avril 1801]. Arch. nat. H 2530. 160 L ORGANISATION MODERNE bienfaits que j'ose vous prier de me faire donner une cravate, n'en ayant qu'une ; deux mouchoirs de poche, n'en ayanl qu'un ; et enfin, Citoyens administrateurs, des bas, vu que les petites guêtres detoffe que je porte, dans ce moment, gênent ma jambe et qu'elles sont usées. J'attends de voire humanité ce nouveau bienfait, qui ne pourra accroître la reconnaissance avec laquelle je suis, avec un profond respect, RoUXKL. P. S. — J'aurais aussi grand besoin d'un pantalon ou d'une culotte. Touchés par la spontanéité de cette éloquence, les citoyens adminis- trateurs écrivirent, en marge de la requête Accordé. Tous ces enfants, que la Pairie assumait le devoir d'élever, Bonaparte comprit qu'il fallait d'abord les vêtir. 11 consulta Champagne, direc- teur du Prytanée, et décida que le linge et les habits seraient pareils pour tous il y aurait un uniforme l. L'humanité la santé, les conve- nances, l'égalité, le bon ordre, l'esprit militaire, trouveraient leur compte à cette organisation. Que de choses, dans un uniforme ; combien d'idées et combien de symboles ! Cet uniforme serait obligatoire pour les internes ; et interdit aux externes. En arrivant au collège, un interne attendrait à l'infirmerie que son uniforme fût prêt ; et cet uniforme serait prêt, dans un délai qui ne pourrait excéder quatre jours. Vêtu de cet uniforme, il serait autorisé à paraître, au milieu de ses camarades 2. Pas d'uniformes, pas de pensionnaires. La question délicate était ailleurs que tous les internes fussent vêtus de même, qu'ils eussent même trousseau et même habit, rien de mieux. Mais qui aurait à payer l'habit et le trousseau? serait-ce l'Etat, seraient-ce les familles? Les familles trouvaient tout simple que ce fût l'Etat. Leurs enfants n'étaient-ils pas les Boursiers de la Nation. La Nation leur accordait l'instruction, le gîte et les vivres voudrait-elle donc leur refuser le vêtement ? La famille du jeune Bureau, fils et frère de soldats tués au service de la République, écrivait v Le Gouvernement, qui accorde aux défenseurs de la Patrie un asyle et de l'instruction, n'a pas eu l'inten- tion d'annuler, pour ainsi dire, la reconnaissance nationale, en forçant à des sacrifices... impossibles * ». 1. Règl. du 9 sept. 1800, A. nat. M 158, n° 4 et PP 2528, n° 12 ; tit. 1, art. 6 tit. II, art. 14; tit. VU, art. 69, etc. Cf. lettre du ministre de l'Intér., Lucien Bonaparte, aux administrateurs du Prytanée, 21 fruct. an VIII [8 sept, 1800] t Je désire que tous les enfans soient habillés uniformément, dans le plus court délai possible... A. nat. H3 2530, lias. 3, pièce 27. — 2. Règl. 11 niv. an XI [1 janv. 1803, A. nat. M 158, art. 2. — 3. Arch. nat. H3 2530 ; [1800]. la vie matérielle 161 De son côlé, l'Etat fit son compte. II calcula qu'un nouveau cadeau lui coûterait cent dix mille francs par an ', au cas où le nombre des élèves au Prytanée n'augmenterait pas. Et il augmenterait. Une lar- gesse qui ne se limite pas ne risque-t-elle point de devenir une folie ? L'Etat proclama donc ce principe les familles auraient à payer le trousseau de leurs enfants ; l'Etat se contenterait de l'entretenir et, quand l'élève quitterait le Collège, l'Etat rendrait à la famille le trous- seau qu'elle aurait fourni. Deux douzaines de serviettes et deux paires de draps seraient seuls retenus au Prytanée. Et cette h fourniture » fut présentée aux parents comme une simple avance. Le mot fut sou- ligné 1. Le trousseau fut exactement défini, non sans quelques hésitations, de 1800 à 1803. Ce qui demeura ce furent l'habit et la culotte de drap ; l'habit, d'allure militaire et la culotte à l'ancien régime, laissant voir les bas et la totalité des souliers. Le chapeau était double, l'un à trois cornes et l'autre, rond 3. Les indécisions portèrent sur les détails plus que sur l'ensemble et plutôt sur la couleur que sur la ligne. Tout d'abord on avait adopté le bleu pour l'habit, la culotte et le manteau *. Mais presqu'aussitôt, le bleu paraissant trop cher, on tenta de lui substituer le gris-de-fer s. Une année entière ne put s'achever à la louange du gris-de-fer. On découvrit que les laines et la teinture de ce drap d'une qualité infé- rieure étaient vraiment trop déplorables. Chaque mois, la nuance accentuait une dégradation nouvelle de teintes ; le soleil et la pluie donnaient au drap des reflets jaunes ou ternes, qui éveillaient sur sa propreté des idées équivoques. Le dégraissage et les réparations accen- tuaient en débâcle la déroute du drap gris. Et puis sa faible épaisseur obligeait à le doubler, de telle sorte que son prix doublait aussi à tout égard, il manquait décidément de tenue. Dernier avatar, pour le drap gris-fer le jugement sévère de l'opi- nion. Lorsque les élèves du Collège de Paris, expliquait-on, sortent en rang, les jours de congé, pour aller à la promenade, la couleur de leurs habits les fait prendre pour des enfants de l'Hôpital général ; et ils se voyent, presque toutes les fois qu'ils sortent, apostrophés, à plu- sieurs reprises, de cette qualification par des gens du peuple; ce qui 1. Lettre de l'administration du Prytanée au ministre de l'Intérieur, 17 fruct. an VIII [4 sept. 1800',, A. nat. H ; 2530, lias. 3, n» 1 ; lettre cit. de Luc Bonap., 21 fruct. an VIII. — Cf. réponse de l'agent comptable à une requête, iS brum. an IX, A. nat. Il 2532, basse A. — 2. Règl. 22 frnet. an VIII, art. 6, 7. 13, 15; cf. lett. du ministre. 21 fruct an VIII, [3 sept 1800J, A. nat. H» 2530. - 3. 76. et règl. therm. an IX [ 1801] art. 16, tit. I, 4 brum. an IX 26 oct. 1800], art. 14 du règl., A. nat. H» 2530. lias. 2. — 4-5. Ib. Rapport de* admin. du Prytanée, 17 fruct. an X [4 sept. 1802], A. nat. H. _ 4 A. nat. F13 3149 n» 89 c. Traité fait par les élèves » et qu'ils pré- tendaient imposer à l'administration, lors de la révolte de janvier 1819. — V. planche XIX, fig. 59, les uniformes successifs de 1806 à 1906. — Cf. d'Albanès, Mystères dn Collège, 1845, p. 13, 15, 24. — 5. Arch. de L. le Gr. — Corresp. admin. In» 329; 13 juill. 1825. Arrêté pris par le Conseil royal le 14 juin 1825, concernant le trousseau que doivent porter les élèves, en entrant dans un des -collèges à pensionnat de Paris [Louis le Gr., Henri IV, S. LouisJ. — 6. 5 déc. 1830. A. n! F*7* n° 3. Coll. roy. L. le Gr. LÀ VIE MATÉRIELLE .' HYGIENE " '167 qui avaient refleuri, à la hampe de nos drapeaux, les hantaient. Ils précisèrent et nous avons retrouvé aux archives leur pétition offi- cielle. La voici. Tenue proposée àli. le Ministre de l'Instruction publique, pour les élèves du Collège royal de Louis-le-Grand 1 Coiffure Petit shako, à la prussienne, formant le creux, vers le milieu, en feutre ou en carton, recouvert de taffetas ciré ; le dessus, en cuir vernis ; menlionnières en cuir, recouvertes de lames de cuivre, en forme d'écaillés. Aigrette tricolore en laine, d'environ trois pouces de longueur ; cocarde tricolore en fer blanc peint, placée au bas de l'aigrette. Plaque de cuivre représentant les armes du collège et un coq. Visière bordée de cuivre, fortement inclinée. Equipement Ceinture en cuir verni, large d'environ 3 pouces, fermée par une large agrafe, surmontée d'une plaque de cuivre, semblable à celle du shako, comme en ont les ceinturons de cavalerie. Petite giberne d'artillerie, adaptée par deux courroies à la ceinture et portant, pour inscription, deux palmes et un coq, au milieu. — Les suus-offi- ciers et officiers, au lieu de la giberne, auraient des sabres d'infanterie ; les caporaux et sergents conserveraient la giberne. Ils porteraient les épaulettes conformes à leurs grades. Habillement Habit coupé, col militaire de bleu de roi, comme les vestes de l'artillerie. Ghandk tenue Collet écarlate, fermé par une agrafe ; parements de manche écarlates, coupés en pointe ; revers des basques de l'habit, rouges; pantalon bleu de roi, avec un passe-poil rouge. Pas de gilet. Guêtres de drap bleu-de-roi, avec boutons de cuivre. Petite tenue Collet bleu de roi et passe-poil écarlate, fermé par une agrafe ; parements de manche bleu de roi, avec passe-poil rouge ; revers des basques de l'habit bleu de roi et passe-poil rouge ; gilet bleu de roi, guêtres de drap bleu, à boutons de métal. Contre-épaulettes rouges, pour les deux tenues. La grande tenue, boutonnée avec deux rangées de petits boulons sur le devant, le grand parement étant bordé d'un passe-poil rouge ; la petite tenue boutonnée tout droit, par une seule rangée de gros boutons. Tenus de tous les jouhs Veste de police bleue, gilet bleu, bonnet de police, pantalon de drap bleu ; guêtres, idem. Le Ministre, au mois d'octobre, s'était borné à modifier le modèle des boutons 2. Le proviseur, M. Pierrot, appuva vainement, le lTdéc. 1830, les vœux de ses élèves. II écrivait au Ministre *. A l'introduction du 1. i30. A. n. P»1j n° 3»>i. Coll. roy. L. le Gr. — 2. Arch. de Louis-le-Gr., Corrcsp. admin. IV, n» 1732; 20 [oct. 1830. — 3. Id, Cor- -rtsp. coll. II n° 2110 ; 17 déc. 1830. 168 L ORGANISATION MODERNE tambour et des exercices militaires, dans nos établissements, semblent se lier des changements nécessaires, dans l'uniforme des élèves. Le chapeau rond, surtout, les choque et les importune. Ils sollicitent aussi de légères modifications, dans la forme de leur habit ». Le Ministre estima que ces modifications n'étaient point si légères. Il reculait devant la dépense. Evidemment, et il le reconnaissait, les finances de Louis-le-Grand supporteraient allègrement cette transfor- mation ; mais convenait-il que la mesure à prendre fût particulière et non générale? Et, si elle était générale, dan3 quel embarras fâcheux risquait-elle de mellre la comptabilité, chez un bon nombre de collèges x ! Près de deux ans se passèrent. A la fin de nov. 1832, de nouvelles barricades à Paris et à Lyon, par exemple, avaient pu convaincre le gouvernement que l'esprit pacifique a du bon. Et, quand l'habit des élèves fut modifié, on eut grand soin d'en bannir les ornements militaires » ; on avait déclaré suspects les retroussis, revers, liserés ». Et l'on déclara officiellement que l'habit des élèves devait être un frac bourgeois, c'est à dire un habit à basques ; mais boutonné droit, sur la poilrine, selon l'usage adopté pour les jeunes gens, particulièrement dans les maisons d'éducation ». Ainsi, l'uniforme devenait vraiment un symbole Napoléon lui de- mandait de traduire l'esprit militaire de l'Empire ; Louis-Philippe, de traduire le triomphe de la bourgeoisie, dans le royaume. Les journées de févripr firent renaître, dans le cœur des élèves, les rêves guerriers, un moment caressés en 1830. Ils demandaient même le droit de joindre à leur uniforme une épée. Aux cote's de Letronne, qui la présidait, et de David d'Angers, une commission réunit le proviseur de Descartes, M. Rinn 3, pour discuter quel vêtement il convenait d'accorder pour l'avenir aux lycéens. L'épée ne fut concédée qu'aux Elèves de l'Ecole normale *. Les lycées auraient des souliers demi-bottes, sur lesquels retomberait un pantalon bleu, avec liseré rouge. Une tunique bleue, bordée d'un liseré rouge au collet et ornée de parements, fermerait, sur le devant, par une seule rangée de boutons dorés. Au collet, des palmes brodées d'or ; autour des reins, une ceinture de cuir noir, avec plaque au milieu, sur laquelle les initiales du lycée se détacheraient. On avait, à l'unanimiîé, préféré, au pantalon serré et à la tunique étroile, le pan- talon large et la unique large, par le souci de ne pas contrarier le développement physique des jeunes gens. Quant à la coiffure, c'était un képi brisé, avec galon, liseré et gland, fixé au fond en or B. 1. Arch. L. le Gr., Corresp. admin., IV, n° 1782. Lettre du ministre de rinstr. publ., Barthe, au proviseur, 18 janv. 1831 — 2. Id. Corr. admin , V, n° 2420. Lettre du recteur, Roussette, au proviseur ; 16 mars 1S33 L'arrêté mi- nistér. avait été pris le 27 nov. 1832. — 3, 4, 5. Arcîi. nat. F" 3176*3, 22 avril LA VIE MATÉRIELLE BTGlÈlfE 169 Le second Empire s'en tint, pour le vêlement, à l'arrêté ministériel du 22 sept. 1848. Le prix du trousseau, en 1853, fut fixé, pour les lycées parisiens, à 600 francs *. C'est l'uniforme d'hiver conservé au Collège Stanislas qui pourrait le mieux, dans le Paris d'aujourd'hui, évoquer à peu près devant nos yeux ce que fut alors le costume officiel à Louis-le-Grand. Tout au moins en ce qui louche à la tunique et au ceinturon *. Mais le laisser-aller se glissa peu à peu dans la tunique on aurait dû la porter fermée et cependant, dans les dernières années de l'Empire, on la portait ouverte ou ne fermant que par le bouton d'en haut, sinon d'en bas 3. Ce qui démontrait l'inutilité du ceinturon. L'hiver, le pardessus était facultatif *. La tenue d'été, bleu-foncé, elle aussi, était en drap plus léger, pour le pantalon et le gilet '°. Petits ou grands élèves portèrent d'abord le col de crin de la vieille armée 6. Puis, vers 1867, le faux col se trouva en pleine floraison ; ou le greffait, tant bien que mal, sur des chemises de toile molle, non empesées s. Ce qui choquerait aujourd'hui nos susceptibilités hygiéniques, c'était l'impersonnalilé des uniformes. Celui que les internes revêtaient tous les jours provenait des générations antérieures. Il était anonyme. Il passait, le plus fraternellement du monde, d'un dos à un autre ; après une lessive complète et qui laissait sur l'étoffe des traces incontestables. Cet uniforme-là était appelé le n" 3. L'uniforme, qui en était à sa seconde année de service, était réservé aux honneurs du jeudi et on le nommait le n° 2. On gardait, pour le dimanche et les sorties, l'uniforme qui était encore dans la fraîcheur printaniere de sa première année c'était le n° i 9. Le premier vêlement civil fil très modestement son apparition pen- dant l'été de 1858 ou 1859 c'était un veston gris quadrillé, fort léger et qu'on se procurait moyennant un crédit de 3 francs , désormais la jiorte s'entre-baillait à toutes les innovat'ons antimililaristes. On sait assez qu'elles s'y glissèrent l'une après l'autre. Au-dessous du pantalon à passe-poil rouge, les souliers à cordons u ne prélendaient à aucune élégance. Autour des mollets, des bas bleus chinés 12,qui s'arrêtaient au genou, là où finissait le caleçon de toile w. 1848. Procès verbal de la Comuiissiou. Le Journal officiel publia, le 2G avril, l'arrêté ministériel rendu le 2-i avril, à la suite de lad. Commission. L'arrêté sur le trousseau est du 22 sept. 1848. — 1. Arch. L. le Gi\. Correap. admin. X. n» 10224 Lettre de Fortoul au recteur, le 30 avr. 1853 — 2 et 3. Communie, de M, Raveton, èlère à Louis le Gr. de 1S51* * 1867.— 4 et 5 Comm. de M. Slaub, élève à L. le Gr. de 1854 à 1864. — 6 et 7. Comm. d- M. Raveton. — 8. Comm. de M. Raveton. — 9. Comm de Bill. Raveton, Staub et de M. le l;octeur A. le Dentu, élève à L le Gr. de 1851 à 1859. — 10. Comm. de M. le 1' A. le Dentu. — 11. Comm. de M. Staub — 12. Comm. de MM. Staub et Raveton. — 13. Comm. de M. Raveton. — Le 22 mars 1868. M. Rallier, inspec- 170 L ORGAIS'ISATIOIN MODERNE Sous la 3* République, l'uniforme a été modifié jusqu'en 1889, il comportait une tunique en drap Meu foncé, boulonnant au col et s'éva- sant en jupe ; une capote à double rangée de boutons dorés, au nom du lycée *,. C'est de 1889 que date l'uniforme actuel veston croisé, genre officier de marine, en drap bleu foncé ; gilet avec boutons grelot ; un pantalon sans passe-poil ; une capote ; une casquette marine. A partir de la Première, le veston pouvait être remplacé par la redingote. L'uniforme d'intérieur n'est pas obligatoire la tenue d'hiver est un veston ordinaire en molleton bleu ; la tenue d'été est en petit drap gris. Les internes adoptent volontiers une grande blouse de serge noire. Il semble que l'uniforme ait aujourd'hui perdu beaucoup de son prestige. On n'a plus esoin de l'interdire, comme jadis, aux externes. Et c'est peut-être là un dernier progrès dans l'hygiène du vêtement. • — N'oublions pas, malgré tout, que l'uniforme avait été, pour la santé des élèves, un premier bienfait; en masquant leur misère, il avait cou- vert leurs corps, trop souvent grelottants. Autre service il avait foitifié en eux l'idée qu'ils appartenaient à la Patrie autant qu'à leurs familles. Grâce à lui, enfin, ils sentaient mieux qu'ils étaient une partie d'un tout. S'ils oubliaient parfois leurs devoirs envers eux-mêmes, ils oubliaient moins aisément leurs devoirs vis-à-vis de Y Aima parens. Du reste, l'uniforme n° 3 lui même avait droit à des égards quiconque en prenait avec lui trop à l'aise, fût-il en récréation, était réprimandé sans pitié 2. § 3. — Les Récréations, les Jeux, les Exercices physiques. Les récréations quotidiennes varièrent assez peu, dans leur durée 3 3 ou 4 heures ou un peu plus, en comptant le temps des repas, dans une journée de 15 heures 1/2. Reste à savoir l'emploi de ces récréa- tions. teur général, parlant do la lingerie de Lonis le Jr , écrivait Let conditions et les fournitures de lingerie sont a réformer. » Arch. nat. F'"h liasse L. le Gr. B, n° 49. — 1. Pour les tout petit», la jaquette était remplacée par un veston à revers, avec double rangée de boutons. — 2. Arch. L. le Gr., rag. des retenues, 1826 28, 1841-42, 50-53 ; couper les palmes de l'unilorme, arracher les boutons, déchirer lo drap, le salir, ne pa3 le brosser, exposaient l'élève à une retenue. — 3. Arch. L. le Gr, liasse an IX, n9 34 5 h. 3/4, lever; 7 h. 3/4- 8 1/4 déjeuner, récréation; 9 3/4 10 1/4 récréation ; 1 1/2 dîner et récré- ation ; 4 h. 1/2-5 h. 1/4 récréation ; 7 1/2-8 3/4 ?ouper, récréation.— Vers 1818, lea élèves se levaient à 5 h. 1/2 et se couchaient à 9 h. A. nat. F17" 3104, pièce 158. En 1920 ; lever 6 h.; coucher 20 h 30 ; récréations 2 heures 7 h. 40 à 8 h.; 10 h. à 10 h. 10 ; 12 h, 30 à 13 h. 30; 16 h. 30 à 17 h , Repas 1 h. 10 ; trarail . Et, au mois de mars 1849, c'est l'Inspection générale qui nolait Les exercice» gymnastiques sont suivis avec empressement et succès !2 ». Onze mois plus tôt, il avait fallu modérer l'enthousiasme naissant pour la gymnastique et à Louis-le-Grand — ou à Descartes — comme ailleurs les jeunes gymnastes ne pourraient s'exercer qu'une fois par semaine et le médecin devrait leur donner son autorisation. 11 est vrai qu'on voulait restreindre ici, pour augmenter là car la commission de réforme» et M. Rinn en faisait partie proposait h l'exercice du soldat sans armes et du pas gymnastique deux fois par semaine 1-b"». Le procès de la gymnastique semblait gagné, à Louis-le-Grand. Depuis un an, le lycée possédait, comme professeur, un ancien sous- officier du génie, Nap. qui avait eu le mérite de créer l'ensei- gnement de la gymnastique à l'Ecole polytechnique il savait à la jeu- nesse inspirer de l'ardeur pour les exercices physiques et son influence, sur elle, était heureuse. M. Rinn s'en applaudissait u. 1, 2. Arch. L. le Gr. Corr. adm., [II, n» 1256. — ^3. A. n. F" n» 24 ; 30 mars 1840 Peu d'élèves, dit l'insp. gén., y prennent part » [a la gymnas- tique! — 4. A. n. F'"* 78487, n» 54; 26 mars 1846, insp. génér. — 6. Idem. — 6. Id. et comm. d M. Staub. — 7. A. n. F'" 3 574 A» 1835. — 8. A. n. F'7» n° 24. L'insp. gén. dit ou i,cée d, Paris, cil., A. nat. H> an lieu de Vannes. - 6. Urconscrid,°n t 1a»vier 1804] a 2558,doss,erV, '^7^™ "pu,, ** d. l'Intérieur, a Napo- ,. „„te précèdent,. - S. *7 ^7,804, . . L'eapérience de léon, 13 tbarmidot an Xll u était UIle pen,ent ut,le ^^convénions e. les peines que l'on prouve à cou- rt qu'elle prévenu,! les .nconve ^^ ^ campag , 0„ tenir et à une ""^Jd,al ,. Mie saison... . A- ua t Fo 135 „e peut se dispenser de 1. "^'^ an sl [27 sept. 1802 et su,». An... dossier 783, Pièce 30, n" 3. . ^^ H, 2548 es 5, 10, 15, „ 2416, 1» 60, etc. - 10- ">• £ 30 ^ . ,_ ,_ u, l9 ,n,„ 1800. 20 25, 30 prairial an Yl", c. a LA VIE MATERIELLE HTGIOE 170 ensuite 1 et, dans le labeur aride de la décade ou de la semaine, ces heures, vécues à Vanves, avaient comme une fraîcheur bienfaisante d'oasis. Les tristesses de 1814 et de 1815 assombrirent, comme le pays tout entier, cette délicieuse maison des champs. Pendant la campagne de France, Fontnnes, dès le 8 février 1814 mettait d'urgence le château de Vanve?, appartenant au Lycée Impérial, à la disposition de M. le général, directeur des Parcs d'artillerie de l'armée >. Les poudres et munitions, exigeant des bâtiments vastes, isolés et cunvenable- mpnt situés, Vanves avait aussitôt paru, pour elles, un lieu d' On y achemina une partie des poudres réquisitionnées à Paris et on y laissa, dans les réfectoires, les bancs et les tables, qui servirent aux ateliers, pour confectionner les munitions K En 1815, après Waterloo, pendant que plus de 150 Prussiens se fai- saient loger et nourrir rue Saint-Jacques, à Louis-le-Grand, — à Vanves c'était l'invasion des Alliés 3. Ils s'y en vainqueurs. Dans l'habitation et dans le parc, ils traînaient leurs boites, leurs grands sabres, leurs orgies et, sous leurs ravages, Vanves sembla la proie des Barbares. Les petits écoliers n'eurent pas à attendre la fin de 1818 et l'évacua- tion totale du lerritoire, pour reprendre à Vanves leurs promenades de jadis. Mais ces promenades ne furent [dus que dominicales. En 1816, le proviseur, AL Taillefer, signalait, comme un avantage inappréciable, attaché au Collège de Louis-le-Grand, celui de pouvoir transportera Vanves, tous les dimanches, dès le matin, après l'oftice, et les élèves et les maîtres. Et il expliquait que l'enclos était entouré de murs » ; a toutes les précautions avaient été prises pour y rendre la surveillance facile et sûre ; les élèves n'y respiraient pas seulement l'air le plus salubre », ils pouvaient s'y livrer aux exercices les plus agréables et les plus salutaires de la gymnastique ; ». Le successeur de M. Taillefer, le proviseur AL Alalleval. parlait de Vanves avec moins d'enihousiasme, le 2 avril 1 SI 9 On y allait jadis le dimanche et le jeudi ; on n'y va plus guère que le dimanche, depuis quelques années. Cette promenade est une fatigue et une distraction G » ; 1. au château ; le* petits, dans les Mtimens de la terme. Arch. nat F1" .1574 — 6. Arch. de L. le Gr. Carr. admin., VI. ofl 3196 12 ont 1836 lettre de M. Petit nu proviseur; A. nat FIT» 78487 n» 25, insp. gêner, du 21 mars 1840; lettre de Villemain 18 mai 1843, arch. L. le Gr. 7111 n° 5404. - 7. Voir notre livre Les Ecoles, lycées,... Paris..., p. 40, 184. 184 L ORGANISATION MODERNE arrivât enfin au Ministère, sur la table du Ministre. Il ne fallut plus que dix ans pour qu'elle reçut, en 1853, sous le provisorat de M. For- neron, son application pratique 1. Onze années plus tard, Vanves devenait un lycée autonome ; le 6e lycée de Paris. Il cessait presque d'être le petit Louis le-Grand. Et c'est si vrai que, vingt ans plus tard, ce fut le Lycée Montaigne qui revendiqua ce titre 2. Louis-le- Grand avait, en somme, perdu sa maison de plaisance, sa maison des champs. Elle lui avait coulé francs, qu'il ne fut pas question de lui rembourser 3. Du moins, tous les anciens Louis-le-Grand, qui connurent Vanves et le prestige de sa grâce rurale, ont fidèlement gardé sa mémoire *. Nous savons que, dans leurs souvenirs, son image n'a rien perdu de sa jeunesse charmante. Vanves était l'oasis du vieux Louis-le-Grand; il en était aussi la sauté. § 4. — La propreté et la Santé. Si la vie matérielle, par toutes les avenues où nous avons essayé de la suivre, — par les finances et l'habitation, par l'alimentation, le vête- ment et par les exercices physiques, — n'avait abouti à la santé géné- rale du Collège, le collège n'aurait pu se survivre longtemps et, très vite, son histoire se serait close. Nous avons dit comment, à force d'intelligence active et de soins attentifs, il réussit à conjurer les pires difficultés financières, à soutenir ses murs croulants, à conquérir l'espace, la lumière et l'air, à nourrir, à vêtir, à fortifier son peuple d'écoliers ; il nous reste à exposer la conclusion de tant d'efforts et leur récompense. Qu'un jeune rural grandi, comme un petit animal sauvage, daus l'intimité des champs ou des bois, ait un corps musclé, souple et robuste, achevé par une tète ébouriffée, et deux joues peintes à la façon des pommes d'api, — cela est dans l'ordre ; la nature est maternelle à cet enfant, que la cueillette des fruits alimente et que le soleil, grand tueur de microbes, fait poussera l'instar d'un arbrisseau. La propreté n'est pas la première condition de sa santé. 1. Le 1er octob. 1853 la division élémentaire de Louis-le Grand, trans- férée à Vanves ! arch. L. le Gr„ Corr. admin. X, n° 10258. — 2. V. pp. 82-85, etc. et notre livre Les Ecoles, lycées... Paris, p. 192-8 et Victor Chauvin, Ilist. des lycées de Paris 1866, in-12, p. 54 55. — 3. Victor Chauvin, op. laud. p. 56; cf. ci-dessus, p. 125. Il eût fallu au moins 3 millions pour rem- bourser Louis le-Grand des terrains et des constructions de Vanves, si l'on avait voulu en estimer équitablement la plus-value. — 4. Comm. de MM. Mar- cou, A. le Dentu, Staub, Raveton, etc. Dans les palmarès de Vanves, v. en 1S81 le dise, de M. Ch. Glachant p. 18 ; en 1887, p. 23 le dise, de M. Compayré, et les dise, cités ci-dessus, de MM. Brouardel et Frédér. Passy. LA VIE MATERIELLE BTG1BME 185 Mais, dans un grand collège parisien, l'agglomération urbaine crée des dangers parfaitement inconnus au jeune campagnard ; et la pro- preté et l'arme la plus puissante pour les prévenir et los combattre. Cette rubrique de la propreté, à Louis-le-Grand, risque sans doute de cboquer quelques-unes de nos délicatesses contemporaines ; mais n'oublions pas que la 1res giande place réservée à l'eau, dans la toilette, est de date récente. Au xviu" siècle, gentilshommes et grandes dames pratiquaient encore, ce qu'ils appelaient la toilette sèche ils l'oppo- saient à la toilette humide. Si la toilette sèche fut quelque temps en honneur à Louis-le-Grand elle avait donc d'illustre» patronages pour la défendre. En ih03, nous n'assurerons pas que les femmes des professeurs logés au collège abusassent des bains ; elles en usaient cependant et, si nous le savons, c'est qu'elles déversaient l'eau de leurs baignoires dans les fosses d'aisances, dont elles troublaient ainsi l'étiage l. Evidemment les bains tièdes n'étaient pas quotidiens, au Collège ; nous n'assurerions même pas qu'ils y fussent hebdomadaires, ni peut être, dans le principe, mensuels. Oserons-nous dire qu'ils furent, en réalité, depuis i8oi, à peu après trimestriels lbis?... Au reste, y avait-il alors beaucoup de collèges ou d'institutions, où ils fussent beaucoup plus fréquents ? Le Collège avait eu quelques bains, dès le 9 thermidor, an Y "27 juillet 1707 2_, mais seulement à l'Infirmerie. On les prenait com- munément hors du collège, dans des appropriés * où les élèves étaient conduits, Rue Racine notamment. La grande ressource des délicats c'étaient les sorties * elles leur paraissaient donc deux fois douces... Les bains froids étaient, par contre, très en honneur, l'été. On les prenait, sous le second Empire, une ou deux fois par semaine ~°. Le proviseur, sous la Restauration, avait été invité par le Recleur à se mettre en quête d'une bonne école de natation 6 ; il s'agissait de choisir celle où 1 ordre et la décence seraient le mieux observés 7 ». Ce fut, 1. Rapport du 6 vend, an XII, adressa par l'agent comptable à l'administra- tion, A. nat. IP 256U — 1*1». Comm. de M. le ïr A. le Dentu, élève à L. te Or. de 1851 à 1859 ; et de M. Raveton, élève de 1859 à 1867. — 2. Arcii. rat. Fi 4259 n 4. — 3 Comm. de M. Marcon, élève à L. le Gr. 1836-1846 ; et de M. Ra- veton, qui ajoute rue Racine. Le 23 mai io37, dans une lettre au ministre, le proviseur réclame qu'on lui laisse les bâtiments du Pkssis pour y établir une salle de bains chauds; là seulement peut se placer, dit-il, an réservoir commode, pour le service des baignoires ». A. nat. F1"" 78 486, n° 3-'>. — 4. Comm. de M. le Lr A. le beutu. — 5. Comm. de M. Raveion deux rois. — M. Kinn, en 1853, dit le eudi. en élé, école de natation, de 11 heures à 12. » Il semble donc que ce fut alors une foia par semaine. A. nat. F''" 78488, i.° 206. — 6. A. nat. Fl~ 3150 n° 223 ; 7 juin 1723. — 7. Ce sont les expressions mimes em- ployées par l'administration, le S juin 1824 ; A. nat. FI"» 3104, i, 246; — Voir les vues du proviseur Laborie ,1^25-»; au sujet des bain», A. nat ,n» 4.. 186 L ORGANISATION MODERNE sous Louis Philippe, l'établissement accroché à la rive sud de l'Ile Saint-Louis, tout près de sa pointe orientale *. On l'appelait, sous Napoléon III et peut-être plus tôt, le Bain Petit 2. Groupés en compagnies, les élèves traversaient, pour s'y rendre, les rues étroites et pittoresques de la montagne Sainte-Geneviève. Chacun tenait, à la main ou sous le bras, dans un petit filet à franges, son caleçon d'uniforme, rayé bleu et blanc, qui allait se charger de zébrer la peau ; car ce caleçon déteignait. Cette promenade, au flanc de la vieille colline et le long des quais, dans la fraîcheur ombreuse des matins, laissait, aux écoliers une de leurs plus délicieuses sensations de collège 3. Aux bains froids, on n'avait pied presque nulle part. Il fallait nager et presque tous nageaient 4. Mes très jeunes camarades d'alors [1836-1846], et qui restent de ce temps-là, nous écrivait M. L. Marcou, peuvent se rappeler combien fut populaire, pour ses joues rondes et rouges et sa gaieté, celui qui, tin jour, se jeta, ?ans savoir nager, dans li partie du bain où l'on n'avait pas pied et barbotta hardiment. Ce jeune intrépide est devenu depuis le général Japy, de la garde impé- riale ' ». Dans l'intervalle des bains de corps, tièdes ou froids, les bains do pied pouvaient être secourables. On s'en était douté, dans l'ancien Louis-le-Grand du xviie siècle, et cela vaut d'être rappelé. Des bains de pied avaient été placés dans la petite cour du Mans-Neuf, dont plus tard l'on fit la 33 cour. C'est là que nous les retrouvons, depuis la Res- tauration tout au moins à l'angle de la rue Chartière et de la Ru© de Reims. L'élève s'asseyait sur un petit banc, que fixait au sol un sup- port métallique. Il avait, devant lui, un récipient d cuivre et, derrière, des ciseaux accrochés au mur 6. C'est M. Pierrot qui régularisa ce ser- vice ; une trentaine de ces récipients étaient installés là, sous l'Empire. Seulement, on oubliait un peu trop d'y venir7, En 1872, on aurait dû, aux termes du règlement, leur rendre visite, tous les quinze jours ; mais l'Inspection générale n'osait assurer qu'on les visitât toutes ks trois semaines. Elle le déplorait 8 et nous la comprenons, sans peine. La toilette matinale quotidienne, s'inspira longtemps d'un mépris ombrageux pour l'eau claire. Bonaparte, en thermidor an IX, [juillet 1801], ordonnait aux élèves du Prytanée de sessuyer le visage et de se laver les mains9. L^ encore on voit l'union de la toilette sèche et la toilette humide. Mais où se lavait-on les mains? Les anciens assu- raient, sous le second Empire, qu'on descendait dans la cour et qu'on 1. Comm. de M. Marcou. — 2. Comm. de MM. Ravelon et le Dentu. — 3. Comm. de MM. Marcou et A. le Dentu.— 4. Idem. — 5. Comm. de M. Marcou. — 6 et 7. Comm. de MM. Marcou et le Dentu. — 8. Arch. nat. FI"7*" liasses Louis-le-Gr., E n° 3.— 9. Règlement du Prytanée, tit. III, art. 25 ; Arch. nat. m 2528. LA VIE UATÉB1BLLB '. B161ENE 18"" les humectait à la fontaine l. C'était bien, en tous cas, ce qui se pra- tiquait alors à Saiule-Barb^ 2. Le lavabo, placé au dortoir, fui très certainement une amélioration n table qu'on s'imagine, au centre de la pièce, un réservoir cylin- drique, contenant la provision d'eau et garni d'autant d'ajutages à robinets que d'élèves. Le tout, reposant sur une vasque en zinc assez haute ; elle recevait leai et récoulait dans un récipient, placé à l'inté- rieur. Aucune prodigalité possible *. Ce lavabo se bu r vécut jusqu'en 1892. A en croire tel ancien élève, entré en 1859 au lycée, ce lavabo étaîl un pur cbef d'œuvre. Son réservoir, percé de petits robinets, donnait fort sagement une vingtaine de jets, gros chacun comme un fil. On revêtait li main de sa serviette et, en faisant le creux de la paume, on pouvait obtenir de quoi se passer de l'em sur la figure il si f lisait de patienter quelques minutes. Le malheur était qu'il y eût vingt robinets, p >ur 40 élèves. Les plus diligents pouvaient faire une toilette sommaire. Mais, comme on avait, au total, 15 minutes pour le lever, la seconde f iurnée n'arrivait guère à ?e débarbouiller. D'ailL-urs., il n'y avait plus d'eau * ». Nous nous souvenons que les dortoirs n'étaient pas chauffés 5. Or certaines nuits 1res froides réussissaient à congeler le réservoir. Ii y avait un remède attendre le dégel et faire des vœux pour qu'il i-e pré- seatât avant le lendemain malin 6. La toilette humide a fait de grands progrès sous la Troisième Répu- blique l-js internes actu-ls ne sont plus ennemis des ablutions abon- dantes et des bains. Nous avons essayé de montrer, dans notre premier volume, comment la coiffure, les peignes, la poudre, les rubans, absorbaient, dans le budget d'un élève de Louis-le-Grand, vers 1770 7, la majeure partie des recettes. Il fallut la Révolution pour permeltre à Bonaparte d'oser inscrire cet article dans le règlement du 22 fructidor an VIII , [9 sept. 18001 t Les élèves '"du Prytanée] porteront les cheveux courts et san? poudre 8 ». Tous ces élèves furent donc transformés en npolits tondus ». Et ce fut là, n'en doutons pas, un tait décisif dans notre bi-t >ire. Jadis un écolier avait besoin que le coiffeur accommodât quolidien- nement ses cheveux. Désormais, toujours audacieux, le Premier Consul le défendit et, en thermidor an IX, il décréta, pour h Prytanée Les élèves se peigneront eux mêmes B ». Il ordonna même qu'ils se pe raient avant de s'essuyer le visage 10. 1. M. Ravton, qui fat é'eve b L. le Gr de iS59 5 1887, tenait le Ml d'as Ancien surveillant — 2. Quicherat, fli f. d? Saint- Baràe, t. W, p - — 3. Comm. d* M Staub, élève à L. le Or. > M. Baveton. — 5. Voir ci desssft, r- 148 — 6. Comm. d • M l'i'lon. — 7. V. t. I, p. 430. — 8 Arch Bat. B» 2628 n" 12 ; lit. VU, art. 61. — 9. lit. III. art. 25, Arch. nat. H 2528. — 10 Idem. 188 L ORGANISATION MODERNE Restaient les élèves - lait plus ses miracles 2. Presque tous ses malades éluient prédesliu, s au salut. Quel dévouement n'avait-il pas fallu à elle, à ses collaboralri ses devancières, pour faire de l'infirmerie autre chose que le lieu le plus insalubre de la maisOQ ? L'aspect en avait déjà consterné le Premier Consul3, en mai 1801. Les murailles en étaient tellement lézardées et les plafonds si incertains que deux salles s'écrjulèrent ensuite, dans la nuitdu lerau 2 uivùsean X "21-22janvier 1802 *]. Deux autres chambres restèrent debout l'une était noire et il y fallait faire tous 1 -s panse- ments après quoi, les élèves y mangeaient ; dans l'autre, ils cou liaient et leurs lits s'y touchaient presque , convalescents et malades s'y entas- saient pêle-mêle, i La cuisine était située près des lieux d'aisance et les bouillons ou les autres aliments s'y corrompaient fréquemment5. » Il fallut enfin reconstruire, à partir de 1804, une infirmerie q i ne fut plus une honte ou un péril, pour le lycée la sauté des élevés valait bien les frs. qui étaient le chiffre du devis0. En 1848, on se plaignait que, sous les fenêtres de l'infirmerie et dans le voisinage des cuisines de Sainte-Barbe, on laissât les eaux grasses s'accumuler et des détritus de légumes, dont les exhalaisons corrompues* pouvaient être dangereuses, l'été7. Eu 1852, le plan, dressé depuis quatre ans, pour -aiuir ce foyer d'infection, fut enfin tiré des cartons8. Jusqu'en 18oi, l'entrée de l'infirmerie n'eu demeura pas moins trop semb'able à l'entrée d'une cave9. La cour voisine était humide et glaciale. Le bon soleil, guérisseur souriant de maux innombrables, lui refusait obstiné- ment sa visite ; jusqu'à ce que M. Jullien eût enfin réussi, nous ['avons vu 10,à regagner au lycée les bonnes grâces de l'Astre un jardinet vint dès lors et jusqu'à la reconstruction du lycée, offrir aux convalescents 1. là. ; comm, de M. ?taub. — 2. Les fièvres terribles, qui ont désolé tant de lycées, se sont, le plus souvent, arrëtéeB au seuil de notre vieux collège. Cette fréquente innocuité, à qui est-elle due ? aux bons soins d-^s proviseurs, des économes, sans doute. Mais surtout, surtout à ceux de la sœur Adrien. Nul ne le conteste. » Henry Dibot, Lettres d'un lyt cit. p. 110. M. babot entré à L. le Gr. en 1846 en sortit eo — 3- 5 ventôse an XI [24 févr. 1S03 l'infirmerie, que le Premier ooBsnl avait trouvée, dans sa visite, très insutfiaante. > A. nat. H- 2553, do. Il y avait pour les consultations une salle et les registres de ces consultations étaient assez bien tenus5. Un de ceux qui ont le mieux connu le vieux Louis-!e Grand, M. Sévrelte, nous écrivait L'infirmerie du lycée n'a jamais été en- combrée de malades ; même en temps d'épidémie, les lits ont été rare- ment occupés ». Les documents d'archives confirment cette apprécia- tion. En 1822, un maître fut atteint de petite vérole et cependant nul élève ne l'a prise au collège ; ce qui prouve que tous les élèves avaient été bien vaccinés* » A quelques reprises, en 1801, en 1802, en 1850, une diarrhée subite et presque générale faillit jeter l'alarme7 ; on en 1 Insp. génér., mars 1838 A. nat. FHh 78 486, n° 44. — M. Rinn, le 21 août 1847, dans son rapport annuel l'infirmerie est bien tenue, i — Comm. de MM. Staub, A. le Dentu, Sévrette, etc. — 2 Vend, an X [commencé le 23 sept. 1801] ; inventaire de l'infirmerie et registres des remèdes fournis A- nat. Hs 2544. — 3. Idem. — 4 et 5. Idem. — 6 A. nat. F"» 3150, n° 167. — 7. 23 fri- maire an X 14 déc. 1801], A. nat. H3 2558, doss. XXI ; nuit du 22 au 23 fructi- dor an X [9-10 ?ej>t. 1802, A. nat. H 2442 p. 16 ; janvier 1850, A. nat. F" 3602". ri. xvi bis. Fig. 46. — M. Bruet, -* el "" Planes baque,s de chlorure. L. .nourriture fut surveillée le maigre, réduit i un seul our par semame; les salai-ous, I» charcuterie, les les légumes herbacé, furent prohibés; les racines el les farineux furent manges en purée. Le riz, les légumes secs, les pois furent en honneur. 1. A. nat. H-125'.S, doss YY[ — p r ..». i janv. 1850 A. a. F î Z£ 1 3^ J" T^ 'U "^ à *»• 1854], - 4 T t "iTs "tfS** ^ ^ r l;;bt^-^,ni- 6. Idem. I, n » 432, 631, 766, 809, 1502 _ 7 27 *. 23 ,„ 1 *ï " „o 175,76. _ 8 à 10. ^ * ^ £ -£ IL J A n., . 13 194 INORGANISATION MODERNE La ration de vin mêlé d'eau fut augmentée d'un tiers. L'eau bue en dehors des repas fut légèrement acidulée. Le vêtement fut modifié de? chaussons de laine furent donnés à tous les élèves et des ceintures de flanelle, à un grand nombre. Les exercices physiques furent modérés à la gymnastique ; les promeaades hors de Paris furent encouragées, mais les marches trop longues, les intempéries et les refroidissements furent évités avec soin ; les bains dans la Seine furent interdits pour l'été. Les précautions médicales à prendre d'urgence, et dès les pre- miers symptômes, sans attendre l'arrivée des docteurs, furent inscrites à l'infirmerie, où la pharmacie fut pourvue de tous les remèdes requis et l'on prépara d'avance une salle spéciale pour les cholériques1. L'épidémie semblait calmée en mai au mois de juillet, elle eut quelque recrudescence. Cetle courbe fut très attentivement suivie à Louis-Ie-Grand, où l'on revint avec une lenteur prudente aux légumes frais, aux fruits cuits, aux pâtisseries légères et au maigre plus d'un jour par semaine. Les soins de propreté demeurèrent très attentifs. Quand cessa l'épidémie, aucun élève n'avait succombé au collège. On sait du reste que le fléau fut particulièrement indulgent à leur âge. Les adultes étaient beaucoup plus menacés que les enfants 2. L'épidémie de 1866 épargna tout pareillement le lycée. Les élèves ne furent pas atteints ; parmi les fonctionnaires, M. Chambon, professeur Je quatrième, fut seul touché ; mais il guérit. Les victimes, dans le quartier, n'en furent pas moins très nombreuses*. Dès le 23 avril, lors de la Première Communion, la messe latine du Jlhetor novus, Boussard, se chargeait de dire à Dieu le remerciement du Lycée*. Et la rentrée d'octobre put s'opérer sans crainte5. En temps ordinaire, au collège ou au lycée, un élève était-il blessé8 ou gravement malade, il arrivait que le ministre en personne réclamât le bulletin de santé qui lui était adressé chaque jour 7. A tous les degrés de la hiérarchie universitaire, la santé des élèves provoquait tous les dévouements et depuis les infirmières jusqu'au îrand Maître, chacun jugeait tout simple d'accomplir son devoir. En mai 1 80 ! , Bonaparte était surpris de trouver si mauvais visage aux bâtiments du Prytanée et si bonne mine aux élèves. — Tous ces enfants se portent à souhait, disait-il à Champagne. Combien sont-ils? 1. Arch. de L. le Gr., Corr. admin. IV, n* 2123, 2124, 2126, 2127, 2153, 2166, 2178, 2219, 2232, 2233, 2237. — 2 Idem. — 3 Comm. de M. Sévrette. — 4. Le 23 avr. 1866. A. nat. FHh liasse B, n° 19. — 5. Idem, liasse A* n° 18. — 6. 14 noT. 1839, arch. L. le Gr. Corr. admin. VII, nn 4116. — 7. 9 lévr. 1867 ; iaéningite, A. nat. FHh liawe B n° 26. — 21 et 22 juin 1869, double cassure du bras idem, n° 4Û. LA VIE HATER BLLE HYGIENE 195 — 368. — Combien de malades ? — 3. En trois années nous n'en avons perdu qu'un ce qui suppose des soins1. » Bonaparte approuva. En juillet 1848, le proviseur, M. Rinn, reçut la visite de MM. Guersent et Baudelocque. Les joues roses et l'air de santé des élèves les émerveillaient et ils félicitèrent vivement M. Rinn». Enfin, parmi les anciens élèves de la maison, celui peut-être qui a mêlé la moindre part d'optimisme h ses souvenirs nous écrivait récem- ment Je ne me charge pas d'expliquer pourquoi ; mais il est hors d doute que nous nous portions très bien* >. Le grand chef d'oeuvre, à Louis-le-Grand, ce fut donc, — en dépit de l'agglomération scolaire et de l'insuffisance des locaux — d'avoir réussi à faire un collège ou un lycée de santé solide et vaillante. Contre vents et marées, la vie matérielle y fut assurée, quand même. C'était promettre à la vie intellectuelle et à la vie morale une fortune pareille ; à moins que cette fortune ne fût plus belle encore. 1. Arch. nat. H 2558. dossier XXVI ; 22 mai 1801 ou 2 prairial an IX. — 2. Rapport annuel de M. Rinn, pioviseur, le 31 juillet 1848 A. nat. FHh 78487 n° 57. — S. Comm. de M. Raveton. LIVRE III LÀ VIE INTELLECTUELLE Dans le Louis-le-Grand du xixe siècle, les vieilles pierres semblaient caduques et les études, vigoureuses Ce n'étaient pas les maîtres dans l'aride construire qui s'étaient chargés de travailler à la gloire de l'illustre maison ; c'étaient les maîtres dans l'art d'enseigner. Le lycée valait par ses professeurs et par ses élèves, plus encore que par ses archi- tectes. Avait-on voulu tout justement choisir des murailles en ruine, pour y faire pousser de jolies fleurs d'humanisme ? Si, parmi tous les lycées de Paris et de France, on avait eu la fan- taisie de désigner aux Bonnes Lettres leur chef lieu d'élection, Louis- le-Grand aurait rallié, sans aucun doute, un nombre flatteur de suf- frages. Les Humanités semblaient y être dans leur fief. Mais tout ce qui est vivant se transforme comme la vie elle-même, l'enseignement devait donc évoluer ; à l'image de la société, pour laquelle il doit modeler les générations successives, il lui a fallu se résigner à changer insensiblement de visage. Et les programmes', en se remplaçant, n'ont fait ainsi qu'obéir à une loi nécessaire. Des programmes ! Notre époque peut estimer qu'ils ont au moins le nombre pour eux. En 1800, Champagne, notre plus ancien provi- seur, passait cependant pour un homme d'avant-garde, quand il s'écriait, II faudrait un programme détaillé qui indiquât à chaque professeur les éléments, le développement et les limites de son cours * » ! * C'était l'heure où, dans le désarroi des méthodes, Luce de Lancival, un des maîtres les plus écoutés de notre maison, s'écriait chacun a son plan d'éducation 2 ». Des besoins nouveaux surgissaient, auxquels des éludes nouvelles 1. Champagne, Vue sur l'organisation de V Instr. publique ; germinal an VIII, p. 98, n. — N'oublions pas que, sous le Consulat, en 1803, Champagne fit partie, avec Fontanes et Domairon, de la Commission charg-'e de réorganiser les études classiques. — 2. A. nat. M 156, Discoxirs de Luce de L., chez les citoyens Du- bois et Loiseau, rue Bigot, p. 6-10 ; 25 fruct. an IX [12 sept. 1801] 198 L ORGANISATION MODERNE devaient répondre. Dans cetle voie, Louis-le-Grand, en plus d'une occasion, a su prendre des initiatives fécondes. La tradition, chez lui, a su s'harmoniser avec le progrès, et l'audace, avec la mesure. La fidé- lité au passé n'élait point, chez lui, superstitieuse ; elle ne l'a jamais empêché de comprendre l'avenir ni de le préparer. Nous aurons à dire d'abord et ce sera notre premier chapitre, ce que fut à Louis-le-Grand renseignement grammatical et littéraire ; ce qu'y devinrent les études latines, et comment on s'efforça d'y conjurer ce que nous appellerions aujourd'hui la crise du grec » et la crise du français ». Les sciences mathématiques, greffées par la Révolution sur le vieux tronc littéraire, n'ont cessé, depuis plus d'un siècle, de se fortifier et de grandir c'est à el!es surtout que font appel les multiples exigences modernes. Noire second chapitre devra montrer comment les sciences ont conquis à Louis-le-Grand leur autonomie, sans tenter, au reste, d'y déloger les Lettres hors des positions prises. Un autre aspect de notre époque c'est la place, de plus en plus élargie, que les spécialités réussissent à s'y faire. Nous examinons donc, sous une seule rubrique, chapitre III, ce que sont devenues ces spécialités, rue Saint-Jacques spécialités littéraires, scientifiques ou même artis- tiques. CHAPITRE PREMIER L'Enseignement grammatical et littéraire. I Classes Elémentaires 10% 9% 8e, 7e. Sitôt qu'ils avaient la gravité de leur huitième printemps, les enfants pouvaient voir s'écarter, devant eux, les portes du lycée ; le dos empri- sonné dans l'habit bleu sombre, au collet et au parement bleu céleste, ils allaient, sous le Consulat et l'Empire, prendre place dans les classes ouvertes pour eux. Ces classes s'appelaient, au Prytanée de 1801, les lre et 2e classe de la Première Section * ; elles avaient déjà changé de nom, dans le lycée de 1803 c'étaient la 6e et la 5' classe 2. On ne les nomma guère classes élémentaires qu'au début de la Restauration 3. Et chacun sait que ce nom leur est demeuré. 1. Thermidor an IX 20 juil. 1801 et suiv.], règlement général du Prytanée français, tit. IV, § 3 et suiv. A. nat. H3 2528. — 2. S. Gloud, 19 frim. an XI 1 10 déc. 1802]. Exlrait des registres des Délibérations des Consuls [pour l'eraei- gntnent des futurs lycées], art. 1 à 5. A. nat. F17 3104 n° 5. — 3. Ainsi, à Louis le Gr. le 18 déc. 1818, A. nat. Fi~ 3149 n 42 et dans le plan d'études de 1814, A, nat. F17h 3104, n° 158. VIE INTELLECTUELLE I ENSEIGNEMENT GRAMMATICAL 199 On pouvait craindre, en 1819, qu'ils y entraient avant neuf ans l ; •mais on constatait, en 1836, que certains s'y attardaient jusqu'à 14 ans *. On ne demandait pas seulement leur âge à ces jeunes bambins, mais aussi leur science. Bonaparte avait accordé qu'ils pourraient apprendre à lire et à écrire, au lycée3; mais Louis XVIII, en sept. 1814, ne voulut plus le permettre. En priucipe, les familiers de l'alphabet auraient seuls le droit de franchir le seuil du Collège *. La mine déconfite des petits ignorants toucha- t-elle le cœur du provi-eur, dont le nom semblait terrible, M. Taillefer? Nous ne savons. 11 est très sûr cependant qu'en 1818 leur nombre était à Louis'îe-Grand ass» z élevé pour qu'il fût queslion de leur réserver, à eux seuls, une 4' 22. — 3. Art. 5, tit. IV du régi. cité, pour le Prytanée, en 1801. — 4. Art. 114 du statut cité, de sept. 1814, et modifie, proposées en 1819, ibid. — 5. Proposition du proviseur, M. Taillofer, 18 déc, 1818. A. nat. FI? 3149, n» 42. — 6. Les élèTBB... Tiennent [dans les coll. roy ] recevoir l'instruction secondaire; au moins, doirent-ils avoir les 61é- mens de l'instruction primaire et savoir lire, écrire, déchiffrer. » A. nat. FHh 3104, pièoe n 158, art. 114. - 7. Depuis 1912-3. — 8. A. nat. PO 3149, n 42 ; 18 déc. 1818. — 9. Arch. de L. le Gr. Corr. coll. II n° 1249; 25 oct. 1827 ; etc. — 10. A. nat. FIT" n° 22 ; 30 sept. 1836 ; rapport au ministre le» classes élémentaires 6ont au nombre de 5, à Loui-le-Gr. » — 11. A. nal. Ft~u 78488, n 225; lr avr. 1854 et FiTn 86464, n 12, avril 1860. 200 L ORGANISATION MODERNE A Louis-Ie- Grand, comme ailleurs, de la bonne organisation de toutes les classes élémentaires dépendait, pour une bonne part, l'avenir de l'enseignement et M. Pierrot avait grandement raison de le pro- clamer l. On fit sagement aussi, en évitant d'entasser trop d'enfants dans chacune la trentaine était un maximum qu'il fallait très rare- ment atteindre, on eut certainement le tort de la dépasser, en 1836 et en 1868 3. Le premier devoir du professeur était, en face d'aussi jeunes enfants, de ne pas s'isoler dans sa chaire ; mais d'en descendre volontiers et d'aller vers chacun, de suivre ses premiers pas, de soutenir et de régler ses moindres efforts. Enfin surtout de conquérir son cœur, pour mieux ouvrir son esprit. Il lui fallait tempérer sa fermeté par une bien- veillance paternelle. À cet égard, on avait su faire, en 1 835, de grands progrès *, sur ce qui se pratiquait, en 1827 et 182S •• En 1840, l'Inspection n'en était pas moins frappée de ce fait le^ classes élémentaires ressemblaient trop aux autres classe du collège. Ces classés, qui duraient deux heures, étaient trop longues. L'attention des enfants était trop surmenée 6. Et c'est l'honneur de M. Rinn plus encore que de M. Pierrot, d'avoir adouci cette excessive rigueur 7. L'exode définitif de 1853, à Vanves, fut une des conséquences de cet assouplissement des vieilles méthodes. Mais cet assouplissement, avant d'être expérimenté aux champs, fut d'abord essayé rue Saint-Jacques • le lever fut retardé, les récréations allongées, les classes écourtées. Moins de surmenage. Dans ces classes l'enseignement paraissait, lui aussi, appeler des réformes. 11 était trop élevé. Sans doute, l'écriture y était enseignée et fort bien les Inspecteurs s'en applaudissaient, en 1820 8 et en 1840 9, où ils pouvaient noter dans toutes les classes l'écriture des copies est bonne. Sous le règne de Louis-Philippe, chaque malin, entre 10 et Il heures, de belles pages blanches se couvraient de barres, de pleins, de déliés et de maximes lapidaires. Et M. Durnerin triomphait, au milieu de son petit peuple d'écoliers 10. En 1836 ou 1837, les modèles 1. Les classes élémentaires, écrit M. Pierrot, le 28 août 1838, sont d'une extrême importance. » A. nat. FHh n° 41. Et encore, le 31 juil. 1840; l'organisation des classes élémentaires, dans les collèges royaux, serait un grand service à rendre à l'enseignement. » A. nat. F17h 78487 n° 30. — 2. A. nat. FHh n 22 l'une avait 34 élèves ; l'autre, 40. — 3. Le 6 août 1868, les deux septièmes à L. le Gr. avaient 34 et 35 élèves. A. nat. F17b liasse B. — 4. Aucune roideur, dans la manière dont les élèves sont conduits. » 25 sept. 1835, note pour le ministre. A. nat. FI "h n° 19. — 5. Iras- cibilité à l'égard des enfans. » Arch. L. le Gr. Corr. coll. II, n° 1339. — 6. A. nat. F"» 78 487, n° 24. — 7. A. nat. Fi7h n» 178 ; [1851-52.] — 8. Inspect. de Fr. Noël, A. nat. FI"7" pièce 197. — 9. L-s leçons d'écri- ture profitent ; dans toutes les classes, l'écriture des copies est bonne. » A. nat. FHh n° 24. — 10. Comm. mai 1911 de M. L. Marcou, élève à L. le Gr.. de 1836 à 1846. VIE INTELLECTUELLE ENSEIGNEMENT GRAMMATICAL 201 calligraphiés, placés sur la table, k gauche de l'enfant, furent remplacés par des modèles fixés sur des cadres vitrés et verticalement attachés à des barres métalliques '. La difficulté ne portait donc pas sur l'écriture, mais bien plutôt sur tout le reste. Qu'enseignerait-on à ces jeunes minimes » ? Tout d'abord, avait répondu Bonaparte, en 1801, les premiers éléments de la Grammaire [française] 2. L'année d'après seulement, viendraient, — sans parler des 4 premières règles de l'arithmétique, — l'orthogra- phe et les principes de la langue latine ". Sous Loui- XVIII, on avait, cinq matinées par semaine, une heure d'histoire sainte et une heure et demie de grammaire fra'nçaise. L'après-midi, huit heures hebdomadaires de grammaire française et de grammaire latine i. Etait-il vraiment sage d'initier au latin des enfants de huit ou neuf ans? M. Pierrot, que soutenaient les Inspecteurs 8, répondait non ! Il réclamait, pour la sixième seulement, les premières leçons de latin 6. Dès avant 1840, il indiquait la réforme que nous avons appliquée de nos jours. Au lieu du latin, les Inspecteurs auraient voulu de simples études françaises, suffisamnieut étendues et développées 7 j> ; M. Pierrot, lui, suggérait l'étude d'une langue vivante 8, tout au moins de sou voca- bulaire l'admirable mémoire de l'enfant, entre 8 et i2 ans, lui sem- blait précieuse, pour cette étude des mots étrangers qui, plus tard, entrent si malaisément dans certaines tètes 9. Mais cela ne resta qu'un vœu, pour le proviseur. Voici au contraire ce qu'il avait pu faire ; il l'explique le 28 août 1838. o 11 y a quelques années, l'enseignement élémentaire se bornait, au Collège Louis-le-Grand, à l'explication des règles du rudiment latin et de la grammaire française. — En conservant ce fondement de l'instruction et des études, j'ai ajouté le calcul ou l'étude pratique de l'arithmétique depuis la numération jusqu'aux fractions et aux décimales inclusive- 1. Comm. mai 1911 de M. L. Marcou, élève à L. le Gr. de ISSo à 1846. — 2 et 3. Régi, du Prytanée de juillet 1801, cit. tit. IV, §3-5. - 4. Pian d'études, pour les collèges royaux..., sept. 1814; A. nat FI"" 3104 pièce 158. — 5 et 6. Les inspecteurs généraux écrivent, en mars 1838 Nous redisons encore, sur les classes élémentaires, ce que nous avons dit bien des fois c'est commencer Irop tût le latin que de le commencer dès la 9, à l'âge de 8 à 9 ans... » A. nat. Fl"n78486 n- 4i ; — idem en mars 1839 ; ibid. n- 40. — Avis de M. Pierrot, trans- mis au ministre ajourner, dans les classes élémentaires, le latin jusqu'à la 6e. A. nat. Fl~n n» 30 31 juill. 18L0. — 7. Mars 1839, FIT* n" 40. En 6°, les élèves arrivent déjà dégoûtés • du latin ; tandis que les langues an- ciennes, venant comme un objet nouveau et comme terme de comparaison, après de simples études françaises, suffisamment approfondies et développées, excite- raient leur émulation et flatteraient leur amour propre. i — 8. 31 juill. 1840 Ce serait là la place des langues vivantes, en aournant le latin jusqu'à la 6e. » A. n. F 17m 78487 n° 30. — 9. Idem. 202 L ORGANISATION MODERNE ment; l'élude de l'histoire générale et superûcielle, par grandes époiues et par !a vie des grands hommes ; l'étude sommaire de la Géographie moderne et, en particulier, de la France ; des notions très générales de Cosmographie et de Mythologie l »• Là encore, l'Université contemporaine a repris à M. Pierrot quelques unes de ses idées. Et, avant l'Université contemporaine, deux ministres, non des moindres Cousin, en août 1840, de Salvandy, en mars 1847. Ainsi que, le souhaitait le Proviseur de Louis-le-Grand, Cousin retarda les débuts du latin ; mais il eut moins de hardiesse et il ne les retarda que jusqu'en 7", non jusqu'en 6e. Aux langues française et latine, il accordait, en 7°, huit classes par semaine et deux classes à toutes les autres études Histoire sainte, Géographie, Calcul 2. M. de Salvandy ne laissa pas, lui non plus, pénétrer le latin dans les classes, avant la Ie. II reconnaissait, comme AL Pierrot, que les classes élémentaires étaient trop vides ; trop longues aussi. Mais, au lieu de les ramener à une seule, la 7*, ce qu'avait voulu Cousin, il les ramenait à deux 8'1 et 7" et, comme la 86 restait sans latin, il la nourrissait d'études françaises plus substantielles que jadis. Sa formule était faire plus rapides, mais plus fortes, les classes préparatoires à la 6e 3. Pourtant les abus que combattaient les Pierrot, les Cousin, les Sal- vandy, étaient de ceux qu'il faut tuer plusieurs fois peu après les pro- testations de ces maîtres, on imaginait de loger le grec dans le second semestre de La 7e et à Louis-le-Grand l'Inspection le déplorait publique- ment, en 1852. Au demeurant, les programmes valent surtout par leur application. Or, la qualité des classes élémentaires fut à Louis-le-Grand fort inégale on leur reconnaissait du soin, en 1819 3bis ; des hésitations et des flotle- meuts, en 1827-28 * ; du travail6, de la métbode et d'heureux résultats entre 1835 et 1847 e. Pénétré de la nécessité de soumettre les élèves à une culture grammaticale intensive, M. Pierrot faisait diriger par des maîtres éprouvés des exercices pratiques, en dehors des heures con- sacrées à la classe. El le souvenir d'un de ces maîtres, M. Pontaillier, n'a pas été aboli, par trois quarts de siècle, dans la mémoire de ses élèves1. En 1847, AI. Rinn, lui aussi, s'ingéniait à organiser des répéti- tions collectives, destinées à garantir aux plus jeunes élèves de Louis- 1. 28 août 1833, A. nat. FH» n° 4t. — 2. Arrêté du 26 août 1840 et lettre du minisire au proviseur, arch. de L. le Gr., Corr. admin. VII, u° 4361 et 4363. — 3. Statut du 5 mars 1847, classes élémentaires ; Arch. nat. FI"» 78449. — 3bis. Faites avec soin » [début 1819], rapport de l'Ins- pection, A. nat. F17 3149 n» 111. — 4. Arch. L. le Gr., Corr. coll., II, n° 1249 et 1339. — 5. Rapport du 16 août 1838, par M. Bouquet, prof, de 7* à L. le Gr., sur le travail de l'année 1837-38. — 6. &n 1835 A. nat. FI"" n° 19 beaucoup d'émulation, » dit une note pour le ministre;— 30 mars 1840, appré- ciation sur la 9», A. nat. FHh n 24 ; — 1847, A. nat. FHn n° 2. — 7. Comm. de M. L. Marcou, éiève à L. le Gr. de 1S36 à 1846 ; M. Marcou, qui voulait bien nous écrire ses souvenirs, en mai 1911, décidait, à la fin d'août 1911. VIE INTELLECTUELLE '. ENSEIGNEMENT GRAMMATICAL 2 03 le-Grand Les avantages qu'assuraient les chefs d'Institution à leurs propres écoliers1. En 1852, malgré tout, il y eut des signes de défaillance 1 intérêt semblait plus languissant et l'enseignement en disproportion avec les forces des enfar;t3 2. Ce recul fut passager une renaissance magnifique était saluée, huit ans plus lard, et l'inspecteur A. de Wailly ne mettait aucune réservedans ses éloges 3. Même applaudissement donné en 1863, par d'autres inspecteurs '. Pourquoi faut-il qu'en 1872 de nouveaux symptômes de faiblesse aient apparu. Trop de rudesse et trop peu de doigté chez les maîtres ; ces classes n'étaient plus alors vraiment dignes de la maison et MM. Bouillier et Jacquinet ne craignaient pars de le dire 3. Le relèvement qui ne pouvait manquer de suivre était doue tout à lait nécessaire. II Classes de Grammaire 17 i classes élémentaires, bien, sauf dans une division dont le titulaire, heureu- sement, va prendre un OOOgé » — 5. A. nat. F1-» liasse L. lt Gr, I", uJ 3. — 6. Almanach national an XII, p. 687-688, Lycée de Paris. — 7. [sept. 1S14J Plan d'étu es pour les coluges royaux... A. nat. Fl 3104, pièce n° 158. — S. Voici les professeurs titulaires de 4»,avec les dates de leur enseiyimruent en *• à L. le Gr. ; on trouvera leur curriçulum vitae, dans les notices ôïS à .>^7, de notre Appknlk;b C, tome 111 MM. Goffaux n XI-18G9; Adam. 1809-4816 . Malle- val, 1815-18h»; Ruine», 1824-1830; Ilumhert; L810-1821 ; Giijot, l^-'l-t^i ; Barrot, 1838-1856; Héguin de Guérie, 1830-1838; Cartault, 1866-1891 ; Chambon, 1866-91 ; Bressant, 1867-1876; l'esbe, 1869-1879 ; Meynal, 1S79-1S87 ; Rocherollas, ; 204 L ORGANISATION MODERNE Par définition, les classes de grammaire étaient chargées d'enseigner la correction du langage. Et non pas seulement, on le devine bien, du français et du latin, mais aussi du grec c'était là ce que l'usage quoti- dien appelait à Louis-le-Grand les trois langues. La véritable grammaire, ce sont les bons auteurs qui l'ont écrite, en écrivant leurs chefs-d'œuvre. Leurs livres, voilà le vrai code de la langue qu'ils ont parlée. Il s'agit seulement de rendre ces livres acces- sibles à l'é ève ; en lui présentant, avec le commentaire approprié, cer- tains passages ; en demandant à sa mémoire d'apprendre les plus beaux ; enfin en demandant à ce jeune français de penser en latin et de penser en grec. De là, naissent les trois exercices essentiels des classes de grammaire l'explication des auteurs classiques, les leçons em- pruntées à ces auteurs ou dérivées d'eux, les devoirs versions, thèmes et vers, dont ces auteurs sont l'occasion. Puisque ces auteurs ont formulé les lois de la grammaire, il est in- dispensable d'amener l'enfant à retrouver toutes ces lois dans les au- teurs expliqués, appris ou traduits. Et, l'esprit de l'enfant allant [du particulier au général, il est logique de lui découvrir, d'abord, par l'analyse, les éléments divers de la règle grammaticale, quitte à l'aider, ensuite, à donner à cette règle sa forme synthétique. L'idéal serait donc de l'amener à se composer lui-même ses grammaires, française, latine, grecque; et, à se passer de toute grammaire, imprimée d'avance. Au lieu d'exiger de lui qu'il apprenne par cœur ce que les grammai- riens ont rédigé, le pousser à ne retenir et à ne réciter que ses propres remarques. Le mettre constamment eu contact avec les auteurs entre les auteurs et lui supprimer tout intermédiaire. Faire de lui un gram- mairien, qui se passerait des grammairiens. A force de vouloir être intelligente, celte méthode ne risquait-elle de l'être trop ? Elever prématurément l'enfant à la dignité d'homme fait, n'élait-ce pas oublier qu'une des qualités foncières de l'enseigne- ment c'est l'art de graduer et d'adapter ? Cette méthode, si admirablement rationnelle et peut-être si chimé- rique, ne naquit pas à Louis-le-Grand. Mais on tenta de l'importer au lycée, avec les programmes de 1872 l. Qu'étaient donc à Louis le-Grand, avant 1872, les classes de gram- maire ? Des classes dont la tradition avait su faire la plus solide arma- ture de la maison 2. Chez elles, aucun de ces tâtonnements qui furent, pour les classes élémentaires, des épreuves presque périodiques. Lud. Durand, 1830-1906; Lafoscade, 1888-1893 ;Grumbach, 1886-1902; Merlin, 1893- 1903; Clairin, 1902-1907; Peine, 1902-1913; Sudre, 1906-1920; Richardot, 1906- 1918; Doby, depuis 1908; Géant, depuis 1914 ; Buchenaud, depuis 1919; Arui. AVeill, depuis 1919; Schulhof, depuis 1919 ils sont encore professeurs. — 1. Voir plus bas, p 211 et ss. — 2. Dès le 25 fructidor an IX [12 sept. 1801, un des premiers professeurs de notre maison, Luce de Lancival Discours, chez Du- bois et Loiseau, A. nat. M 156, p. 14 15 expliquait ainsi sa méthode i Fixer le VIE INTELLECTUELLE '. ENSEIGNEMENT GRAMMATICAL 205 Avant 1872, les classes de grammaire n'eurent jamai», malgré les efforts oV M. Pierrot, l'honneur d'initier les enfants au premier balbu- tiement des syllabes latines la septième, sinon la huitième et même, hélas ! la neuvième, avaient revendiqué ce privilège. Mais on réserva presque toujours aux classes de grammaire la prérogative dos leçons de début dans la langue d'Esope. En avril 1852, l'Inspection générale dé- plorait à Louis-Ie-Grand qu'on eût placé dès la septième second semestre les commencements du grec1 c'était un peu tôt. Parconlro, en 1801, Bonaparte avait logé es débuts deux années seulement avant la Rhétorique, c'est-à-dire en 3e, première classe d'Humanités2 c'était un peu ta'd. Puis, dès 1802-3, en 4e et, dès 1804-5, en 5'. Devant ces hésit-ilions, on avait ju^é sage, en sept. 1814, de commencer le grec en sixième3 puis, en 1824 5, en cinquième4 ; mais le grec réussit peu après à reconquérir la sixième ', il la gardait encore e-; 1872 et même plus tard, nous le verrons. sens bimple et le sens figuré de chaque expression, observer i'analo_ie des radi- caux avec leurs dérivés, ... analyser... les phrases... dans le sens logique fran- çais et latin ; comparaison dont Je résultat doit être une connaissance plus ap- profondie de notre langue. • Et il s'appliquait à réhabiliter le thème, qu'on c '- nigrait déjà Dans toutes les langues, le thème le plus mal fait a exercé pi s l'élève que ne l'aurait pu faire la meilleure version. » — Cf. infra, p. 215. — Le proviseur de L. le Gr., Pierrot, estimait cependant que la ?ei latine e^t la t faculté où se produisent [.lus particulièrement l'intelligence et ie goût des élèves.» Lettre au ministre, 13 janv. 1835, arch. L. le Gr., Corr. coll.,l\l, n° 3i!30.— 1. Insp. gén. 8 avr. 1852 ; A. nat. pi* 78 488 n° 2. Art. 14, t;t. IV du règl. cit. du Prytanée, juill. 1801. — 3. Plan d'études pour les coll. royaux; cit. — 4. Arrêté du 21 sept. 1824 ; arch. de L. le Gr., Corr. admin, I, n° 171.— 5. Arch. L. le Gr. Corr. coll. II, n» 1906. — Voici un tableau pour l'a je de dé- but du français, du latin, du grec et des langues vivante?, à L. le Gr. 1801 fran- çais 1803 1814 1825 latin 1840 latin grec 1847 1852 1857 1^72 lang. vi7. latin 1873 1880 1902 1920 9* latin lang. viv. lang. viv. 8» latin lang. viv. latin 7" latin STPC latin latin grec grec latin latin latin et grec 6 grec grec grec grec latin lang. V i Y . latin lang. viv. II angl. grec angl. ail. Il ng. vu . grec grec lang viv. angl ail. lang. 2 0G L ORGANISATION MODERNE Il esl plus facile Je préciser les débuts des trois langues, que de pré- ciser le temps que leur réservaient les programmes. Le statut univer- a'redesept. 1814 et les lois ou arrêtés qui suivirent confondaient presque toujours le grec et le latin sous la rubrique langues anciennes », ou bien iis se bornaient volontiers à dire langues anciennes et française1 ». Notons seulement qu'en 18i0, Cousin donna, en 6e et 5% une classe hebdomadaire de plus aux langues an- ciennes 2. La préparation d'une classe de grammaire à Louis-le Grand, était laborieuse, pour peu qu'on y voulût apporter toute la conscience re- quise. En 1820, il fallait, suivant l'expression d'alors, faire des cahiers nouveaux » et quatre années n'épuisaient pas, cctle tâche, tant les re- cherches étaient longues et pénibles ». Il était souvent nécessaire de changer le texte ou de le tronquer, pour l'adapter au but » proposé. Et puis les livres, qu'on imprimait tous les jours, obligeaient de faire des matières nouvelles de vers latins. Enfin les corrigés, qui devaient servir de modèles aux élèves, exigeaient de grands soins3 ». Les auteurs dont il s'agissait d'extraire les exemples et les préceptes grammaticaux, à l'usage des trois langues, étaient plus nombreux, en latin et en grec, qu'en français. En 1814, nul auteur français avant la 4e, où apparaissaient Delille, avec son Pocme de la Religion et Féne- lon avec son TêlémaqueK ; aucun, non plus, en 1825-26, avant la 4e, où les Gèorgiques de Dalille entraient en scène5 ; en 1837-8, les Mor- ceaux choisis de Fénelon se présentaient sans concurrents, en 4e c, mais a cette date, dès la 6% le Tèlëmaque était devenu un familier et La Fon- taine, un ami ' . Les auteurs latins formaient presque une petite légion 8. 1. Plan d'études, pour les coll. royaux; cit. — De même, en octob. 1840,. annexe à la circulaire de Cousin, arch. L. le Gr., Corr. admin. VU, n° 4364. — 2. Arch. L. le 6p. Corr. admin. VII n° 4363. — 3 A. nat. F" 3149 n° 138; 1er oct. 1820, lettre de Ruinet, agrégé de 4e à L. le Gr., à Guénaud de Mussy. — 4. Statut de sept. 1814, art. 138, 139, 140, notes et corrections d'octob. 1819; A. nal. F'Th 3104, pièce n° 158. — 5. Liste des livres classiques, arrêtés pour l'Académie de Paris, 1825-26; A. nat. FHh 3104 n° 250. — 6 et 7. Août 1838, rapporta sur leurs classes de 1837-38 présentés par les professeurs de 6e, 5 et 4, à Louis-le-Gr. ; A. nat. F17h n 41, D à I. — 8. En 1814, pour la 68 YEpitome historiae Sacrae ouvrait naturellement la marche, escorté de VEpitome historiae Graecae de Siret ; à quelque distance, était le De Viris illustribus Urbis Romae de Lhomond ; VAppendixde Diis et les Erasmi Collo- quia, ad usum Sckolarum. En 1825 26, la 68 avait deux livres latins, pour tout potage les Selectae e profanis scriptoribus historiae et les Phoedvi fabulae, avec les iables correspondantes de notre La Fontaine. En 1837-8, outre ces deux ouvrage», on demandait à Cornélius Nepos de raconter aux éco'iers les aven- tures d'Epaminondas, de Pélopidas, d'Agésilas et d'Eumène. — La 5e, en 1814, restait fidèle aux Selectae, à Phèdre, à Cornélius Nepos ; et, en 1825 26, Corné- lius Nepos demeurait toujours, mai* le Compendium veteris historiae d M. Go- bert avait délogé Phèdre. En 1837-38, le Selectae 5e livre ; ou les 15 premiers VIE INTELLECTUELLE ENSEIGNEMENT GBAUHAT1CAL 207 Le grec avait un succès moindre que !e latin l. La routine ne se rencontrait guère que par exception *, dans l^s classes de grammaire à Louis-le-Grand. Bien au conlraire, le professeur savait, dans l'explication des auteurs, trouver ce qui excite le zèle et l'intérêt des élèves3 ». Et chacun y apportait son tour d'esprit particu- lier. Ainsi, M. Didier, eu 0e, attirait surtout l'attention sur la justesse et la précision du Langage, sur la clarté et l'aisance de la phrase*. Al. Sarret, en 4% faisait habituellement préparer, sur copie, l'auteur à expliquer. Après un mot à mot bien exact, on faisait le français, que tous les élèves étaient tenus d'écrire, et l'on passait à une autre phrase ; on épuisait toutes les questions grammaticales, historiques et 'autres, que présentait chaque phrase. On avait soin de rendre les élèves atten- tifs aux idiolismes, aux tournures différentes ou analogues des trois langues 5 ». Ce professeur ajoutait, en 1838 a On ne saurait apprendre le grec et le latin que par l'étude sérieuse des auteurs mêmes, qui ont écrit dans ces langues ». Aux élèves qui traitent parfois légèrement l'explication de tes auteurs, voire à messieurs les maîtres d'études », quand ils se font sur ce point complices des élèves, il était donc indispensable de crier gare 6. L'étude des auteurs, malgré tout, ne semblait pas encore capable de suppléer à tout ; la grammaire dont les élèves apercevaient ça et là dps bribes, à travers les textes, ne les dispensait pas d'étudier les traités chapitres du 3e livre ; et la Vie d'Atticus, par Corn. Nepos, faisaient déjà, dans les derniers mois de l'année, accueil à quelques pages d'Ovide. — La 4e, en 1814, se nourrissait toujours des Selectae 28 partie ; de Justin, du de Amicitia de Cicron ; de Quinte Curce et de César ; des Eglogues de Virgile et de plusieurs Métamorphoses d'Onde ; en 1825-26, Quinte Curce, le de Seneetute, Ovide, les Gcorgiques de Virgile et tels passages de ses Bucoliques. Mais, en 1837-38, on se bornait à Quinte Curce les deux derniers tiers du livre IV et dans Ovide, à la fable de Phaëton, à celles de Philémon et Bauci>, du Céyx et d'ilalcyone. 1. En 1825-6, on se bornait, pour la 6e, au choix de textes colligé par Ville- meureus. — Pour la 5e, les Fables d'Esope, en 1814, accaparaient l'attention; on y joignait, en 1825-6, les Dialogues de Lucien et on leur préférait en 1837-8, Isocrate {à Dëmonlcos et les pages de Diodore de Sicile, d'Arrien, de Denys d'ilalicarnasse et de Josephe recueillies par Legay ; sans parler des Actes des Apôtres 'les 5 premiers chapitres}. — Pour la 4 enfin, à Esope, à Lucien, à VEvingile selon S. Luc, adoptas en 1814, pour aider les premiers pas des com- mençants, il parut bon, en 1819, de substituer Isocrate, Xénophon {Cyropédie et le texte grec du Nouveau Testament ; on avait, en 1825-2G, maintenu le iYou- veau Testament, la Cyropédie, et on y ajoutait uu choix des Dialogues de Lu- cien ; on ne se bornait pas, en 1837-8, à maintenir la Cyropédie, on v joignait YAAaiase, quelques morceaux d'Hérodote et on achevait l'année en compagnie d'Homère {lhade\ chant I, 3U0 vers. — 2 et 3. Arch. n. FlTi n» 19; note pour le ministre, au sujet de la classe de 6», de M. Agon, à L. le Gr., 25 sept. 1835. — 4. Arch. na'. Fl/ta n° 41, I. — 5. Idem, n» 41, D. — 6. Idem. 208 L ORGANISATION MODERNE composés jadis à leur usage. La grammaire à faire ne les empêchait pys d'apprendre la grammaire déjà faite. Cetle grammaire, c'était, pour le français, en 1814, Lhomond, Gue- roull ou l'abrégé de Wailly ; en 1837, c'étaient Noël et Ghapsal. Pour le latin, c'était le Lhomond annoté. Pour le Grec, ce fut d'abord Gail, Le Roy et Fremyon ; ce fut ensuite Burnouf '. En 1852, l^s programmes recommandèrent de cheminer, en compa- gnie des textes, pour arriver aux règ'es ; de rapprocher les exemples concrets, avant d'en dégager la formule ab>traite. La grammaire ne serait pas, de la sorte, un point de départ, mais un point d'arrivée. Les élèves en trouveraient eux-mêmes, peu à peu, les éléments dans les auteurs, et y aboutiraient comme à une conclusion. L'Inspecteur général Dutrey vint à Louis-le-Grand expliquer ainsi l'esprit du nou- veau programme et Gt comprendre dans quelle mesure on pouvait comparer les grammaires des trois langues. Ce sérail un moyen nou- veau de les éclairer les unes par les autres 2. Ce moyen était-il en réalité si nouveau ? Et n'avons-nous pas vu qu'une quinzaine d'années plus tôt, tout au moins, M. Sarret, sans parler de M. Barrot et d'autres sans doute, faisait déjà de la gram- maire comparée » à Louis-le-Grand ? Le programme de 1852 avait raison de rappeler la grande importance des auteurs les textes forment vraiment le Corpus où toutes les règles grammaticales se retrouvent. Mais on voit à quel danger il risquait de conduire à la suppression prochaine de toute grammaire écrite, de Ncël et Chapsal, de Lhomond, de Burnouf ou de leurs successeurs. Ge6 livres-là on les conservait encore vingt ans plus lard on décrétera leur mort. Faire sans cesse contrôler les grammaires par les texles, rien de mieux ; mais faire table rase de toutes les grammaires et trans- former les écoliers en autant de jeunes Descartes, ne serait-ce pas les faire entrer dans le royaume d'utopie? Et, en 1838, un des professeurs de 6° à Louis-le-Grand, n'était-il pas dans le vrai quand il faisait apprendre par cœur, au moins deux fois, tout ce qui avait été vu en classe, soit dans les gram maires, soit dans les auteurs 8 » ? Aussi bien, les leçons tenaient-elles, comme de juste, à Louis-le- Grand, une place importante. C'était généralement par elles que toute classe commençait. Elles étaient toujours expliquées et le professeur s'assurait q'i'il n'avait point parlé dans le désert il faisait répéter ce qu'il avait dit 4. Autre souci exiger une prononciation distincte et 1, Sources citées plus haut, p. 206, n. 5. — 2. Arch. nat. FHh n°214, 13 octob. 1852 La réforme consiste surtout à ne faire voir les formules pré- cises et arrêtées des grammaires qu'après que l'explication des textes aurait pré- paré l'intelligence des combinaisons grammaticales, au lieu de prendre celles-ci pour point de départ. • — 3. M. Didier, Rapport cité, d'août 1838. — 4. Rap- ports cités d'août 1838. VIE INTELLECTUELLE \ ENSEIGNEMENT GRAMMATICAL 200 intelligente1. Il élail malaiséd'oblenird' emblée un bon résultat;mais Louis- le-Grand mettait une de ses coquetteries à se distinguer, sur ce point 2. Outre les auteurs et les grammaires, la prosodie latine 3 était étudiée en 4e et les racines grecques étaient récitées, dès la 5e *. Les devoirs 6 complétaient les leçons. On pouvait leur consacrer la seconde moitié de la classe G. On les donnait généralement, en 4°, au moins, pour le surlendemain 1 . lis pouvaient être dictés, dès la 6e s. Leur choix demandait une grande attention il s'agissait, no. Or, en 1872, les nouveaux programmes vinrent, un moment, jeter l'alarme, dans le cœur des grammairiens les plus pacifiques. On voulut essayer de bouleverser les vieilles disciplines. Le Ministre les avait qualifiées de procédés barbares » et les deux mots avaient été dou- loureux au vieux lycée *. Lhomond et Burnouf, dont les services, à Louis-le-Grand, ne se comptaient plus, passaient presque désormais pour des malfaiteurs ; on les mettait à l'index, dans les classes où ils avaient régné. Ils étaient totale du latin, dans les classes élémentaires, n'a pas profité, comme on l'avait espéré, à l'étude du français. Le nouveau plan d'études a donc, eu dé- finitive, affaibli les étud-s latines et grecques, sans profit pour la langue mater- nelle, à laquelle cependant il avait réservé exclusivement deux années entières, la 8e et la classe des commençants. Le proviseur attribue le peu de progrès faits en français à la grammaire de Lhomond, qu'il juge insuffisante. Nous croyons, an contraire, que cette grammaire est la meilleure à mettre dans les mains des entants et nous pensons que l'étude du français ne pourra que gagner à mar- cher de front avec celle des langues anciennes, i — 1. A. nat. F'~" 7* ii" 131 ; 24 mars 1850. — 2 Avril 1860, M. de Wailly, A. nat. FI* n° 12. — 3. A. nat. FH» liasses L. la Cr , liasse A. n» 15. — 4. Le 15 oct. 1872, le proviseur, M. J. Girard soul'gna cette expression minis- térielle, devant les professeurs de 5e, 6, 7», 8e réunis en assemblée, au lycée.— Les arch de Louis-le-Grand ont conservé les registres de procès-verbaux, de ces assemblées, plénières ou partielles, des professeurs 1° de 1872, 11 octobre, au 23 janv. 1374 2° du 26 octob. 1881 à juil. 1883. Sauf indication contraire, tout ce qui suit, relativement aux classes de grammaire, a été tiré par nous de ces proès-ve' baux. 212 L ORGANISATION MODERNE donnés comme àas usurpateurs. Leurs grammaires étaient frappées d'ostracisme et on interdisait aux petits écoliers, sinon de les feuilleter, du moins de les apprendre par cœur. Les auteurs latins et les auteurs grecs devaient occuper la place des intrus. N'étaienl-ce pas ces auteurs qui avaient fait la langue latine, la langue grecque et leurs gram- maires? Pour augmenter la familiarité des élèves et des auteurs, il faudrait d'abord présenter aux élèves ces auteurs avec leur vrai visage. Plus de morceaux choisis, plus d'extraits, plus d'anthologie; les auteurs eux- mêmes, avec le prestige de leur taille, et avec le cortège leurs œuvres. Plus d' Epitome, ni de Selectae, ni de De Viris. Les élèves devraient être en contact quotidien avec ces esprits d'élite et se nourrir de leur pensée. Et l'on n'hésitait pas à mettra aux mains des enfants des tra- ductions, qui leur permettraient de lire plus vile et plus longtemps les textes latins et les textes grecs. El le temps? — On saurait le donner sans parcimonie aux écoliers, en faisant, dans la forêt des devoirs, trop nombreux et trop longs, des coupes sombres. Jusqu'ici, les devoirs et les exercices écrits étaient innombrables; on les élaguerait et 1 air rentrerait dans les classes. Les compositions, elles aussi, seraient réduites. On aurait moins de papier noirci, moins de fatras, moins de labeur mécanique, eî plus d'exercices oraux, plus d'attention active, plus d'idées. Le thème latin oral prendrait la place du thème écrit. Les vers latins seraient abolis ; et le thème grec, aussi, en 6e, en 5", en 4e ; les interminables leçons, diminuées ; les compositions de mémoire, supprimées. Mais qui estimait-on faire profiter de toutes ces réformes? L'éternelle victime, notre langue maternelle. On disait Moins de Ialiu, moins de grec, afin d'avoir plus de français. N'était-ce pas là un admirable raisonnement, et d'une logique toute mathématique? Les grammairiens firent à Louis-le-Grand, un essai loyal, pour juger équitablement ce coup d'état. Après quoi, ils lui furent sévères et lui trouvèrent des airs de sophisme. Ils consentirent à la mise en quarantaine de Lhomond el de Burnouf, que les auteurs, appelés à l'aide, lurent invités à suppléer. Les traduc- tions, juxtalinéaires ou non, se répandirent. Mais on eut beau faire, même ainsi vulgarisés, les auteurs ne pouvaient suffire à tout on constata d'abord que, fussent-ils au grand complet, ils n'arrivaient pas à enseigner ce que les deux anciennes grammaires faisaient tenir en quel jues pages les déclinaisons et les conjugaisons. Et les élèves furent, comme par le passé, autorisés à apprendre par cœur rosa, hortus, amo, lego et leurs transformations successives. Le Ministre avait voulu borner là ses concessions à la vieille routine. A Louis-le-Grand, les professeurs, de complicité avec le Proviseur, osèrent, sur trois ou quatre autres points conserver la tradition ; ils réclamèrent d'abord le sauvetage des exemples ; puis celui des modèles VIE INTELLECTUELLE \ ENSEIGNEMENT GRAMMATICAL 213 de déclinaison ou de conjugaison, les paradigmes 1 ; après quoi, ils n'eurent pas le cœur, non plu3, de laisser se noyer toute la vaillante armée de ces règles, dont quelques-unes avaient la frappe, énergique et nette, des belles médailles antiques. Finalement et dès le 5 mai 1873, leur assemblée générale reconnut la nécessité do faire apprendre, par cœur, certaines parties de la grammaire, suivant le choix du professeur de chaque classe ». Et il fut entendu que chacun jouirait, à cet égard, de toute liberté ». Quatre ou cinq semaines plus tôt, les Inspecteurs généraux Bouillier, Jacquinet et Faye, avaient enregistré, avec une sympathie à peine voilée l, le vœu unanime des professeurs de 4e, 5' et Ge revenir à l'usage ancien. Ni interrogations, ni explications grammaticales qui valussent, pour la mémoire de l'enfant, le? bonnes vieilles formules de Burnoufet de Lhomond. Et l'Inspection notait celte remarque a !a récitation des règles et des exemples, pratiquée, comme elle l'était depuis longtemps, avec choix et dans la mesure de lit'éralité conve- nable, olîrait des avantages précieux, sans mélange d'inconvé- nients 2. » Les proresseurs de grammaire, à Louis-le-Grand, avaient aussi résolu de se faire les Terre-Neuve du De Viris et des Selectae. Ils protes- taient que le De Viris, en particulier, était un livre excellent, écrit en vrai latin, emprunté aux auteurs et qui formait un récit suivi 3 ». Autre mérite le De Viris était incomparable pour faciliter aux enfants l'intelligence de la langue latine 4 ». M. Julien Girard, était si bien en harmonie de pensée avec ses collaborateurs qu'il en écrivit au iMinistre ; sa lettre, jugée aussi remarquable par la forme que par la force des raisons exposées, fut l'objet de l'approbation unanime » du corps professoral 5. Les Selectae et le De Viris ne songeaient pas à jouer le rôle d'acca- pareurs. A côté de ces livres, les professeurs avaient été, en octobre 1872, invités à choisir, pour leurs élèves, les auteurs les mieux appro- priés. En 4e, M. Chambon repoussa, comme trop abstraits, les traités cicéroniens De Senectute et De Amicitia, mais il fit agréer Salluste Jugurtha, et, a avec peu de sympathie », Quinte-Curce. J. César fut choisi, lui aussi 6 ; puis, deux mois après, le Proviseur, notait la diffi- culté des élèves à apprendre par cœur le texte de la Guerre des Gaules et Salluste ralliait tous les suffrages 7. La poésie eut sa part avec les morceaux choisis d'Ovide et les deux premiers livres de l'Enéide. — Pour le Grec, en 4°, Xénophon conservait la faveur générale Anabase et 1. 7 avril 1873. Arch. nat. F' liasses L. le Cr., F, n 2. — 2. Idem. — 3 Réunion des prof, de 5', 6e, 7e, 8, le 15 oct. 1872. — 4. As- semblée génér. du 18 déc. 1872. La remarque est de M. Lemeipnan, prof, de 6e. — 5. Assemblée génér. du 22 janvier [1873]. — 6. Réunion, le 16 octob. 1872, des profess. de 4, 3», 2e et rhétoriq. — 7. As. génér. du 18 déc. 1872. 214 .' L ORGANISATION MODERNE Cyropédie, avec les morceaux choisis d'Hérodote et les deux premiers chants de V Iliade l. Mais tous ces textes devraient être préparés en étude, sans le secours, des traductions ; tait qu'ils étaient dans les classes de grammaire, les élèves ne devraient toucher à aucune traduction, d'aucune sorte a. Jusqu'à la Gn de la 4e, on reconnut que les traductions encouragent seulement l'incapacité et la iarese. Elle ne remplacent jamais le dic- tionnaire ni la grammaire, c'est-à-dire les deux livres qui enseignent le plus utilement à l'élève et les mots et les formes 3. La lutte contre le thème oral et en faveur des vers latins fut, à Louis- le-Grand, une double occasion, offerte aux professeurs de grammaire, d'affirmer, de nouveau, leurs convictions et de révéler leurs initiatives. Jusqu'à la fin de la 5e seulement, le ministre tolérait encore le thème écrit; depuis le début de la 4e, le thème ne devait plus être qu'oral, et improvisé. Ce thème était banni de l'étude; il n'avait plus droit de cité qu'en classe. Et ce tbème ne devait plus être un texte factice, ima- giné par le maître pour contrôler l'étude intelligente des règles ; il ne serait plus un thème de règles ». Le texte en serait emprunté à la traduction d'un auteur ancien ou bien à un écrivain moderne; l'écolier pourrait être sommé de traduire, sur le champ, dans la langue de Cicéron, une phrase de Fénelon ou de Bosquet. — Le ministre eut beau affirmer dans quelques années, on ne comprendra pas que le thème latin ait jamais pu être enseigné autrement * » ; l'expérience, à Louis- le-Grand, fut presque partout malheureuse. Sauf dans une division de 4% les élèves, devant l'Inspection générale 5, ne réussirent guère à mener à bien cette épreuve. C'était lo mutisme ou le balbutiement, la médiocrité, les platitudes ou les erreurs. Le professeur devait trop souvent remplacer le dictionnaire et même la grammaire. Etait-ce défaut d'entraînement ou d'aptitude ? Etait-ce excès de diffi- culté6 ? Fallait-il accuser le professeur, ou les élèves, ou le ministre ? En réalité, quand l'inspection visita Louis-le-Grand, le thème oral était déjà condamné dans l'esprit des maîtres, du proviseur, des écoliers et, semble-t-il, des inspecteurs eux-mêmes. Les professeurs ne se conten- taient plus de souhaiter le rétablissement du thème écrit. Le proviseur, depuis trois mois7, avait autorisé les professeurs à revenir à l'ancien thème, fait en élude et sur copie ; tout au plus, es thème serait-il plus rare et voisinerait-il avec le thème oral. Et,dans d'autres lycées, on n'avait pas hésité plus qu'à Louis-le-Grand8. M. Girard 1. Réunion du iô oct. 1872. — 2. Ass. génér. du 7 juil. 1873. — 3. M. Bou- dhors, assemblée génér. du 7 juillet 1873.— 4. Propos rapporté par M. J. Girard, à l'assemblée générale du 18 déc. 1872. — 6. 7 avril 1873, A. nat. PITh liasses Louis-le-Grand, F, n° 2. — 6. Idem. C'est ce que se demandaient les inspecteurs. — 7. Séances des 8 et 22 janvier 1873. — 8. Le proviseur le déclara, dans la réunion des proless. de 3» et de 4e, le 8 janvier 1873. VIE INTELLECTUELLE '. ENSEIGNEMENT GRAMMATICAL 215 eut, du reste, une façon charmante d'expliquer son gesle. o Je suis persuadé, dit-il, que M. le ministre n'a pas eu la volonté d'affaiblir les études; il n'a songé, au contraire, qu'à les fortifier. J'ai donc cru l'aider dans l'accomplissement de ce dessein, en n'autorisant pas plus longtemps la suppression absolue du thème latin, en 4" * t en 3* 1 ». Le thème oral n'avait pas é!é, en 1873, l'unique déception ménagée aux inspecteurs2 ; les questions qu'ils avaient posées sur la prosodie étaient restées généralement sans réponses, chaque ois qu'elles n'avaient pas été tout à fait élémentaires. Les élèves de 4e pouvaient bien scander un hexamètre, un pentamètre, indiquer la place de l'élision et de la cé- sure. Mais, pour peu qu'on les interrogeât sur des règles de prosodie un peu plus délicates quantité des voyel'es, quantité des crénunts, ou dans les noms ou dans les verbes, ils ne trouvaient presque jamais le mot attendu. Et les professeurs, d'une voix unanime, leportaient la cause de cet insuccès sur la suppression des vers latins. Jadis l'initiative d'une classe, dans ces détails, était aisée ; et maintenant celte iniiiative était devenue presqu'impossible. La poésie latine avait cessé de paraître un régal. De guerre lasse, trois professeurs avaient cru bon de se réduire aux éléments les plus simples 3. La condamnation de l'exercice des vers latins avait deux autres con- séquences elle affaiblissait les classes supérieures, elle ôtait à la préparation à l'Ecole Normale une de ses assises. Il fut donc décidé, en déc. 1872, que les élèves de 4' apprendraient, tout au moins, les régies générales de la prosodie et scanderaient d*>s vers. Les classes d'Huma- nités, nous le verrons, se chargeraient ensuite de faire vaillamment le reste *. Le latin à Louis-Ie-Grand retenait presque toujours la faveur des élèves, au détriment du grec '.Quand la grammaire de Burnouf fut mise au ban des classes et quand le thème grec eut été exclu des trois classes de grammaire, on put penser que ce serait, pour le grec, le coup de grâce. Car l'attrait des auteurs, fut il accru parles traductions 'es plus complaisantes, continuait à paraître assez mince aux yeux des élèves. Les professeurs crurent trouver au mal son remède en donnant au grec la même scolaiité qu'au latin et en reportant à la 7* la première clas-e de grec, comme la première classe de latin G. C'était avancer de deux ans les débuts du grec. En juiu 1873, ils décidèrent, d'accoid avec leur Proviseur, que l'on se bornerait prudemment, en 7*, aux de- clinaisonsgrecques, à l'étude du verbe eîuîet de l'actif Xoo>, connaissances suffisantes pour faire des exercices utiles ; outre les déclinaisons et les 1. Assemblée générale du 22 janvier 11873]. — Cf. supra, p. 204, n. 2, nion de Luce de Laucival, en 1801, sur le thème. — 2. Insp. oitie, 7 avr. 18" ; — 3, Idem. r= 4. Réunion des professeurs de ietres, le 23 déo. 1872. — 5. A génér. du 19 mai 1873. — 6. A>s. génér. du 15 mai 1873 us?, d. Au Prytunée de 1801, il y en avait trois,appelées 1* classe d'il umanités, 2" classe d'Humanités et Rhétorique1; dans le règlement des lycées du 19 frimaire an XI, [10 déc. 1802], il n'y en avait qu'une, mais qui durait deux ans c'était la classe des Belles Lettres, latines et françaises2 ». On restaura, dès'sept. 1814, la traditionnelle division de l'ancien Régime 38, 2e, Rhétorique*. Elle a subsisté jusqu'à nous, avec une légère modification onomastique, en 1902 la Rhétorique s'appelle désormais la Première. De ces trois classes, il en est une que l'on ne sautait guère, la 3' ; une autie qui connaissait des fortunes diverses, la Rhétorique ; entre la 3° et la Rhétorique, la seconde eut parfois des apparences de victime. La Rhétorique avait conservé son grand air d'autrefois ; elle avait gardé, parmi les autres classes, une situation éminenle et on lui accor- dait une influence notable4. Aussi arrivait-il à ceux-là mêmes qui ne se destinaient pas à l'enseignement de redoubler leur Rhétorique5. On mettait alors sa coquetterie à refaire une rhétorique, comme on la met aujourd'hui à passer sa licence-ès-Ietlres pour avoir une culture géné- rale plus sérieuse. Les anciens s'appelaient vétérans et les autres, nou- veaux6. Mais, à côté de ce zèle, un abus s'était glissé à Louis le-Grand, que l'on aperçoit dès 1820 ' et qui, sous le Gouvernement de Juillet, put réapparaître8 un certain nombre d'élèves n'assistaient pas à tous les cours, lis choisissaient ceux qui leur convenaient rhétorique française, par exemple, ou rhétorique latine; d'autant mieux que cha- 1. RègJem. gêner, du Prytanëe, thermidor an IX [commencé le 20 juil. 1801], tit. IV, § 14 ; Arch. nat. H3 2528.— 2. Arrêté consulaire de S. Cloud, 19 frimaire an XI [10 déc. 1802], Arch. nat. F1~h 3104, n° 5; art. Statut portant rè- glement sur la discipline et les études des collèges royaux... A. nat. F H» 3104, n° 158 art. 141 et suiv. ; — Horaire des collèges royaux, dans le Plan d'études desd. collèges, ibid pièce 158.— 4 Lettre du proviseur, M. Mallevai, au recteur, le 20 sppt. 1821 L'exemple de la rhétorique a Louis-Ie-Grand aune très grande influence sur les autres classes, i A. nat. F1"h 3150, pièce 47. — 5. Rapport du pro- viseur, M. Rinn, 31 juil. 1846. A. nat FHh 78 487,n57; 30 juillet 1845. ibid., n° 52. — 6. Ce mot était en 1820 passé dans la langue officielle ; on le trouve le 31 oct. 1820, dans les procès-verbaux de la Commission de l'Instruction publique. A. nat. FIT* 3104 n» 183. — Henry Dabot, Lettres d'un Lycéen, cit. p. 1 ; le 8 oct. 1847, écrit à ses parents Sur ces 85 élèves [rhétoriciens à Louis-le-Gr.], il y en a dix qui redoublent; on les appelle vétérans; les autres sont appelés nouveaux...» — 7. Idem, procès-verbaux du 31 oct. 1820, cités ci-dessus, n. 6. — 8. 11 est donné, le 20 mars 1847, par l'Inspection génér ., comme ancien déjà, à Louis- le-Gr., A. nat. F17h n» 2. VIE INTELLECTUELLE .' ENSEIGNEMENT LITTÉRAIRE 219 oune d'elles était confiée à un professeur distinct. Les Barhistes, de 1846 à 1849, se signalaient dans celte pratique. Ces élèves avaient un surnom n'étaient les demi-rhé oricîens1. Il fallut, pour les ramener, la menace de leur interdire de se présenter au baccalauréat ; on leur re- fusait le certificat d'études 2, sans lequel nul ne pouvait alors aborder cet examen. La Seconde était désertée et sans aucune compensation. Il suffisait, comme en 1833-34, que les professeurs, chargés de l'enseigner, pa- russent ternes ou vieillis, et on faisait le vide autour d'eux a La plupart des élèves aimaient mieux doubler leur 3e, pour passer ensuite en Rhétorique3 ». Mais il y avait à ce mal bien d'autres causes, puisqu'il subsistait douze ans plus tard et que le personnel avait éé renouvelé. La Seconde re-tail déconsidérée elle semblait négligeable et vaiue à ceux qui rêvaient de succès au Concours général et qui avaient, pour les atteindre mieux, redoublé leur 3* ; à ceux qui voulaient atteindre plus vite le baccalauréat et qui avaient hâte d'être en rhétorique ; à ceux enfin que poursuivait la hantise de l'Ecole Polytechnique et qui vou- laient économiser, pour en franchir le seuil avant 20 ans 1/2, une année d'études 4. Le résultat était qu'en 1816 la Seconde était encore omise par la moitié des élèves 5 >. 1. L'inspect. génér. les appel!© ainsi, en 1847 ; texte cité, note précédente. — 2 Ordonnance royale du 5 juillet 1820; A. nat. F1~h 3104, n° 183. — 3. Lettre du proviseur, M. Pierrot, au ministre, le 20 août 1834, A. nat. F'"h l° 15. — 4. Rapport annuel du proviseur, M. Rinn, le 31 juillet 1846, A nat. F1"» n° 57. — 5. Idem. — Voici, — avec les dates de leur ensei- gnement à Louis-le-Grand, — la liste des professeurs titulaires ; nous renvoyons à notre t III, AprsNmcK C, nos 331 547, pour le détail du Curriculum vitae de chacun, et pour le tableau de tous ceux qui n'ont pas été titulaires A Rhétorique puis Première Luc? de Lancival, 1800-1810; Dubos, 1809-1823 ; J. L. Burnouf, 1810 1826 Pierrot Deseilliçny, 1828-1830; 1828-1846; Lorain, 1830-1837; Rinn, 1837-1844; Aug. Lemaire, 1848 1855; Feu- gère, 1847-1854; Aubert-Hix, 1859 1874 ; Merlet, 1867-1891 ; Hatzfeld, 1864-1894 ; Georges Perrot, 1870 1871 ; Jacob, 1878-1897; Dupré, 1870-1878; Chabrier, 1879- 1896; Gaspard, 1873-1896; Bernage. 1879-1886 ;. Hémon, 1886 1895; A. Cafaen. 1894-1902; Berr, 1895-96; Bompard, 1891 1901 Morand, 1896-1906; Bernés, 1896- 1897; Snlomon, 1897-98; Le Goupil, depuis 1906; Acis. 1897-1909 ; E. Mât*, 181 - 1906 ; Lafont, 1898-1903; Bétout, 1900 01 Doin, 1900-05; P. Gautier. 1901-06 V. Glachant, 1903 1918; P. Desjardins, 1905 06; Mayer, 1907-1910 Piésn', 1909-1919; Rudler, 1909; Bévotte, 1912-1918 ; Canat, depuis 1918; ret, depuis 1918 ; Mercier, de 1919 à 1921. A2 Première Supérieure A. Cahen, 1902-5; Lafont, 1902-1919; H. Durand, 1906-1918; G. de Bévott-, 1918 191-9 ; Cana», depuis 1919; II. Mayer, depuis 1919., A3 Première-Vétérans'; Morand, 1906 1910; A. Bellassort, depuis 1906; 11. Mayer 1910 1919; Lemain, depuis 1919. D'autres, qui ne furent pas titulaires, sont fort connus Char'es Al» "Xandre, 1819-20; S. Marc Girardin, 1828-30; Rosseeuw S. Hilaire, 1830 ; Des- pois, 1843-51 ; Ch. Benoit, 1843 ; Kmile Decnanel, 1815-50; Julien Girard, 1850- 51 ; Ch. Glachant, 1854 1861; Nie. Fél. Déltour, 1851 et 1855-56; Bug. Talbot. 1856-59 ; Paul Albert, 1853 59 ; A. J de laCoulonche, 1859-62; Alfr r 220 L ORGANISATION MODERNE En 3e, en 2% en Rhétorique, il s'agissait d'éludipr la littérature des trois langues. Le temps réservé à chacune est impossible à préciser exactement, car on les confondait volontiers dans les programmes et sur les horaires. Ainsi, en septembre 18i4, sur 29 h. 1/2 de classes, on consacrait aux langues française, latine et grecque » 13 h. 1/2 en 3"; 15 heures 1/2, en seconde, et 13 heures 1/2, en Rhétorique 1. En lh37, Salvandy accordait aux c langues anciennes et françaises » 7 classes sur 1 1 , en 3e et en seconde ; et 10 sur 11, en Rhétorique 2. En 1840, Cousin attribuait indistinctement 9 classes sur 11 , en Rhétorique, aux langues française, grecque et latine 3 ». C'était ensuite à chaque professeur de distribuer harmonieusement, entre les trois littératures, le temps dont il pouvait disposer. Et celte répartition dépendait, pour une part, des auteurs classiques inscrits, pour les trois langues, aux programmes. Comme dans les classes de grammaire, les latins l'emportaient sur les français et sur les grecs. Au Prytanée de 1801, on s'en apercevait déjà 4. Dans la lre classe d'Humanités, [c'est-à-dire notre 3"], aucun auteur français ; en Grec, tout simplement les Fables d'Esope et les dialogues les plus aisés de Lucien ». En latin, Quinte Curce, les Commentaires de César les traités cicéroniens de la Vieillesse et de V Amitié ; les Métamor- phoses d'Ovide et les Eglogues de Virgile. Môme partialité latine, dans la 2° classe d'Humanités, [notre seconde] les élèves, prescrivait-on, continueront l'étude des auteors de l'Antiquité, tels que Lucien, Plu- tarque, Vies des Hommes illustres ; Sallusle, Conjuration de Cati- 1S75-76 ; Brunetiere Ferd., 1875 78; Parigot, 1889-90; Gust. Reynier, 1893-1902; Gust. Lanson, 1894 1900, avec intermittences; S. Rocheblave, 1S94-95 ; Gh. Casa- nova, 1896-97. B Seconde, Dubos, an VIII-1809 ; Mollereau, 1801-1815; Le Marchand abbé, 1815-1820; Quênon, 1820-21; Gnyet, 1821-24; Humbert. 1826-1837; Charpentier, 1826-28 ; Gros Et., 1837-1838 ; Pierron, 1858-1872; Boudhors Ch. Eu?., 1869- 1894; Delacroix, 1872-1881 ; Marcou Léop , 1868-1894 ; Bouchot, 1870-1885 ; Eug. Lintilhac, 1891-93 ; Em. Mâle, 1893-95; Acis, 1894-97; La Filiolie, 1894-1906; Bernés, 1895 ; Nollet, 1896-99 ; Pressoir, 1897-1913 ; Combarim, 1899-1901 ; De- jean de la Bâlie, 1900-1913; Plésent, 1906-09; Gend. de Bévolte, 1909-1912; Amiot. depuis 1913; de Bilhère de S. Martin, depuis 1913; Arbelet, 1913-1919. C Troisième, Mollereau, an Vlll-an IX; Dubos, an X-1809 ; Gofiaux, 1809- 1^15; Guyet, 1819-21 ; Guyot, 1824-[1832] ; Humbert, 1821-24 ; Gros, 1832-1837 ; Destainville-Janot, 1833 1852; Delacroix, 1867-69; Seligmann, en 1871; Gaspard, 1874-77; Jully, 1881-94; Huyot, 1881-1902; Rocheblave, 1890-94; Fouyé, 1891-93; Acis, 1892-94 ; Boudhors Ch. H., 1893-94 ; Pressoir, 1894-97 ; Bonnerot, 1894- 99; Combarieu J, 1894 99; Dejean de la Bâtie, 1897-1900; Laloy, 1898-99; Ejjger Max. Fél. 1,1899-1900; Dautremer, depuis 1901; Reynaud, 1900-03; Mercier, 1903 1912; Gend de Bévotte, 1903-09 ; Roche L. A, 1906-07; Damenez, 1909-17 ; Bourgin Hub., depuis 1911 ; Lesans, 1916 ; Lanusse, 1917-19. 1. Plan d'études pour les collèges royaux... A. nat. FHh 3104. — 2. Arch, L. le Gr., Corr. admin. VI, n° 3496 — 3. Idem, VII n» 4364 — 4 Règlement gé- néral du Prytanée français, thermidor an IX [commencé le 20 juill. 1801], tit. V, § 14, VIE INTELLECTUELLE ENSEIGNEMENT L1TTERAIBE 221 lina, avec les Oraisons, 'nous dirions a ijourd'hui les Discours}, de Cicéron,. prononcés à ce p-opos ; Tite-Live, Tacite, 'es Géoryiques de Virgile, avec la traduction de Uelille, el Horace. En Rhétorique, deux auteurs grecs, trois latins el tr >is français.» Dans la classe de Rhéto- rique, disait le règlement, on enseignera aux élèves les principes géné- raux de l'art oratoire, appliqués à quelques discours de Cicéron et de Dérnosthènes, aux harangues des historiens latins, iniitulées Conciones, aux 0> disons funèbres de Turenne, par Flécher, et de Condé, par Bossuet. Ils verront ï Enéide de. Virgile, quelques chants de l'Iliade, l'Art poétique d'Horace et celui de Boileau, comparés1 ». Et c'était tout. La Restauration eut le souci, dès les programmes de sept. 1814, d'accorder des faveurs moins inégales aux trois littératures en o", tout le génie français était représenté par les Odes choisies de Rousseau pt par les Epîtres de Boileau ; faut-il y ajouter les Gêorgiques de Delille? Le génie grec était défendu par YEvagoras d'Isocrate, la Cyropéd> Les Inspecteurs, en 1819, constataient avec tristesse dans l était vraiment distinguée. Et cette distinction n'avait chance d'être atteinte que si la classe était nombreuse, très nombreuse. Là élait l'excuse des Rhéto- riques de 85, 100, 120 élèves. Là était le grand argument de M. Pierrot, de M. Rinn et des Inspecteurs, quand ils s'opposaient à ce que l'on divisât en deux sections un pareil ensemble 1. A ce point de vue, ils estimaient que le nombre faisait la force. La correction d'un thème et d'une version associait, d'autre façon, les élèves au maître. Telle phrase heureusement traduite était empruntée à tel élève et le corrigé naissait de la collaboration de tous. Cer- tains professeurs avaient même le scrupule de s'effacer trop devant leurs élèves ce que l'Inspection générale observait dans la Rhétori-jue de M. Despois. Il corrigeait les versions avec beaucoup de critique ei justesse, mais 1 Inspection ajoutait Peut-être devrait-il finir par substituer son travail à celui des élèves. Une traduction bien arrêtée est le commentaire le plus intelligent d'un texte. Malgré sa facilité et peut-être par modestie, M. Despois reste quelquefois en chemin 2 ». En 1819, le discours, surtout dans la division de Rhétorique confiée à M. Pierrot, révélait un enchaînement d'idées et une maturité de raison rares à cet âge 3 ». Chez M. Aug. Lemaire, en 1849-1851, le discours entraînait encore les élèves à bien autre chose qu'à celte déclamation si franchement dis- créditée à Louis-le-Grand ; il les entraînait à la logique. Ce profes- seur éminent voulait que tout, dans un discours, servit à prouver ^ que chaque paragraphe fût une preuve particulière, nettement dis- tinguée des autres et que chaque phrase d'un paragraphe donné fût un élément de celte preuve particulière. Cela paraît fort simple en théorie mais il n'avait pas trop de l'année entière pour plier les jeunes esprits à cette rigueur 4 ». L'explication des auteurs achevait la classe, dans la seconde de M. Durand, en 1837-38 5 ; elle prenait une heure sur deux, dans les 1. Rapports de M. Rinn, 21 août 1847 et 25 juill. 1848. A. nat. FHh n° 4 et 76. — L'inspecteur Caboche écrivait, le 2 mars 1869, au sujet de la Rhé- torique de Louis-le-Gr. t II faut que cette classe soit nombreuse, afin qu'il y ait, sur chaque devoir, un certain nombre de bonnes compositions, qui servent de modèles; les élèves qui ne demandent aux études que le diplôme de bache- lier doivent profiter des travaux des premiers ; ils apprennent ce qu'ils ne sau- raient apprendre dans d'autres conditions à trouver des idées et à les dispo- ser. » A. nat. F17H 86 471, C, 43 — 2. Le 24 mars 1845, A. n» 49. — 3. Rapport de l'Inspection, fin janvier 1819, A. nat. FHh 3149, pièce 111. — 4. Lettre de M. Lachelier, 5 mars 1911. — 5. A. nat. F1~h n° 41a. VIE INTELLECTUELLE ENSEIGNEMENT LITTEBAIHE 2 33 Rhétoriques de MM. Emile Deschanel et Auguste Lemaire, de 18i8 à ISoO x. L'explication sérieusement faite était, pour le des élèves, tin infaillible moyen d assurer ces progrès. Les remarques publiques du maître décupla'ent l'intérêt de toutes les opinions personnelles que la page solitairement étudiée avait fait naître dans chaque esprit. Si bien qu'on posait en axiome pédagogique la préparation des textes est presque la seule manière de s'adress-r à tous les élèves, forls et faibles1 ». M. Lacbelier nous en a dit toute la méthode et tout le secret Nos professeurs à Louis-le-Grand faisaient expliquer les auteurs anciens de fort près, mais sans aucune prétention à l'érudition et ils les faisaient, à mesure, traduire, dans le meilleur français pos- sible et c'était tout. Aucune leçon d^histoire littéraire, aucune analyse ni appréciation d ouvrages non expliqués ils ne parlaient jamais tout seuls. lis dirigaient la classe, celaient les élèves qvi la faisaient 3 ». Il en allait de môme, à l'occasion, pour le vers latin, chez M. Merlet, par exemple* le vers pouvait devenir le gr^nî sport de la classe ou, du moins, delà meilleure moitié de la classe. On s'y entraînait avec une ardeur inouïe. Le professeur énonçait une phrase française, un vers de La Fontaine, ou un vers du Lutrin. Il interrogeait du regard à droite, à gauche, sur les premiers bancs, parfois sur les au 1res El tout aussitôt, des lèvres qui s'entr'ouvrciient, jaillissaient ici un premier hémistiche, là une fin de vers, ailleurs une coupe heureuse, une jolie césure, un renvoi faisant image, un adjectif achevant l'harmonie cherchée. Le pro- fesseur vérifiait ce mot, retouchait celle tournure, changeait ce verbe et l'esquisse première était fixée chacun, dans cette collecte générale, avait donné son ob M. Lachelier. — 2. Inspr-ct. ,qénér. de 1867, A. nat. Fl'u Louis-le-Grand, liasse A, n° 15. — 3. Lettre citée de M. LaclMier. — Cf. infra, p. 233, n. 1. - 4. Communie, de M A Ab rt-IVtit. — 5. Nous parlerons plus ba, V. à Yindex, du Concours général. L'inspection en 1819 avait trouvé, à Louis-le-Grand, des compositions fort distinguées, surtout en vers » et en discours. A. nat. FI"» 3149 ne 111 — idem pou [1822 , A. n. Fl~» 3174 ; pour 1849, 1850, 1867, 1869, IS72, is?3 A. nat. FHH a4. n > 14 et 14W. — G. de M Ra- veton, entré en 1859 a Louis-le-Grand nt aujourd'hui avoué près le tribunal ci vi de la SeinH ; mémoire reçu lo 10 janvier 1911. 234 l'organisation moderne réussir toujours à être égal à lui-même. Ses lauriers étaient tout à la fois sa fierté et son tourment. Ce fut donc à lui qu'on s'adressa, en 1867, pour savoir si les Humanités avaient dégénéré en France, depuis le règne de Louis-le-!3iea-Aimé. Les deux Rliétoriques se mesurèrent avec l'un des meilleurs élèves de Crévier, le vétéran Moreau elles furent invitée*, comme lui-même s'y était prêté jadis, en 1736, à dire le fond de leur pensée, sur les mérites inégaux de la sévérité et de la clémence De severitatis et clementise divevsis laudibus judicium ulriusqiie prœcones1. Et l'Empereur connut que les sèves nourricières du vieux soi de France gardaient toujours des tendresses maternelles aux fleurs rares de Latinité. Comment les classesde Lettres traversèrentà Louis-le-Grand l'épreuve Î872-73 et ce qu'elles devinrent depuis, il nous reste maintenant à le dire. Parmi les réformes proposées alors par le ministre, les professeurs du lycée firent leur choix. Ils en rejetèrent quelques-unes ; ils mirent au point les autres ou les adoptèrent 2. Quand on voulut réduire à rien ou presque à rien les grammaires grecque et latine, ils protestèrent avec énergie et ces grammaires furent sauvées on continua, même en 3e et en 2e, à y recourir sans cesse et à les apprendre par cœur. On se préoccupa seulement de leur donner plus d'unité, non pas uniquement dans leur méthode mais dans leur vocabulaire. Ils ne furent pas d'avis, non plus, que les auteurs expli- qués et compris doivent tenir lieu de tout, ni1 qu'il fallait, dans leur préparation, absorber la meilleure part des heures d'étude, pas plus que, dans leur explication, la meilleure part des heures de classe. Rendre l'explication alerte et précise, bien nourrie, et vivante, rien de mieux ; mais lui sacrifier les autres exercices parut un abus et un péril. Que quelques auteurs fussent renJus, dans leur totalité, accessibles à l'élève d'Humanités, l'idée leur parut bonne ; ils acceptèrent même, de la 3e à la Rhétorique, le secours des traductions, mais pour les auteurs grecs seulement et encore fallait-il que ces traductions n^ parussent jamais en classe et ne fussent point juxtalinéaires. Autrement ce n'était plus à la curiosité d'esprit de l'adolescent qu'on prêtait secours, c'était à sa paresse. L'amener à acquérir des livres qui fussent sa propriété, lui ménager des loisirs, pour des lectures nouvelles, c'était parfait ; mais serait-on bien sûr que ces lectures fussent toujours classiques et 1. A. nat. F11n liasse B, n» 31. — 2. Tout ce qui suit, jusqu'à la fin de ce chapitre, est inspiré des Procès-verbaux du registre de l'assemblée des pro- fesseurs de Louis-le-Grand, 1872 -74, 1881 et suiv., conservés dans les archives du lycée; notamment des séances des 7 juillet et 4 oct. 1873. VIE INTELLECTUELLE 235 comment conlrainilro les grands écoliers à préférer les livra très mo- dernes aux livres consacrés par lu passé? El comment, à cet égard, r. - genter les externes ? Yoil i pourquoi les Eocccrpta, les Narrations et les Concio?ies, ne semblèrent pas avoir mérité le bannissement ni la mort. Que les leçons fussent abrégées, que les devoirs fussent réduits, dans leur nombre et leur étendue, qu'on passât quotidiennement à les dicter moins de temps ; qu'on les variât davantage, tout cela témoignait d s vues très justes et provenait d'initiatives fécondes. Mais ce n'était pas une raison pour immoler le thème écrit et le lycée, avant même la sanction ministérielle, sauva les thèmes grecs et latins, en 2e comme eu 3e. Cela n'empêcha pas d'exercer les en 2e, par des narrations, des lettres, des descriptions ; en Rhétorique, par des dissertations plus fréquenles et par des lettres également, qui firent désormais une concurrence redoutable aux discours. Le thème oral put bien être maintenu pour quelques phrase-, en classe, mais le thèuie écrit ne fui pas exclu de l'étude. Les vers lalias, eu 1872, étaient restés facultatifs au lycée ; les pro- fesseurs obtinrent qu'on accordât un sursis à leur exécution. Ce lut tout. Et si le discours français, qui menaçait de supplanter le discours latin, con-entit à retarder sa victoire, c'est que, entre tous, les maîtres de Louis-ie-Grand s'y employèrent. Pour la première fois, on enseigna d'une façon suivie, l'histoire des trois littératures1 en 3% la littérature gre que ; en 2e, la littérature latinee!, en Rhétorique, la littérature française. Point de dictées, point de cahiers, point do rédactions des idées générales précises et quelques notes. Ou voulait éviter l'érudition paperassière et on visait a meubler l'esprit, mais sans entasser les écritures qui meublent seulement les pupitres. Ne venait-on pas de s'apercevoir que quelques élèves ignoraient presque tout de notre théà'. re classique ? 11 s'agissait de le leur faire lire, sans leur donner, à son sujet, des jugements tout faits; de former leur goût, autant et plus que leur mémoire. Les professeurs acceptèrent volontiers aussi d'initier les élèves à l'histoire des mots, comme à l'histoire des idées; de leur montrer le progrès de notre langue depuis les Serments de Strasbourg, jusqu'à la maturité du xvnc siècle. Et tout cela sans oublier qu'une classe de lycée ne doit pas être un cours de Faculté et qu'elle doit prétendre moins à faire briller le talent du maître qu'à iaire pa>ser sa science dans l'esprit de ses auditeurs. El l'Inspection, après avoir constaté les 1. Il est piquant de constater que, des 1801 , Luce de Lancival, qui enseigna dans noae maison la rhétorique de 1800 à 1^10, combattait la prétention de quelques novateurs de faire parcouru- rapidement le domaine entier de la lit térature dont chaque branche sullirail pour occup -rs mois. » .Discours chez Dubois et Luiseau, 25 fructidar an IX A. m t, 17-18. 236 L ORGANISATION MODERNE tâtonnements du début, accordait que ce n'était pas là chose facile, en raison de la forme éparse de cet enseignement et de la manière toute discursive » dont il convenait de le donner. En somme la Rhétorique était de moins en moins latine, et de plus en plus française ; elle cessait d'être oratoire pour être simplement littéraire. Eu 1902, il ne lui restait plus qu'à perdre son vieux nom, comme elle avait perdu son ancien caractère elle est devenue la Pre- mière, car elle n'était plus vraiment la Rhétorique. Aujourd'hui, à Louis-le Grand, la Première a su du moins, et plus poul-être qu'ailîeurs, rester fidèle aux Humanités. Il n'est pas à Paris une Première-Vétérans ni une Première-Supérieure qui présente un ensemble comparable à celui de l'illustre maison. Il y a là, d'habitude, 80, 100 ou 120 élèves qui rappellent leurs glorieux aînés. Ils sont le nombre et ils sont l'élite. Comme jadis, au temps des Pierrot-Deseilli- gny, des Rinn, des Jullien ou des Girard, ils accourent là, de tous les points du territoire. Quand ils entrent au lyc^e, ils sont déjà une sélec- tion ; c'est un honneur pour eux de lui appartenir, en attendant que ce soit un honneur pour lui, de les avoir eus sur ses bancs. CHAPITRE II L'Enseignement Mathématique I Portée pédagogique de cet enseignement Les Anciens, que l'on suivait à Louis-le-Grand, tout le long de l'en- seignement littéraire, di-aieni déjà Mundum regunt nnrneri, et Pla- ton avait inscrit sur sa porte a Quiconque ignore la géométrie doit rester dehors. » La mathématique, chez les Grecs, c'était la science, sans épilhète, c'est-à-dire le savoir coordonné. Chez nous, les mathématiques ne sont plus que la science des gran- deurs mesurables et mesurables, numériquement. Ces grandeurs, les mathématiques les dégagent les unes des autres, dans l'espace, et les circonscrivent, dans le temps elles les étudient, dans leur nombre et dans leur durée. Or, on ne peut percevoir aucun objet sensible sans le situer dans l'espace et dans le temps; l'espace et le temps sont les nutions universelles et nécessaires des objets. Ce qui se rapporte à l'espace et au temps est donc applicable à tous les objets sensibles du monde et se ramène à une vérité évidente. Quand on énoncp, en ma- nière de prémisses, certaines propriétés de l'espace et du temps et qu'on les attribue, en conclusion, à tels objets localisés dans l'espace et le temps, ou fait un syllogisme mathématique, qui n'est autre qu'un théorème. Et voilà pourquoi les vérités mathématiques ont ce caractère d'évidence absolue et général, qui les dislingue. Elles nerelèventque delaraison etdes jugements, rigoureusement con- duits. Chacune de leurs propositions se démontre et se démontre par le seul raisonnement, abstraction faite de toute expérience ; l'expérience confirme cependant toutes ces propositions ; au besoin même elle a pu y conduire. Les mathématiques sont donc la science rationnelle par excellence elles sont la meilleure gymnastique du raisonnement et de la raison. Les Humanités cultivent la mémoire, l'imagination, le cœur et une partie de l'esprit l ; aux mathématiques il appartient de développer le 1. V. Cousin ; lettre [circulaire] au proviseur de Louis-lc-Gr., 27 sept. 1840.— Arch. L. le Gr.. Corr. admin. VII a» 4363. 2 38 L ORGANISATION MODERNE reste. C'est la science mathématique qui a fait la civilisation et la trans- forme ; et c'est une série de raisonnements bien liés et enchaînés qui a créé !a science. Chacun de ces raisonnements permet aux hommes un progrès de plus. Nous voyons plus loin que nos pères, disait Fonte- nelle, parce que nous sommes montés sur leurs épaules1. » L'homme ne petit être complet qu9 si, à l'enseignement littéraire, s'ajoutent l'enseignement scientifique et ses disciplines. Les découvertes des trois derniers siècles s'étaient chargées de renou- veler cette preuve et, au lendemain de la Révolution, la Science sem- blait le plus immortel de tous les anciens Dieux. C'était sur elle que l'on comptait pour rebâtir le monde, car on avait fini par se douter que le monde n'était plus celui d'Athènes ou de Rome2. Puisque la cité mo- derne évoluait, plus encore que la cité antique, il fallait bien adapter l'enseignement à cette évolution. Sans quoi l'enseignement eût cessé de préparer l'homme aux réalités de la vie. L'utilité des sciences fut ainsi proclamée et par des hommes assez divers. Bonaparte, quand il visita le Collège de Paris, le 22 mai 1801, insista sur la nécessité d'étudier les mathématiques, dont les applications ultérieures lui semblaient riches d'avenir3. Quand, deux mois plu lard, il fixa le règlement du Prytani'e, il demanda surtout aux mathéma- tiques de façonner le cerveau de ses futurs officiers et l'article l*r de l'arrêté du 19 frimaire an XI [10 déc. 1802], disait on enseigner* essentiellement, dans les Lycées, le Latin et les mathématiques *. » Les Inspecteurs généraux A. Ampère et Rendu ne jugeaient pas inu- tile de déclarer, en 1819, dans la réforme du statut universitaire de sep- tembre 1814 L'étude des Sciences a besoin d'être encouragée au moins autant que celle des Lettres '. » Et Cousin, pendant son ministère, n'hé- sitait pas à écrire au Proviseur de Louis le-Grand, le 27 août 18i0 Il est incontestable que l'éducation n'est ni vraie ni complète, si elle n'embrasse pas, avec les études classiques proprement dites, des con- naissances suffisantes de mathématiques 6... » Plus près de nous. M. Ern. Lavisse, se reportant à ses souvenirs d'écolier, aux environs de 185'>, déplorait qu'on pût quitter le collège sans rien connaître de la nature » et demeurer comme un étranger dans l'Univers7 ». Reconnaître la portée pédagogique de l'enseignement mathématique, c'était poser un principe, dont l'application devait suivre. Mais dans celte application, les difficultés ne manquaient guère. Et les premières tenaient à la nature même des mathématiques ou à leurs diverses façons d'envisager l'idée de nombre. 1. Mot qui reste toujours vrai, dit Victor Turuy, en le citant, Notes et sou- venirs, 1901, I p. 59. — 2. Cf. le discours de M. Maurice Croiset, à la distri- bution des prix du lycée Michelet [ancienne succursale de Louis-le-Gr.], 1895; Palmarès, p. 30.— 3. A. nat. H 2558 doss. XXVI.— 4. A. nat. FHh 3104, n° 5- 5. A. nat. FITh 3104,. pièce n° 158; §05.— 6. Arch. L. le Gr., Corr. admi- nistr. VII, n° 4303. — 7. E. Lavisse, Souvenirs, p. 228. VIE INTELLECTUELLE ENSEIGNEMENT MATHEMATIQUE 239 L'idée de nombre renferme, en elle-même, la première des sciences, celle qui leur sert d'assise commune, la science du calcul. L'enfant com- mence à exercer son calcul sur dos objets concrets ; puis ou lui montre que la nature des objets peut changer, à l'infini, sans que les opéra- tions de son calcul en soient modifiées. Il conçoit dus lors le nombre indépendamment des objets comptés, puisque les objets diffèrent et que le compte demeure. Cen'e^tdonc pas l'idée de qualité qui importe, mais seulement l'idée de quantité. L'enfant passe ainsi à la notion du monde abslrail. En exerçant le calcul des valeurs numériques abs- traites, on fait de V arithmétique. Ce premier effort peut conduiie à un second effort d'abstraction. Après avoir dépouillé l'objet de sa qualité, on peut le dépouiller d*3 sa valeur tt on découvre que les rapports des nombres n'en sont pas changés il y a donc une loi des nombres, qui domine les faits numé- riques, une loi générale, dominant les valeurs particulières cette loi, c'est V algèbre qui la recherchent la formule. Et dans ce sens, Auguste Comte a pu dire l'arithmétique est le calcul des valeurs, l'algèbre est le calcul des fonctions. » Si, au lieu de se borner au nombre proprement dit, la science mathé- matique se préoccupe de calculer les dimensions, elle s'appelle géomé- trie ; et pour peu qu'elle hausse à cette élude des surfaces et des courbes le ca'cul algébrique, elle devient la géométrie analytique. Elle précise les relations entre les parties d'une même figure, relations de position et relations de grandeur ou métriques comme toutes les figures se composent de triangles finis ou infinitésimaux, toutes les relations métriques simples sont des relations entre parties de trian»'es. Et, si l'on cherche à calculer les éléments des triangles définis par des données numériques suffisantes, on aborde la trigonométrie. Veut-on pousser plus loin le calcul et lui demander de démontrer les lois du mouvement et de l'équilibre, puis d'appliquer ces lois à la cons- truction et à l'utilisation des machines, on est dans le domaine de la mécanique ; on passe dans le domaine de la cosmographie, si l'on se borne à connaître les astres et à les décrire; on s'élève jusqu'à l'as- tronomie si on cherche à préciser les lois de leurs mouvements '. Et l'on a parcouru les principales étapes que le collège ait proposé à l'am- bition de ses élèves, au cours du xixe siècle. Il s'agissait donc d'abord déménager des degrés, dans celte ascension vers les sommmets scientifiques, et de tailler ces degrés à la mesure de chacun. Comment graduer l'enseignement mathématique ? Comment le mettre à la portée de l'enfant, déjà sollicité par les études gramma- ticales et littéraires ? Comment renseignement scientifique doit- il être combiné avec l'enseignement littéraire, dans l'éconoa ie des 1. Même dans le dernier quart du irx»?. la cosmographie à Louis-le Grand est restée généralement ei si rtout descriptive. V. ci-dessous ; - 24 0 L ORGANISATION MODERNE collèges ' » ? Ce fut un problème souvent agile et diversement résolu 2 » et do ni Louis-le-Grand n'eut jamais le droit de se désintéresser, un moment, depuis le Consulat jusqu'à nos jours. De sa solution devail dépendre !a physionomie de la maison et une part de sa destinée. On pouvait concevoir une élucation scientifique parallèle à l'éduca- tion littéraire, depuis les classes élémeutairrs jusqu'aux classes supé- rieures ; chaque année et'peu à peu, chaque cerveau s'assimilprait une double somme de connaissances, en rapport avec son dévelop- pement et ses forces. Et la dose des éludes mathémaliques serait égale à la dose des éludes littéraires. C'était la méthode progressive de renseignement dualiste et égalilaire. A cette méthode, une objection grave l'attention de l'enfant serait partagée. Sollicité par les lettres et par les sciences, tiraillé entre ces rivales, il ne serait ni aux unes ni aux autres. Impossible, avec un loyalisme égal, de servir deux maîtres. D'autant moins que les exercices mathématbiques exigent 'plus de réflexion et de maturité que les exercices littéraires. On pouvait donc réserver comme couronnement des études l'initiation aux mathématiques ; la grammaire et les lettres d'abord et uniquement, les sciences plus lard et uniquement. C'était la méthode des enseignements successifs. Ces deux méthodes étaient radicales et la seconde avait, comme la première, à coté d'avantages théoriques évidents, des inconvénients pratiques majeurs après une éducation littéraire complèle, combien d'éîèvps auraient la volonté ou le temps de commencer, au collège, une éducation scientifique sérieuse? Puisque l'une et l'autre méthode avalises qualités et ses défauts, était il donc si malaisé de garder les unes en laissant les autres? De s'en tenir, entre les deux systèmes intransigeants, à un troisième système, mixte, faitde tempéraments, de conciliations et de mesure? L'enseigne- ment grammatical d'abord, puis, avec l'enseignement littéraire ou hiéme avant la fin de l'enseignement grammatical, augmenter de plus en plus la proportion de l'enseignement scientifique en diminuant, d'autant, l'enseignement littéraire. Vers 15 ans, les écoliers se pronon- ceraient les uns pour les sciences, les autres pour les lettres et ils auraient enfin la liberté d'être eux-mêmes. Nous allons voir comment, à Louis-le Grand, les trois méthodes furent tour à tour essayées et quelles fortunes diverses elles connurent. 1. Ce sont les termes mêmes de la lettre de V. Cousin au proviseur de Louis- le-Grand, le 27 août 1340. Arch. L. le Gr. Corr. admin. VII n° 4363. — 2. Idem. — Les Inspecteurs généraux Ampère et 'Rendu disaient déjà, le 9 oct. 1819 L'accord des études mathématiques et des études littéraires a toujours été un problème difficile à résoudre. » A. nat. FHh 3104, n 157. ^R^. *» Fig. 26. — Escalier du Lycée, vu de la Sorbonne, pendant la démolition, en septembre 1887. Dessin relevé de sépia. M g" point, plutôt que l'intransigeance, novatrice et vaine. §[. — De 1800à 1814 Au Prytanée, dans le Collège de Paris, en 1801, l'enfant, de 9 à 12 ans 2 au moins, étudiait surtout l'orthographe, la grammaire et le latin ; ces débuts duraient trois ans 3. Et ils n'étaient scientifiques qu'à peine la première année, l'écolier apprenait à 'chiffrer ; la seconde, on l'initiait aux quatre règles de l'arithmétique ; la troisième, aux frac- tions et aux parties plus élevées de l'arithmétique 4 ». A ce moment, dans la fleur de sa treizième année, il était invité à se découvrir, sans relard, des aptitudes ou bien pour la carrière civile » ou bien pour la carrière militaire 5 ». Car le Prytanée était destiné, par définition, aux enfants des militaires tués au champ d'honneur et aux enfants des fonctionnaires civils, victimes de leurs fonctions 6 », Bonaparte 1. Voici le tableau des professeurs titulaires de mathématiques, avec les dates de leur enseignement à L. Je Gr. ; nous donnons le détail de leur curriculum vitae, dans notre tome III, Appendice C, nos 50 à 155, où l'on trouvera également les professeurs non titulaires MM. Duport, an IX-1816; Landry, an 1X1816; Dubourguet, an IX-1816 ; La- ran, an IX-1827 ; Rouby, 1820-26 Richard L. P. E., 1826-1848; Guibert, 183?- 1853; Lionnet, 1849-1866; Vieille, 1S53-58; Lecaplain, 1852-74; Bernés P. M. M. E., 1863-1889; Burat, 1880-1891 ; Simon, 1866-1880; Painvin, 1872-75; Viant, 1879-1888 ; Pruvost, 1875-1880 ; Javary Adr., 1876-1910; Marguet. 1878-1888; Ribout, 1879-1892; Niewenglowski, 1881-1895; Lignières, 1885-1893; Roche Arth., 1888-1895; Ilumbert Ch. Eug., depuis 1888; Balézo, 1888 89; Baudot, 1889-91; Genouille, 1891-1906; Goulin, 1892-95; Charvet, 1391-93; Cels, 1895 et 1901-1910; Mathieu, 1895-1906; Riemann J., dep. 1895; Périer G. E., 1895- 97; Bioche, depuis 1897; Ferval, 1897-1901; Combet, dep. 1906 ; Durand A. L., 1902-1906 ; Leconte, 1906-1919 ; Serrier Al. Em , dep. 1907 ; Roubaudi, 1910-1919 ; Kéraval, 1910-1919 ; 'Baudoin, 1912-1920 ; Bernheim, dep. 1919 ; Dufour, dep. 1919 ; Danelle, dep. 1919 ; Pouget, dep. 1919 ; Fossier, dep. 1919. — 2,3,4. Arch. 2528. Régi, gënèr. du Prytanée /Vancoù,titre IV, art. 3 à 11. — 5. Idem ; et art. 13 et 18. — 6. Id., titre I art. 1 » lo Prytanée français est essentiellement destiné par le Gouvernement à fournir une éducation gratuite aux enfants des militaires tués au champ d'honneur et des fonctionnaires civils, victimes de leurs fonctions. » 1G „42 l'organisation modeune trouvait indispensable que les fils, comme les pères, servissent l'Etat. Une fois son parti pris, l'enfant, s'il avait opté pour la carrière civile, n'entendait plus parler de mathématiques pendant trois ans ; a 4- année en Philosophie, pour donner à son jugement une plus grande rectitude», il ajoutait à ses études un cours de géométrie élémentaire . L'enfant avait-il, par contre, choisi la carrière militaire, il s'acheminait, on dira plus tard, il obliquait» \ vers les mathématiques et on ne lui parlait plus de littérature \ Il allait ainsi, de 12 ou 13 ans, a 15 ou 16 II faisait trois classes au moins ». Dans la 1", il apprenait 1 al- gèbre, la géométrie théorique et pratique et l'application de l'algèbre a la géométrie » ; dans la seconde, les trigonométries rectihgne et sphérique avec leurs applications à la levée des plans et des sections coniques»; -dans la troisième, cette partie delà mécanique qu on appelle la statique ; les éléments d'astronomie et de fortification ». Dix-huit mois plus tard, les Consuls retouchaient ces Le principe subsistait d'un enseignement grammatical français et latin préalable à l'enseignement scientifique. Mais la durée de cet enseignement grammatical était réduite au bout d'un an, pour les élèves d'un talent et d'une application ordinaire », et au bout de deux ans pour les autres, on était, avant l'achèvement du cours de latinité», autorisé à s'en évader 5. Et l'on passait dans le cours des mathéma- tiques ; il était divisé en six classes, mais ces classes étaient semes- trielles au lieu d'être annuelles, et l'on pouvait en faire deux, en un an . Le cours de Mathématiques pouvait donc être achevé en 3 ans \ En y entrant, l'élève avait appris simplement à chiffrer et à triompher des quatre règles». On lui révélait alors, outre les éléments de la sphère et de l'astronomie, tout ce qui était indispensable pour l'intelligence du Cours de Mathématiques transcendantes », réparti sur deux années. Dans la première classe, le professeur enseignait l'application du calcul difîérentiel et intégral à la géométrie et aux courbes; dans a seconde, l'application du calcul différentiel à la mécanique et à la théorie des fluides. » Il montrait, en outre l'application de la géométrie à la levée des plans et des cartes 9. Sur cette portée pratique des mathématiques, le Premier Consul, lors de sa visite à l'ancien collège Louis-le-Grand, avait insisté, de la manière la plus expresse 10»; et l'on s'en souvint, rue Saint-Jacques . Le professeur de mathématiques, le citoyen Duport, s'entendit avec deux ingénieurs. Les opérations de triangulation se firent à Vanves, sur 1 TâPm titre IV art. 17, ad finem. - 2. V. ci-dessous, p. 257. — 3. Titre IV iHrt 18. - 4. Idem. - 5. Le 19 frimaire an XI [10 déc. 1802]. des registres des délibérations des Consuls de la République Enseignement des Lylèes ; arch. nat. FI* 3104 n» 5 ; art. 2, 3 et 8 - 6 Idem art. 3 et 8. _ 7 Idem - 8. Idem et art. 5. - 9. Idem, art. 10. Le 22 mai 1801 A nat. H 2558 doss. XXVI et H* 2558 doss. XV, n° 17. - 11. Idem, doss. XV, n 17, cité. VIE INTELLECTUELLE ENSEIGNEMENT MATHEMATIQUE 243 les collines et dans les bois des environs. Le site,était très favorable pour ce genre de travail. , Et tous les instrumenta nécessaires furent acquis *. II y eut, en Tan XI, beaucoup d'entrain pour l'étude des mathéma- tiques, au Collège de Paris », à la veille d'être converti en lycée. Aux trois professeurs ordinaires, il fallut en adjoindre d'autres z. En octobre 1804, on se préoccupait déjà de pénétrer davantage, l'un par l'autre, dans les 4 lycées parisiens*, l'enseignement scientifique et renseignement Littéraire. On retardait d'abord de six- mois ou d'un an l'exode des élèves dans les classes de mathématiques et l'on fortifiait, d'autant, l'étude des langues anciennes K Puis, on voulut permettre à certains élèves de ne point se spécialiser trop tôt, mais de suivre con- curremment le cours des langues anciennes et de mathématiques » On combina les heures des classes de telle façon que les élèves fussent littéraires le malin et scientifiques le soir on reporta aux classes de lapres-diner la partie la pUS indispensable des sciences»; la matinée s'occupait seulement des applications c. A cet égard, on abandonnait un peu ce que nous avons appelé la troisième mélhode. pour incliner vers la première \ Mais, à moins de deux ansde là, plusieurs maîtres autorisés annonçaient déjà quelque chose du système cousinien de 1840-41, c'est-à-dire de ce que nous avons nommé la seconde méthode celle qui consiste à reporter les sciences à la fin des études littéraires 8. Un des arguments essentiels, que fera valoir plus tard Cousin, à l'appui de sa méthode, était, dès 1806, présenté au Directeur général de l'Ins- truction publique par plusieurs professeurs du Lycée Impérial9 • L'ex- périence a mis tout à fait hors de doute que"' l'attention partagée entre les langues [anciennes^ ou les Lettres et les Mathématiques' produit, en général, peu de résultats et que les élèves ainsi dirigés sont très faibles, dans chacun des genres qu'ils veulent embrasser 10 » On avait alors étendu très loin la liberté laissée aux élèves de choisir entre les deux enseignements et on leur permettait de porter eur choix sur les diverses leçons de l'enseignement scientifique ou de 1 enseignement Littéraire. Et voici ce qui en résultait, au Lycée Impérial • chez tel professeur, certains élèves t ne venaient que le matin, les J;/T\d°3S' V" n°17' "ité-2- 1W ,eS liTrM de LaCroi* et de Rancœur, alors adoptés pour l'enseignement des mathémat., cf. Tableau hhtor. de Vin** £»'•'•.£. 874. VIE INTELLECTUELLE ENSEIGNEMENT MATHÉMATIQUE 249 Deux ans plus tard, M. Laborie no cachait pas son senlirnent au .Mi- nistre Il faut le dire, Monseigneur, qu'a produit, jusqu'à ce jour, l'introduction des mathématiques, dans les classes de seconde ou de Rhétorique ? Rien ou très peu de choses » l. Ces cours de mathématiques, dans les classes de lettres, ne purent, de 1830 à 1840, retrouver le regain de vogue, qu'on eût voulu leur donner. Au lieu de les appeler cours de mathématiques préparatoires, on finit même, dans un moment de franchise, par leur trouver leur véritable nom cours accessoires 2. Découvrir leur notn était plus facile que de fixer leur organisation. L'arrêté du 3 avril 1830 laissait, à Louis-le-Grand, l'Arithmétique en 3e ; il installait plus largement la Géométrie en seconde et il tentait de gagner la Rhétorique aux séductions de la Cosmographie. Ce fut, en grande partie, peine perdue. El, officiellement consulté par le Ministre, sur les effets de cet enseignement à Louis-le-Grand, le Proviseur ré- pondit Je ne vous cache pas que nos élèves, partagés entre tant d'études, qui se disputent leur goût et leur attention, ontehoisi, jusqu'à présent, celle qui leur paraissait la plus utile et la plus intéressante, se plaignant d'être gênés par les autres 3. » Les élèves avaient donc, sur la question, des idées très nett?s les uns étaient littéraires, les autres étaient scientifiques et ils jugeaient impossible d'être à la fois scien- tifiques et littéraires *. Le ministère n'en continua pas moins, et avec une persévérance louable, à chercher la bonne formule pour l'harmonieux mélange des sciences el des lettres. L'Arithmétique, la Géométrie, l'Algèbre, la Cos- mographie eurent, pendant quelques années, une existence nomade. La 3e perdit l'Arithmétique mais gagna la Géométrie ; la seconde, qui n'avait pu contracter avec la Géométrie une association durable, même en appelaut l'Algèbre au se?ours, reçut, en 1836, la Cosmographie, en cadeau, car la Cosmographie qui, dans la Rhétorique de Louis-le- Grand, — pas plus que dans celle de tous les autres collèges de Paris — n'avait produit aucun résultat », avait rompu son bail et se trou- vait sans domicile. Guizot, en octobre '836, ne désespérait pas de la sauver el il comptait beaucoup, pour l'aider, sur le cours préparatoire dp Géométrie, placé désormais en 3'. II se disait sans doute que h» Cos- raphie, hospitalisée en seconde, le jeudi matin, pourrait sentir la lâcheuse inlluence du congé de l'après-midi. Mais i! comptait, à Louis- 1. Arch. L. le Or., Ccrr. coll. II n° 1776; M. Laborie trouvait à cela deux causes c'était d'à bord, parce que la leçon [dj mathém.] venait .à la suite d'une classe d'Humanités ou de belles lettres; elle trouvait des esprits d*jà fati- yufiz et incapables d'une attention plus longue ; ensuite... certains, esprits ont, pour les sciences abstraites, un dégoût invincible...»— 2 Arch. L. le Or., Corr, achnin. VI, n 3934, etc. — 3. Arch. L. le Or., Corr. coll.. Il, n- 1906, 193-i et 2Ù0. — 4. Idem et A. nal. Fl7a a ' - •'. do mars 1S39. 25 0 l'organisation moderne le-Grand, sur les professeurs et le Proviseur, pour bien convaincre les élèves que l'assiduité était la première de leurs vertus '. En attendant, la Rhétorique fut libérée, pendant quelques mois, de toute étude mathématique 2 et nous nous persuadons qu'elle s'en con- sola. Coupable ou non, sa joie fut courte. On crut, en 1837 et 1838, se rapprocher de la solution rêvée. D'abord on fonda l'enseignement de la Géométrie sur la méthode des infiniments petits, qui réunit à l'avantage de simplifier les démonstralions celui de préparer au cours supérieur des sciences mathématiques 3 ». Ensuite, on fit cette distinc- tion fondamentale il y a, dans les classes de mathématiques, deux sortes d'élèves ceux qui aspirent aux Ecoles scientifiques et s'occupe- ront de sciences toute leur vie ; d'autre part, ceux qui font seulement des études classiques et ne s'occupent guère de sciences que pour ne pas ignorer ce qu'il importe à tous de connaître '* ». Aux premiers, il con- vient de donner un enseignement plus relevé et plus complet, aux se- conds suffit un enseignement plus simple. Les premiers sont, pour les sciences, l'élite; les seconds sont la masse. On sacrifie la masse, si on lui parle comme à l'élite 5. Et M. de Salvandy 6 reprochait aux profes- seurs de mathématiques d'avoir trop longtemps ignoré qu'ils n'avaient pas devant eux un auditoire capable de les suivre ; sous peine de parler dans le désert, il fallait donc revenir et souvent sur ce qu'on avait dit. L'essentiel n'élait pas d'aller vite, c'était, par une marche plus lente, de laisser aux intelligences paresseuses le loisir de regagner le temps perdu ». Puisqu'il y avait deux auditoires, il fallait bien qu'il y eût deux enseignements 7. Et le ministre estimait que jusqu'à lui il y avait eu un seul enseignement, et trop peu élémentaire. 11 voulait créer l'autre. L'arrêté du 28 septembre 1838 naquit de là s les mathématiques commencèrent en 4e, au lieu de commencer en 3°; en 4e, on mettrait deux heures par semaine pour enseigner les premiers éléments de l'Arith- métique ; deux heures, en 3e, pour expliquer le reste de l'Arithmétique et la Géométrie plane; en seconde, deux heures pour initier les élèves aux logarithmes et à la Géométrie des solides. Et enfin la Cosmogra- phie retournait en Rhétorique d'où elle avait émigré peu auparavant ; 1. Lettre du Rousselle au Proviseur, 31 mai 1833, arch. L. le Gr. , Corr. admin., V, n° 2475 ; 30 sept. 1836 cette année, à Louis-le Gr., comme dans tous les collèges de Paris, l'enseignement de la cosmographie, de l'avis des Inspecteurs généraux, n'a produit aucun résultat. A. nat. F1~h n° 22. — 22 oct. 1836, lettre de Guizot au Proviseur, arch. L. le Gr., Corr. adm., VI, n° 3246. — Lettres de Salvandy au Proviseur, ibid. n° 3496. — 2. Ibid. 3496. — 3. Arch. L. le Gr., Corr. admin., VI, n° 3489. — 4 et 5. Arch. ,L. le Gr., ibid. n 3934 ; lettre de Salvandy au — 6. Ministre de l'Instr. publ. du 15 avr. 1837 en mars 1839. — 7. Idem. — 8. Arch. L. le Gr., Corr. admin., VII, n» 4099. VIE INTELLECTUELLE '. ENSEIGNEMENT M ATII i\l ATlnl K 2 51 elle y avait droit, comme jadi=, à une leçon de 2 heures. C'est tout au plus si, en Rhétorique ou en 3e, les sciences pourraient à l'avenir, bénéfi- cier de temps en temps d'un jour de congé; mais rien de tel n'était au- torisé pour la 4e et la seconde. L'arrêté disait Quand la leçon d'arith- métique ou de géométrie, annexée à la classe de 4* et à celle de 2" tombera un jour férié, elle sera reportée à un autre jour de la même semaine, en remplacement d'une des classes de grammaire ou d'Huma- nités l. » It y avait bien un moyen d'assurer aux élèves de lettres cet enseigne- ment élémentaire, que souhaitait le ministre; et ce moyen c'était le pro- viseur de Louis-Le-Grand, M. Pierrot, qui le proposait, un mois tout juste avant la publication de l'arrêté de Salvandy. M. Pierrot était d'avis de confier, de la 69 à la Rhétorique, au professeur de Langues anciennes l'enseignement du calcul, de l'arithmétique, de la géométrie et de l'algèbre élémentaire. Quand les agrégés de Grammaire, ajou- tait M. Pierrot, seraient tenus, [au concours d'agrégation, de répondre sur l'arithmétique, les agrégés des hautes classes sur la Géométrie et les éléments d'Algèbre, croit-on que les concurrents manqueraient 2? » Sans doute. Mais, en 1838, les spécialistes, comme nous le verrons bientôt 3, avaient depuis longtemps gagné leur cause et on ne voulait plus compter que sur des mathématiciens pour enseigner des matbé- matiques. En réalité, en 1830 4, l'Inspection générale constatait, à Louis-!e- Grand, ce que nous appellerions aujourd'hui la faillite» de l'ensei- gnement scientifique, dans les classes de lettres. Excédés de besogne, les élèves, en 1839, — comme à la fin de l'Empire, comme en 1827, ou en 4830 et tout le long de la période que nous étudions, — avaient pris un parti auquel ils se tenaient ils se spécialisaient, comme leurs professeurs. Ils étaient scientifiques ou littéraires ; ils étaient l'un ou l'autre et n'ambitionnaient pas d'être l'un et l'autre. Leur fantaisie et leur goût, la nécessité de leur carrière et la volonté de leur famille les déterminaient. Et l'Inspection générale pouvait dire, en sortant de Louis-le-Grand Les résultats des différents systèmes, suivis jusqu'à présent, sont généralement faibles, puisque, à quelques exceptions près, on ne compte, dans chaque classe, qu'un très petit nombre de jeunes gens, pour lesquels les leçons scientifiques soient véritablement profi- tables '•. » Ces jeunes gens c'étaient ceux qui songeaient aux grandes Ecoles de l'Etat. Kl, pour y entrer plus sûrement, nous savons qu'il leur arrivait, à Louis-le-Grand, de sauter par dessus la seconde ou la lUiélorique et 1. Idem, art. 5. — 2. Aroh. nat. l'i'.ii n° Al rapport annuel du Pro- viseur, 28 août 1838. — 3. V. ci-dessous, p. 269. — 4. A. nat. FIT" n° 40; rapport de mars 1839. — 5. Idem. 252 L ORGANISATION MODERNE même la 3e ' ils pénétraient ainsi plus tût dans l'une des divisions de mathématiques élémentaires, veslihule obligé des mathématiques spé- ciales. Ces deux classes existaient à Louis-le-Grand depuis 1810-1811. Elles étaient florissantes et chacune comptait parfois une centaine d'élèves 2 ; des conférences 3, des interrogations *, dont nous aurons, le moment venu, à préciser le mécanisme et la portée s, tenaient chez toute cette jeunesse, le zèle scientifique en haleine. Et il arriva aux Ins- pecteurs de sortir de ces classes pleins d'une admiration enthousiaste pour les professeurs et les élèves. Ainsi, MM. Bourdon, Cardaillac et Naudet, en avril et mars 1837. Ils écrivirent Les résultats de notre inspection prouvent que, sous le rapport des études scientifiques, le collège de Louis-le-Grand ne le cède point aux autres collèges de Paris c. ». 11 fallait bien conclure cependant, en 1840, que l'effort continué de- puis 1814 pour assurera tous, dans ce collège, une culture générale scientifique et littéraire, aboutissait à un échec. La méthode que nous avons qualifiée dualiste et progressive » n'avait pu parvenir à être égalitaire. Il y avait, malgré tout, à Loiis-le-Graud, deux disciplines, l'une scientifique, l'autre littéraire. Et les élèves, en bons utilitaires que déjà ils savaient être, se refusaient au cumul et choisissaient l'une ou choisissaient l'autre. § 3. — De 1840 à 1863 A une période pédagogique qui avait peut-être trop manqué de har- diesse, il était dans l'ordre qu'une autre succédât, qui n'en manquât peut-être pas assez. Avec Cousin, eu 1840, avec Forloul en 1852, il sembla, dans deux sens d'ailleurs divers, qu'on se plût à tendre à l'excès l'esprit de système. 1. Le proviseur M. de Laborie, écrivait, le 17 octob. 1828, au ministre de l'I. P. Une foule d'élèves, qui fe destinent aux Ecoles spéciales, sortent des classes de 3é et de 4e... » Arch. L. le Gr. Corr. coll., II, n° 1562 ; autre lettre, du même au même, le 28 nov. 1828 • Les élèves qui se destinent aux Ecoles militaires terminent rarement leur cours d'études littéraires. Les uns vont jusqu'en 3e, les autres traînent jusqu'en 2e, puis se livrent exclusivement à l'étude des sciences. » lbid. n° 1605. — Le 20 août 1840, le proviseur Pierrot écrit au ministre beaucoup d'élèves passent de 3e ou de 2e en mathématiques. A. nat. F17h 78486 n» 15. — 2. 75 élèves, en math, spéc, 1832-33. A. nat. FHh 78485 n° 88 ; 80 élèves en math. spéc. 1834-35, A. nat. FHh 78486 n» S ; 96 élèves 25 sept. 1835, ib. n» 19 ; 112 le 30 sept. 1836, ib. n» 22 ; 90, 1" trimestre de 1838, en spéciales, et 36, en élémentaires, FH 3336; en 1839-40, 90 en math, spéc, chez M. Richard et 20 seulement, chez M. Guibert ; 90 en math élément., A. nat. F17h n» 29.— 3. En 1837, insp. génér., A. nat. F Ha 78486 n° Idem. 5. V. ci-dessous, Liv. III, Chap. îv. — 6. Insp. génér. de MM. Bourdon, Cardaillac et Naudet, Arch. nat. F^h n° 34. VIE INTELLECTUELLE ENSEIGNEMENT UÂTHEHAT1QUE 253 Cousin, qui eut le portefeuille de l'Instruction publique, dans le court ministère Thiers Ier mars-29 octobre 1840, essaya d'une réforme radi- cale. Il était très frappé de voir que les études scienlifiques, rattachées aux classes de grammaire ou d'Humanités, les alourdissaient sans profit pour les sciences ni pour les lettres; il pensait que l'éparpillement de cet enseignement scientifique nuisait à son succès ; mais que sa con- centration, au moment où l'esprit a déjà pris assez de vigueur pour comprendre tout ce que les mathématiques ont de puissance logique et abstraite, serait seule capable d'en assurer le profit l. Et il lui paraissait bon de le réserver pour la classe de pbilosopbie, parce qu'alors surtout l'intelligence, formée par les humanités, est devenue capable de mettre dans ses pensées plus de suite et de force et, dans ses réflexions, plus de profondeur. Par l'arrêté du 25 août 1840, il supprima donc tout l'en seignement scientifique annexé aux classes de grammaire et de lettres ; du calcul en 7e, soit ; après quoi, plus rien de l'enseignement mathéma- tique, avant la philosophie. En philosophie, deux années d'études ; dans la première, 12 heures de sciences, sur 22 heures de classes ; dans la seconde, 20 heures de classes. toutes consacrées aux sciences. Pourgagner, au sommet des études, la seconde année qu'il ajoutait à la Philosophie- Mathématiques, il abrégeait les classes élémentaires et n'admettait que la 7° 2. 11 estimait réaliser ainsi l'enseignement normal 3, et rendre plus intensives la culture littéraire et la culture scientifique. Ce plan nou- veau, expliquait-il préviendra la confusion des idées, la dispersion et l'affaiblissement de l'attention ; car le meilleur système d'étude, ne consiste pas à enseigner le plus de choses à la fois, mais à enseigner chacune d'elles en son temps... en l'appropriant à chaque âge. Accu- muler des enseignements dissemblables, c'est fatiguer et énerver l'es- prit, ce n'est pas le féconder » 4. Les familles ne voulurent pas voir ce que le programme cousinien pouvait avoir de séduisant ; elles se récrièrent 5 seulement contre son absolutisme et ses chimères. Comment, sans préparation antérieure, utilement étudier, en une ou deux années, toutes les matières de sciences réunies en philosophie » ? Invité par la clameur de l'opinion publique à tempérer l'intransi- geance de son système, Cousin le fit presqu'aussitùt et avec une adresse qui pouvait paraître ingénieuse, mais qui contenait le germe de la ruine prochaine de sa réforme. Il rappela qu'il venait, par une circulaire, 1. Lettre circulaire] de Victor Cousin au Proviseur de Louis-le-Grand, 27 1840, arc'u. L. le Gi\, Corr. admin., VII, n° 4363. — 2 Idem et n°* 4361, — 3. Idem. — Cf. supra p. 246, n. 2 c'était, en somme, ce qu'aurait voulu l'arrêté du 30 sept. 1315. — 4. Idem. — 5. Lettre de M. Cayx au proviseur de Louis-Ie-Gr., le 28 sept. 1841, arch. L. le Gr.. Corr. admin., VII, n° . Des réclamations nombreuses s'élèvent au sujet du règlement d'études du 25 août 1840... » 254 L ORGANISATION MODERNE d'autoriser des conférences de mathématiques, que les élèves de 48, de 3e, de 2e et de Rhétorique avaient la faculté de suivre '. Ces conférences furent placées en dehors des heures ordinaires de classes, de telle façon que le vœu des familles pût être suivi, sans dommage pour les études littéraires ». Les élèves, qui craignaient d'arriver à la philosophie trop novices en mathématiques, pouvaient fréquenter ces conférences. Et ils y seraient admis à partir de la 4", sans distinction de classe et selon le degré de leur instruction en mathématiques» 2. C'était 2bis réa- liser le vœu des Inspecteurs de 1819. Une seule objection ces confé- rences étaient prises sur les heures d'étude et ajoutaient encore à la longue liste des heures de classe. Quand Villemain reprit le ministère de l'Instruction publique 29 dé- cembre 1840, où Cousin venait de le remplacer quelques mois, il se garda bien de détruire le nouveau plan d'études. 11 en admettait le prin- cipe et il pensa qu'il était possible, en le complétant, d'en mieux assu- rer l'application 3. Les conférences organisées l'année précédente devin- rent deux cours fixes, l'un d'arithmétique et l'autre de géométrie; ces conférences étaient facultatives et ces cours devinrent réguliers; ces conférences étaient prises sur les heures d'étude, ces cours furent pris sur les heures dp classe et placés le jeudi matin. Comme aux confé- rences, chacun y était inscrit, non pas d'après la classe littéraire, dont il faisait partie, mais suivant le degré de ses connaissances scientifiques constatées par un examen. Un dernier reste de l'ancienne liberté, laissée à chacun de suivre ou non les conférences, demeurait cependant, car l'arrêté de Villemain disait Il y aura étude, le jeudi matin, pour ceux des élèves qui, d'après le vœu de leurs parents, ne suivraient ni le cours préparatoire d'arithmétique, ni le cours préparatoire de géomé- trie 4 » . Pour mieux sauvegarder ce qu'avait vouluCousin, Villemain crut pos- sible de revenir à ce qu'avait recommandé Salvandy un enseignement scientifique, dont le principal souci serait de s'adapter à la force des classes de lettres. Dans sa lettre au Proviseur de Louis-le-Grand, Ville- main disait, en propres termes L'enseignement accessoire de mathé- matiques et de géométrie, qui a une tendance à s'élever et à s'étendre, au seul profit de quelques élèves d'élite, doit, au contraire, rester tou- jours simple, facile et à là portée du plus grand nombre, de sorte que le mérite du professeur se signale, non par la force éminente de quelques 1. Lettres de V. Cousin au proviseur de Louis-le Gr., le 9 sept. 1840 et le 28 oct. 1840 ; arch. L. le Gr., Corr. admin., VII, n 4364 et 4423. — 2. Idem. — 2bis. V. ci-dessus, p. 247 et ss. — 3. Lettre de M. Cayx au provi- seur de Louis-le-Gr., le 28 sept. 1841 M. le ministre [Villemain] a cru... de- voir maintenir intact ce règlement, dont il approuve le principe, et attendre que les résultats de l'exécution indiquassent, s'il y avait lieu de modifier quelques parties. » Areh. L. le Gr., Corr. admin. VII, n 4663. — 4. Arrêté du 14 sept. 1841 ; arch. L. le Gr., Corr. admin. VII, u° 4663. VIE INTELLECTUELLE \ ENSEIGNEMENT MATHEMATIQUE 2 55 sujets rares, mais par l'instruction moyenne, qui se trouve répandue par toute la classe. » Et Villemain poursuivait Cet enseignement, raisonné, mais dégagé de toute subtilité, doit être réduit à des notions justes, à des démonstrations claires et faciles et toujours soutenu et, pour ainsi dire, vivifié par des applications choisies, qui en montrent l'utilité. Donné dans cet esprit, en suivant cette méthode, dont le livre de Bezout offre un si bon modèle, il ira naturellement à l'intelligence de tous les élèves. [Dès lors],... loin de nuire à l'étude des lettres, il ne peut que la fortifier, parce que cette logique pratique, qui vient de la Géométrie, dispose à mieux sentir celle qui est cachée dans l'arrange- ment des mots et qui préside en secret à nos meilleures compositions x ». En réalité, les idées de Salvandy, bien loin de fortifier celles de Cou- sin, les contredisaient. 11 fallait choisir ou bien élever Jes élèves jus- qu'à l'enseignement des mathématiques, en le leur donnant seulement quand ils seraient devenus capables de le comprendre ; ou bien abaisser humblement cet enseignement à leur taille et l'adapter aux phases suc- cessives de leur développement. Cousin aurait voulu abolir les mathé- matiques accessoires aux lettres, et il ne concevait plus les mathéma- tiques réduites à la portion congrue, dans les classes de lettres; les mathématiques étaient pour lui la conclusion des éludes classiques et leur couronnement. Salvandy ressuscitait les élèves de lettres-mathéma- tiques. Cousin ne voyait qu'une catégorie d'élèves, purs humanisies jusqu'en Rhétorique, purs scientifiques ensuite. Salvandy, de nouveau, groupait les élèves en deux sections les humanisies métissés de scien- tifiques, les candidats aux grandes Ecoles. Et voici, quand Salvandy fut revenu au pouvoir, ce que finit par reconnaître le statut du 5 mars 1847 2. L'étude des sciences, dans la mesure même qui convient à la majorité des élèves, devait commencer assez tôt et ri être point interrompue. Les conférences d'arithmétique et de géométrie, annexées aux classes de 3e et de 2% avaient besoin d'être dé- veloppées et étendues. Contre le principe, posé par Cousin, on en appelait à l'expérience. On restituait à la 4e l'étude des sciences et l'on stipulait que chaque classe, à partir de la 4e, aurait sa leçon régulière de mathématiques, obliyatoire comme toutes les parties de V enseignement classique ». Au reste, lesélèves de Philosophie, qui n'aspiraient point aux Ecoles du Gouvernement, continueraient de recevoir les trois leçons de mathématiques, fixées par le règlement du 25 août 1840 3. Cette toute petite concession à la réforme de 1840 ne masquait pas ce fait, désor- mais acquis l'effondrement de la méthode cousinienne ; en consé- quence, on restaurait la méthode dualiste », suivie de 1814 à 1840. Pourquoi fallut il qu'à Louis-le-Grand les idées de M. de Salvandy ou de Villemain n'eussent pas plus de succès que les idées de Cousin. 1. Arch. L, le Gr., Corv. admin. VII, n° 4745. Sur ce livre d'Etienne Bezout. v. supra, p. ÏAô. — 2. Arch. nat. F1~h — 3. Idem. 25 G L ORGANISATION MODERNE En 3% en 2e, en Rhétorique, l'enseignement scientifique demeurait trop élevé il était, remarqua l'Inspection de 1848 l, beaucoup trop théo- rique, pour intéresser déjeunes esprits ; el c'est là qu'un proviseur ou un censeur compétent pourraient utilement intervenir. Les professeurs qui enseignent les sciences dans l'Université, puisent, pour la plupart, à l'Ecole Normale, le goût des abstractions pures. Peu d'entre eux, dans leur carrière universitaire, ont l'occasion de se trouver en contact avec la pratique et d'enrichir leur esprit d'une foule de notions utiles, emprun- tées aux sciences appliquées ; transportées dans leur enseignement, pour éclairer la théorie, elles lui donneraient, à coup sûr, l'intérêt qui lui manque et rattacheraient aux éludes mathématiques un grand nom- bre de jeunes esprits, que la sécheresse systématique de l'enseignement ordinaire en éloigne » -. Le temps consacré aux sciences était, pour elles, une autre infério- rité une leçon de deux heures, chaque semaine, était trop lente à venir et trop longue à finir. Au lieu de 2 heures, tous les 8 jours, il eût fallu une heure, fous les 3 ou 4 jours. Au lendemain des journées de 1848, le Prince-Président et M. de Fortoul crurent bon de faire ce que l'on considéra comme un coup d'Etat pédagogique. Le 10 avril 1852, un décret institua, pour tous les élèves, un enseignement grammatical unique, jusqu'à la fin delà qua- trième ; au seuil de la troisième, la route se divisait en deux voies, l'une conduisait aux Humanités, l'autre conduisait aux Sciences. Et chaque élève devait choisir ou la première ou la seconde. Ce moment était déci- sif pour l'enfant à ce carrefour où bifurquaient les deux chemins, il devait, du haut de ses 13 ou 14 ans, juger si sa vocation le poussait aux Humanités ou aux Sciences. Pour lui et les siens, cette bifurcation était le point critique et ce nom de bifurcation servit à désigner tout le système. C'était, dans une certaine mesure, revenir aux idées de 1801 et de 1802 3 où, au Collège de Paris, c'est-à-dire à Louis-Ie-Grand, l'écolier obliquait à 12 ou 13 ans soit vers les sciences, soit vers les lettres. C'était appliquer ce qu'un ancien proviseurde Louis-le-Grand, M. Labo- rie, réclamait expressément, un quart de siècle plus tôt*. C'était recon- naître, avec Cousin, que l'enseignement des sciences doit suivre et non pas côtoyer l'enseignement grammatical; mais Cousin voulait dava> 1, 2. A. nat. FHii n° 74. — 3. V. ci-dessus, p. 241-242. — 4. Dans une lettre au ministre de l'înstr. ;ublique, le 6 juillet 1829, M. Laborie disait Quelle que soit la carrière future d'un enfant, il le sait rarement, en entrant au collège el les parents ne le savent guère mieux que lui. Il est donc nécessaire de soumettre tous les eufans à une même épreuve, à cet égard... à la fin de la classe de 4e, cette épreuve doit être terminée. Alors chaque élève peut avoir le sentiment de sa vocation et de sa capacité. Alors doit commencer la sépara- tion » entre°les littéraires et le3 scientifiques. Arch. L. le Gr. Corr. coll., II, n° 1778. VIE INTELLECTUELLE MATHEMATIQUE 25 7 tage piiisqu 'après l'enseignement grammatical et avant l'enseignement scientifique, il entendait plaGer tout l'enseignement litttéraire '. Enfin la bifurcation ne supprimait pas, à partir de la 3e, les lettres dans les classes de sciences ; et, à ce point de vue, elle empruntait à la méthode dualiste » une partie de ses idées. La bifurcation était donc moins nouvelle et moins originale qu'on ne l'a dit; moins révolutionnaire aussi. Elle empruntait les éléments de sa mixture à toutes les méthodes antérieures. Le dosage seul lui appartenait. Nous devons, ici, nous borner à dire quelles fortunes lui furent réservées à Louis-le-Grand. Six mois à peine après le décret du 10 avril, l'Inspecteur général Dutrey était venu se rendre compte au lycée même de l'acceuil ménagé à la réforme. Et il lui sembla que cet accueil n'était peut-être pas sans quelque fraîcheur. Il écrivit Dans la section des sciences, les Professeurs montrent, en général, avec de la confiance et d'excellentes dispositions, l'aptitude désirable pour le succès du nouvel enseignement. Toutefois, de nos entretiens avec eux, il résulte, pour nous, que leur zèle a besoin d'être dirigé et, sur beaucoup de points, éclairé; une surveillance active est nécessaire, pour prévenir des dévia- tions, qui se changeraient bientôt en difficultés et compromettraient l'ensemble du nouveau système 3. » Deux mois et demi plus tard, l'Inspecteur d'Académie Charpentier était, ce semble, plus optimiste que précis 4 Les classes où se trouvent réunis les élèves des Lettres et des Sciences ont dû surtout attirer mon attention, J'y vois déjà d'heureux résultats. Si les élèves d"S Lettres s'y emparent, en général, sur les facultés littéraires, d'un avantage naturel, les élèves des Sciences leur disputent cependant les premiers rangs, quelquefois ; et, d'un autre côté, on rencontre, dans les Lellress des élèves qui obtiennent dans les Sciences des succès soutenus. » On ne pouvait se payer longtemps d'euphémismes ; en 1858 les Ins- pecteurs à Louis-le-Grand virent les choses de près et ils eurent le courage de parler *. La bifurcation s'opérait au lycée par le choix des parents, qui est ordinairement celui des élèves » ; ce choix s'éclai- rait, au besoin, des conseils de l'Administration. La section littéraire avait toutes les faveurs parce que ceux qui la composaient avaient tous les succès. En face d'elle, la section scientifique, deux ou trois fois moins nombreuse, n'avait, pour elle, sauf exceptions, ni la qualité ni la quan- tité. On allait môme, à l'occasion, jusqu'à dire celte section là ne compte 1. V. ci-dessus, p. 252-3, et ss. — Cf. Projet d'un lycée de langues vivantes, et qui iut prof de math. à L le Gr Appendice —2. V. ci- de3sus, p. 240. — 3 Rapport du 13 octob. 1852 au ministre de l'instr publ. A. nat. FHh 214.— 4 Rapport au V. -recteur, du 30 déc. 1852. ibid. n 216. — 5. A. nat. F'"" n° 3bis ; le rapport, daté du 5 avril 1S5S, est si^né Alexandre, inspecteur général. M. Alexandre avait été professeur de rhétorique à Louis-le-Grand, avant d'aller à Fontanes [Condorcet] où il fut professeur puis proviseur. V. notre livre sur L'.s Ecoles, lycées, collèges, 1913, p. 137, n. 1. 17 25 8 L ORGANISATION MODERNE pas. Non pas que les élèves, qui renonçaient au Grec et entraient dans la section scientifique, fussent des incapables ou des amis du moindre effort ; la vérité était tout autre les parents qui destinaient aux sciences leurs enfants les mettaient, de préférence, à Saint-Louis ou à Sainte-Barbe ' ». Les classes particulières aux deux sections isolées avaient générale- ment lieu le matin ; les classes communes aux deux sections réunies avaient lieu généralement l'après-midi 2. Dans les diverses divisions de 3e, le meilleur élément c'étaient les futurs candidats aux Ecoles du Gouvernement ; le reste était le rebut des classes précédentes ce rebut promenait son insuffisance, de la grammaire dans les sciences et, des sciences, dans les clasges de lettres, sans l'amoindrir en chemin. Quand le 1er des scientifiques se pla- çait dans le premier quart ou môme la première moitié, il se dis- tinguait 3. En seconde, les résultats étaient pareils ; les scientifiques étaient peu nombreux, faibles, bons enfants, et sans influence sur leurs cama- rades littéraires. Les meilleurs aspiraient aux Ecoles ou à la Médecine; les autres n'aspiraient à rien qu'aux vacances. Ils alourdissement un peu l'enseignement, en augmentant le groupe des traînards. Pourtant, depuis la bifurcation, on constatait, dans toutes les divisions de seconde, un plus grand nombre d\ lèves de force moyenne en général, notait l'Inspection, on peut dire que tout le nouveau système d'enseigner a été favorable à la niasse, mais peut-être un peu aux dépens des forts 4 » . La Rhétorique se chargeait de tenir les promesses des deux classes antérieures d'Humanités 30 élèves, dans la section des sciences 65 élèves, dan3 la section des lettres. Sur 30 scientifiques, 14 se des- tinaient aux Ecoles. Dans la section littéraire, 10 étaient vétérans dont 6 se destinaient à l'Ecole Normale, la plupart songeaient à faire plus tard du droit et quelques-uns, qui eussent réjoui le cœur de Cousin, voulaient, leur éducation d'humanistes achevée, faire des sciences. Mais la hantise du baccalauréat plutôt que de la culture désintéressée assiégeait presque tous les esprits. L'efficacité de l'enseigniment commun était passable » pour les littéraires et s très médiocre » pour les scientifiques, dont un seul se plaçait dans les 20 premiers d'une classe de 95 élèves 5. La conclusion des Inspecteurs était très nette la réunion des deux catégories d'élèves avait abaissé les études ; les scientifiques n'y gagnaient rien et les littéraires y perdaient ils piétinaient, au lieu d'avancer. La culture générale des esprits avait baissé. La bifurcation 1 et 2. Rapport cité du 5 avril 1853. — Cf. Lamarre, Hist. Sainte-Barbe, t. IV, p. 28 ; Ern. Bersot, Questions actuelles, p. 4 et suiv. — 3 et 4. Idem. — 5. Idem. VIE INTELLECTUELLE ENSEIGNEMENT MATHÉMATIQUE 25 9 ne donnant pas ce qu'on attendait d'elle, on désirait généralement, dans l'intérêt de tous, un enseignement distinct » pour les littéraires et pour les scientifiques plus relevé, pour les premiers, et mieux approprié au développement intellectuel des seconds l. Et cette conclusion était d'autant plus grave qu'on la formulait à Louis-le-Grand, le lycée de Paris, disait l'Inspection de 1858-59, où l'aspect général des classes donne l'idée du travail le plus sérieux * » ; celui auquel, en 1860, elle trouvait juste d'accorder des éloges, sans restriction aucune3 ». Nul doute, en conséquence le fonctionnement de la bifurcation à Louis-le-Grand a contribué, pour une large part, à la suppression du système. Cette suppression fut graduelle le 2 sept. 18b3, M. Duruy retarda d'un an l'avènement des sciences ; puis, en 1864, de 2 ans. On ne bifurquait plus, à la rentrée de 1863, qu'après la 3* et, à la rentrée de 1864, qu'après la seconde. Le 4 décembre 1864, la bifurcation reçut enfin le coup de grâce ; et l'on s'aperçut que c'était une ruine qui tombait. N'aurait-on pas pu, de ce système fameux, tirer un parti meilleur ? Quelques-uns le pensent et, parmi eux, il en est qui ont consacré leur vie à bien servir l'Université 4. D'autres estiment qu'en durant douze ans la bifurcation a eu le temps de faire beaucoup de mal. On lui prête des arrière-pensées politiques et on l'accuse d'avoir désorganisé sciem- ment l'Enseignement de l'Etat, pour le seul profit de l'Enseignement libre. Il est très certain que la bifurcation a eu presque constamment une mauvaise presse. Dupin ne disait-il pas La bifurcation me fait l'effet d'un homme qui soutiendrait qu'il faut toucher, pour y voir plus clair » ? En réalité, M. Duruy abandonna d'autant plus volontiers la bifurca- tion qu'il comptait, nous le verrons6, ressusciter l'Enseignement spécial; il rêvait de pouvoir donner ainsi forme et vigueur aux quelques élé- ments d'avenir que la bifurcation des éludes pouvait, malgré tout, contenir en elle. Ce n'était pas à la méthode cousinienne qu'il pré- tendait revenir ; il ouvrait toute grande la porte au système dualiste, dont les imperfections étaient périodiquement oubliées. De 18i0à 1863, c'était donc, au total, sur ses élèves de mathéma- tiqnes élémentaires et spéciales que l'enseignement scientifique à Louis- le Grand pouvait seulement compter sans attendre la fin de leur Rhé- torique, les élèves s'y consacraient parfois à l'issue de la 2', de la 3e et même de la 4e. Pour eux. on sentait la nécessité de faire beaucoup à Louis-le-Grand, on voulait donner aux candidats aux grandes Ecoles 1. Idem. — 2. A .nat. F17h n° 6 — 3. Ibidem, n° 12. — 4. C'est ce qu'a bien voulu nous écrire, le 27 déc 1J10, M. Staub, proviseur honoraire du lycée Bulfon, 49 ; rapport de l'Inspect. géuérale, le 24 mars 1845. — 5. Rapport de l'Insp. gén., 19 mars 1842, ibid. n 39. — 6. idem. — 7. Rapport de l'Insp. gén., 26 mars 1846, A. n. FHh n° 54. — 8. A. nat. F'7h n 101-116. — 9. Idem. — 10. 31 juillet 1846, A. nat. F17n n» 57. — 10bis. Rapport au ministre, 30 juil. 1843 ; A. nat. F17n 78487, n" 43. — 11. A. nat. fth a» 74. V1G INTELLECTUELLE ENSEIGNEMENT MATHEMATIQUE 261 chose à désirer, soit quant au choix des professeurs, soit quant aux succès des élèves.. Mais, si l'on envisage l'enseignement général des sciences, pour la majorité des élèves qui traversent le collège, on est obligé de convenir qn'il est dans un état peu florissant. » L'impression, en 1»63, demeurait sensiblement pareille '. Observation plus inquiétante la classe de mathématiques spéciales pouvait être, comme en 1854, remarquablement forte », sans que le lycée fut rassuré sur son avenir scientifique. Car cet éclat lui venait surtout du dehors des externes et des élèves des Institutions plutôt que des élèves grandis dans la maison. Les fleurs risquaien! d'être éphémères et la plante semblait sans racines1 ». En 1840. il était permis encore de se faire illusion sur le véritable ca- radère du lycée et l'insp clion écrivait L'enseignement scientifique au collège Louis-le-Grand peut marcher de pair avec celui du collège Saint-Louis3 ». Vais, en 18G3, le caractère de l'enseignement ne trom- pait plus personne et, du conflit des méthodes opposées, se dégageait enfin, pour Louis-le-Grand, celte vérité d'être un lycée plutôt litté- raire que scientifique 4 t. § i. — Depuis 18e, 3. La période pédagogique ouverte en 1863 n'a pas eu, dans l'enseigne- ment cla>sique et jusqu'en 1902, d'initiatives vraiment nouvelles. Elle n'a pas cherché, avant la récente organisation des cycles », autre chose que la mise au point des tentatives anciennes. On n'osa plus, comme Cousin, supprimer les mathématiques dans les classes de grammaire et de lettres et on n'osa plus, comme Fortoul, ins- taller une section scientifique, à l'issue des classes de grammaire. On préféra replacer, suivant la méthode dualiste », l'enseignement des Mathématiques à côté de l'enseignement littéraire ; mais on subordonna le premierau second. On permitauxscientifiquesd'abandonner les lettres, dès la fin de la 3", pour entrer dans une nouvelle classe de mathé- matiques, piéalabieaux mathématiques élémentaires, qui, ellet-mêmes, précédaient les mathématiques spéciales. Ce fut la classe de mathéma- tiques préparatoires, qui dura de 1863 à octobre 1893. Un élève qui achevait sa 3e pouvait, en deux années, l'une en préparatoires > et l'autre en élémentaires », arriver au Baccalauréat es sciences ; mais il lui fallait trois années pour arriver au Baccalauréat es-lettres complet, l'une en 2e, l'autre en Rhétorique, l'autre en Philosophie. Si l'on bor- nait ses ambitions au diplôme de bachelier, on gagnait donc, à passer 1. A. nat pila i.° 17 ; 12 avr. 1863. — 2. A. nat. Plli u° 223; Insp. gén. de 1853-1804. — 3. 26 mars 1846, A. nat. plis 78487, B 54. — 4. 12 avril 1863, A. nat. Fi.. n° 17. 2 62 L ORGANISATION MODERNE par les sciences, une année d'études ; et, si l'on eongeait à entrer dans une Ecole de l'Etat, on avait une année supplémentaire de préparation. Les mathématiques, sanctionnées par le baccalauréat, n'étaient plus désormais sacrifiées aux lettres et c'était là peut-être, avec l'invasion des bacheliers, la plus grande nouveauté du système. Que fut à Louis-Ie-Grand l'enseignement des mathématiques dans las classes de lettres et hors de ces classes, de 1863-4 à 1902 ? Dans les classes de lettres, on crut devoir résister à l'hégémonie scientifique menaçante. L'Inspection de mars 1868 disait avec une rude franchise ' Les études scientifiques ne sont pas en honneur, à Louis- le-Grand, dans la division littéraire. On accuse l'AdminisIration de favoriser les exigences des professeurs de lettres, qui se concertent pour laisser le moins de temps possible aux sciences et qui en font même, dit-on, ouvertement la critique. 11 est certain que le travail des élèves est extrêmement faible et que, sur des divisions de 50 élèves, on a peine à en trouver une dizaine qui tirent quelque profit des leçons du professeur. Les heures des classes de mathématiques sont considérées comme un temps de récréation par l'immense majorité des élèves ». L'année d'après, le pessimisme des Inspecteurs s'accroissait encore3 Les classes de mathématiques, dans la division littéraire, sont, disaient-ils, extrêmement languissantes ». Et ils précisaient En Phi- losophie, comme en Rhétorique ou en seconde et en 3e, les professeurs sont aux prises avec des difficultés et des obstacles, qui ne viennent pas seulement des élèves. On professe tout haut, dans toutes les classes de lettres, que les heures données à l'étude des sciences sont perdues pour les littéraires et on les en détourne par tous les moyens possibles». Les conséquences étaient fatales L'enseignement ne profite dans chaque classe, qu'à 4 ou 5 élèves, doués d'aptitudes spéciales mais il est une cause d'ennui et de perte de temps, pour tous les autres ». Et l'Inspection, élevant la question à sa véritable hauteur, ne pouvait s'empêcher de conclure Affligeant contraste ! Au moment où la société tout entière se montre plus avide de sciences que jamais, où toutes les classes les réclament avec ardeur, on veut que les élèves appelés littéraires emportent, de nos lycées, non seulement une igno- rance, en matière scientifique, qui ferait tristement rougir les élèves des plus humbles écoles, mais encore un superbe mépris, pour toute cette branche d'études 3 ». Le curieux c'est que cette indifférence des littéraires pour lès mathé- matiques était masquée par un faux zèle ainsi, les Rhétoriciens avaient, en dépit des règlements parus en 1863, des conférences supplémentaires. Us se refusaient à consacrer sérieusement à la géométrie et à la cosmo- 1. A. nat. FHh liasses Louis-le-Gr., B, n° 49. — 2. A. nat. FHh liasse C, L. le Gr., n°42. — 3. Idem. VIE INTELLECT! ELLE ENSEIGNEMENT MATHEMATIQUE 2 63 graphie les deux heures hebdomadaires, imposées par le* programmes, et leur proviseur, M. Didier, leur infligeait encore une conférence non sanctionnée par le ministère1. Avec grande raison l'Inspection générale de 1869 demandait, pour Louis-Ie-Grand, la réforme déjà proposée en 1 8 1 9 2 et commencée en 184,' rendre le mouvement annuel d'ascension, dans les classes littéraires, indépendant de l'enseignement scientifique. Il serait par- tagé en 4 cours et nul ne serait admis à passer dans le second cour6 s'il n'avait été déclaré par le professeur, dan* un rapporl signé, capable de suivre l'enseignement de ce cours ; ». Là, sans doute, on aurait pu trouver le salut, si l'on avait écarlé les complications d'horaire et les objections tirées de Tàge trop différent parfois des élèves, que leurs connaissances scientifiques égales auraient rapprochés. Au sortir de l'année terrible », pendant laquelle deux professeurs, MM. Pichet et Frin, avaient, aidés de deux maîtres, réussi à assurer l'enseignement des mathématiques 5, brusquement on put voir, dans le classes de lettres, une renaissance scientifique. L'Inspection, en avril 1873, quand eile sortit des dusses de lettres, se déclara satisfaite des résultats de l'enseignement mathématique ». Elle ajouta a La Philo- sophie et même la Rhétorique contiennent, dans la P9 série, des élèves remarquables et, dans l'ensemble, un degré de force qui est rarement atteint ces classes G >. Les professeurs de Louis-le-Grand, à cette même époque, ne cher- chaient guère, cependant, à dissimuler l'insuffisance des résullats atteints7. En 4* et en 3°, les élèves ne comprenaient pas les théories de l'arithmétique et, seul, le calcul était à leur portée. Au reste, la solution des problèmes paraissait suffire pour exercer la sagacité de la classe et l'habituer au raisonnement. Les Professeurs demandaient donc de supprimer, avant la classe de Philosophie, toute théorie en arithmé- tique et en algèbre 8. Pour la géométrie, ils étaient d'avis de donner seulement, en 3e, les énoncés des principaux théorèmes, d'en expliquer le sens et de les vé- rifier par des constructions grapbiques. En 1871-2, cette méthode venait de donner, pour la 4e, d'excellents résultats ; les élèves taisaient très volontiers les exercices pratiques auxquels on les entraînait Et l'on exprimait le vœu de reporter en seconde et en Rhétorique toutes les théories géométriques '. 1. Rapports de l'Insp. jrén. du 22 mars 1868, A. nat. F'"" 86471, liasses L le Gr., B n° 49; et 1869, ibid. n» 42 — 2. V. ci-dessus, — 3. V. ci- dessus, p. 252 et ss. — 4 A. nat. F17H 86,471, liasse C, L. le Gr. n° 42. — 5. Le 22 févr. 1871, A. nat. Fl7n 85 471, liasBe L. le Gr , D, n 7. — 6. Inep. gén. de MM Bouillier, Jacquinet et Faye 7 avr. lS^o, A. nat. F'~n ^ . -1 ~ l . liasses L. le Gr., F n° 2. — 7. Arch. L le r., Assemblées génér. d -s professeurs du Jycée registres des procès-verbaux, 1872 et Miiv. — 8. Ibid., séance du 2 dé©. 1872. - 9. Idem. 26 4 L ORGANISATION MODERNE De môme ils estimaient qu'on perdait son temps à vouloir, en 3e, faire du raisonnement algébrique ; le mécanisme du calcul et la solution des équations du premier degré devaient suffire à cette classe *. Enfin ils jugeaient opportun de reporter la Cosmographie en Philo- sophie qui deviendrait parmi les classes de lettres, celle où l'on étudie- rait le plus sérieusement les mathématiques2. Jusqu à la fin de 1872-73, les élèves de lettres n'avaient aucun livre scientifique entre leurs mains, ni arithmétique, ni géométrie. Et un temps précieux était perdu à dicter aux élèves toutes les démonstra- tions. Beaucoup écrivaient sans bien comprendre ». D'accord avec l'Inspection, on décida de donner enfin des livres imprimés aux élèves8. Quand il fut question de scinder le baccalauréat littéraire, les pro- fesseurs de Louisle-Grand volèrent, à une grande majorité, 1 exclu- sion de tout élément scientifique de la première partie de l'examen * ». Et CHite exclusion fut, en effet, acceptée par le Ministère. En 1881-82, le Ministère voulut encore avoir, sur les nouveaux pro- grammes et les réformes à introduire dans l'enseignement des sciences, J'avis des professeurs. Sur 26 heures d'études hebdomadaires, en Rhé- torique, ils réclamaient seulement 2 h. 1/2 pour les mathématiques; et autant probablement, sur les 36 heures d'études de la seconde ou delà 3e; en 4e, 2 heures, sur 25 h. 1/2, et aulanten 5e; 1 h. 1/?, sur 19 heures, en 6°. On leur accorda davantage en 5° et en 4e, sur 5 h. 1/2 d'études quotidiennes, 1 heure ; et 1 heure aussi, sur 6 heures, quotidiennes, en 3e, en 2e et en Rhétorique; mais 2 sur 6, en Philosophie s. Us lormaient le vœu que les élèves ne fussent pas admis en mathéma- tiques élémentaires, avant d'avoir achevé leur Rhétorique 8 et, à l'una- nimité, ils déclaraient que, tout le long des classes de lettres aucun livre, si bon fût-il, ne pouvait dispenser les élèves de prendre le cours du Professeur 7. Et en effet, pour 1 élève le livre est un maître qui semble froid il n'a ni le geste, ni l'intonation, ni la vie agissante d'un profes- seur, qui parle et vérifie constamment si on l'entend et si on Técoute. Le livre s adresse à des centaines ou à des milliers d'écoliers anonymes et lointains, le professeur ne s'adres-e qu'aux écoliers qu'il connaît. 11 est le livre animé, qui vérifie les explications de l'enfant, qui encou- rage ou qui gronde ; et on le lit avec l'oreille tout autant qu'avec les yeux. En dehors des classes de lettres, le véritable enseignement scien- tifique se donnait à Louisle-Grand, de 1863 à octobre 1893, en ma- thématiques préparatoires, en mathématiques élémentaires et en mathématiques spéciales. Depuis 1893, comme avant 1863, en mathéma- 1 et 2. Idem. — 3. Séance du 5 mai i873, ibid. — 4. Ibid., séance du 23 jan- vier 1874. — 5. Ibid., procès-verbaux desd. assemblées, 1881-83 ; séances des 25 janvier et 22 mars 1882. — 6. Ibid., séance du 22 févr. 1882. — 7. Idem VIE INTELLECTUELLE ENSEIGNEMENT MATHEMATIQUE 2G5 tiques élémentaires et spéciales seulement. Les mathématique.? prépara- toires ne vécurent que 30 ans. Et, dès 1882, les professeurs de Louis- le-Grand réclamaient la suppression de celte classe 1 ; elle avait cependant, et avant la guerre franco-allemande, rendu, grâce à M. Bernés, d'éminenls services au lvcée. Aussi bien, dans les dernières années de l'Empire, les mathémaliques élémentaires traversèrent une crise et les mathématiques spéciales furent menacées. M. Bouquet avait, à Louis-le Grand; porté les spéciales à un degré de supériorité qui rappelait !es meilleures années de M. Vieille *. Or, M. Pouquet quitta !e lycée pour la Sorbonne et Sainte-Barbe organisa, chez elle, son Ecole préparatoire les spéciales tombèrent aussitôt de 80 élèves ou davantage à une soixantaine 3. Fort heureusement l'émo- tion produite par le départ de M. Bouquet se calma, sitôt que Ton connut les éminent^s qualités de son successeur, M. Darboux. La vi- gueur et l'éclat du jeune maître enthousiasmèrent les élèves et, dès 1868-9, la classe était aussi brillante que jadis 4. Le danger n'en sub- sista p*s moins ; et non pas seulement parce que son talent et sa distinc- tion même désignaient M. Oarbonx à une chaire plus haute, mais parce que le recrutement des élèves continuait à se faire en dehors du lycée. En 1868, plus des cinq sixièmes de ces élèves n'avaient pa fait à Louis- le-Grand leur éducation scientifique antérieure. Tant que ce recrute- ment ne se ferait pas intra muras, il fallait tout craindre, au renou- vellement de chaque année, de ce que l'Inspection nommait les caprices de la concurrence ». 5 Et nous nous souvenons que le cri d'alarme avait été poussé dès 1834 6. Ce n'est pas tout ; l'organisation des mathématiques élémentaires, qui eût cependant relevé de la seule Administration du lycée, restait dé- plorable. Elle comportait deux divisions; l'une d'elles, confiée à M. Le- caplain, aurait dû n'être composée que de bacheliers es sciences, et les préparer directemant aux Eco'es spéciales; et l'autre, confiée à M. Simon, n'être composée que de candidats au baccalauréat. Ces deux divisions auraient eu, de la sorte, un enseignement de force inégale ; la seconde aurait préparé à la première et la première aurait été l'échelon qui met les élèves au seuil des mathématiques spéciales. L'obstination têtue de M Didier s'opposait, en dépit de l'Inspection, à un système aus^i logiquement gradué 7. Et un Irou s'ouvrait devant la porte des mathématiques spéciales. ! es Barbistes le mesuraient de l'œil et se dé- tournaient ; les candidats de Sainl-Cyr ne s'y aventuraient plus, les can- 1. Idem. — 2. A. nat. F1"h liasse B, n» 32 ; n° 47 et !iase F, n» 5. — 3. Idem; 22 mars 1868 r»pport de l'insp. gék, A. nat. FHh liasses Louis le-Gr , B, n° 49 ; et 1869. ibid. n» 42. — 4 et 5. Ibidem. — 6 V ei-deignement scien- tifique, à opérer une révolution aussi profonde que celle des t cycles », commencée en 1902. C'était un ancien professeur de Louis-le-Grand, Jules Simon qui, après Victor Cousin, en avait eu l'idée, l'un des pre- miers 7. En réalité, c'est par voie de conséquences, ce n'est point par son idée fondamentale que cette réforme louche le vieux lycée; à Louis-le- Grand, aucun élève ne songe, après le premier cycle, achevé en 3e, que son enseignement classique peut être achevé. Et il demeure au lycée, pour y parcourir les classes du second cycle. Ces classes comportent toutes rue Saint-Jacques une langue morte, au moins, le latin. Donc la section D, sciences-langues, n'y e6t pas admise. Des trois autres, A, ou latin-grec ; B, ou latin-langues; C, ou latin- sciences c'est la V qui, suivant la promesse de son étiquette, est la 1. Idem. — du 22 févr. 1S82. — 3 t 4. Idem. — B. Idem. — 6. Séances des 22 lévr. et 24 mai 1S82 ; voir ci-dessous, ce que nous disons, liv. III, chap. iv sur les interrogations. — 7. Un des premiers, di- sons-nous, car une circulaire, sous le ministère Fortoul, 1 ocl. 1852, disait textuellement Journal gêner, de l'Instr. publ. A0 1852, p. 537 Il ne vous a point échappé... que, d'après le nouveau plan d'études [du 30 août 1852],... la vie du-collè^e est aujourd'hui partagée en 4 époques distinctes gui forment ch un tout complet études élémentaires, études de grammaire, études spéciale- ment littéraires, études spécialement scientifiques. Un enfant peut donc s' ter à une de ces époques, sans essayer de traverser toutes les autre». S'il a su profiter dos leçons de ses maîtres, i7 aura parcouru un ci ncbs, qui, à la rigueur, lui suffiront, pour la carrière modeste, à laquelle il aspire. • 26 8 L ORGANISATION MODERNE plus fortement scientifique. Or, cette section est florissante au lycée ; elle se partage, avec le latin-grec, l'élite des élèves. Le syslème des cycles a donc réussi à faire ce que toutes les méthodes du siècle précédent n'avaient pu instituer; des classes qui fussent, depuis le début de la se- conde, aussi scientifiques que littéraires ; et des classes qui assurassent inira muros le recrutement des élèves de mathématiques spéciales. Louis-le-Grand a beau, aujourd'hui encore, rester fidèle à sa vieille réputation de Lycée littéraire, l'enseignement scientifique n'y compte pas moins, chaque année, de brillants succès l. Les sciences n'y sont plus tenues sous la suzeraineté des lettres; elles sont indépendantes et s'appartiennent. On le voit donc, ni les oscillations de 1800 à 1814, ni les décourage- ments de 1814 à 1839, ni les outrances de 1840 à 1864 n'avaient été complètement inutiles. On avait compris toutes les leçons de cette la- borieuse expérience et on a finalement réussi à les mettre au point. Désormais les mathématiques ont, à Louis-le-Grand, leur autonomie; elles ont mieux encore le péril signalé en 1854 et 1868-9 est conjuré, et il semble bien que l'avenir travaille pour elles. Les longs efforts du passé ont ainsi leur récompense. 1. De 1869 à 1920, 899 Polytechniciens sont sortis de L. le Gr. ; 139 norma- liens scientifiques ; et 442 élèves de l'Ecole centrale. — Le vrai lycée scienti- fique, c'est S. Louis et cela, dès le Gouvernement de Juillet Insp. gén. del8i6-7 et 1854, A. nat. FI? CHAPITRE III Les spécialités littéraires, scientifiques et artistiques L'enseignement doit être, nous l'avons vu, une préparation à la vie et son effort tente d'approprier les générations successives aux besoins de la société l. Puisque, depuis cent ou cent vingt-cinq ans, cette vie et cette société sont allées se compliquant sans cesse, il n'est donc pas surprenant que celte complexité ait mis son reflet sur les tendances et sur les méthodes. Si nos sociélés modernes transforment leurs rouages, c'est que la science réussit à étendre partout le domaine de la connaissance. Et cette évolution ne peut se faire que parce que les intelligences, au lieu de chercher, comme jadis, à savoir tout, cherchent à savoir mieux ; le temps des cerveaux encyclopédiques est mort, avec l'Antiquité et le Moyen Age. L'ambition est aujouid'hui d'explorer les provinces et même les cantons, jusque là délaissés, des choses littéraires, scientifiques et artistiques les spécialités sont une des formes modernes du labeur mondial et du progrès. Mais dans quelle mesure pouvaient- elles pénétrer dans l'enseignement? Jusqu'à quel point les professeurs pouvaient-ils se spécialiser dans leurs classes ? Ce qui convient à un savant convient-il à un élève? A Louis-le-Gand, le problème a été posé en termes très nets. Les avantages et les inconvénients des professeurs spécialistes ont été ana- lysés, pesés et comparés. On sait de préférence ce que l'on étudie beaucoup et l'on a plus de chances d'enseigner excellemment ce que l'on connaît à merveille. Il y a un art particulier de simplifier, sans déformer d'enchatner, sans vio- lenter ; de coordonner, pour éclairer et de choisir, pour adapter. L'en- semble ne vaut que par l'harmonie des parties et chaque détail, que 1. Lettre du recteur Roussette au proviseur de Louis-le Grand le 17déc. 1S2S mettre les élèves dans la nécessité de suivre toutes les parties de l'instruction qui a lieu dans les collèges ; et leur faire ainsi acquérir des connaissances so- lides, variées et appropriées aux besoins de, la société. • Àrcli. L. le Gr., Corr. administr. III n° 1180. 270 L ORGANISATION MODEUNE par sa place dans l'ensemble. Même dans les classes les plus élémen- taires, les maîtres distingués ne sont jamais inutiles. Conduire l'esprit par les chemins qu'il préfère, c'est habituellement le faire aller, pour son agrément, du connu à l'inconnu, avec le minimum d'efforts et le maximum de profit. Nulle résistance de sa part il ne songe pas à se défendre. Il est captif. L'élève, ce semble, saura donc bien, si le maître sait mieux. L'écueil c'est que le spécialiste peut-être un savant ou un demi-savant, plutôt qu'un professpur ; songer à s'instruire plutôt qu'à instruire, à la science plutôt qu'à l'enseignement, à sa spécialité et à lui-même plutôt qu'à ses élèves. Il se peut qu'il les attire, les accapare et les con- fisque. Au lieu dese dire qu'il leur suffit d'avoir, au collège, des clartés de tout1, il lui arrive de songer à faire d'eux, aussi, et sans plus attendre, des spécialistes. Ce serait confondre des enfants et des ado- lescents avec des hommes développer à l'excès une case de leur cer- veau, mais aux dépens du développement organique de tout leur esprit. La vue des arbres n'empêche-t-elle point quelquefois de voir la forêt ou de la faire voir ? Et comment nier que le surmenage soit venu surtout des programmes toujours plus longs, chaque fois qu'on les abrège, parce que les spécialistes les mettent bout à bout, infati- gablement. Un des proviseurs de Louis-le-Grand, qui fut un maître-éducateur, M. Pierrot, était moins frappé par les avantages des spécialités et des spécialistes que par leurs inconvénients. 11 constatait qu'à Louis-le- Grand les professeurs spécialistes enseignaient souvent, dans leur propre spécialité, l'accessoire plus que l'essentiel; qu'ils s'attardaient sur des points secondaires et omettaient parfois leurs dernières leçons, ou les défiguraient, à force de les réduire; ce qui n'était pas seulement oublier de faire tout le cours, mais de faire, du cours, un tout Autre péril certains spécialistes semblaient des nomades, dans un collège sédentaire ; comme des ombres, ils traversaient les classes ; ils passaient de l'une à l'autre, sans pouvoir connaître assez les élèves, et sans s'imposer, d'autorité, à leur attention. Multiplier les spécialistes, c'était, pour M. Pierrot, multiplier les actes d'indiscipline2. Dans un accès de rude franchise, il lui arriva donc de demander la suppression des Professeurs spécialistes, avant la classe de Philosophie le pro- fesseur de grammaire et de lettres aurail eu, comme jadis, dans le Louis-le-Grand du XVIÎl" siècle, à se charger des mathématiques, de l'histoire et du reste 8. 1. Rapport de l'Insp. génér., du 30 mars 1840 le but de l'enseignement se- condaire est de former des gens du monde instruits et ayant des clartés de tout non point des spécialistes. 11 s'agit de mettre chacun en mesure de choisir, au sortir du collège, la direction souhaitée. A. nat. F1~h n° 24. — 2. Rapport annuel du 28 août 1838, A. nat. FHh n» 41, — 3. Idem, 31 juillet 1840 A. nat. F"h n» 30. TIE IMTELLECTCELLE PU1L0S0PH1E 271 En réalité, les inconvénients signalés, non sans justesse, par M. Pierrot, tenaient à des espèces et à des individus, plutôt qu'à un principe. Les spécialités pouvaient valoir mieux que les spécialistes. Les spécialistes furent maintenus. L'accoutumance leur apprit ce qu'ils avaient encore à apprendre le doigté, le tact scientifique, la mesure, la mise au point. El, quand les spécialistes furent ce qu'ils devaient être, on s'applaudit d'avoir, même en dépit de certains spécialistes de la première heure, sauvé les spécia- lités. La cause était entendue. Parmi ces spécialités, certaines relevaient surtout des lettres et nous lesétudierons dans un premier groupe la Philosophie, l'Histoire, la Géographie, les Langues vivantes. — D'autres naviguaient plutôt dans le sillage des Mathématiqnes et c'étaient la Physique, la Chimie, l'Histoire naturelle elles formeront une seconde série. — Nous réser- verons, pour une troisième famille, celles qui assortissent principa- lement à l'art le chant, le dessin, l'histoire des arts plastiques. Et enfin, dans ce chapitre réservé aux spécialités, nous chercherons pourquoi l'Enseignement secondaire Spécial ne pouvait s'acclimater à Louis le-Grand. où cependant les proviseurs de la maison et tel de ses professeurs en avaient formulé, dès la Restauration, l'idée première. § 1. — Les spécialités littéraires 1° Philosophie. 2° Histoire. 3° Géographie. 4° Langues vivantes. A. — Philosophie Réduire la philosophie à n'être qu'une spécialité littéraire peut sembler injuste. Puisqu'elle est la science générale des êtres, des prin- cipes et des causes, la philosophie devrait être par définition, la science suprême et l'àme de toutes les sciences. Les autres classes devraient à son sanctuaire, servir de vestibule ; elle devrait être sur les marches frontières de l'enseignement secondaire et de l'enseignement supérieur. Sans aucun doute; il n'en est pas moins vrai que les nécessités de l'en- seignement littéraire et scientifique, que les traditions scolaires et par- fois jusqu'aux programmes et à leurs contingences, que tout, en un mot, a conspiré à Louis-le-Grand pour réduire la place faite à la Philosophie et non pas pour l'élargir. Persuadons-nous que les mattres, chargés de l'enseigner ', étaient assez philosophes pour avoir assez de rési- gnation. 1. Voici le tableau chronologique des professeurs titulaires de Philosophie, arec les dates de lenr enseignement à Louis-le-Grand ; pour leur cun iculum vitae et pour les professeurs non titulaires, nous renvoyons à l'ArrrcNDicB C n" 249-272, de notre tome III. MM. Maugras abbé 1809-1823 ; Damiron, 1830-1833 ; Valette, 1837-1857 ; 272 L ORGANISATION MODERNE De 1801 jusqu'à nos jours, l'enseignement philosophique à Louis-le- Grand traversa comme cinq périodes pendant la première, qui se prolongea jusqu'en 1830, la philosophie, en dépit de Laromiguière, n'avait pas encore réussi à s'affranchir de la tutelle Ihéologique. Mais, au cours de CourrierPicard La principale du collège de Chaulnes part pour celui de Péronne Courrier Picard Stéphanie Naillon, principale du collège Aristide-Briand depuis 2008, quitte l'établissement pour prendre la direction du collège Béranger de Péronne dès la rentrée de septembre 2014. Elle avait donc organisé une petite réception vendredi 4 juillet

CONTACT Collège Privé Sacré-Coeur. 11 impasse Saint Exupéry. BP637. 85016 La Roche sur Yon Cedex. +33 2 51 37 31 13.

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ጃциսጢ ք ռяτէчոшэзОтвուчዷ псоռθբицуχ οղሥмኁςեчеν
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CollègeSaint-Louis. Cette fiche présente "Collège Saint-Louis", localisé 23 Place Napoleon, 85000 Roche Sur Yon, dépendant de l'Académie de Nantes, dont l'identifiant national est 0850114M.Ce groupe est privé.
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